La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/05/2002 | FRANCE | N°01MA00786

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3eme chambre b - formation a 3, 14 mai 2002, 01MA00786


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 mars 2001 sous le n° 01MA00786, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 97-03743 en date du 24 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a donné décharge des impositions mises à la charge de M. STEINHAUER au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 1990, 1991 et 1992 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2'/ de remettre à la charge de M. STEINHAUER les im

positions et pénalités ainsi déchargées ;

Classement CNIJ : 19-04-01-02-05-02-02...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 mars 2001 sous le n° 01MA00786, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1'/ d'annuler le jugement n° 97-03743 en date du 24 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a donné décharge des impositions mises à la charge de M. STEINHAUER au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 1990, 1991 et 1992 ainsi que des pénalités y afférentes ;

2'/ de remettre à la charge de M. STEINHAUER les impositions et pénalités ainsi déchargées ;

Classement CNIJ : 19-04-01-02-05-02-02 C

Il soutient que l'administration a, à bon droit, imposé les revenus en litige comme revenus d'origine indéterminée faute de pouvoir les rattacher avec certitude à une catégorie précise ; il demande à titre subsidiaire que les revenus en litige soient, par substitution de base légale imposés dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; il soutient que cette substitution est possible ; qu'en effet, elle ne prive le contribuable d'aucune garantie ; il ajoute que les impositions en litige ont été établies au terme d'une procédure d'office régulière ; que les pièces utiles ont valablement été notifiées à M. STEINHAUER sur son lieu de détention ; que la notification de redressement est bien motivée ; que les bases d'impositions ont été correctement évaluées au vu des éléments recueillis sur les comptes bancaires et le train de vie du contribuable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu l'ancien code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le nouveau code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2002 :

- le rapport de M. DUBOIS, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant que, quand elle procède à une taxation d'office sur le fondement de l'article L.66 du livre des procédures fiscales ou de l'article L.69 de ce même code, l'administration, lorsque l'origine des revenus en cause n°est pas identifiée, n°est pas tenue de rattacher à une catégorie particulière les sommes retenues comme base d'imposition et peut les réintégrer directement dans le revenu global du contribuable comme revenus d'origine indéterminée ; qu'en revanche, si la provenance des sommes en question lui est révélée avant la mise en recouvrement, elle a l'obligation de les rattacher à la cédule dont elles relèvent ;

Considérant en l'espèce, que si l'administration avait connaissance du fait que M. STEINHAUER tirait d'importants revenus d'une activité de proxénète et notamment qu'il avait été pénalement condamné pour cela, ce fait, à lui seul ne lui permettait pas de rattacher précisément les sommes non déclarées mises à jour par les opérations de contrôle en litige, à cette activité, et par voie de conséquence à une catégorie de revenus imposables prévue par l'article 1er du code général des impôts ; que s'agissant, plus précisément d'une somme de 416.000 F dénommée 'subsides versés par des tiers' par le vérificateur dans la notification de redressement en date du 20 décembre 1993 et dont l'appellation ainsi effectuée n°emporte, par elle-même, aucune qualification juridique, il résulte de l'examen des pièces versées au dossier que cette appellation ressort d'une déposition de Mme P..... qui dans un premier temps a soutenu que ces 'subsides' provenaient de prostituées ; que toutefois M. STEINHAUER a contesté ce fait et a même produit une lettre dans laquelle M. P... revenait sur ses déclarations ; que dans ces conditions, le service était en droit d'estimer que ces prétendues 'subsides' ne provenaient pas d'une source clairement identifiée et les a considérés comme des revenus d'origine indéterminée ; qu'ainsi, en l'absence de toute précision et de toute justification pouvant venir établir que l'une quelconque des sommes comprises dans les redressements en litige puisse être précisément rattachée à l'activité de proxénète de M. STEINHAUER, le ministre est fondé à soutenir, que c'est à bon droit que le service les a qualifiées de revenus d'origine indéterminée et les a intégrées directement dans le revenu global du contribuable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif a qualifié les revenus en cause de bénéfices non commerciaux et, en conséquence, a prononcé la décharge des impositions litigieuses au motif que la procédure de redressement était entachée d'irrégularité ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel de Marseille, saisie par l'effet dévolutif de l'appel de statuer sur les autres moyens de la requête présentée par M. STEINHAUER devant le Tribunal administratif de Nice ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant que si M. STEINHAUER soutient qu'il n°a pas reçu les demandes d'éclaircissement et de justification qui lui ont été adressées le 25 mai 1994 sur le fondement de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, il résulte de l'instruction et notamment de l'examen des accusés de réception produits au dossier que ces pièces lui ont bien été notifiées le 27 mai 1994 ; que, par ailleurs, le fait que la notification de redressement en date du 20 décembre 1993 ou encore l'avis de mise en recouvrement qui s'est ensuivi, lui aient été notifiés à son adresse dans l'établissement pénitentiaire où il était incarcéré n°est, par lui-même, en rien irrégulier ; qu'au surplus, M. STEINHAUER n°établit ni même n°allègue sérieusement que ces dernières pièces ne lui seraient pas parvenues ; que, dès lors le moyen doit être écarté ;

Considérant que le contribuable se trouvait pour 1990 en situation de taxation d'office faute d'avoir procédé, après avoir été mis en demeure de le faire, aux déclarations de revenus auxquelles il était tenu ; que pour 1991 et 1992, il était aussi dans une telle situation, faute pour lui d'avoir déféré à une demande d'éclaircissement et de justification qui lui avait été régulièrement adressée sur le fondement de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; que, dès lors, sans qu'il ait été nécessaire de lui adresser une nouvelle mise en demeure en l'absence de réponse de sa part, les moyens tirés d'irrégularités ayant pu affecter la procédure d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle diligentée, par ailleurs, à son encontre, sont inopérants ;

Considérant que dans la notification de redressement en date du 20 décembre 1993, le vérificateur indique clairement les sommes non déclarées révélées par l'examen des comptes bancaires de M. STEINHAUER ou mises en lumière par les balances espèces qu'il a établies et dont il donne le détail ; qu'il précise par ailleurs le montant des 'subsides versés par des tiers' et mentionne que ces informations ont été tirées du dossier pénal qui lui a été transmis en application de l'article L.101 du livre des procédures fiscales par l'autorité judiciaire ; que dans ces conditions, la notification de redressement en litige satisfaisait aux exigences des dispositions de l'article L.76 du livre des procédures fiscales selon lesquelles : 'Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portées à la connaissance du contribuable...' ; que, dès lors aucune irrégularité ne peut être utilement invoquée de ce chef ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

Considérant, en premier lieu, que M. STEINHAUER soutient qu'une somme de 28.263 F réintégrée dans sa base d'imposition, l'a été à tort, s'agissant d'une indemnité versée par une compagnie d'assurance en réparation d'un sinistre, et comme telle, insusceptible d'entrer dans son revenu imposable ; que, toutefois, pour établir la véracité de cette allégation il produit, d'une part, une attestation de remboursement relative à un sinistre mais établie au nom d'une autre personne dont rien n°indique qu'elle ait perçu cette somme pour son compte, et, d'autre part, des pièces établissant que ce montant lui a été versé par la compagnie 'Nationale Suisse Assurance' mais sans aucune indication de la cause de ce versement ; que, dans ces conditions, il ne peut être regardé comme apportant la preuve, dont la charge lui incombe dans le cadre d'une procédure d'imposition d'office, du caractère non imposable de la somme en litige ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'en ce qui concerne les années 1991 et 1992, le vérificateur a établi des balances espèces d'un montant de 168.000 F annuel en comparant les mouvements observés sur ses comptes et des éléments de train de vie, non contestés, tels que la propriété d'une voiture Porsche 924 et de trois biens immobiliers ; qu'en se bornant à soutenir que ces balances espèces sont arbitraires et excessives sans en discuter le détail produit au dossier par l'administration ni proposer une autre méthode d'évaluation de ses dépenses en espèce, M. STEINHAUER n°apporte pas la preuve du mérite de ses allégations ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en ce qui concerne l'année 1990 pour laquelle l'administration n°a retenu qu'un montant de 120.000 F de solde créditeur de balance espèce, le contribuable n°apporte pas non plus en soutenant les mêmes arguments la preuve du caractère exagéré de l'évaluation adaptée par le vérificateur ;

Considérant, en quatrième lieu, que, dès lors, que, comme il vient d'être dit, ci-devant, la preuve de l'exagération du montant de 168.000 F relatif aux années 1991 et 1992 n°a pas été apportée, le contribuable ne peut soutenir utilement, étant donné le caractère inévitablement forfaitaire d'une telle méthode d'évaluation, que le fait qu'un montant inférieur ait été retenu pour l'année précédant cette période révèle une quelconque exagération des bases d'impositions ainsi reconstituées ;

Considérant, que dans ces conditions, M. STEINHAUER ne peut être regardé comme apportant la preuve, dont la charge lui incombe, de l'exagération des bases d'impositions arrêtées d'office par le service ;

Considérant, enfin, sur ce point qu'il résulte de l'examen des pièces produites par l'administration que dans la totalisation pour 1990 des remises de chèques sur le compte que possède par M. STEINHAUER au crédit agricole, le vérificateur a commis une erreur de calcul et a retenu un montant excédant de 1915 F (291,94 euros) la réalité ; qu'il y a donc lieu de prononcer la réduction correspondante de la base d'imposition ;

Sur les pénalités :

Considérant que, dans la notification de redressement en date du 30 décembre 1993, le vérificateur indique au contribuable qu'en raison du fait qu'il n°a pas produit, après mise en demeure, les déclarations auxquelles il était tenu, il lui applique outre l'intérêt de retard les pénalités prévues en un tel cas par l'article 1728 du code général des impôts ; qu'ainsi, M. STEINHAUER était clairement et complètement informé des motifs de fait et de droit sur lesquels était fondée la décision de lui infliger la sanction fiscale en litige ; que, dès lors, le moyen tiré d'un prétendu défaut de motivation de ces pénalités manque en fait ;

Considérant que dans la notification de redressement en date du 20 octobre 1994 le vérificateur indique au contribuable qu'il ne pouvait ignorer le montant des sommes ayant transité par son compte bancaire et le caractère répétitif des omissions constatées et décide en conséquence de lui infliger les pénalités prévues en cas de mauvaise foi par l'article 1731 du code général des impôts ; qu'ainsi, là encore, M. STEINHAUER était suffisamment informé des motifs de fait et de droit sur lesquels était fondée la décision de lui infliger la sanction fiscale en litige ; que, dès lors le moyen tiré d'un prétendu défaut de motivation de ces pénalités manque en fait ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a accordé à M. STEINHAUER décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des sommes 1990, 1991 et 1992, et que la requête présentée par M. STEINHAUER devant le Tribunal administratif de Nice doit être rejetée ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 97-03743 en date du 24 octobre 2000 du Tribunal administratif de Nice est annulé.

Article 2 : L'impôt sur le revenu auquel M. STEINHAUER a été assujetti au titre des années 1990, 1991 et 1992 est remis à sa charge en droits et pénalités, à l'exception d'une somme correspondant en droits et pénalités à la réduction de sa base d'imposition afférente à l'année 1990, d'un montant de 291,94 euros (1.1915 F).

''

''

''

''

1

N° 01MA00786


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3eme chambre b - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA00786
Date de la décision : 14/05/2002
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. DUBOIS
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : PALOUX ;

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2002-05-14;01ma00786 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award