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06/05/2008 | FRANCE | N°05MA00836

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 06 mai 2008, 05MA00836


Vu la requête enregistrée le 5 avril 2005, présentée pour M. Georges X, élisant domicile ..., par Me Hérin, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 20 janvier 2005 en tant qu'il a déclaré prescrite sa créance afférente aux heures supplémentaires accomplies entre 1994 et 1996, a limité le quantum des heures supplémentaires accomplies au-delà de 352 heures annuelles et a rejeté sa demande de dommages et intérêts ;

2°) de condamner l'Ecole nationale supérieure d'arts et métiers (ENS

AM) à lui verser 107 582,49 € ,majorés des intérêts au taux légal à compter du 14 janvie...

Vu la requête enregistrée le 5 avril 2005, présentée pour M. Georges X, élisant domicile ..., par Me Hérin, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 20 janvier 2005 en tant qu'il a déclaré prescrite sa créance afférente aux heures supplémentaires accomplies entre 1994 et 1996, a limité le quantum des heures supplémentaires accomplies au-delà de 352 heures annuelles et a rejeté sa demande de dommages et intérêts ;

2°) de condamner l'Ecole nationale supérieure d'arts et métiers (ENSAM) à lui verser 107 582,49 € ,majorés des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 1998, à titre de rappel de traitement, ainsi que 7 622,45 €, majorés des intérêts moratoires, à titre de dommages et intérêts ;

3°/ de condamner l'ENSAM à lui verser 2 500 € au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 73-415 du 27 mars 1973 ;

Vu l'arrêté du 17 août 1973 fixant la liste des écoles nationales d'ingénieurs relevant du ministère de l'éducation nationale prévue à l'article premier du décret n° 73-415 du 27 mars 1973 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er avril 2008 :

- le rapport de M. Gonzales, rapporteur,

- les observations de M. X et de Me Garcia de la SCP d'avocats Chabas et associés pour l'école nationale supérieure d'arts et métiers,

- et les conclusions de M. Brossier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'école nationale supérieure des arts et métiers (ENSAM) à payer à M. X les sommes correspondant aux heures supplémentaires d'enseignement accomplies par ce dernier du 1er janvier 1997 jusqu'au terme de l'année scolaire 1998-1999, en retenant pour cette année scolaire un nombre d'heures supplémentaires inférieur à celui que proposait le requérant, et qu'il a écarté la demande de ce dernier tendant au paiement des heures supplémentaires effectuées au titre des années 1994 au 1er janvier 1997 ; qu'il a en outre rejeté la demande de M. X relative au paiement de dommages et intérêts ; que l'appel principal de l'intéressé tend à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à toutes ses demandes indemnitaires ; que par la voie de l'appel incident, l'ENSAM sollicite le rejet de l'intégralité des demandes présentées par M. X devant le tribunal administratif ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. X a expressément réclamé au tribunal le paiement des heures supplémentaires qu'il a accomplies au titre des années 1994 à 1997 et a maintenu cette demande jusqu'à la fin de la première instance ; que si l'ENSAM a opposé la prescription quadriennale de la créance de M. X à ce titre, il résulte de l'instruction qu'elle a reçu le 14 janvier 1998 un courrier de l'intéressé contestant le mode de calcul de sa rémunération aboutissant à une minoration de sa créance, et demandant l'application du décret susvisé du 27 mars 1973 régissant les modalités de prise en compte des heures supplémentaires effectuées dans le cadre de ses obligations de service ; qu'un tel courrier, qui constitue une réclamation portant sur le principe de la créance litigieuse et comporte des précisions suffisantes pour permettre à l'administration de liquider celle-ci, était de nature à interrompre le cours du délai de prescription quadriennale, lequel ne peut donc être regardé comme expiré à la date de saisine du tribunal administratif par M. X, le 26 octobre 2001 ; qu' en tant qu'il a refusé d'examiner le litige soumis au tribunal sur ce point, le jugement attaqué doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer ce point et d'y statuer, et de se prononcer sur les autres questions en litige en vertu de l'effet dévolutif de l'appel :

Sur le litige relatif au paiement d'heures supplémentaires par l'ENSAM :

Considérant, en premier lieu, qu'au terme de l'article 1er du décret du 27 mars 1973 relatif aux obligations de service hebdomadaire de certains personnels enseignants de l'école nationale supérieure des arts et métiers et des écoles nationales d'ingénieurs assimilées : « (...) Les professeurs techniques (...) de l'enseignement du second degré, affectés dans les écoles nationales d'ingénieurs relevant du ministère de l'éducation nationale dont la liste est fixée par arrêté du ministre de l'éducation nationale, du ministre de l'économie et des finances et du ministre chargé de la fonction publique sont tenus d'effectuer, sans rémunération supplémentaire, un service hebdomadaire d'enseignement déterminé dans les conditions fixées aux articles suivants » ; que l'article 3 du même texte fixe à 11 heures les obligations hebdomadaires de service des professeurs techniques ; que l'ENSAM est au nombre des écoles nationales d'ingénieurs dont la liste a été dressée, en application des dispositions précitées, par un arrêté interministériel du 17 août 1973 ; qu'elle n'entre donc pas dans le champ du décret du 21 mars 1959 qui fixe la durée de l'année universitaire à 39 semaines ; qu'en l'absence de textes réglementaires fixant la durée de l'année dans cette catégorie d'établissement, avant l'intervention du décret du 4 janvier 2001 qui l'a fixée désormais à 35 semaines, il appartenait à chaque établissement de fixer ce nombre de semaines compte tenu, d'une part, des obligations hebdomadaires de service fixées par le décret du 27 mars 1973, d'autre part, de la durée des études dans l'année ; qu'il ressort des pièces du dossier que sur ce fondement, la durée de la scolarité au centre d'enseignement et de recherche d'Aix-en-Provence avait été fixée, pour les années en cause, à 32 semaines ; qu'il suit de là que, mis à part le cas de l'application uniforme du même service hebdomadaire durant toute l'année, pour lequel le nombre des heures supplémentaires éventuelles pouvait être apprécié par semaine, c'est au-delà de l'accomplissement de 352 heures d'enseignement au cours d'une même année que s'ouvrait, pour un professeur technique affecté à l'Ecole nationale supérieure d'arts et métiers, et avant que le décret précité du 27 mars 1973 eût été abrogé par celui du 4 janvier 2001, le droit de percevoir l'indemnité pour heures supplémentaires d'enseignement instaurée par l'article 5 de ce décret ;

Considérant, en deuxième lieu, que si le service d'enseignement dont il s'agit peut comprendre, au terme de l'article 2 du décret précité du 27 mars 1973, des cours, des travaux dirigés et des travaux pratiques et d'expérimentation, il résulte des termes mêmes de l'article 7 de ce décret que seuls « les cours répétés à plusieurs sections d'une même promotion sont comptés une seule fois pour leur durée réelle, les autres fois pour les deux tiers de cette durée » ; qu'aucune autre disposition législative ou réglementaire n'est venue préciser les modalités de calcul du service hebdomadaire pratique des enseignants de l'ENSAM ; que, dans ces conditions, l'école ne saurait utilement se prévaloir d'une circulaire ministérielle du 25 avril 1973 qui contredit irrégulièrement les énonciations du décret précité en assimilant une séance de travaux pratiques et d'expérimentation d'une durée réelle d'une heure et demie à un cours magistral d'une heure ; que M. X est donc fondé à réclamer le paiement intégral des heures supplémentaires qu'il a effectivement assurées au cours de chaque année en litige selon les modalités fixées par le décret du 27 mars 1973 ;

Considérant à cet égard, en troisième lieu, que le tribunal a estimé que M. X avait effectué, entre le 1er janvier 1997 et la fin de l'année universitaire 1996-1997, durant l'année 1997-1998 ainsi que durant l'année 1998-1999, respectivement 65, 61, et 69 heures supplémentaires ; que l'administration ne conteste pas sérieusement ce calcul et que, de son côté, M. X ne fournit au dossier aucun document probant de nature à établir l'insuffisance dudit calcul ; qu'il convient donc de l'adopter pour confirmer le bien-fondé du jugement attaqué sur ce point ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'en l'état des indications fournies par les parties sur ce point, il sera fait une juste appréciation du nombre d'heures supplémentaires effectuées par M. X entre le début de l'année universitaire 1994-1995 et le 1er janvier 1997, en condamnant l'ENSAM à lui payer 65 heures supplémentaires pour chacune des années universitaires 1994-1995, 1995-1996 et pour la période allant du début de l'année universitaire 1996-1997 au 1er janvier 1997 ; que la somme qui lui est due à ce titre devra être assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de sa réclamation indemnitaire, soit le 14 janvier 1998 ;

Considérant, enfin qu'il convient de renvoyer M. X devant l'ENSAM pour la liquidation de sa créance relative au paiement de l'ensemble de ces heures supplémentaires ;

Sur les conclusions aux fins de dommages et intérêts :

Considérant que la demande indemnitaire présentée par M. X et fondée sur la résistance abusive de l'administration n'est pas assortie de justifications ; que ce dernier n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté cette demande ;

Sur l'appel incident de l'ENSAM :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'appel incident de l'ENSAM ne peut qu'être rejeté en tant qu'il conteste le principe de l'indemnisation accordée à M. X par le tribunal et, par voie de conséquence, en tant qu'il demande le remboursement des sommes que l'école a versées à ce titre à l'intéressé ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que l'ENSAM, qui succombe dans la présente instance, ne peut prétendre au remboursement de ses frais de procédure ;

Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'allouer 1 500 € à M. X, à la charge de l'ENSAM, sur le fondement de cet article ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille en date du 20 janvier 2005 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. X tendant au paiement d'heures supplémentaires pour les années 1994-1995, 1995-1996 et pour la période allant du début de l'année scolaire 1996-1997 jusqu'au 1er janvier 1997.

Article 2 : L'École nationale supérieure des arts et métiers est condamnée à payer à M. X les sommes correspondant à 65 heures supplémentaires accomplies au cours de chacune des années universitaires 1994-1995, 1995-1996 et durant la période allant du début de l'année scolaire 1996-1997 jusqu'au 1er janvier 1997.

Article 3 : La créance de M. X sur l'Ecole nationale supérieure des arts et métiers déterminée en application de l'article 2 ci-dessus, sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 14 janvier 1998.

Article 4 : M. X est renvoyé devant l'Ecole nationale supérieure des arts et métiers pour qu'elle procède à la liquidation de sa créance due en application des articles 2 et 3 ci-dessus.

Article 5 : L'Ecole nationale supérieure des arts et métiers versera 1 500 € (mille cinq cents euros) à M. X en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de M. X est rejeté.

Article 7 : L'appel incident de l'Ecole nationale supérieure des arts et métiers est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. Georges X, à l'Ecole nationale supérieure des arts et métiers et au ministre de l'éducation nationale.

N° 05MA00836

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05MA00836
Date de la décision : 06/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GANDREAU
Rapporteur ?: M. Serge GONZALES
Rapporteur public ?: M. BROSSIER
Avocat(s) : HERIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-05-06;05ma00836 ?
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