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06/12/2005 | FRANCE | N°02MA01925

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 06 décembre 2005, 02MA01925


Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2002, présentée pour la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED, dont le siège est Purdy's Warf Tower One ... 997 Halifax (000NS), CANADA B3J 2X2, par Me de Rohan Chabot ;

La société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9805446 / 9900828 du 16 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes qui lui a été réclamée au titre

de l'année 1994, de l'imposition forfaitaire annuelle réclamée au titre des années 19...

Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2002, présentée pour la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED, dont le siège est Purdy's Warf Tower One ... 997 Halifax (000NS), CANADA B3J 2X2, par Me de Rohan Chabot ;

La société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9805446 / 9900828 du 16 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes qui lui a été réclamée au titre de l'année 1994, de l'imposition forfaitaire annuelle réclamée au titre des années 1994 et 1995 et du droit au bail des années 1992 à 1995 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées 1994 et 1995 et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention conclue le 2 mai 1975 entre le gouvernement de la République Française et le gouvernement du Canada tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, modifiée par l'avenant du 16 janvier 1987 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2005,

- le rapport de Mme Mariller, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Bonnet, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions tendant à la décharge du droit de bail :

Considérant que les articles 736 et 741-I-1° du code général des impôts, qualifient le droit de bail de 2,50% perçu sur le prix de loyers de droit d'enregistrement ; que l'article L.199 du livre des procédures fiscales dispose qu'en matière de droits d'enregistrement, le tribunal compétent est le tribunal de grande instance ; que, c'est dès lors à juste titre que le Tribunal administratif de Nice a rejeté ces conclusions comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

Sur les redressements d'impôt sur les société notifiés au titre de l'année 1994 :

En ce qui concerne le principe de l'assujettissement de la société MANASER :

Considérant qu'aux termes de l'article 206-1 du code général des impôts : « Sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes…, les sociétés coopératives et leurs unions, ainsi que, sous réserve des dispositions de l'article 207-1-6° et 6bis, les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif » ; qu'en application de ces dispositions et sous réserve de l'application des conventions internationales, une société de droit étranger est imposable à l'impôt sur les sociétés en France lorsque, d'une part, elle peut être de par sa forme assimilée à l'une des catégories de sociétés visées par les dispositions précitées, ou, d'autre part, elle réalise sur le territoire français des opérations à caractère lucratif ;

Considérant, par ailleurs, qu'aux termes de l'article 6 de la convention Franco-canadienne conclue le 2 mai 1975 : « 1. Les revenus provenant de biens immobiliers, y compris les revenus des exploitations agricoles ou forestières, sont imposables dans l'état contractant où ces biens sont situés. (…) ; 3. La disposition du paragraphe 1 s'applique aux revenus provenant de l'exploitation directe de la location ou de l'affermage, ainsi que de toute autre forme d'exploitation de biens immobiliers, et aux bénéfices provenant de l'aliénation de ces biens » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société MANASER a mis en location la maison dont elle est propriétaire à Saint Tropez du 13 juillet au 19 septembre 1994 et a encaissé pour cette période des loyers d'un montant de 380 000 francs ; qu'en outre, en dehors de cette période de location, elle a attribué la jouissance gratuite de ce bien à un associé ou à un tiers ; que la location de la maison en contrepartie de loyers et l'attribution de la jouissance gratuite à un associé ou à un tiers constituent des opérations à caractère lucratifs au sens des dispositions précitées de l'article 206-1 du code général des impôts ; que les dispositions de la convention franco canadienne du 2 mai 1975 rappelées ci-dessus attribuent l'imposition de tels revenus à l'état contractant où les biens sont situés, soit en l'espèce à la France ; qu'ainsi la société requérante n'est pas fondée à soutenir que la convention franco-canadienne n'a pas pour effet de faire entrer une société canadienne dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés en France ;

En ce qui concerne l'acte anormal de gestion :

Considérant qu'en dehors de la période de location du 13 juillet au 19 septembre 1994, la société MANASER reconnaît avoir mis la maison de Saint Tropez à la disposition gratuite d'associés ou de tiers ; qu'elle n'établit, ni même n'allègue, que l'avantage ainsi consenti l'a été dans son intérêt propre ; que si elle soutient qu'elle n'a pas trouvé de locataire en dehors de la période estivale, elle n'établit pas avoir accompli les diligences nécessaires ; que, dans ces conditions, le ministre doit être regardé comme apportant la preuve que, ce faisant, la société MANASER a accompli un acte anormal de gestion ; que l'administration était, dès lors, en droit de l'imposer sur la base des loyers ainsi abandonnés ;

En ce qui concerne la détermination du revenu brut :

Considérant que pour fixer le revenu de la société MANASER imposable au titre de l'année 1994, l'administration a appliqué à la valeur vénale de l'immeuble, fixée à 13 905 000 francs un coefficient de rentabilité de 4% ;

Considérant, d'une part, que la notification de redressement du 15 février 1996 précise la méthode de détermination du revenu imposable retenue par le vérificateur, le mode de détermination de la valeur vénale de l'immeuble et précise notamment pour la méthode par comparaison initialement retenue, les termes de comparaison choisis et les motifs pour lesquels il a été procédé à l'application d'un correctif de 40% ; que l'application d'un coefficient de rentabilité fixé à 4% est motivé par la situation géographique exceptionnelle de l'immeuble et par l'environnement touristique ; que cette notification de redressements est ainsi suffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, d'autre part, que si la société requérante soutient que la valeur locative de la maison aurait dû être fixée par comparaison, il ne résulte pas de l'instruction qu'il existerait dans la région des termes de comparaison conduisant à une évaluation plus favorable ; que s'agissant d'une maison de plus de 400 m² habitable d'un très haut standing, construite en 1983 au bord de la mer avec piscine privée et située à l'intérieur de l'un des plus beaux parcs de Saint-Tropez, la valeur vénale fixée en définitive par l'administration à la somme de 13 905 000 francs n'apparaît pas excessive ; que compte tenu de ces caractéristiques, le coefficient de rentabilité de 4% n'est de même pas excessif ; que le revenu brut a justement été fixé à la somme de 556 000 francs, conduisant, compte tenu du chiffre d'affaire déclaré par la société, soit 380 000 francs, à l'imposition de recettes omises pour un montant de 176 200 francs ;

En ce qui concerne les amortissements :

Considérant qu'il résulte des dispositions des articles 39-1-2 et 39B du code général des impôts que ne peuvent être déduits du bénéfice imposable d'un exercice que les amortissements qui ont été effectivement portés dans les écritures comptables de l'entreprise avant l'expiration du délai de déclaration des résultats de cet exercice ; qu'il appartient au contribuable de justifier que cette inscription a été effectuée avant l'expiration dudit délai ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société MANASER a déposé sa déclaration de résultat le 23 septembre 1995 après mise en demeure, soit après l'expiration le 2 mai 1995 du délai de déclaration des résultats de l'exercice 1994 ; qu'elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que, malgré le dépôt tardif de sa déclaration, elle avait porté les amortissements litigieux dans ses écritures comptables avant l'expiration du délai de déclaration ;

En ce qui concerne la rémunération du gardien :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : « 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes les charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (…). Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursement de frais ; (…) » ; qu'il appartient toujours au contribuable de justifier tant du montant de ses charges que de leur exacte inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité » ;

Considérant que si la société établit avoir viré sur le compte de M. X... la somme totale de 42 000 francs au cours de l'année 1994, elle ne produit aucun élément de nature à établir que cette somme lui aurait été versée en rémunération du gardiennage de la maison ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que cette charge n'était justifiée, ni dans son principe ni dans son montant, et qu'elle n'était dès lors pas déductible ;

Sur l'imposition forfaitaire annuelle :

Considérant qu'aux termes de l'article 223 septies du code général des impôts : « Les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés sont assujetties à une imposition forfaitaire annuelle (…) » ;

Considérant que la société MANASER qui est passible de l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1994 est, en vertu des dispositions précitées, légalement assujettie à l'imposition forfaitaire annuelle au titre de la même année ; que si elle conteste l'imposition forfaitaire qui lui est réclamée au titre de l'année 1995, elle ne développe aucun moyen pour contester le principe ou le montant de cette imposition ;

Sur les revenus distribués :

Considérant que par une décision du 4 novembre 2005, postérieure à l'introduction de l'instance, le Directeur des services fiscaux du Var a accordé à la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED la décharge totale de la pénalité prévue par l'article 1763A demeurant à sa charge ; que les conclusions de la société requérante tendant à la décharge de cette pénalité sont en conséquence devenues sans objet ;

Sur les conclusions de la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, soit condamné à payer à la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED tendant à la décharge de la pénalité prévue par les dispositions de l'article 1763A du code général des impôts.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société MANASER ESTABLISHMENT INVESTMENTS LIMITED et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

N° 02MA01925 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA01925
Date de la décision : 06/12/2005
Sens de l'arrêt : Non-lieu partiel
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. RICHER
Rapporteur ?: Mme Cécile MARILLER
Rapporteur public ?: M. BONNET
Avocat(s) : DE ROHAN CHABOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2005-12-06;02ma01925 ?
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