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07/03/2024 | FRANCE | N°22LY02993

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 07 mars 2024, 22LY02993


Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 14 octobre 2022, 17 novembre 2023 et 15 décembre 2023, la SAS Distribution Casino France, représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, l'arrêté du 16 août 2022 par lequel le maire de Villefontaine a délivré à la SA L'immobilière européenne des mousquetaires un permis de construire en vue de la création d'un bâtiment incluant une cellule commerciale de 863 m² de surface de vente sur le territoi

re de la commune ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Villefon...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 14 octobre 2022, 17 novembre 2023 et 15 décembre 2023, la SAS Distribution Casino France, représentée par Me Bolleau, demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, l'arrêté du 16 août 2022 par lequel le maire de Villefontaine a délivré à la SA L'immobilière européenne des mousquetaires un permis de construire en vue de la création d'un bâtiment incluant une cellule commerciale de 863 m² de surface de vente sur le territoire de la commune ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Villefontaine la somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle dispose d'un intérêt à agir et sa requête est recevable ;

- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) est irrégulier ; il n'est pas justifié du respect des prescriptions des articles R. 732-35 et R. 732-36 du code de commerce ;

- la CNAC aurait dû rejeter la nouvelle demande du pétitionnaire en vertu des dispositions de l'article L. 752-21 du code de commerce ;

- le dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale est insuffisant s'agissant de l'évaluation des flux de circulation ;

- le projet est incompatible avec les orientations du Scot Nord Isère ;

- le projet méconnaît les articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce dès lors qu'il aura un impact négatif en terme d'aménagement du territoire et qu'il présente des efforts insuffisants en terme de développement durable et de protection des consommateurs.

Par un mémoire, enregistré le 12 janvier 2023, la commune de Villefontaine, représentée par Me Pyanet, conclut à l'irrecevabilité, au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requérante ne justifie pas d'un intérêt pour agir et que le moyen tiré de l'incompatibilité avec le Scot Nord Isère n'est pas fondé.

Par deux mémoires, enregistrés les 10 août 2023 et 15 décembre 2023, la SA l'Immobilière Européenne des Mousquetaires, représentée par Me Debaussart, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable faute pour la requérante de présenter un intérêt pour agir et de justifier de l'exercice régulier du recours administratif préalable obligatoire devant la CNAC ;

- et les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par deux mémoires, enregistrés le 29 janvier 2024, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'elle justifie de la régularité de l'avis rendu le 2 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,

- et les observations de Me Ducros pour la SAS Distribution Casino France, de Me Teyssier pour la commune de Villefontaine et de Me Paillat pour la SA L'immobilière européenne des mousquetaires.

Considérant ce qui suit :

1. Le 17 décembre 2021, la société L'Immobilière Européenne des Mousquetaires a déposé auprès de la mairie de Villefontaine une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour la réalisation d'un bâtiment de deux cellules dont l'une, à l'enseigne " le marché aux affaires ", est soumise à autorisation d'exploitation commerciale, d'une surface de vente de 863 m² sur un tènement où un magasin à dominante alimentaire à l'enseigne " Netto " d'une surface de vente de 978 m² est présent. La Commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) de l'Isère a émis un avis favorable au projet le 15 février 2022. Saisie d'un recours contre cet avis de la part de la SAS Distribution Casino France, la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a rejeté ce recours et émis, le 2 juin 2022, un avis favorable au projet. Par un arrêté du 16 août 2022, le maire de Villefontaine a délivré à la société L'Immobilière Européenne des Mousquetaires le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale pour le projet considéré. La société Distribution Casino France, qui exploite un supermarché sur la commune de Villefontaine, situé au sein de la zone de chalandise telle que définie par le pétitionnaire, demande l'annulation de cet arrêté en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.

Sur la légalité de l'arrêté édicté le 16 août 2022 :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial :

2. Aux termes de l'article R. 752-35 du code de commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président. / Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier : / 1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; / 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ; / 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. " Aux termes du dernier alinéa de l'art. R. 752-36 du même code : " Le secrétariat de la commission nationale instruit et rapporte les dossiers. Le commissaire du Gouvernement présente et communique à la commission nationale les avis des ministres chargés de l'urbanisme et du commerce. Après audition des parties, il donne son avis sur les demandes. ".

3. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, le 17 mai 2022, le secrétaire de la Commission nationale d'aménagement commercial a adressé de façon simultanée aux membres de cette commission une convocation pour la réunion n°532 du 2 juin 2022, à laquelle était joint l'ordre du jour et où il était mentionné que tous les documents visés à l'article R. 752-35 du code de commerce sont disponibles, au moins cinq jours avant la tenue de la séance, sur la plateforme de téléchargement. La CNAC a produit au présent dossier une attestation de la société Dematis, qui exploite le site " e-convocations.com ", attestant du fait que les convocations ont bien été adressées à leurs destinataires le 17 mai 2022. En outre, elle produit un document justifiant du partage des fichiers annoncés dans les convocations avec les membres de la CNAC qui est une capture d'écran de la plateforme dédiée Sofie faisant apparaître le partage de ces fichiers intitulés " CNAC 531 et 532 du 2 juin 2022 " le 25 mai 2022 ainsi qu'une attestation du 14 novembre 2023 de la secrétaire de la CNAC attestant de l'envoi et la mise à disposition des convocations aux membres de la CNAC et des documents exigés en vue de la séance du 2 juin 2022 le 25 mai 2022, soit plus de cinq jours avant la date de la séance. Contrairement à ce que prétend la requérante, l'ensemble de ces documents permet de justifier que les membres de la CNAC ont été régulièrement convoqués à la séance du 2 juin 2022 au moins cinq jours avant celle-ci et qu'ils ont reçu l'ensemble des éléments de dossiers pour la séance en cause conformément aux dispositions précitées. Il est constant qu'aucun membre de la CNAC ne s'est plaint de ne pas avoir été destinataire de la convocation et/ou des documents nécessaires à l'examen des dossiers. Par suite, la société Distribution Casino France n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article R. 732-35 du code de commerce ont été méconnues.

4. D'autre part, l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement prévoit que " à compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions (...), peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : (...) 2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs, les chefs des services à compétence nationale mentionnés au deuxième alinéa de l'article 2 du décret du 9 mai 1997 susvisé (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du ministre chargé de l'urbanisme auprès de la ministre de la transition écologique du 1er juin 2022 a été signé par M. C... D..., sous-directeur de la qualité du cadre de vie, au sein de la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages de la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature, à l'administration centrale du ministère de la transition écologique et solidaire et du ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales qui a reçu délégation pour ce faire en raison de sa nomination en cette qualité par arrêté du 27 février 2020 publié le 29 février 2020 au Journal Officiel. L'avis du ministre du commerce du 19 mai 2022 a été signé par Mme A... B..., cheffe du service du tourisme, du commerce, de l'artisanat et des services de la direction générale des entreprises, à l'administration centrale du ministère de l'économie et des finances, qui a reçu délégation pour ce faire en raison de sa nomination en cette qualité par arrêté du 30 septembre 2019 publié le 1er octobre 2019 au Journal Officiel. Il s'en suit que ces personnes avaient respectivement qualité pour signer, au nom du ministre chargé de l'urbanisme, d'une part, et du ministre chargé du commerce, d'autre part, les avis recueillis par le commissaire du gouvernement auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial au titre de l'article R 752-36 du code de commerce. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence des signataires de ces avis manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 752-21 du code de commerce :

6. Aux termes de l'article L. 752-21 du code de commerce : " Un pétitionnaire dont le projet a été rejeté pour un motif de fond par la Commission nationale d'aménagement commercial ne peut déposer une nouvelle demande d'autorisation sur un même terrain, à moins d'avoir pris en compte les motivations de la décision ou de l'avis de la commission nationale. / Lorsque la nouvelle demande ne constitue pas une modification substantielle au sens de l'article L. 752-15 du présent code, elle peut être déposée directement auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial. "

7. La société requérante soutient qu'un projet quasiment identique au projet litigieux, qui prévoyait de créer deux cellules commerciales sur le même tènement que le magasin Netto, a fait l'objet d'un avis défavorable de la CNAC le 27 novembre 2020 et que la pétitionnaire ne pouvait déposer une nouvelle demande sans avoir tenu compte des motifs mentionnés dans cet avis. Toutefois, s'il ressort des pièces du dossier qu'une première demande d'autorisation avait été soumise par la société L'Immobilière Européenne des Mousquetaires sur le tènement litigieux et avait donné lieu à un avis défavorable de la CNAC le 27 novembre 2020, le projet alors étudié était très différent du projet litigieux même s'il portait sur le même tènement. A ce titre, ce projet prévoyait la création d'un ensemble commercial de 1 942 m² comprenant un magasin à dominante alimentaire à l'enseigne " Intermarché " en lieu et place du magasin à l'enseigne " Netto " d'une surface de vente de 978 m² soit un doublement de la surface de vente alimentaire. Il portait également sur la création de moyennes surfaces de vente respectives de 552 m² et 893 m² outre la création d'un drive de 29 m² d'emprise avec 2 pistes de ravitaillement. Le projet litigieux ne comporte plus aucune dimension alimentaire et consiste à créer une cellule commerciale de 863 m² à l'enseigne " le marché aux affaires ", qui formera avec le magasin Netto existant, d'une surface de vente de 978 m², un ensemble commercial d'une surface de vente de 1 841 m². Il découle de cette modification importante de la nature même du projet que plusieurs griefs relevés par la CNAC dans son avis du 27 novembre 2020 ne peuvent plus être opposés. Il en va ainsi du grief tiré de l'impact négatif du premier projet sur l'animation de la vie urbaine eu égard au taux de vacance commerciale dans l'ensemble des centres-villes de la zone d'étude et de l'existence de plusieurs commerces de bouche et de l'incompatibilité avec les prescriptions du Scot Nord Isère notamment en raison du doublement de la surface de vente alimentaire dès lors que ces griefs prenaient essentiellement en compte la dominante alimentaire du magasin projeté. S'agissant du grief tiré du déclin démographique, il ressort des pièces du dossier que cette première évaluation de la population de la zone de chalandise et de la commune de Villefontaine a fait l'objet d'une actualisation dans le cadre du nouveau projet qui a conduit à constater au contraire une croissance démographique. Enfin, l'insertion paysagère du projet a été largement revue en raison de la modification de l'importance et de la nature de celui-ci. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 752-21 du code de commerce ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la composition du dossier de demande d'autorisation d'exploitation commerciale :

8. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " I. La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. (...) 3° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. (...) Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : (...) b) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; (...) ". Les commissions d'aménagement commercial ne peuvent pas légalement délivrer l'autorisation demandée sur la base d'un dossier qui, par ses insuffisances, ne leur permettrait pas d'apprécier l'impact du projet au regard des objectifs et des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

9. Il ressort des pièces du dossier que le pétitionnaire a fait réaliser une étude de trafic par le cabinet Lee Sormea laquelle mentionne en pages 18 et 24 de l'étude que le flux de véhicules particuliers supplémentaire induit par le projet sera de 25 clients entrant / sortant en heure de pointe le soir. En outre, à l'échelle d'une journée, le trafic supplémentaire induit sera de 150 VL/j sur le réseau. Si le projet nécessitera la suppression de l'accès sud de la zone et que toutes les entrées et sorties se feront par la rue Emile Romanet au nord, les réserves de capacité ont été évaluées comme satisfaisantes. La société requérante n'apporte pas d'élément permettant de considérer que ces flux de circulation et l'appréciation des capacités des infrastructures de transport existants n'auraient pas été correctement évalués. Par suite, la CNAC, qui a disposé des informations nécessaires à l'analyse du dossier sur ce point, a pu statuer en toute connaissance de cause sur la demande qui lui était soumise. Le moyen tiré du caractère incomplet du dossier de demande s'agissant de l'évaluation des flux de circulation doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne l'incompatibilité du projet en litige avec le Schéma de cohérence territoriale Nord Isère approuvé le 12 juin 2019 :

10. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale (...) ". Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale (SCoT), mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent pris dans leur ensemble.

11. Aux termes du point 6.4.1. du document d'orientations et d'objectifs (DOO) du Scot Nord Isère intitulé " Limiter la création de nouveaux sites commerciaux et encadrer l'implantation de nouveaux magasins ", " prescriptions en dehors des centralités urbaines " : " Toute nouvelle implantation commerciale s'inscrit en complémentarité d'offre avec les centralités urbaines. Les sites commerciaux en dehors des centralités urbaines sont destinés à accueillir les commerces dont le bon fonctionnement est incompatible avec une insertion dans les centralités urbaines en raison notamment de l'importance du besoin en foncier ou des volumes et des fréquences de livraisons. " Aux termes du point 6.4.2. du DOO du Scot Nord Isère intitulé " Favoriser la requalification à l'échelle du site commercial et en lien avec son environnement et son voisinage ", " prescriptions en dehors des centralités urbaines " : " Les collectivités compétentes sont invitées à conduire une réflexion préalable sur l'aménagement des sites commerciaux situés en dehors des centralités urbaines et rurales, à l'échelle de l'ensemble du site commercial qui intègre notamment les trois orientations ci-après listées. / La création, l'extension ou la densification d'un site commercial par l'implantation d'une surface de vente nouvelle de 1000 m² au global (un ou plusieurs commerces) est conditionnée à cette même réflexion préalable à l'échelle de l'ensemble du site commercial. / Les orientations de la réflexion préalable sont les suivantes : / 1-Orientations répondant aux objectifs de prise en compte de l'échelle humaine / • Diversifier des usages sur les espaces extérieurs (publics et privés) des sites commerciaux, par des aménagements et du mobilier urbain adapté (bancs, tables, luminaire, jeux d'enfant, espaces ombragés...). / • Assurer la continuité, la lisibilité et sécurisation d'itinéraires modes doux depuis les quartiers et équipements riverains (cheminements continus et éclairés, stationnement pour vélos, signalétique adaptée...) et sites dédiés aux stationnements. / • Améliorer l'accessibilité du bâtiment pour l'ensemble des usagers (taille et emplacement de la signalétique, marquage au sol, ...). / • Rechercher le meilleur rapport à la rue et pour son animation par les choix d'implantation du bâti et le soin architectural à porter aux façades principales qui doivent donner sur les espaces publics (choix des matériaux, limiter les parties aveugles, regroupement des enseignes, ...). (...) / 2-Orientations répondant aux objectifs d'optimisation et de mutualisation (...) / • Mutualiser l'offre de stationnement et limiter la surface des parkings à un maximum de 75% de la surface de vente. / • Prévoir le stationnement deux roues (motorisées ou non) sécurisé en nombre suffisant, de préférence couvert et à proximité de l'entrée des magasins / 3-Orientations répondant aux objectifs de renforcement des fonctions de l'environnement naturel (...) / • Renforcer la performance environnementale par une conception du bâti et du projet qui utilise des matériaux contribuant à la durabilité, l'adaptabilité, la facilité d'entretien, la réduction de l'impact sanitaire des matériaux, la capacité de recyclage, ... / • Intégrer des dispositifs de production d'énergie renouvelable et tenir compte de l'ensoleillement par une conception du bâti et du projet adaptée (lumière naturelle et apport calorifique). / • Développer la gestion des déchets par le tri et le recours aux filières de valorisation. / • Mettre en place une gestion des eaux limitant les impacts sur le milieu et une limitation de l'imperméabilisation (bassins, fosses, mares écologiques, noues...) (...). "

12. La société L'Immobilière Européenne des Mousquetaires soutient que le projet ne s'inscrit pas en complémentarité d'offre avec les centralités urbaines et contrevient à un développement équilibré du commerce dans la zone de chalandise, puisqu'il n'est notamment pas démontré que les surfaces de vente envisagées ne pourraient pas s'implanter en lieu et place des friches commerciales du centre-ville de Villefontaine. En outre, le projet n'aurait fait l'objet d'aucune réflexion préalable portant sur les objectifs de prise en compte de l'échelle humaine, d'optimisation et de mutualisation, ou encore de renforcement des fonctions de l'environnement naturel. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le projet est situé à 1,7 kilomètre au nord-ouest du centre-ville de la commune de Villefontaine, à 3 minutes en voiture du centre-ville, au sein de la zone d'activités économique de la Cruizille, sur un site occupé depuis le 10 novembre 2015 par un bâtiment affecté à l'exploitation d'un magasin alimentaire à l'enseigne " Netto ". Le projet est situé au sein d'un pôle majeur du développement commercial dans le Nord Isère pour lesquels le DOO du Scot prévoit qu'ils " peuvent accueillir tous types de commerces qu'ils soient de proximité, occasionnels en alimentaire et non alimentaire, ou exceptionnels ". Le projet s'inscrit donc, contrairement à ce que soutient la requérante, dans une zone d'implantation préférentielle des commerces. En outre, eu égard à la nature des produits proposés à la clientèle, il s'inscrit " en complémentarité d'offre avec les centralités urbaines ", qui ne proposent pas ce type de produits, ce que préconise le Scot. Ainsi, le projet apparaît bien complémentaire aux commerces existants et permet de renforcer l'offre commerciale dans la zone de chalandise sur ce type de produits. Si la société requérante estime que le projet ne s'inscrit pas dans une friche existante au sein du centre-ville de la commune de Villefontaine, elle ne se prévaut d'aucune friche présente en centre-ville qui aurait été susceptible d'accueillir le projet et les prescriptions du Scot qu'elle invoque ne prévoient pas la résorption prioritaire des telles friches. En outre, le projet permettra de résorber une friche existant sur le tènement en cause. Enfin, le projet prévoit une accessibilité par les vélos et piétons avec la réalisation d'aménagements doux sécurisés sur le site, qui est également desservi par les transports en commun, ainsi que la mutualisation du stationnement avec le magasin " Netto " et comportera des bâtiments à haute performance énergétique. Contrairement à ce que relève la requérante, il ressort du rapport d'instruction de la CNAC que le pétitionnaire a réalisé une réflexion en lien avec la Communauté d'Agglomération Porte de l'Isère sur les trois enjeux susvisés mentionnés dans le Scot. Par suite, le projet est compatible avec les prescriptions du DOO du Scot citées par la requérante.

En ce qui concerne la méconnaissance des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce :

13. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au dernier alinéa de l'article L. 123-1-4 du code de l'urbanisme. La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 ; 3° En matière de protection des consommateurs : a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs.(...) ".

14. Il résulte de ces dispositions que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la compatibilité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant de l'aménagement du territoire :

15. Il ressort des pièces du dossier que la zone de chalandise présente une croissance démographique de l'ordre de 5% sur la période 2009-2019, celle de la commune de Villefontaine de l'ordre de 1,6% et celle du département de l'Isère de plus de 6%. Si les taux de vacance commerciale peuvent apparaître élevés sur certaines communes de la zone de chalandise (telles que les communes de Villefontaine et Bonne famille), l'analyse d'impact produite au dossier a relevé un taux de similitude de 1,2% entre les produits amenés à être vendus dans le cadre du projet et les commerces situés dans les centres-villes. Il en résulte que le projet n'aura pas d'influence préjudiciable sur l'attractivité des commerces de centre-ville et sur l'animation de la vie locale, ainsi qu'a pu le relever la CNAC. En outre, le pétitionnaire fait valoir, sans être contesté, que le taux de vacance commerciale sur la commune de Villefontaine est justifié par les nombreux travaux en cours de réalisation dans le centre-ville. Enfin, il n'est pas contesté que sur les 162 commerces présents au sein de la zone de chalandise, seuls deux commerces sont susceptibles de présenter à la vente des produits similaires à ceux qui seront commercialisés dans le cadre du projet. La requérante n'établit donc pas que la CNAC aurait commis une erreur d'appréciation en estimant que le projet ne porterait pas atteinte aux objectifs fixés par le législateur en matière d'aménagement du territoire.

S'agissant du développement durable :

16. Si la SAS Distribution Casino France critique l'insertion paysagère du projet, il ressort des pièces produites que le projet litigieux s'inscrit dans la même typologie architecturale que celle présentée par le magasin " Netto " existant, que l'ensemble de la structure du bâtiment sera réalisé en charpente métallique et les façades habillées en bardage métallique nervuré vertical de teinte brun-gris et en bardage lisse en lames horizontales aspect bois et que les entrées en façade principale seront marquées par un auvent de teinte rouge vif permettant de s'intégrer dans l'environnement. Contrairement à ce que soutient la société requérante, le projet n'emportera pas l'imperméabilisation de nouvelles surfaces et, au contraire, il permettra de réduire la surface actuellement imperméabilisée qui passera de 13 337 m² sur 16 632 m² soit 80,2 % à 8 342 m², soit 50,1 %. A ce titre, le parc de stationnement projeté prévoit l'aménagement de 98 emplacements dont 92 perméables pour la totalité de l'ensemble commercial alors que le parc actuel est composé de 56 emplacements imperméables. Le projet prévoit également la création de 3 790 m² d'espaces verts soit 6 670 m² après réalisation du projet contre 2 880 existants, outre plusieurs mesures en matière d'isolation, de recours aux équipements économes en énergie, de traitement des eaux pluviales et des déchets. Le nombre d'arbres plantés sera compris entre 113 et 117. Par suite, le projet litigieux ne peut être regardé comme méconnaissant les objectifs fixés par le législateur en matière de développement durable.

S'agissant de la protection des consommateurs :

17. Eu égard à l'importance relativement modérée du projet et la nature des produits vendus, l'impact sur le tissu commercial des centres-villes concernés sera faible. Par suite, la requérante ne saurait soutenir que la création de cet ensemble commercial peut potentiellement nuire au tissu commercial de centre-ville qui reste essentiel pour l'animation et la qualité urbaine du centre-ville.

18. Par les griefs qu'elle invoque, la société requérante ne démontre pas que la Commission nationale d'aménagement commercial aurait porté une appréciation erronée sur la conformité du projet aux différents critères visés par les dispositions précitées du code de commerce.

19. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que la SAS Distribution Casino France n'est pas fondée à demander l'annulation, en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale, de l'arrêté édicté le 16 août 2022 par le maire de Villefontaine et délivré à la société L'Immobilière européenne des mousquetaires.

Sur les frais liés à l'instance :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande présentée par la SAS Distribution Casino France au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion de cette instance.

21. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société le versement de la somme de 2 500 euros chacune à la société L'Immobilière Européenne des Mousquetaires et la commune de Villefontaine, au titre des frais exposés par elles dans cette instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Distribution Casino France est rejetée.

Article 2 : La SAS Distribution Casino France versera à la commune de Villefontaine une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La SAS Distribution Casino France versera à la SA l'Immobilière Européenne des Mousquetaires une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Distribution Casino France, à la SA l'Immobilière Européenne des Mousquetaires, à la commune de Villefontaine et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la présidente de la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 15 février 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente,

Mme Burnichon, première conseillère,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 7 mars 2024.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLa présidente,

P. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY02993

ar


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02993
Date de la décision : 07/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. - Réglementation des activités économiques. - Activités soumises à réglementation. - Aménagement commercial.


Composition du Tribunal
Président : Mme DECHE
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : DEBAUSSART

Origine de la décision
Date de l'import : 31/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-03-07;22ly02993 ?
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