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03/06/2004 | FRANCE | N°00MA02417

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre - formation a 5, 03 juin 2004, 00MA02417


Vu la requête sommaire, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 octobre 2000 sous le n° 00MA02417, présentée pour M. Robert X demeurant ..., par Me GRIMALDI, avocat ;

M. X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 99-1220 en date du 30 juin 2000 par lequel le magistrat-délégué du Tribunal administratif de Bastia, sur déféré du préfet de la Corse-du-Sud, l'a condamné à payer une amende de 500 F pour contravention de grande voirie, à remettre les lieux en l'état dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et

passé ce délai sous astreinte de 500 F par jour de retard, et a autorisé ...

Vu la requête sommaire, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 octobre 2000 sous le n° 00MA02417, présentée pour M. Robert X demeurant ..., par Me GRIMALDI, avocat ;

M. X demande à la Cour d'annuler le jugement n° 99-1220 en date du 30 juin 2000 par lequel le magistrat-délégué du Tribunal administratif de Bastia, sur déféré du préfet de la Corse-du-Sud, l'a condamné à payer une amende de 500 F pour contravention de grande voirie, à remettre les lieux en l'état dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, et passé ce délai sous astreinte de 500 F par jour de retard, et a autorisé l'administration à y procéder d'office aux frais et risques de l'intéressé passé ce délai ;

Classement CNIJ : 24-01-03-01-01

C

Il fait valoir :

- que la procédure prévue par les dispositions de l'article L.13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel selon lesquelles il appartient au préfet de notifier le procès-verbal de contravention de grande voirie à la personne concernée dans les dix jours de son établissement, n'a pas été en l'espèce respectée ;

- que cette irrégularité de procédure constitue une violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'il entend rappeler que le procès-verbal a été dressé le 3 septembre 1999 mais que ce débarcadère a été réalisé il y a de nombreuses années ;

- qu'il convient également de rappeler que ces structures démontables sont retirées une fois la saison terminée et qu'elle ne gâchent en rien le paysage ;

- que cette construction facilite également l'accès au rivage et à la mer et n'affecte en rien la navigation, cet endroit étant seul utilisable par les habitués et les riverains ;

- qu'il développera ces moyens dans un mémoire ampliatif produit ultérieurement ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le procès-verbal de contravention de grande voirie ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 mars 2001, présenté au nom de l'Etat, par la ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il précise à la Cour qu'il ne produira les observations en défense au nom de l'Etat qu'après examen du mémoire ampliatif annoncé par l'appelant ;

Vu le mémoire ampliatif, enregistré le 9 avril 2001, présenté pour M. X et par lequel il conclut aux mêmes fins que sa requête et par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre :

- que le procès-verbal établi le 3 septembre 1999 ne lui a été notifié que le 3 décembre 1999, en violation des dispositions de l'article L.13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et qu'ainsi, en l'absence de respect des délais prescrits par lesdites dispositions, la procédure doit être annulée ;

- que ce débarcadère a été édifié il y a de nombreuses années, lors de la construction de la maison d'habitation, soit bien avant l'arrêt du Conseil d'Etat KREITMANN ;

- qu'ainsi, c'est en toute bonne foi, qu'il a construit cet accès dès lors qu'il ne pensait pas se situer sur le domaine public puisque cet endroit n'est constitué que de gros blocs de rochers qui ne sont que très rarement recouverts par les flots, lors de grosses tempêtes ;

- qu'en outre, du fait de la construction de ce débarcadère qui ne gâche en rien le paysage, il est amené à entretenir ce secteur, entretien qui n'est pas effectué par le service du domaine public en raison de son accès difficile ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 mai 2001, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement et par lequel il conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir :

- que durant l'été 1998, il a été constaté que M. X, propriétaire d'une villa située plage du week-end à Ajaccio occupait illicitement au droit de celle-ci une emprise de 53,27 m2 sur le domaine public maritime, supportant un chemin d'accès au rivage ;

- que cet aménagement construit en pierres maçonnées et béton était prolongé sur l'eau par un débarcadère, composé d'une structure aluminium avec plancher bois, reposant sur des supports en béton coulés au milieu des rochers ;

- que l'intéressé ne s'étant conformé que partiellement à une première mise en demeure de remise en état des lieux formulée le 23 mars 1999, en retirant simplement une partie de la structure et du plancher du débarcadère, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé à son encontre le 3 septembre 1999 pour la partie correspondant aux éléments restés en place à cette date sur une surface de 38,07 m2 ;

Il soutient, en premier lieu, en ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure, que si le procès-verbal de contravention de grande voirie n'a pas été notifié à l'intéressé par le préfet dans les dix jours suivant sa rédaction, ledit procès-verbal fait suite à un avertissement daté du 23 mars 1999 ; que de plus, ce procès-verbal a été notifié au contrevenant par les services de la Direction Départementale de l'Equipement (DDE) par lettre recommandée avec accusé réception, reçue le 9 septembre 1999 par M. X ; qu'ainsi, l'intéressé a été informé dans des délais normaux des accusations portées contre lui ; qu'en outre, selon la jurisprudence dégagée sur ce point par la juridiction administrative, le délai de dix jours, mentionné par les dispositions de l'article L.13 du code précité, n'est pas prescrit à peine de nullité ; qu'enfin, l'intéressé ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ces stipulations n'étant pas applicables à la procédure de contravention de grand voirie ainsi qu'il ressort notamment d'un arrêt de la Cour administrative d'appel de Marseille et de la Cour administrative d'appel de Nantes ;

Il soutient, en deuxième lieu, que ni la bonne foi du requérant ni le fait que l'intéressé entretiendrait ce secteur du domaine public ne sont de nature à l'exonérer de sa responsabilité dès lors que l'infraction matérielle est démontrée et non contestée ; qu'à cet égard, le fait que le débarcadère serait antérieur à l'arrêt KREITMANN du Conseil d'Etat ne constitue pas un moyen de droit probant dès lors que par cet arrêt, le Conseil d'Etat n'a fait qu'unifier les modalités de délimitation du domaine public maritime telle que fixée par la loi du 29 floréal an X et l'ordonnance du 3 août 1681 ; que contrairement à ce que soutient l'appelant, les installations litigieuses en pierres et en béton ne sont pas démontables et sont à usage privatif ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance du 3 août 1681 ;

Vu la loi du 29 floréal an X ;

Vu la loi 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code du domaine de l'Etat ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2004 :

- le rapport de Mme BUCCAFURRI, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. HERMITTE, premier conseiller ;

Sur l'action publique :

Considérant que l'article 2 de la loi susvisée du 6 août 2002 portant amnistie, dispose que : Sont amnistiées en raison de leur nature : 1°) les contraventions de police et les contraventions de grande voirie... ; que l'infraction pour laquelle M. X s'est vu dresser procès-verbal entre dans les prévisions de cette disposition ; que les dispositions de cette loi font désormais obstacle à l'exécution de la condamnation prononcée par l'article 3 du jugement du Tribunal administratif de Bastia ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête en tant qu'elles tendent à l'annulation dudit article ;

Sur l'action domaniale :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur : Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal... avec citation à comparaître dans le délai d'un mois devant le tribunal administratif ; que si le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé à l'encontre de M. X a été établi le 3 septembre 1999 et n'a été notifié à l'intéressé que le 3 décembre suivant, cette circonstance est sans influence sur la régularité de la procédure dès lors que le délai de dix jours prévu par les dispositions sus-rappelées de l'article L.13 entre la rédaction d'un procès-verbal de contravention de grande voirie et sa notification n'est pas prescrit à peine de nullité de la procédure ; qu'à cet égard, M. X ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquelles ne sont applicables qu'en matière pénale dès lors que, lorsque le juge administratif statue sur l'action en réparation des dommages causés au domaine public, il ne statue pas sur une accusation en matière pénale ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'article 2, titre VII, livre IV de l'ordonnance royale d'août 1681 fait défense à toutes personnes de bâtir sur les rivages de la mer, d'y planter aucun pieu, ni faire aucun ouvrage qui puissent porter préjudice à la navigation, à peine de démolition des ouvrages, de confiscation de matériaux et d'amende arbitraire ; que l'article L.28 du code du domaine de l'Etat prévoit que nul ne peut, sans autorisation délivrée par l'autorité compétente, occuper une dépendance du domaine public national ou l'utiliser dans des limites excédant le droit d'usage qui appartient à tous. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X, propriétaire d'une villa située ..., occupait sans titre, au droit de son habitation, une emprise de 53,27 m2 sur le domaine publique maritime, supportant un chemin d'accès au rivage ; que cet aménagement construit en pierres maçonnées et en béton était prolongé sur la mer par un débarcadère, composé d'une structure aluminium avec un plancher en bois, reposant sur des supports en béton coulés au milieu des rochers ; que l'intéressé ne s'étant que partiellement conformé à une mise en demeure du 23 mars 1999 de remise en état des lieux en retirant une partie de la structure et du plancher du débarcadère, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé à son encontre le 3 septembre 1999 pour la partie correspondant aux éléments restés en place à cette date sur une surface de 38,07 m2 ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du procès-verbal précité, lequel fait foi jusqu'à preuve contraire, que les ouvrages litigieux ont été édifiés sans aucune autorisation sur le domaine public maritime ; que si l'intéressé allègue, en outre, que les gros rochers ne sont que rarement recouverts par les flots, il n'a produit au dossier aucun élément de nature à démontrer la réalité de ses allégations ; que, par suite, il est établi que les travaux en cause ont été effectués sur le domaine public maritime ; que si M. X fait valoir que le débarcadère a été construit depuis de longues années, soit bien avant l'intervention de l'arrêt du Conseil d'Etat du 12 octobre 1973 sieur KREITMANN, cette circonstance est sans influence sur l'appartenance des ouvrages litigieux au domaine public maritime dès lors que, par ledit arrêt, la Haute juridiction s'est bornée à interpréter les dispositions de l'ordonnance sur la marine d'août 1681 ;

Considérant, d'autre part, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, que les ouvrages litigieux ont été édifiés sans aucune autorisation de l'administration ; qu'ils constituaient, par suite, une occupation illégale du domaine public maritime constitutive d'une contravention de grande voirie ; que si M. X soutient qu'il était de bonne foi et fait valoir qu'il procède à l'entretien du secteur du domaine public maritime et que les ouvrages en litige, qui ne nuisent pas au paysage, sont de nature à faciliter pour les riverains l'accès de ce secteur, ces circonstances sont sans influence sur le bien-fondé des poursuites engagées à son encontre ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat-délégué du Tribunal administratif de Bastia l'a condamné à remettre les lieux en l'état ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête en tant qu'elles sont dirigées contre l'article 3 du jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia en date du 30 juin 2000.

Article 2 : Le surplus de la requête est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 6 mai 2004, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,

M. LAFFET, président-assesseur,

Mme BUCCAFURRI, Mme FERNANDEZ et Mme FEDI, premiers conseillers,

assistés de Mme EJEA, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 3 juin 2004.

Le président, Le rapporteur,

signé signé

Marc ROUSTAN Isabelle BUCCAFURRI

Le greffier,

signé

Françoise EJEA

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 00MA02417 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 00MA02417
Date de la décision : 03/06/2004
Sens de l'arrêt : Non-lieu
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Rapporteur public ?: M. HERMITTE
Avocat(s) : GRIMALDI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2004-06-03;00ma02417 ?
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