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09/01/2006 | FRANCE | N°02MA00578

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 09 janvier 2006, 02MA00578


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 avril 2002 sous le n°02MA00578, présentée par Me Z..., avocat, pour :

- la société Y... Bernard Méditerranée, venant aux droits et obligations de la société SOGEA Méditerranée, venant elle-même aux droits et obligations de la société SOGEA Sud-Est et dont le siège est situé aux Docks, Atrium 10-4, 10 place de la Joliette à Marseille (13002),

- la Société d'Exploitation de la Nouvelle Entreprise de Construction (SENEC), dont le siège est ... (83087 cedex 09),

- la société STORUS, nouvelle dénomi

nation commerciale de la société Omnium de Construction et d'Entreprise (OCE), dont le siè...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 2 avril 2002 sous le n°02MA00578, présentée par Me Z..., avocat, pour :

- la société Y... Bernard Méditerranée, venant aux droits et obligations de la société SOGEA Méditerranée, venant elle-même aux droits et obligations de la société SOGEA Sud-Est et dont le siège est situé aux Docks, Atrium 10-4, 10 place de la Joliette à Marseille (13002),

- la Société d'Exploitation de la Nouvelle Entreprise de Construction (SENEC), dont le siège est ... (83087 cedex 09),

- la société STORUS, nouvelle dénomination commerciale de la société Omnium de Construction et d'Entreprise (OCE), dont le siège est ... ;

Elles demandent à la Cour :

1) de réformer le jugement n° 96-4437 du 6 décembre 2001, notifié le 1er février 2002, par lequel le tribunal administratif de Nice n'a que partiellement fait droit à leur demande tendant à la condamnation du département du Var à leur verser les sommes de 25.563 936 F, soit 3.897.196,92 euros, et 7.872.941, 71 F, soit 1.200.222,23 euros, assorties des intérêts moratoires, en réparation des préjudices subis dans l'exécution de travaux réalisés dans le cadre d'un marché relatif à la construction du bâtiment des services du département du Var ;

2) à titre principal, de condamner le département du Var à leur verser, avec les intérêts moratoires à compter du 1er janvier 2001, la somme de 1.758.439,81 euros (décomposée en 1.040.348,78 + 45.969,63 + 113.903,74 + 558.217,65) ;

3) à titre subsidiaire, de condamner ledit département à leur verser la somme de 1.158.947,69 euros ;

4) à titre infiniment subsidiaire, de condamner le même département à leur verser la somme de 884.683,30 euros ;

5) en tout état de cause, de condamner le département du Var à leur verser la somme de 20.000 euros au titre de leurs frais exposés et non compris dans les dépens ;

Vu le mémoire, enregistré au greffe le 19 mars 2003, présenté par Me X..., avocat, pour le département du Var, représenté par le président du conseil général, qui conclut au rejet de la requête et demande que la société Y... Bernard Méditerranée soit condamnée aux entiers dépens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2005 :

- le rapport de M. Brossier, premier conseiller,

- les observations de Me B... de la SCP Courteaud-Pelissier pour les sociétés appelantes,

- et les conclusions de M. Firmin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que pour la construction du bâtiment qu'il allait occuper avenue des Lices à Toulon, le conseil général du Var a passé le 10 décembre 1993 un marché public de travaux avec le groupement d'entreprises solidaires constitué par les sociétés appelantes Y... BERNARD MEDITERRANEE, SENEC et STORUS, pour un prix global forfaitaire de 97.278.270 F HT (soit 115.372.028 F TTC) et une durée de 16 mois, l'ordre de service du 10 décembre 1993 fixant ainsi la date d'achèvement des travaux au 10 avril 1995 ; qu'un avenant n°1 du 8 septembre 1994 a porté le montant du marché à la somme de 98.639.265 F HT (soit 116.986.169 F TTC ) et a repoussé le délai d'exécution de 6 semaines ; que le 16 mai 1995, un compte-rendu signé par le groupement et la maîtrise d'oeuvre, entériné par la personne responsable du marché le 19 mai 1995, a prolongé la livraison de l'ouvrage jusqu'au 24 juillet 1995, soit un délai supplémentaire accordé de 8 semaines ; qu'un état supplémentaire de prix forfaitaire n°1 du 20 juillet 1995 a porté le montant du marché à la somme de 100.880.658 F HT ; que la réception de l'ouvrage a pris effet le 24 octobre 1995 ; que le décompte général du 30 avril 1996, proposé par le maître de l'ouvrage, a été rejeté par les appelantes ; que ces dernières ayant saisi le Tribunal administratif de Nice aux fins de régler ce différend, la juridiction leur a alloué, par le jugement attaqué, une indemnité totale de 2.866.838 F, incluant la somme de 1.959.266 F TTC au titre du crédit du décompte du marché et la somme de 907.571 F au titre des intérêts moratoires dus au 31 décembre 2000 ; que les appelantes, qui soutiennent que les premiers juges auraient sous-évalué le montant ainsi alloué, réclament devant la Cour, à titre principal la somme de 11.534.609 F TTC (1.758.439,81 euros) et, à titre subsidiaire, la somme de 7.602.190 F TTC, ensemble les intérêts moratoires à compter du 1er janvier 2001 ; que par son appel incident, le département du Var conteste la condamnation prononcée à son encontre, notamment en ce qui concerne les intérêts moratoires ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont retenu la responsabilité exclusive des appelantes en ce qui concerne les retards ayant affecté le chantier au cours de l'année 1994, alors qu'ils ont ensuite intégré dans les préjudices à réparer des coûts afférents à ladite année 1994, dont ceux notamment induits par le fonctionnement de deux grues, auxquels ils ont appliqué un coefficient de partage de responsabilité de 50 % ; que, de même, les premiers juges ont maintenu les pénalités de retard de 19 jours infligées au groupement, sans en justifier le montant, alors qu'ils avaient estimé que le titulaire du marché établissait que l'augmentation de la masse des travaux justifiait une prolongation du délai d'exécution ; qu'enfin, et en ce qui concerne les intérêts moratoires, les premiers juges, qui ont constaté que les calculs de l'expert étaient erronés, ont toutefois repris les conclusions de cette expertise sans en corriger les erreurs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelantes sont fondées à soutenir que le jugement attaqué est entaché de contradictions de nature à en justifier l'annulation ; que l'affaire se trouvant en état d'être jugée, il y a lieu pour la Cour de l'évoquer afin de statuer sur la demande indemnitaire des appelantes ;

En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée par le département :

Considérant qu'aux termes de l'article 13-44 du cahier des clauses administratives générales, applicable aux marchés publics de travaux et approuvé par le décret n°76-87 du 21 janvier 1976 : « L'entrepreneur doit, dans un délai (de 45 jours) compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer (…) Si la signature du décompte général est refusée ou donnée sous réserve, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant, sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif (…) Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. » ; que le renvoi à l'article 50 doit s'entendre, dans cette hypothèse, comme visant les dispositions des 2 et 3 de cet article, relatives aux différends opposant directement l'entrepreneur au maître de l'ouvrage ;

Considérant qu'aux termes des dispositions des articles 50.21, 50.22 et 50.23 (intervention du maître de l'ouvrage) du cahier des clauses administratives générales :

« 50.21. Lorsque l'entrepreneur n'accepte pas la proposition de la personne responsable du marché ou le rejet implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l'expiration du délai de deux mois prévu au 12 du présent article, le faire connaître par écrit à la personne responsable du marché en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. un mémoire complémentaire développant les raisons de son refus.

50.22. Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage.

50.23. La décision à prendre sur les différends prévus aux 21 et 22 du présent article appartient au maître de l'ouvrage. Si l'entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise, les modalités fixées par cette décision sont appliquées à titre de règlement provisoire du différend, le règlement définitif relevant des procédures décrites ci-après. » ;

Considérant qu'aux termes des dispositions des articles 50.31 et 50.32 (Procédure contentieuse) du même cahier :

« 50.31. Si, dans le délai de trois mois à partir de la date de réception par la personne responsable du marché, de la lettre ou du mémoire de l'entrepreneur mentionné aux 21 et 22 du présent article, aucune décision n'a été notifiée à l'entrepreneur ou si celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut saisir le tribunal administratif compétent. Il ne peut porter devant cette juridiction que les chefs et motifs de réclamation énoncés dans la lettre ou le mémoire remis à la personne responsable du marché.

50.32. Si, dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la décision prise conformément au 23 du présent article sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général du marché, L'entrepreneur n'a pas porté ses réclamations devant le tribunal administratif compétent, il est considéré comme ayant accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le présent litige doit être regardé comme exclusivement relatif à la contestation du décompte général du marché, proposé par la personne responsable du marché par courrier du 30 avril 1996 reçu le 2 mai, d'un montant de 100.280.828 F HT (soit 124.277.384 F TTC) explicité par une note du 15 mai ; que ce décompte n'a pas été accepté par les entreprises concernées qui l'ont signé avec réserves, en explicitant leurs prétentions dans un mémoire de réclamation motivé daté du 10 juin 1996, reçu le 11 juin 1996, dans le délai de 45 jours prévu par les dispositions précitées, et faisant apparaître un différend de 21.197.294 F HT en indemnisation totale (25.563.936 F TTC) ; que ce mémoire de réclamation a été rejeté par la maître de l'ouvrage par décision du 5 septembre 1996, reçue le 6 septembre 1996 et contestée le 20 décembre 1996 devant le Tribunal administratif de Nice, dans le délai de recours contentieux de 6 mois prévu par les dispositions précitées ;

Considérant que la circonstance que les entreprises concernées aient précédemment, le 20 janvier 1995, saisi le maître de l'ouvrage d'une réclamation tendant à l'indemnisation de sujétions imprévues en exécution du marché, pour un montant de 3.367.054 F TTC, et qu'elles lui aient demandé le 19 avril 1995 la « confirmation rapide de la prise en compte de leur réclamation provisoire du 20 janvier 1995 », sans obtenir de réponse explicite, s'avère sans influence sur la recevabilité de la demande concernant le décompte général et définitif du marché, dès lors que cette demande pouvait reprendre les précédentes réclamations qui n'avaient pas fait l'objet d'un règlement définitif au sens des dispositions de l'article 13-44 précité ; qu'ainsi le mémoire de réclamation du 11 juin 1996, arrêté à la somme de 25.563.936 F TTC, pouvait légalement inclure la somme de 3.367.054 F demandée à titre provisoire en janvier 1995 et qui restait en différend ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir soulevée doit être rejetée ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'aux termes de l'article 19.21 du cahier des clauses administratives générales : « Lorsqu'un changement de la masse de travaux ou une modification de l'importance de certaines natures d'ouvrages, une substitution des ouvrages initialement prévus d'ouvrages différents, une rencontre de difficultés imprévues au cours du chantier, un ajournement de travaux décidé par la personne responsable du marché ou encore un retard dans l'exécution d'opérations préliminaires qui sont à la charge du maître de l'ouvrage ou de travaux préalables qui font l'objet d'un autre marché, justifie soit une prolongation du délai d'exécution de l'ensemble des travaux ou d'une ou plusieurs tranches de travaux, soit le report du début des travaux, l'importance de la prolongation ou du report est débattue par le maître d'oeuvre avec l'entrepreneur, puis elle est soumise à l'approbation de la personne responsable du marché, et la décision prise par celle-ci est notifiée à l'entrepreneur par ordre de service. » ; qu'aux termes de l'article 19.22 dudit cahier : « Dans les cas d'intempéries (…) » ; qu'aux termes de l'article 19.23 du même cahier : « En dehors des cas prévus aux 21 et 22 du présent article, la prolongation du délai ne peut résulter que d'un avenant. » ;

Considérant que le chantier en litige, qui a débuté en décembre 1993 pour une réception en octobre 1995, alors qu'il devait s'achever en avril 1995, a subi un retard total de 6 mois ; que, par l'avenant du 6 septembre 1994 et la décision du 19 mai 1995 susmentionnés, un total de 14 semaines supplémentaires de chantier a été accordé (3 mois et demi) ; qu'il est constant que le mois d'août 1995 n'a pu être travaillé en raison des congés d'été ; qu'il reste ainsi un retard non prévu contractuellement d'un mois et demi ; qu'à ce titre a été infligée aux appelantes une pénalité de 19 jours ; que ces dernières soutiennent toutefois, d'une part, que le retard dans la livraison de l'immeuble, ramené à 19 jours, ne leur serait pas imputable, d'autre part, qu'elles ont dû augmenter de façon significative leurs moyens pour faire face aux sujétions imprévues et travaux supplémentaires auxquels elles ont été confrontées afin de pouvoir livrer l'ouvrage en octobre 1995 ; que sans ces moyens supplémentaires, le chantier aurait subi un retard encore plus conséquent et qu'elles réclament une indemnisation à cet égard ;

En ce qui concerne les retards successifs pris par le chantier au cours des années 1994 et 1995 :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise du 7 février 2001, que la modification la plus importante du projet initial a concerné l'habillement des façades, initialement prévu en parements de pierre agrafée, finalement choisi en béton architectonique le 15 février 1994 ; que pour des questions notamment esthétiques afférentes à l'aspect des noyaux centraux du bâtiment, le gros oeuvre du chantier a été en partie retardé dans l'attente du choix du béton, qui prendra près de 6 mois ; que cette lenteur a pour origine le choix du sous-traitant chargé des éléments préfabriqués en béton ; qu'une partie de ce retard est imputable au groupement dès lors, d'une part, qu'il n'avait émis aucune réserve en février 1994 alors qu'il supportait contractuellement l'ordonnancement du chantier, d'autre part, qu'une de ses propositions ne pouvait être retenue en raison d'un sable impropre au béton choisi ; qu'une autre partie de ce retard est par ailleurs imputable au maître de l'ouvrage du fait, d'une part, que les échantillons de pierres présentés en janvier 1994 ont tous été refusés par lui alors que cette technique avait été décidée dans le cahier des charges initial, d'autre part, qu'il a souhaité imposer à l'entrepreneur un « échantillon de référence » (rapport page 43) ; que dans ces conditions, eu égard aux insuffisances d'ordre technique manifestées par les entrepreneurs et à l'indécision du maître de l'ouvrage dans ses choix, notamment esthétiques, la responsabilité de ces deux parties dans la lenteur et l'inertie qui ont affecté le choix final du béton architectonique, à l'origine du décalage d'une partie importante des travaux du chantier, doit être répartie entre elles à raison de 50 % chacune ; que la circonstance qu'un avenant ait été signé le 6 septembre 1994 pour prendre en compte les retards subis ne peut être regardée comme étant de nature à exonérer contractuellement le département dès lors, d'une part, que cet avenant fait référence à titre principal aux retards dus à une source, d'autre part, qu'il contient de façon expresse une réserve quant « à une demande de l'entreprise portant sur des délais supplémentaires, en cours d'examen (...) et qui donnera lieu éventuellement à un nouvel avenant », laquelle entraînera effectivement, le 20 janvier 1995, une nouvelle demande de prolongation de 3 semaines supplémentaires accompagnée d'une réactualisation de la réclamation estimée à 3.367.054 F TTC ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que des travaux supplémentaires ont été demandés au cours du deuxième trimestre 1995, qui ont consisté en un remodelage du niveau R+5 et en un ensemble de petites modifications qui ont donné lieu à de nombreux ordres de services, notamment en mai 1995 ; que ces changements par rapport au projet initial n'ont pas fait l'objet d'un avenant n°2, mais d'un compte-rendu entériné le 19 mai 1995, prolongeant la livraison du chantier au 24 juillet 1995 ; que ces changements ont retardé le chantier de plusieurs semaines, l'expert estimant notamment à un mois le retard imputable à l'ensemble des petites modifications ; que ce retard a pour origine des différends relatifs aux finitions de l'ouvrage ; qu'une partie de ce retard est imputable au groupement, dès lors qu'il ne conteste pas sérieusement avoir pris du retard dans la livraison d'une cellule témoin et n'a pu prévenir des difficultés afférentes à la livraison de matériaux de qualité et de prestations de belle facture, alors qu'il supportait contractuellement l'ordonnancement du chantier ; qu'il n'est pas sérieusement contesté qu'une autre partie de ce retard est imputable au maître de l'ouvrage dès lors que le compte-rendu susmentionné, signé le 16 mai 1995 par le groupement et la maîtrise d'oeuvre, et entériné par lui le 19 mai, prolongea la livraison du chantier jusqu'au 24 juillet 1995 au motif d'un « changement de la masse des travaux et des modifications importantes de certains ouvrages sur la demande du maître d'ouvrage ; que dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation de la responsabilité des deux parties dans la survenance des retards supplémentaires ayant affecté le chantier au cours du deuxième trimestre 1995, en la répartissant à raison de 50 % pour chacune d'elles ;

Considérant, dans ces conditions, que l'ensemble des retards ayant affecté le chantier, tant en 1994 qu'en 1995, doit être regardé comme imputable, dans les circonstances de l'espèce, pour moitié à la maîtrise de l'ouvrage et pour moitié aux entreprises appelantes ; qu'ainsi le département du Var doit être condamné à supporter la moitié des conséquences dommageables de ces retards ;

En ce qui concerne les travaux supplémentaires commandés en 1995 :

Considérant qu'il appartient au maître de l'ouvrage de payer à l'entrepreneur co-contractant l'intégralité du prix des travaux qu'il lui a commandés et qui n'avaient pas été prévus dans le marché initial, dès lors que ces travaux supplémentaires n'ont pas été rendus nécessaires par les défaillances dudit co-contractant ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que le prix des travaux supplémentaires commandés par le maître de l'ouvrage au cours de l'année 1995 et réalisés par le groupement, alors qu'ils n'étaient pas prévus dans les documents contractuels initiaux, doit être intégralement pris en charge par le maître de l'ouvrage dès lors que, contrairement à ce que soutient le département du Var, de tels surcoûts n'ont pas été pris en compte par les modifications successives du contrat, notamment par l'état de prix supplémentaires de juillet 1995, et qu'ils n'ont pas été rendus nécessaires par les défaillances du groupement ; que le prix de ces travaux supplémentaires n'a été qu'imparfaitement intégré dans le décompte définitif du 30 avril 1996 et a été mentionné dans la réclamation du 11 juin 1996 contestant ce décompte ;

Considérant, dans ces conditions, que les préjudices nés des travaux supplémentaires commandés en 1995 doit être regardé comme exclusivement imputable à la maîtrise de l'ouvrage ; qu'ainsi le département du Var doit être condamné à supporter la totalité des conséquences dommageables de ces préjudices ;

Sur la réparation :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit, que le présent litige doit être regardé comme relatif à la contestation du décompte général du marché ; que les appelantes se prévalent de cinq chefs de préjudices tirés, en premier lieu, des conséquences financières des retards pris par le chantier qui, en se cumulant au cours des années 1994 puis 1995, auraient nécessité des moyens supplémentaires coûteux non pris en compte, en deuxième lieu, du coût de travaux supplémentaires non prévus par les documents contractuels initiaux et imposés en 1995, en troisième lieu, des réfactions pratiquées à tort lors des opérations préalables à réception, en quatrième lieu, du manque à gagner induit de la neutralisation de moyens qui auraient été utilisables sur d'autres chantiers, en cinquième lieu, de pénalités de retards indûment infligées, ; que les appelantes demandent, par ailleurs, que la Cour corrige les montants afférents aux intérêts moratoires à appliquer et qui auraient été sous-évalués ;

Considérant que les appelantes ont réclamé, dans leur requête introductive de première instance, la somme totale de 21.197.294 F HT, soit un montant de 25.563.936 F TTC décomposé, d'une part, en la somme de 3.367.054 F TTC, augmentée des intérêts moratoires à compter du 20 janvier 1995, d'autre part, en la somme de 22.196.882 TTC, augmentée des intérêts moratoires à compter du 1er mars 1996 ; que les appelantes réclament devant la Cour, à titre principal, la somme totale de 11.534.609 F (1.758.439,81 euros), augmentée des intérêts moratoires à compter du 1er janvier 2001, incluant notamment les sommes de 113.903,74 euros (747.154 F) au titre de pénalités de retard, de 558.217,65 euros (3.661.664 F) au titre des intérêts moratoires et de 45.969,63 euros (301.536 F) au titre des réfactions ; qu'à titre subsidiaire, elles demandent que la Cour retienne le montant total, proposé en page 137 du rapport d'expertise, de 1.158.947 euros, soit 7.602.190 F (incluant la somme de 1.799.056 F au titre du manque à gagner) ;

En ce qui concerne le préjudice né des conséquences dommageables des retards pris par le chantier au cours des années 1994 et 1995 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise qui n'est pas sérieusement contesté à cet égard, que le groupement doit être regardé comme établissant de façon suffisamment sérieuse que l'augmentation de la masse des travaux et les retards accumulés ont nécessité une augmentation des moyens supplémentaires mis en oeuvre sur le chantier afin de pouvoir faire face, dans des délais raisonnables, aux modifications souhaitées par le maître de l'ouvrage ; que cette augmentation de moyens n'a pas été prise en compte par l'état supplémentaire de prix n°1, relatif à des travaux imposés sans considération des retards déjà subis par le chantier ; que cet état ne peut être regardé, contrairement à ce que soutient le département du Var, comme l'exonérant de toute responsabilité au titre des chefs de réclamation en litige ; qu'ainsi une telle augmentation de moyens est de nature à justifier une indemnisation prononcée par le juge du contrat ;

Considérant, en premier lieu, que ces moyens supplémentaires, qui sont à regrouper en 8 postes de frais distincts, ont généré des frais de structure, qu'ils aient été mis en oeuvre en 1994 ou en 1995, qu'ils soient regardés comme externes aux entreprises (location, sous-traitance, intérimaire …) ou internes, compte-tenu de leur nécessaire traitement administratif et comptable (secrétariat, assurance, trésorerie, archivage…) ; que dans son projet de février 1996, le groupement avait fait état d'un taux de frais généraux de structure atteignant 12 % ; qu'il sera fait une juste appréciation des faits de l'espèce en évaluant effectivement ces frais de structure au taux de 12 % ; lequel doit ainsi être appliqué sur le montant de chacun des 8 postes de frais retenus ;

Considérant, en deuxième lieu et en ce qui concerne ces 8 postes de frais, que les évaluations auxquelles a procédé l'expert ne peuvent être regardées comme sérieusement contestées par les parties ; que dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des préjudices subis par le groupement en retenant, avant frais de structure, les sommes de 478.010 F HT au titre des matériels (grue, compresseur, banche, divers …), 218.705 F HT au titre de la logistique de chantier (baraquement, eau, électricité, téléphone, ordures, gardiennage …), 136.890 F HT au titre de la main d'oeuvre (grutiers, hors perte de rendement insuffisamment établie), 1.159.125 F HT au titre de l'encadrement du chantier (conducteurs, chefs ...), 160.020 F HT au titre des études (reprise des plans d'exécution d'ouvrage, hors coût d'établissement des devis qui doivent être inclus dans les frais de structure), et 77.880 F HT au titre des protections complémentaires (nettoyages tardifs …) ; que, par ailleurs, le préjudice allégué afférent à la mission OPC (ordonnancement-pilotage-coordination) ne peut être regardé comme établi qu'à hauteur de 84.250 F HT, surcoût effectif de la sous-traitance SCO, les autres surcoûts internes éventuellement subis devant être considérés comme intégrés dans les enveloppes globales de 711.600 F et 770.900 F allouées, dans le marché initial, aux missions ordonnancement-pilotage-coordination-cellule de synthèse ; qu'enfin, le préjudice allégué relatif à la perte de matériaux ne peut être regardé comme suffisamment établi, en l'absence d'éléments chiffrés précis de nature à établir la somme de 106.200 F réclamée ;

Considérant que, dans ces conditions, et au titre des huit postes de frais sus-énumérés, les appelantes sont fondées à demander réparation du préjudice subi à concurrence de 2.314.880 F HT, soit la somme de 2.768.596 F TTC (avec un taux moyen de TVA de 19,6 %) augmentée d'un taux de 12 % au titre des frais de structure, soit un montant total de 3.100.828 F TTC ; que le surplus des demandes du groupement doit être rejeté comme insuffisamment établi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelantes sont fondées à demander que la Cour réintègre dans le crédit du décompte du marché, compte tenu du partage égalitaire de responsabilité susmentionné, la somme de 1.550.414 F TTC ;

En ce qui concerne le préjudice né du coût des travaux supplémentaires non prévus par les documents contractuels initiaux :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise qui n'est pas sérieusement contesté sur ce point, que le groupement doit être regardé comme ayant réalisé, du mois août 1995 au mois de janvier 1996, des travaux supplémentaires de finition non prévus, afférents au niveau R+5, qui n'ont été évalués par le département qu'à hauteur de 551.085 F HT au lieu d'un coût réel de 593.705 F HT ; qu'il y a lieu de condamner le département à prendre intégralement en charge la différence de 42.620 F HT ; que la rectification de 213.160 F HT en faveur du groupement opérée par l'expert sur le montant du devis n°47 n'est pas sérieusement contestée ; que le surplus de demandes afférentes au poste n°7 (travaux supplémentaires) doit être regardé comme insuffisamment établi, dès lors que l'erreur relative à l'allège du rez-de-chaussée est imputable au groupement et que l'indemnité de 35 % invoquée n'est pas sérieusement établie compte-tenu des imprécisions du dossier afférentes au devis n°47 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise qui n'est pas sérieusement contesté sur ce point, que le groupement doit être regardé comme ayant dû faire réaliser au cours de l'année 1995, par diverses entreprises sous-traitantes (menuiserie, cloisons, peintures, vitrage... ), des travaux afférents au niveau R+5 qui n'étaient pas prévus par les documents contractuels initiaux ; qu'il y a lieu de condamner le département à prendre intégralement en charge ce poste n°10 (sous-traitants) pour un montant de 112.158 F HT ;

Considérant que, dans ces conditions et au titre des travaux supplémentaires susmentionnés, les appelantes sont fondées à réclamer la somme de 367.938 F HT, soit 443.733 F TTC avec un taux moyen de TVA de 20,6 % applicable à compter du mois d'août 1995 ; que, contrairement à ce que soutient le département du Var, l'état supplémentaire de prix n°1 de 2.241.393 F HT en date de juillet 1995, n'avait pas intégré de tels surcoûts dont certains, au demeurant, lui sont postérieurs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelantes sont fondées à demander que la Cour réintègre dans le crédit du décompte du marché la somme de 443.733 F TTC ;

En ce qui concerne le préjudice né des réfactions pratiquées lors des opérations préalables à réception :

Considérant que certains désordres, constatés lors des opérations préalables à la réception de l'ouvrage, ont donné lieu à une réfaction de prix, pratiquée par le département du Var sur le solde dû au groupement, d'un montant de 499.900 HT ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que le coût des travaux nécessaires pour remédier à ces désordres doit être évalué à 247.775 F HT, incluant au demeurant une somme de 104.350 F admise par le groupement ; qu'il y a lieu, dès lors, de réintégrer dans le solde du marché à porter au crédit du groupement, la différence de 252.125 F HT (499.900 - 247.755), soit 304.062 F TTC en appliquant le taux de 20,6 % applicable l'année de la retenue pratiquée (1996) ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelantes sont fondées à demander que la Cour réintègre dans le crédit du décompte du marché la somme de 304.062 F TTC ;

En ce qui concerne le préjudice né de pénalités de retards indûment infligées :

Considérant qu'aux termes de l'article 20.1 du cahier des clauses administratives générales : « les pénalités sont encourues du simple fait de la constatation de retard par le maître d'oeuvre. » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'augmentation de la masse des travaux a augmenté le délai d'exécution du marché et que les prolongations contractuelles susmentionnées de 6, puis 8 semaines (trois mois et demi), n'ont pas été suffisantes pour faire face à cette augmentation ; que compte tenu du mois d'août 1995, non travaillé, il reste un retard final d'un mois et demi non justifié contractuellement ; que ce retard, ainsi qu'il a été dit, provient non seulement du comportement du groupement, mais également de celui du maître d'ouvrage, à raison de 50% chacun ; qu'ainsi, le groupement doit être regardé comme responsable d'un retard de 22,5 jours ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le maître de l'ouvrage ne pouvait lui infliger des pénalités de retard qu'il a calculées sur une période de 19 jours ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelantes ne sont pas fondées à demander à la Cour de réintègrer dans le crédit du décompte du marché la somme de 624.715 F HT, soit 753.406 F TTC au taux de TVA de 20,6 % applicable à compter du mois d'août 1995 ;

En ce qui concerne le préjudice né d'une perte de rendement et d'un manque à gagner :

Considérant que le groupement soutient que l'accumulation de ses retards sur le chantier, en induisant la mise en oeuvre de moyens supplémentaires, aurait provoqué une perte de rendement et un manque à gagner compte-tenu de la mobilisation de tels moyens qui auraient pu être employés ailleurs ; qu'en particulier, le groupement doit être regardé comme réclamant, au titre de ce chef de préjudice, le paiement de « frais financiers » qu'il évalue à un montant de 1.870.670 HT dans son projet de décompte de février 1996, en les distinguant des intérêts moratoires ; qu'il résulte toutefois de l'instruction qu'un tel préjudice ne peut être regardé comme suffisamment certain et, par suite, de nature à justifier une indemnisation, nonobstant la circonstance que l'expert ait pu évaluer une éventuelle perte de rendement à 1.799.056 F ;

Sur les intérêts moratoires :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11.7 du cahier des clauses administratives générales, approuvé par le décret 76-87 du 21 janvier 1976 modifié et applicables au marché en litige : « l'entrepreneur a droit à des intérêts moratoires, dans les conditions réglementaires, en cas de retard dans les mandatements (…) » ; qu'aux termes des dispositions de l'article 357 du code des marchés publics, reprises à l'article 178 dudit code, auquel renvoie l'article 352 du même code, dans leur rédaction issue du décret du 15 décembre 1992 applicable au marché signé le 20 décembre 1993 : «I.- L'administration cocontractante est tenue de procéder au mandatement des acomptes et du solde dans un délai qui ne peut dépasser 45 jours. (…) La date de mandatement est portée (…) à la connaissance du titulaire par l'administration cocontractante. II.-Le défaut de mandatement dans le délai prévu au I ci-dessus fait courir de plein droit et sans autre formalité, au bénéfice du titulaire (…) des intérêts moratoires, à partir du jour suivant l'expiration dudit délai jusqu'au quinzième jour inclus suivant la date du mandatement du principal. Toutefois, dans le cas où le mandatement est effectué hors du délai prévu au présent article, lorsque les intérêts moratoires n'ont pas été mandatés en même temps que le principal et que la date du mandatement n'a pas été communiquée au titulaire, les intérêts moratoires sont dus jusqu'à ce que les fonds soient mis à disposition du titulaire. Le défaut de mandatement de tout ou partie des intérêts moratoires lors du mandatement du principal entraîne une majoration de 2 p. 100 du montant de ces intérêts par mois de retard. Le retard auquel s'applique le pourcentage de majoration est calculé par mois entiers décomptés de quantième à quantième. Toute période inférieure à un mois est comptée pour un mois entier (…)» ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 182 du code des marchés publics, applicable aux marchés des collectivités en vertu de l'article 352 du même code : « Le taux et les modalités de calcul des intérêts moratoires (…) sont fixés par arrêté conjoint du ministre chargé de l'économie et des finances et du ministre chargé du budget (..) ; que ledit arrêté, en date du 17 janvier 1991, modifié par arrêté du 17 décembre 1993, fixe le taux des intérêts moratoires au taux d'intérêts légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts ont commencé à courir, majoré de 2 points ; que le taux annuel des intérêts moratoires à prendre en compte, majoré de 2 points, hors majoration de 2% par mois pour défaut de mandatement de tout ou partie desdits intérêts lors du mandatement du principal, atteint 10,40 % en 1994, 7,82 % en 1995, 8,65 % en 1996, 5,87 % en 1997, 5,36 % en 1998, 6,47 % en 1999, 5,74 % en 2000 ;

Considérant, en troisième lieu et en application des dispositions précitées, qu'en cas de mandatement du principal hors délai et lorsque les intérêts moratoires n'ont pas été mandatés avec le principal, il y a lieu de prendre en compte, pour le calcul de ces intérêts moratoires, la date de paiement effectif du principal, et non la date de son mandatement effectif augmentée de 15 jours ; que le montant d'intérêts moratoires ainsi obtenu, appliqués sur un montant en principal TTC mais qui ne peut lui-même supporter de taxe sur la valeur ajoutée, doit être majoré par un taux de 2% par mois dans la même hypothèse d'un retard de mandatement des intérêts moratoires, postérieur au mandatement du principal ; que l'application de cette majoration de 2 % par mois sur les intérêts moratoires ne peut se cumuler avec une demande de capitalisation des intérêts ; qu'en effet, les majorations pour retard de 2% sont exclusives de tout autre intérêt, les sommes dues à ce titre ne pouvant constituer une créance productive d'intérêts, sur le fondement de l'article 1153 du Code civil, que dans le cas et à partir du jour où les intérêts moratoires ayant été payés sans les majorations de retard, celles-ci auraient cessé de courir ;

En ce qui concerne les intérêts moratoires afférents aux acomptes :

S'agissant de la recevabilité de la contestation :

Considérant que la possibilité de discuter un décompte général définitif de marché concerne exclusivement les intérêts moratoires qui courent le cas échéant sur le solde résultant du décompte, à l'exclusion des intérêts afférents à des acomptes inclus dans le décompte ; qu'en l'espèce, les intérêts moratoires afférents aux acomptes inclus dans le décompte général querellé ont été contestés dans le mémoire de réclamation du 10 juin 1996, présenté dans les quarante-cinq jours réglementaires, qui précisait les motifs des réserves et demandait au titre des retards de paiement un montant total d'intérêts moratoires de 646.382 F ; que dans ces conditions les appelantes, qui soutiennent que les intérêts moratoires dus au titre de ces retards de paiements auraient été sous-évalués, sont recevables à demander au juge du contrat de tels intérêts moratoires dans la limite de la dite somme de 646.382 F initialement demandée ;

S'agissant des situations n° 4, 13, 21 et 25 et de la majoration de retard de 2% par mois :

Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que les montants en principal de ces quatre acomptes ont été mandatés au delà du délai de 45 jours, faisant ainsi courir des intérêts moratoires contractuels ; que ces intérêts moratoires ont été mandatés par le département au cours du mois de décembre 1997, après les mandatements du principal des acomptes ; que dans ces conditions, en l'absence de mandatement des intérêts moratoires avec le principal il y a lieu, d'une part, de prendre en compte la date de paiement effectif du principal et non la date de mandatement augmentée de 15 jours, d'autre part, de faire courir la majoration de retard de 2% par mois, laquelle s'applique du mois de paiement du principal, inclus, au mois de décembre 1997, également inclus ;

Considérant, en deuxième lieu et en ce qui concerne la situation n°4, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise et de la notice explicative du décompte général définitif notifiée par courrier du 15 mai 1996, que la date de paiement réel du montant en principal de 2.919.273 F TTC est le 7 mai 1994, pour une date limite contractuellement prévue le 15 avril 1994, soit un retard de 22 jours ; que le montant des intérêts moratoires, au taux de 10,4% et pour une année de 365 jours, atteint ainsi la somme de 18.299 F (2.789 euros) ; qu'il y a lieu d'appliquer sur cette somme la majoration de 2% par mois sur la période courant du mois de mai 1994 au mois de décembre 1997, soit 88 % pour 44 mois ; qu'ainsi la créance d'intérêts moratoires due au titre de la situation n°4 atteint la somme de 34.402 F (5.244 euros) ; que le département a mandaté le 1er décembre 1997 la somme de 28.538 F ; qu'il lui reste à verser la différence, soit 5.864 F (893 euros) ;

Considérant, en troisième lieu et en ce qui concerne la situation n°13, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise et de la notice explicative du décompte général définitif notifiée par courrier du 15 mai 1996, que la date de paiement réel du montant en principal de 4.554.607 F TTC est le 25 février1995, pour une date limite contractuellement prévue le 6 février1995, soit un retard de 19 jours ; que le montant des intérêts moratoires, au taux de 7,82 % et pour une année de 365 jours, atteint la somme de 18.540 F (2.826 euros) ; qu'il y a lieu d'appliquer sur cette somme la majoration de 2% par mois sur la période courant du mois de février 1995 au mois de décembre 1997, soit 70 % pour 35 mois ; qu'ainsi la créance d'intérêts moratoires due au titre de la situation n°13 atteint la somme de 31.518 F (4.804 euros) ; que le département a mandaté les 2 et 5 décembre 1997 les sommes de 31.384 F et 18.813 F ; que le département a ainsi versé un indû de 18.679 F (2.847 euros) ;

Considérant, en quatrième lieu et en ce qui concerne la situation n°21, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise et de la notice explicative du décompte général définitif notifiée par courrier du 15 mai 1996, que la date de paiement réel du montant en principal de 7.647.255 F TTC, est le 7 novembre 1995, pour une date limite contractuellement prévue le 21 septembre 1995, soit un retard de 47 jours ; que le montant des intérêts moratoires, au taux de 7,82 % et pour une année de 365 jours, atteint la somme de 77.004 F (11.739 euros) ; qu'il y a lieu d'appliquer sur cette somme la majoration de 2% par mois sur la période courant du mois de novembre 1995 au mois de décembre 1997, soit 52 % pour 26 mois ; qu'ainsi la créance d'intérêts moratoires due au titre de la situation n°21 atteint la somme de 117.047 F (17.843 euros) ; que le département a mandaté le 5 décembre 1997 la somme de 47.602 F ; qu'il lui reste à verser la différence, soit 69.445 F (10.586 euros) ;

Considérant, en cinquième lieu et en ce qui concerne la situation n°25, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise et de la notice explicative du décompte général définitif notifiée par courrier du 15 mai 1996, que la date de paiement réel du montant en principal de 5.902.511 F TTC est le 16 avril 1996, pour une date limite contractuellement prévue le 3 avril 1996, soit un retard de 13 jours ; que le montant des intérêts moratoires, au taux de 8,65 et pour une année de 365 jours, atteint la somme de 18.184 F (2.772 euros) ; qu'il y a lieu d'appliquer sur cette somme la majoration de 2% par mois sur la période courant du mois d'avril 1996 au mois de décembre 1997, soit 42 % pour 21 mois ; qu'ainsi la créance d'intérêts moratoires due au titre de la situation n°25 atteint la somme de 25.822 F (3.936 euros) ; que le département, qui a mandaté le 8 décembre 1997 la somme de 32.218 F, a ainsi versé un indû de 6.396 F (975 euros) ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la créance totale d'intérêts moratoires rectifiée en faveur du groupement appelant s'élève à 50.234 F (7.658 euros) ; que cette créance, incluant la majoration mensuelle de 2% appliquée pour retard jusqu'au mois de décembre 1997, doit être augmentée à compter de ce mois des seuls intérêts au taux légal, en application de l'article 1153 du code civil ; que, dès lors, cette créance de 50.234 F (7.658 euros) portera intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1998 ;

S'agissant des situations n° 2, 3, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 11, 12, 14, 15, 16, 17, 18, 19, 20, 22, 23, 24 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du tableau produit par le département le 19 octobre 2005 et qui n'est pas contesté, que les montants en principal de ces acomptes ont été mandatés dans le délai contractuel de 45 jours ; que ces montants n'ont pu, dès lors, faire courir des intérêts moratoires ;

En ce qui concerne les intérêts moratoires afférents au solde du décompte général :

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que le décompte du marché litigieux doit être rectifié en faveur des appelantes, en portant à leur crédit les sommes (TTC) de 1.550.414 F au titre des conséquences dommageables des retards pris par le chantier au cours des années 1994 et 1995, de 443.733 F au titre des travaux supplémentaires non prévus par le cahier des charge initial et de 304.062 F au titre des réfactions pratiquées lors des opérations préalables à réception, soit un total de 2.298.209 F TTC (350.359,70 euros) ;

Considérant que ce montant est dû par le département à titre contractuel en rectification du montant en principal du décompte général du 30 avril 1996, notifié le 20 mai 1996 par une notice explicative datée du 15 mai, exigible par voie de conséquence le 4 juillet 1996 après un délai contractuel de 45 jours ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, d'appliquer sur ce montant de 2.298.209 F TTC (350.359,70 euros) les intérêts moratoires prévus contractuellement sur la période courant du 4 juillet 1996 à la date de son mandatement, lequel est intervenu le 25 avril 2002 par trois mandats d'un montant total supérieur à 2.298.209 F TTC (350.359,70 euros), émis en exécution du jugement annulé ; que ces intérêts moratoires contractuels n'ont pas, en revanche, à être majorés du taux de 2% par mois, ladite somme de 2.298.209 F TTC (350.359,70 euros) étant la rectification prononcée par le présent arrêt ;

Sur les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise, tels qu'ils ont été liquidés et taxés le 30 mars 2001 à 164.177,91 F par ordonnance du président du Tribunal administratif de Nice, pour moitié à la charge du département du Var et pour moitié à celle du groupement appelant, compte-tenu du partage égalitaire de responsabilité susmentionné ;

Sur les frais exposés par les parties et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions des parties fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative et tendant au remboursement des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement attaqué du Tribunal administratif de Nice du 6 décembre 2001 est annulé.

Article 2 : Le département du Var est condamné à payer au groupement d'entreprises solidaires constitué par les sociétés SNC SOGEA Sud-est, aux droits et obligations de laquelle est venue la société Y... BERNARD MEDITERRANEE, SENEC et STORUS, anciennement dénommée OCE dont le commissaire à l'exécution du plan de continuation est Me A..., la somme de 2.298.209 F TTC (350.359,70 euros) au titre du solde en principal du marché. Cette somme sera augmentée des intérêts moratoires contractuels sur la période courant du 4 juillet 1996 au 25 avril 2002.

Article 3 : Le département du Var est condamné à payer au groupement d'entreprises susmentionné la somme de 50.234 F (7.658 euros) au titre des intérêts moratoires afférents aux acomptes n°4, 13, 21 et 25. Cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 1er janvier 1998.

Article 4 : Les frais d'expertise, taxés à la somme de 164.177,91 F, sont mis à la charge du département du Var à hauteur de 82.088,96 F (12.514,38 euros) et à la charge solidaire du groupement d'entreprises susmentionné à hauteur de 82.088,96 F (12.514,38 euros).

Article 5 : Le surplus des conclusions du groupement d'entreprises susmentionné et du département du Var est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié aux sociétés Y... BERNARD MEDITERRANEE, SENEC, STORUS, au département du Var, à M. A... et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

N° 02MA0578 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA00578
Date de la décision : 09/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste BROSSIER
Rapporteur public ?: M. FIRMIN
Avocat(s) : SCP COURTEAUD-PELLISSIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-01-09;02ma00578 ?
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