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06/12/2007 | FRANCE | N°04MA01323

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2007, 04MA01323


Vu la requête, enregistrée le 24 juin 2004, présentée pour la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE (SAEM), dont le siège est situé 8-14, allée Cervantès, Parc du Roy d'Espagne à Marseille (13273), par Me Laurent ;

La SNC SAEM demande à la Cour :

11) d'annuler l'article 2 du jugement n° 99-6120/99-6157 en date du 3 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir, par l'article 1er du même jugement, prononcé la décharge des majorations pour mauvaise foi qui avaient assorti une fraction des impositions mises à sa charg

e, a rejeté le surplus de sa demande en décharge de la cotisation supplémen...

Vu la requête, enregistrée le 24 juin 2004, présentée pour la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE (SAEM), dont le siège est situé 8-14, allée Cervantès, Parc du Roy d'Espagne à Marseille (13273), par Me Laurent ;

La SNC SAEM demande à la Cour :

11) d'annuler l'article 2 du jugement n° 99-6120/99-6157 en date du 3 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir, par l'article 1er du même jugement, prononcé la décharge des majorations pour mauvaise foi qui avaient assorti une fraction des impositions mises à sa charge, a rejeté le surplus de sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1991 et du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période allant du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1993 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en cause ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
……………………………………………………………………………………………

Vu la sixième directive du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2007 ;

- le rapport de M. Bédier, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité de la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE (SAEM), qui exerce son activité dans le secteur du bâtiment, l'administration fiscale a estimé que la société avait versé des honoraires à différents intervenants pour des prestations dont la réalité n'était pas établie et qu'elle avait comptabilisé en « charges à payer » une prime d'assurance pour garantie décennale ne présentant pas le caractère d'une dette certaine et déterminée ; que l'administration a en conséquence assujetti la société, selon le régime fiscal des sociétés de capitaux dont l'application n'est pas contestée, à une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1991, un complément de taxe sur la valeur ajoutée lui étant réclamé au titre de la période allant du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1993 ; que la SNC SAEM demande à la Cour d'annuler l'article 2 du jugement en date du 3 mai 2004 par lequel le Tribunal administratif de Marseille, après avoir, par l'article 1er du même jugement, prononcé la décharge des majorations pour mauvaise foi qui avaient assorti une fraction des impositions mises à sa charge, a rejeté le surplus de sa demande en décharge des impositions et pénalités qu'elle contestait ; que, par la voie du recours incident, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande à la Cour d'annuler l'article 1er du même jugement et de remettre les majorations pour mauvaise foi à la charge de la société ;

Sur l'appel principal de la SNC SAEM :

En ce qui concerne l'application de l'article R 200-5 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article R 200-5 du livre des procédures fiscales : «Lorsque l'administration n'a pas, à l'expiration d'un délai de six mois suivant la date de présentation de l'instance, produit ses observations, le président du tribunal administratif peut lui accorder un nouveau délai de trois mois qui peut être prolongé, en raison de circonstances exceptionnelles, sur demande motivée. Le président du tribunal administratif peut imposer des délais au redevable. Si c'est le demandeur qui n'a pas observé le délai, il est réputé s'être désisté ; si c'est la partie défenderesse, elle sera réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans les recours» ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'elles ne sont applicables que devant le tribunal administratif ; qu'en toute hypothèse, le mémoire en défense de l'administration fiscale a été enregistré au greffe de la Cour le 3 octobre 2005, antérieurement au délai qui lui était imparti pour répondre et qui expirait le 19 octobre suivant ; que la société requérante n'est, par suite, pas fondée à soutenir qu'en présentant son mémoire en défense tardivement, l'administration aurait acquiescé aux faits exposés dans sa requête ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la notification de redressement datée du 17 août 1994 énumère, en mentionnant leur date et leur montant, les dix-huit factures que le vérificateur a regardées comme ne correspondant pas à des prestations effectivement réalisées au profit de la société requérante et précise que les sommes portées sur ces factures ne peuvent être regardées comme des charges déductibles sur le fondement du I de l'article 39 du code général des impôts, la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les mêmes factures ne pouvant ouvrir droit à déduction par application du 4 de l'article 283 et du 2 de l'article 272 du même code ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir ni que la notification de redressement serait insuffisamment motivée ni qu'il y aurait lieu pour la Cour de prononcer la décharge des impositions par application de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les charges regardées par l'administration comme non justifiées et le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente :

Considérant que, d'une part, seul peut être déduit du bénéfice net imposable à l'impôt sur les sociétés, au titre des charges visées au 1 de l'article 39 du code général des impôts, le coût facturé de biens ou de prestations de services qui ont réellement été livrés ou rendues à l'entreprise ; que, d'autre part, seule peut être déduite par un assujetti de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations, en vertu des dispositions tant du 1 de l'article 271 que du 2 de l'article 272 et du 4 de l'article 283 du code général des impôts, la taxe portée sur des factures correspondant à des biens ou à des prestations de services qui lui ont été effectivement fournis ;

Considérant que, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

Considérant que la SNC SAEM a compris dans ses charges des exercices clos le 31 décembre 1991 et le 31 décembre 1992 la rémunération des prestations de services qui lui avaient été facturées par M. Vernochet et par l'entreprise Partenariat Valorisation Développement et déduit de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur les factures d'honoraires ; que les redressements litigieux procèdent de la réintégration du montant hors taxe d'honoraires au bénéfice imposable de l'exercice clos en 1991 et de la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux deux exercices clos en 1991 et en 1992 à laquelle avait prétendu la SNC ; que, pour opérer ces redressements, l'administration s'est fondée sur le fait que la société ne justifiait pas que des prestations lui avaient été effectivement rendues en contrepartie des honoraires qui avaient été facturés ; que la société requérante n'apporte pas plus en appel qu'en première instance de précisions au sujet de la nature des prestations dont elle aurait bénéficié ainsi qu'au sujet de l'existence et de la valeur des contreparties qu'elle en aurait retirées alors que la nature immatérielle des prestations en cause ne fait pas obstacle à ce qu'elle apporte ces informations minimales ; qu'imposée à raison de sa participation de 50 % dans la SEP Golf de Frégate, la société requérante n'apporte pas davantage de précisions relatives aux prestations dont la SEP aurait bénéficié ; que, dans ces conditions, et sans qu'y fassent obstacle en matière de taxe sur la valeur ajoutée les dispositions de la sixième directive du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 ou la jurisprudence de la Cour de Justice des Communautés européennes, l'administration doit être regardée comme établissant que les redressements litigieux procèdent d'une exacte application des articles précités du code général des impôts ;

Considérant que la société requérante n'invoque pas de moyens spécifiques à l'encontre du redressement relatif à un profit sur le Trésor, qu'elle se borne à contester par voie de conséquence de sa contestation des autres redressements ; que ses prétentions ne peuvent qu'être rejetées également sur ce point ;

En ce qui concerne les charges à payer :

Considérant que la société requérante a enregistré au cours de l'exercice clos en 1991 la somme de 1 195 346 francs dans un compte de charges à payer ; que le vérificateur a relevé que cette somme correspondait à la fraction d'une cotisation d'assurance qui n'avait pas été appelée au cours de l'exercice par l'assureur et que cette fraction de la cotisation pouvait d'ailleurs ne pas être demandée à la société si l'évolution du rapport « sinistres sur cotisations » sur cinq années le permettait ; que, par suite, c'est à bon droit que le vérificateur a réintégré dans les résultats de l'exercice les charges inscrites au compte « charges à payer », dès lors que la société, qui ne conteste pas les constatations de l'administration, n'apporte pas la preuve qu'au moment de son inscription, la charge en cause présentait pour elle le caractère d'une dette certaine dans son principe et son montant ; qu'en outre, la société requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des termes de l'instruction référencée 4 C 2 91 du 10 avril 1991, qui ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait ici application et dans les prévisions de laquelle, en toute hypothèse, elle n'entre pas, dès lors que l'instruction en cause ne concerne que les petites entreprises soumises à un régime simplifié d'imposition ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SNC SAEM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de ses demandes ;

Sur les conclusions incidentes du ministre :

Considérant que le vérificateur a relevé dans la notification de redressement datée du
17 août 1994, après avoir identifié les rehaussements auxquels s'appliquait la mauvaise foi, que, compte tenu de la nature des redressements notifiés (comptabilisation de factures ne correspondant pas à des prestations réelles ayant pour objet de minorer les impôts dus au Trésor) et du fait que la société ne pouvait ignorer les faits qui lui sont reprochés, les rappels d'impôt seraient assortis de la majoration pour mauvaise foi prévue à l'article 1729 du code général des impôts ; que, par suite, les majorations pour mauvaise foi devant être regardées comme suffisamment motivées, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif a prononcé la décharge de ces pénalités au motif de l'insuffisance de leur motivation ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen invoqué par la SNC SAEM à l'encontre des pénalités ;

Considérant que les agissements susrappelés reprochés à la société consistant en la comptabilisation de factures ne correspondant pas à des prestations réelles ayant pour objet de minorer les impôts dus au Trésor doivent être regardés comme établis ; que la circonstance que des irrégularités commises en matière de taxe sur la valeur ajoutée peuvent faire l'objet de mesures de régularisation demeure sans incidence sur l'appréciation de la mauvaise foi du contribuable ; que l'administration soutient à bon droit que, compte tenu de la nature des irrégularités commises aussi bien en matière d'impôt sur les sociétés que de taxe sur la valeur ajoutée, la société ne pouvait ignorer les faits qui lui sont reprochés ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de la mauvaise foi de la société ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement en date du 3 mai 2004, le tribunal administratif a prononcé la décharge des majorations pour mauvaise foi infligées à la société et à demander que ces pénalités soient remises à la charge de l'intéressée à concurrence de la somme de
13 411, 10 euros en ce qui concerne la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la société a été assujettie au titre de l'année 1991 et de la somme de 9 391, 35 euros en ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la société pour la période allant du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1993 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SNC SAEM demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE est rejetée.
Article 2 : L'article 1er du jugement en date du 3 mai 2004 du Tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 3 : Les majorations pour mauvaise foi qui ont assorti la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE a été assujettie au titre de l'année 1991 et le complément de taxe sur la valeur ajoutée réclamé à la société au titre de la période allant du 1er janvier 1990 au
31 décembre 1993 sont remises à la charge de la société à concurrence respectivement de la somme de 13 411,10 euros et de la somme de 9 391,35 euros.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC SOCIETE AUXILIAIRE D'ENTREPRISE MEDITERRANEE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
Copie en sera adressée à Me Laurent et à la direction des vérifications nationales et internationales.

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N°04MA01323


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04MA01323
Date de la décision : 06/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SELAS BONTOUX ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2007-12-06;04ma01323 ?
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