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05/03/2024 | FRANCE | N°22LY02679

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 05 mars 2024, 22LY02679


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération n° 19-170 du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Cœur de Chartreuse a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat et valant schéma de cohérence territoriale, en tant qu'il classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AE n° 334 située sur le territoire de la commune de Saint-Christophe-sur-Gui

ers.



Par un jugement n° 2001156 du 8 juillet 2022, le tribunal administratif...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération n° 19-170 du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Cœur de Chartreuse a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat et valant schéma de cohérence territoriale, en tant qu'il classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AE n° 334 située sur le territoire de la commune de Saint-Christophe-sur-Guiers.

Par un jugement n° 2001156 du 8 juillet 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 2 septembre 2022, M. A... B..., représenté par Me Laurent, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2022 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler la délibération n° 19-170 du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Cœur de Chartreuse a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat et valant schéma de cohérence territoriale, en tant qu'il classe en zone agricole la parcelle cadastrée section AE n° 334 située sur le territoire de la commune de Saint-Christophe-sur-Guiers ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Cœur de Chartreuse le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'identification de sa parcelle en " zone humide " ou " marécageuse " est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le classement en zone agricole de sa parcelle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à la communauté de communes Cœur de Chartreuse qui n'a pas présenté d'observations.

Par une ordonnance du 25 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 octobre 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- les conclusions de Mme Conesa-Terrade, rapporteure publique,

- les observations de Me Laurent pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... est propriétaire d'une parcelle de terrain d'une superficie de 4 844 m² située sur le territoire de la commune de Saint-Christophe-sur-Guiers, au lieu-dit La Richardière, et cadastrée section AE n° 334. Il relève appel du jugement du 8 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération n° 19-170 du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes Cœur de Chartreuse a approuvé le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de programme local de l'habitat (PLUi-H) et valant schéma de cohérence territoriale (SCoT), en tant qu'il classe sa parcelle cadastrée section AE n° 334 en zone agricole.

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 151-23 du code de l'urbanisme : " Le règlement peut identifier et localiser les éléments de paysage et délimiter les sites et secteurs à protéger pour des motifs d'ordre écologique, notamment pour la préservation, le maintien ou la remise en état des continuités écologiques et définir, le cas échéant, les prescriptions de nature à assurer leur préservation. (...) / Il peut localiser, dans les zones urbaines, les terrains cultivés et les espaces non bâtis nécessaires au maintien des continuités écologiques à protéger et inconstructibles quels que soient les équipements qui, le cas échéant, les desservent. ". D'autre part, l'article L. 211-1 du code de l'environnement prévoit que : " I.- Les dispositions des chapitres Ier à VII du présent titre ont pour objet une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau ; cette gestion prend en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer : / 1° La prévention des inondations et la préservation des écosystèmes aquatiques, des sites et des zones humides ; on entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d'eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l'année ;/(...) ". Il ressort des dispositions de cet article L. 211-1 du code de l'environnement, éclairées par les travaux préparatoires de la loi sur l'eau du 3 janvier 1992 dont elles sont issues, qu'une zone humide ne peut être caractérisée, lorsque de la végétation y existe, que par la présence simultanée de sols habituellement inondés ou gorgés d'eau et, pendant au moins une partie de l'année, de plantes hygrophiles.

3. S'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la cartographie des zones humides de l'Isère, que la parcelle cadastrée section AE n° 334 appartenant à M. B... ne se trouve pas dans la zone humide du " Marais de Berland ", en étant séparée par plusieurs parcelles, elle se trouve en revanche dans une autre zone humide proche identifiée par cette même cartographie. Par ailleurs, il ressort de l'étude réalisée par le cabinet ECR Environnement en décembre 2019 à la demande du requérant, et il n'est pas contesté, que cette parcelle comporte des eaux qui débordent le long du fossé situé à l'ouest et alimenté par les eaux souterraines. Cette étude relève qu'en hiver la végétation est entièrement brûlée par le gel, elle précise également que le long du fossé, à l'ouest et sur environ 1 150 m², il y a une prairie humide et une friche humide (mégaphorbiaie). Si l'expert estime que cette parcelle présente un caractère humide sur seulement 20 % de sa surface, il relève que les sols sont caractéristiques des zones humides, le long du fossé souvent inondé par le débordement des eaux, et note des sols à faciès humides pour le reste de la parcelle. En conséquence, en admettant même que ces inondations seraient étroitement liées à l'écoulement dans ce fossé de déversements irréguliers d'eaux usées ou de vidange d'une piscine par un voisin ayant en outre effectué des remblais dans le fossé ou de la déviation d'une source désormais canalisée vers son terrain et d'un busage fait en amont, ou même de manquements de la commune concernant la canalisation des eaux pluviales, ces circonstances sont toutefois sans incidence sur la constatation des caractéristiques effectives de la zone humide présente sur la parcelle de M. B... et pour laquelle le PLUi-H n'autorise que l'évolution des bâtiments agricoles existants. Compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, le classement en zone humide de la parcelle de M. B... n'est pas entaché d'une quelconque erreur.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 151-22 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A ", du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

5. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de définir des zones urbaines normalement constructibles et des zones dans lesquelles les constructions peuvent être limitées ou interdites. Ils ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme ou par la qualification juridique qui a pu être reconnue antérieurement à certaines zones sur le fondement d'une réglementation d'urbanisme différente. L'appréciation à laquelle ils se livrent ne peut être discutée devant le juge de l'excès de pouvoir que si elle repose sur des faits matériellement inexacts, si elle est entachée d'erreur manifeste ou de détournement de pouvoir.

6. La parcelle cadastrée section AE n° 334 d'une superficie de 4 844 m² appartenant à M. B..., classée en zone A, est située sur le territoire de la commune de Saint-Christophe-sur-Guiers. Cette parcelle, d'ailleurs précédemment classée en zone NC (zone de richesses naturelles à protéger) et d'une taille particulièrement conséquente, est restée à l'état naturel et est dépourvue de constructions, et elle jouxte à l'est une vaste zone agricole. Par ailleurs, si elle est située à proximité de plusieurs maisons d'habitation individuelles, elle est toutefois située à l'arrière-plan des zones urbanisées qui se sont principalement développées autour des routes et chemins qui desservent le hameau. Enfin, si l'orientation n° 15 du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) vise la nécessité de " conforter le développement urbain et villageois en s'appuyant sur la trame paysagère et fonctionnelle du territoire " et préconise " l'urbanisation en continuité avec les bourgs, villages ou hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d'habitations existants ", il ressort du rapport de présentation que le PLUi-H a entendu, pour la commune de Saint-Christophe-sur-Guiers, privilégier les principales extensions urbaines sur les deux entités urbaines les plus denses et les mieux équipées de la commune, qui sont Berland et le Chef-lieu, et ne pas développer le secteur de coteau entre Berland et Entre-deux-Guiers qui inclut, quant à lui, précisément, le lieu-dit La Richardière. Enfin, il ressort des orientations nos 6 et 7 du PADD qu'elles entendent favoriser le maintien et l'évolution de l'agriculture ou encore préserver et valoriser les espaces agricoles pour leur rôle dans l'aménagement du territoire. Eu égard à l'ensemble de ces circonstances, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le classement en zone agricole de sa parcelle cadastrée section AE n° 334 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté de communes Cœur de Chartreuse, qui n'est pas la partie perdante, verse à M. B... la somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la communauté de communes Cœur de Chartreuse.

Copie sera adressé aux préfets de l'Isère et de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 13 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, première conseillère,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 mars 2024.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY02679 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02679
Date de la décision : 05/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme. - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d’urbanisme (PLU).


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: Mme CONESA-TERRADE
Avocat(s) : LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-05;22ly02679 ?
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