La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/05/2004 | FRANCE | N°00MA01876

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 18 mai 2004, 00MA01876


Vu, I°, la requête, enregistrée à la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 août 2000, sous le n° 00MA01876, pour la SCEA Les Escruvéous, dont le siège est Domaine de la Réparade à Châteauvert (83670), par Me X..., avocat ;

La société demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement N° 964210/973944 en date du 21 mars 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge ou à la réduction des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 1992 et 1993 et n'a que partiellem

ent fait droit à sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée...

Vu, I°, la requête, enregistrée à la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 août 2000, sous le n° 00MA01876, pour la SCEA Les Escruvéous, dont le siège est Domaine de la Réparade à Châteauvert (83670), par Me X..., avocat ;

La société demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement N° 964210/973944 en date du 21 mars 2000 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge ou à la réduction des suppléments de droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des années 1992 et 1993 et n'a que partiellement fait droit à sa demande de remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée présentée pour l'année 1994 ;

2°/ d'accorder la décharge ou la réduction demandée ;

Elle soutient :

- que la taxe sur la valeur ajoutée en cause était bien déductible ; qu'en ce qui concerne les travaux afférents à une cave, elle en a bien supporté la charge effective ; qu'en ce qui concerne les factures écartées pour ne pas avoir mentionné la taxe, elle est en mesure de produire des justificatifs ; qu'en ce qui concerne les factures établies au nom de « Delta Cave », elle les a réglées et en a supporté la charge ; qu'elle est en mesure de produire des justificatifs sur ce point aussi ; qu'en ce qui concerne une facture écartée comme ne mentionnant pas la prestation fournie, elle est aussi en mesure de produire un acte rectificatif ; qu'enfin le crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 60.000 F écarté par le service l'a été à tort ; qu'en effet elle était en droit de réparer l'oubli d'un report ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 2 juillet 2001, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre conclut au rejet de la requête, il soutient que les conclusions afférentes à 1992 et 1993 sont tardives ; que la taxe afférente aux travaux concernant une cave n'est pas déductible faute pour la société de justifier qu'elle a supporté la charge effective de ces travaux ; que les factures ne mentionnant pas la taxe ont été écartées à bon droit pour ce motif ; que les factures établies au nom d'un tiers devraient aussi être écartées pour ce motif ; que celle qui ne mentionnait pas la prestation accomplie était en cela irrégulière ; que le crédit de taxe sur la valeur ajoutée de 60.000 F ayant été annulé suite à un redressement afférent à 1993, il ne peut plus être utilement critiqué, dès lors que les conclusions concernant l'année 1993 sont tardives ; subsidiairement en ce qui concerne 1992 et 1993, le ministre soutient que le montant retenu de taxe sur la valeur ajoutée collecté n'est affecté d'aucune erreur ; que les allégations concernant des ventes réalisées à l'exportation et donc exonérées ne sont assorties d'aucune justification ; que les cessions d'immobilisations en cause sont bien passibles de la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'indemnité de résiliation de bail en cause est bien passible de la taxe sur la valeur ajoutée telle qu'elle a été établie ; que le crédit reportable sur 1992 n'est pas justifié ; que les factures écartées l'ont été à bon droit vu leur irrégularité ; que les premiers juges n'ont pas commis d'erreur en décidant que le litige ne portait pas sur le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée mais sur l'existence ou la présentation de pièces justificatives ;

Vu le mémoire enregistré le 2 avril 2004, présenté pour la SCEA Les Escruvéous, elle conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens et fait valoir en outre qu'on lui a refusé à tort l'exonération d'une indemnité pour résiliation de bail ;

Vu, II°, la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 août 2000 sous le N° 04MA00272, présentée pour la société Les Escruvéous dont le siège est Domaine de la Réparade à Chateauvert (83670), par Me X..., avocat ;

La société demande à la Cour de décider qu'il sera sursis à l'exécution du jugement N° 964210/973944 en date du 21 mars 2000 du Tribunal administratif de Nice ;

Elle soutient que sa requête du 21 août 2000 était recevable ; que les redressements en litige étaient mal fondés par les mêmes moyens que ceux exposés ci-dessus dans sa requête N° 00MA1876 et que l'exécution de la décision attaquée lui causerait un grave préjudice ;

Vu le jugement pour lequel le sursis à exécution est demandé ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 8 mars 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre conclut au rejet de la requête, il soutient que la requête du 21 mars 2000 est irrecevable car tardive ; que les redressements en litige sont bien fondés par les mêmes moyens que ceux exposés ci-dessus dans l'instance N° 00MA01876, que la société se prévalait à tort de droits à déduction qui n'existaient pas ; qu'enfin elle ne justifie pas que l'exécution du jugement en litige lui causerait un grave préjudice ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 avril 2004 :

- le rapport de M. Dubois, rapporteur,

- et les conclusions de M. Bédier, Commissaire du Gouvernement.

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes N° 00MA01876 et N° 04MA00272 de la SCEA Les Escruvéous sont relatives à une même imposition et présentent à juger des questions semblables ; que, dès lors, il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;

Sur les conclusions relatives aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée établis au titre des années 1992 et 1993 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la décision de rejet de la réclamation relative aux rappels établis pour les années 1992 et 1993 a été notifiée à la SCEA le 5 juillet 1997 ; que, par suite, en application des dispositions de l'article R.*199-1 du livre des procédures fiscales, le délai de deux mois pour saisir le tribunal administratif expirait le 6 septembre 1997 ; que dès lors la requête enregistrée au greffe du tribunal administratif le 26 septembre 1997 était tardive et en cela irrecevable ; que la SCEA n'est, par suite, pas fondée à se plaindre du rejet de ses conclusions sur ce point par le Tribunal administratif de Nice ;

Sur les conclusions relatives à un crédit de taxe au titre de 1994 :

Sur les droits à déduction relatifs à l'année 1994 :

Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : « 1. la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'un opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération … » ; que, selon l'article 230 de l' annexe II audit code : « 1. La taxe ayant grevé les biens ou services que les assujettis acquièrent ou se livrent à eux-mêmes n'est déductible que si ces biens ou services sont nécessaires à l'exploitation … » ;

Considérant qu'il est établi et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté que la SCEA Les Escruvéous a bien procédé au paiement des travaux de construction de la cave vinicole à raison de laquelle elle prétend tenir des droits à déduction ; que, cette construction faite pour son compte sur le sol d'autrui et qui est affectée à son exploitation doit être réputée rester sa propriété jusqu'à l'expiration du bail à ferme dont elle est titulaire ; que, par ailleurs, et en tout état de cause, il n'est pas établi qu'à la suite d'un jeu de compensation elle n'ait pas supporté la charge définitive de cette immobilisation ; que, dès lors qu'elle doit être considérée comme propriétaire de la cave en cause, la circonstance qu'elle ne remplirait pas les conditions mises par l'article 216 ter de l'annexe II au code général des impôts à la déduction de la taxe afférente aux constructions édifiées sur le sol d'autrui reste sans incidence sur ses droits à déduction ; que dans ces conditions, la SCEA est fondée à soutenir qu'elle détenait, à raison de cette construction, des droits à déduction et que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Nice a refusé, sur ce point qui portait sur un montant de 111.584 F, de faire droit à sa demande ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a écarté une série de factures comme étant irrégulières en la forme en tant qu'elles ne mentionnaient pas la taxe, ou en tant qu'elles ne mentionnaient pas la prestation accomplie, et une autre série en tant qu'elles étaient établies au nom d'un tiers et a refusé d'admettre des factures rectificatives établies au nom de la société requérante au motif qu'elles n'établissait pas les avoir réglées et avoir effectivement supporté cette charge ; que sur tous ces points la SCEA Les Escruvéous affirme être en mesure de produire des documents rectificatifs ou des justifications mais n'a en réalité produit aucun document probant ; que dès lors ses demandes sur ces points ne peuvent qu'être écartées ;

Sur les droits à déduction relatifs aux années antérieures à 1994 :

Considérant que la SCEA Les Escruvéous conteste le refus de remboursement d'un crédit de taxe de 60.000 F constaté au titre d'années antérieures et reportable sur 1994 ; que ce crédit a été annulé par une notification de redressement en date du 15 janvier 1996 qui concerne en matière de taxe sur la valeur ajoutée la période du 1er janvier 1994 au 31 décembre 1994 ; que, par suite, la réclamation présentée sur ce point le 16 octobre 1996 l'a été dans le délai prévu par les dispositions combinées des articles R.196-1 et R.196-3 du livre des procédures fiscales et est donc recevable, dans la limite du montant du report de crédit annulé, nonobstant le fait que les rappels de droits supplémentaires afférents aux années 1992 et 1993 n'aient pas fait l'objet, par ailleurs, comme il vient d'être dit ci-dessus, d'une contestation émise en temps utile ;

Considérant en premier lieu que la société soutient qu'une somme de 187.043 F correspondrait à des ventes à l'exportation exonérées de taxe sur la valeur ajoutée ; que toutefois elle n'apporte aucune justification à l'appui de cette allégation ;

Considérant en deuxième lieu que la société soutient ne pas être redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de diverses ventes d'immobilisations effectuées en 1992 et ayant donné lieu à un rappel de taxe de 296.320 F en raison du fait que les achats correspondants n'auraient pas donné lieu à déduction ; que toutefois elle ne fait état sur ce point ni d'un moyen de droit ni de justifications de fait établissant l'existence d'une telle exonération ;

Considérant en troisième lieu que la société fait valoir que l'indemnité de résiliation de bail perçue par elle en 1992 du GFA les Escruvéous, qui a vendu des terres qui étaient en partie louées à la SCEA pour son exploitation, n'est pas assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'une telle indemnité qui ne rémunère aucune prestation ou service rendu qui aurait été effectué par la partie versante et a pour objet exclusif la réparation d'un préjudice ne saurait être assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement des dispositions de l'article 256 du code général des impôts en vertu desquelles « Les affaires faites en France sont passibles de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elles relèvent d'une activité de nature industrielle ou commerciale, quels qu'en soient les buts ou les résultats », que dès lors la société requérante est fondée à soutenir que l'imputation, d'un montant de 235.245 F effectuée sur le crédit qu'elle détenait n'est pas fondée ;

Considérant en quatrième lieu que la société fait valoir que la taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures de travaux de construction de la cave vinicole susmentionnée pour 1993 a fait naître à son profit des droits à déduction pour 197.333 F ; que, comme il a été dit ci-dessus, elle est fondée à soutenir que ces travaux ont fait naître un tel droit à son profit ;

Considérant en cinquième lieu que la société se prévaut enfin de crédits de taxe sur la valeur ajoutée pour des montants de 14.790 F et de 55.800 F pour 1993 sans apporter à l'appui de ses prétentions aucune justification ; que, dès lors ces prétentions ne peuvent qu'être écartées ;

Considérant en sixième lieu que la société soutient que la déduction d'une somme de 571.940 F correspondant à la taxe déductible des années 1987 et 1988 lui a été refusée à tort, de même que la déduction d'une somme de 19.616 F correspondant à la taxe déductible pour 1989 ; qu'à l'appui de ses allégations elle a produit dans un envoi enregistré au greffe de la Cour le 2 avril 2004 et communiqué le 5 avril 2004 au ministre défendeur cinquante cinq factures pour un montant de 279.306, 19 F ; que, toutefois, il n'y a pas lieu de prendre en considération ces éléments dans la présente instance, dès lors que le crédit de taxe reportable au 31 décembre 1993 dont la SCEA requérante est recevable à demander la prise en compte doit, comme il a été dit plus haut, être limité à 60.000 F, et que ce montant est déjà atteint par les droits à report qui doivent lui être reconnus en fonction des considérations qui précèdent ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCEA Les Escruvéous est seulement fondée à demander que le droit au remboursement de crédit de taxe au titre de l'année 1994 qui lui a été reconnu par le jugement attaqué du Tribunal administratif de Nice soit majoré de 171.584 F, soit 26.157, 81 euros ;

Sur le sursis à exécution du jugement attaqué :

Considérant que la Cour ayant statué sur le fond de l'appel formé par la société Les Escruvéous, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions susvisées tendant au sursis à exécution de ce jugement ;

D E C I D E :

Article 1er : Le droit au remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de l'année 1994 qui a été reconnu à la SCEA Les Escruvéous par le jugement du 21 mars 2000 du Tribunal administratif de Nice est majoré de 171.584 F (cent soixante et onze mille cinq cent quatre-vingt quatre francs) soit 26.157, 81 euros (vingt-six mille cent cinquante sept euros et quatre-vingt un centimes).

Article 2 : Le surplus des conclusions de la SCEA Les Escruvéous est rejeté.

Article 3 : Le jugement N° 964210/973944 en date du 21 mars 2000 du Tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 4 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête N° 04MA00272 de la SCEA Les Escruvéous tendant au sursis à exécution du jugement N° 964210/973944 en date du 21 mars 2000 du Tribunal administratif de Nice.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCEA Les Escruvéous et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 00MA01876, N° 04MA00272 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 00MA01876
Date de la décision : 18/05/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Jean DUBOIS
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : RASTOUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-05-18;00ma01876 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award