La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/01/2006 | FRANCE | N°03MA01103

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6eme chambre - formation a 3, 23 janvier 2006, 03MA01103


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 juin 2003, sous le 03MA01103, présentée pour la société BTMF, dont le siège est ... du Désert à Marseille (13012) et par l'association « Les foyers marseillais », dont le siège est ..., par la SCP Fournier et associés, avocats ;

La. société BTMF et l'association « Les foyers marseillais » demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9902361 du 18 février 2003 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à la d

emande de la société BTMF tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la som...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 3 juin 2003, sous le 03MA01103, présentée pour la société BTMF, dont le siège est ... du Désert à Marseille (13012) et par l'association « Les foyers marseillais », dont le siège est ..., par la SCP Fournier et associés, avocats ;

La. société BTMF et l'association « Les foyers marseillais » demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9902361 du 18 février 2003 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille n'a que partiellement fait droit à la demande de la société BTMF tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 12.653,86 euros en réparation des préjudices qui lui ont été causés par les travaux de construction de la rocade L2 en avril 1996, et a rejeté la demande de l'association « Les foyers marseillais » tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 125.403 F (soit 19.117,56 euros) en réparation de son préjudice financier ;

2°) de condamner l'Etat à verser à la société BTMF une somme de 96088,56€ et à l'association Les foyers marseillais une somme de 19117,56 € ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 3500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er juin 2004, présenté par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande la réformation du jugement en tant qu'il a été condamné à verser à la société BTMF une somme de 12653,86 € ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2005 :

- le rapport de Mlle Josset , premier conseiller,

- les observations de Me Hugo de Y..., de la SCP Fournier et associés, pour la société BTMF et l'association « Les foyers marseillais « ,

- et les conclusions de M. Firmin, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la société BTMF et l'association Les foyers marseillais demandent à être indemnisées par l'Etat des préjudices qu'elles estiment avoir subis consécutivement aux travaux de construction de la rocade L2 dans le secteur de Montolivet à Marseille ; qu'elles font appel du jugement du tribunal administratif de Marseille qui n'a fait que partiellement droit à leur demande en condamnant l'Etat à verser à la société BTMF une somme de 12 653,86 € ; que l'Etat, par voie de l'appel incident, demande la réformation du jugement en tant qu'il a été condamné à payer cette somme à la société BTMF ;

Sur la responsabilité

Considérant que les travaux litigieux ont consisté en la construction d'une autoroute en partie enterrée, dans une tranchée couverte en surface par un voile de béton ; qu'ils ont nécessité un décaissement important du terrain d'assiette et des forages à 17 mètres de profondeur pour que puisse être injectée de la bentonite, permettant l'installation de plots de béton appelés barettes, destinés à asseoir la future voie et à assurer sa couverture ;

En ce qui concerne la diminution du débit de la source Sainte Elizabeth :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des rapports des deux expertises ordonnées par le juge des référés, que la réalisation des forages susmentionnés a creusé des fissures dans le réseau de circulation des eaux superficielles qui rejoignent la source Sainte Elisabeth par la voie d'un chenal ; que ces fissures ont été colmatées par des injections de boues qui ont gagné l'émergence de la source en suivant le chenal et ont réduit son débit ; que s'il est exact qu'en 1992 le débit de cette source avait diminué pour des raisons météorologiques, il résulte de l'instruction que la période d'avril à septembre 1996 a été particulièrement pluvieuse et n'a pu entraîner les mêmes conséquences ; que, dans ces conditions, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la diminution du débit de la source n'était pas liée aux travaux autoroutiers déjà évoqués ;

En ce qui concerne la pollution de la source :

Considérant que si l'Etat soutient qu'il ne peut être déclaré responsable de la pollution subie par la source Sainte-Elizabeth, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, de décider que le lien de causalité entre les travaux de construction de la rocade L2 et la pollution des eaux captées par la société BTMF pour les besoins de son exploitation doit être regardé comme établi ; que c'est ainsi à bon droit que le tribunal a déclaré l'Etat responsable des dommages qui ont découlé de cette pollution ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne la société BTMF :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société BTMF a dû, pour pallier la diminution du débit de la source en cause, s'approvisionner auprès d'un autre fournisseur d'eau à concurrence de 29 586 m3, pour un prix supérieur au prix demandé par l'association Les foyers marseillais, et a subi de ce fait un préjudice financier de 28 821,25 € ; qu'en revanche, les travaux de creusement d'un nouveau forage n'ont pas été entrepris en pure perte pour la société BTMF, qui bénéficiera durablement d'une source d'approvisionnement accru ; que, dans ces conditions, la société BTMF n'est pas fondée à demander à être indemnisée de ce chef de préjudice ; que la présence persistante de boue a endommagé le système de traitement des eaux, en particulier le filtre à sable, dont la saturation a reporté la charge polluante sur les deux adoucisseurs d'eau, provoquant leur dysfonctionnement permanent pendant la durée de la pollution ; que la turbidité persistante, trop fine pour pouvoir être interceptée par le filtre à sable, a colmaté les résines des adoucisseurs et provoqué l'usure plus rapide de l'ensemble des pièces, imposant des interventions techniques pour un montant de 2 431,12 € et induisant des frais de gestion administratifs et comptables pour un montant de 2 957,51 € ; que la société justifie des honoraires versés à M. X..., expert géologue, qui a assisté la société BTMF dans les opérations d'expertise pour un montant de 914,69 €, et des constats d'huissiers pour un montant de 438,44 € ; qu'en revanche, ladite société ne justifie pas plus en appel qu'en première instance que les frais de curage des canalisations obstruées par les boues, supportés plus de six mois après les faits, aient été directement induits par la pollution ; qu'elle ne justifie pas davantage de la somme de 30 489,80 € demandée au titre de la désorganisation de son exploitation ; qu'il résulte cependant de tout ce qui précède qu'en condamnant l'Etat à verser à la société BTMF une indemnité de 12 653,86 €, les premiers juges ont fait une insuffisante appréciation du préjudice ; qu'il y a lieu de porter cette indemnité à la somme de 35 563,01 € et de réformer en ce sens le jugement du tribunal administratif de Marseille ;

En ce qui concerne le préjudice subi par l'association « Les foyers marseillais » :

Considérant que l'association demande réparation du préjudice constitué par le manque à gagner résultant pour elle de la chute des quantités d'eau achetées par la société BTMF, contrainte de diversifier ses sources d'approvisionnement ; que, d'une part, si consécutivement aux perturbations causées à la source la société BTMF a creusé un nouveau forage pour compléter son approvisionnement, les quantités d'eau ainsi utilisées par la société ne peuvent être regardées comme liées directement aux travaux en cause et donner lieu à indemnisation pour le manque à gagner qu'elles entraîneraient pour l'association requérante ; que, d'autre part, en ce qui concerne la baisse de quantité d'eau vendue à hauteur de 29 586 m3, l'association ne justifie pas de son préjudice en se bornant à faire état, en appel comme en première instance, de la diminution de son chiffre d'affaires, sans donner aucun élément d'évaluation de la perte de bénéfice consécutive à celle-ci ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1500 euros au titre des frais exposés par la société BTMF et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante vis-à-vis de l'association Les foyers marseillais, la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : L'indemnité que l'Etat a été condamné à verser à la société BTMF par l'article 1er du jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille est portée à 35 563,01 €.

Article 2 : Le jugement susvisé du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à la société BTMF une somme de 1500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Les foyers marseillais, à la société BTMF et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer

N° 03MA01103 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03MA01103
Date de la décision : 23/01/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: Melle Muriel JOSSET
Rapporteur public ?: M. FIRMIN
Avocat(s) : SCP FOURNIER ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2006-01-23;03ma01103 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award