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04/12/2008 | FRANCE | N°06MA01382

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 04 décembre 2008, 06MA01382


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2006, présentée pour M. Philippe , demeurant ..., par Me Thiery-Secchi ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0204885 du 29 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'administration fiscale à lui restituer les sommes indûment

versées, majorées des intérêts moratoires, conformément aux articles L. 208 et R. 208-1 du livre...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2006, présentée pour M. Philippe , demeurant ..., par Me Thiery-Secchi ;

M. demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0204885 du 29 mars 2006 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1998 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée et des pénalités y afférentes ;

3°) de condamner l'administration fiscale à lui restituer les sommes indûment versées, majorées des intérêts moratoires, conformément aux articles L. 208 et R. 208-1 du livre des procédures fiscales ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..............................................................................................................

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 février 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, qui conclut au rejet de la requête ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2008 :

- le rapport de Mme Menasseyre, premier conseiller,

- les observations de Me Filio, substituant Me Thiery-Secchi, pour le requérant,

- et les conclusions de M. Dubois, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de la réunion du conseil d'administration de la SA Spir communication, qui s'est déroulée le 2 juin 1998, il a été mis fin au mandat social et aux fonctions de M. , son président directeur général salarié ; que le même jour, un accord transactionnel était signé entre ce dernier et la société Sofiouest, actionnaire principal de Spir communication, aux termes duquel l'intéressé percevrait les sommes de 1 250 000 francs à titre d'indemnité de préavis, 3 000 000 francs à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, et 5 750 000 francs à titre d'indemnité transactionnelle, destinée à couvrir l'ensemble de ses préjudices moraux et financiers, et à prévenir toute contestation judiciaire liée à sa révocation ou à son licenciement ; que M. relève régulièrement appel du jugement en date du 29 mars 2006, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 1998, à raison de la réintégration dans ses bases imposables de la somme de 792 633 francs au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, et de la somme de 3 750 000 francs au titre de l'indemnité transactionnelle ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que le requérant fait valoir que le tribunal ayant rendu sa décision le jour même de l'audience, il a été privé de la possibilité de présenter utilement une note en délibéré, et que le jugement a ainsi été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du tribunal a été rendue sur le siège et que la note en délibéré produite par le conseil du requérant a été enregistrée au greffe du tribunal le 31 mars 2006, deux jours après la lecture du jugement ;

Considérant que si la lecture sur le siège de la décision n'est pas incompatible avec les exigences du respect du principe du contradictoire, c'est à la condition que les parties aient été dûment averties, au plus tard lors de l'audience publique, de ce que la lecture aurait lieu le jour-même ; que le respect de cette exigence s'impose, indépendamment du contenu de l'argumentation développée par le commissaire du gouvernement au cours de l'audience publique, et notamment du fait qu'elle contient ou non de nouveaux éléments de fait ou de droit ; qu'en l'espèce il ne ressort pas des pièces du dossier que les parties aient été informées de ce que la lecture du jugement aurait lieu sur le siège ; que M. est, par suite, fondé à soutenir que le jugement critiqué a été rendu à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. devant le Tribunal ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'en vertu de l'article L.59 A du code général des impôts, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est pas compétente en ce qui concerne le détermination des revenus imposables dans la catégorie des traitements et salaires, hormis le cas où le différend porte sur le caractère excessif d'une rémunération allouée à un dirigeant de société ; qu'ainsi, dans la présente affaire, où il s'agit seulement pour le contribuable de justifier que les sommes litigieuses avaient vocation à réparer un préjudice autre que celui résultant de la perte de son revenu il n'y avait pas lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, de saisir la commission départementale ; qu'est à cet égard indifférente la circonstance que la commission ait pu être compétente sur une partie des impositions en litige, aujourd'hui dégrevées ; qu'il en résulte que M. n'est pas fondé à soutenir que les impositions litigieuses ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant que les sommes versées à un salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail sont normalement imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des traitements et salaires, dans la mesure où elles ne réparent pas un préjudice autre que celui résultant pour le salarié de la perte de son revenu ; qu'il appartient à M. , qui soutient que les circonstances qui ont présidé à son départ confèrent aux sommes litigieuses, au moins en partie, le caractère de dommages-intérêts non imposables, de justifier de l'existence de préjudices autres que ceux découlant de la perte de ses fonctions ;

Considérant en premier lieu qu'à supposer même établi le caractère abusif du licenciement dont a fait l'objet M. , qui, au demeurant n'a pas contesté cette mesure devant les juridictions compétentes, une telle appréciation ne s'impose pas au juge de l'impôt quant à la qualification à donner à l'indemnité reçue à l'occasion de sa fin de fonctions ;

Considérant, en deuxième lieu que M. ne saurait soutenir utilement que la doctrine et la législation applicables en 2000 ne lui sont pas applicables, dès lors que l'imposition contestée ne repose pas sur l'application des textes auxquels il fait référence, mais sur le fait que la réalité des préjudices moraux ou autres censés être réparés par l'indemnité transactionnelle n'a pas été établie ;

Considérant, en troisième lieu, que le requérant ne saurait davantage invoquer les qualifications implicitement données par l'URSSAF aux sommes en litige, qualifications qu'il infère de la circonstance que ces dernières n'ont pas donné lieu à un rappel de cotisations ; qu'il ne saurait pas plus invoquer les qualifications retenues par l'administration fiscale lors du licenciement de son prédécesseur, dès lors qu'il n'établit pas que sa situation personnelle serait en tous points comparable à celle de ce dernier ;

Considérant en quatrième lieu que si M. soutient également que les sommes qu'il a reçues avaient vocation à réparer les troubles qui ne manqueraient pas de survenir, du fait de son départ forcé, dans ses conditions d'existence, il n'établit nullement que l'indemnité litigieuse ait eu, même pour partie, vocation à compenser financièrement ses difficultés conjugales futures ou ses contre-performances sportives à venir ;

Considérant toutefois qu'il résulte de l'instruction que M. , titulaire d'un DUT, a été contraint, de façon relativement brutale, de quitter le mandat social et l'emploi qu'il occupait au sein de la SA Spir communication, société créée par son frère, qu'il avait intégrée en tant que simple commercial en 1981, et dont il avait gravi les échelons jusqu'à en devenir le président en 1995 ; que les circonstances de cette rupture, fondée sur la difficulté pour l'intéressé à concilier les exigences de la pratique d'un sport de haut niveau avec les relations de confiance et le dévouement nécessaires à l'exercice de ses fonctions pouvaient être regardées comme de nature à ternir sa réputation professionnelle, et à freiner sa réinsertion ultérieure ; que dans ces circonstances, et alors même que l'accord transactionnel prévoyant en sa faveur le versement d'une indemnité transactionnelle de 5 750 000 francs comportait un engagement de non concurrence, cette indemnité ne saurait être regardée comme ayant eu pour unique objet de compenser les seuls préjudices pécuniaires résultant pour M. de sa fin de fonctions ; qu'il sera fait, en l'espèce, une juste appréciation des préjudices non pécuniaires ainsi indemnisés en les évaluant au quart de ladite indemnité, soit à la somme de 1 437 500 francs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est seulement fondé, dans cette mesure, à demander la réduction de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1998 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 29 mars 2006 est annulé.

Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. au titre de l'année 1998 est réduite d'une somme de 219 145,46 euros (1 437 500 francs) .

Article 3 : M. est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 2.

Article 4 : L'Etat versera à M. une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N°06MA01382


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06MA01382
Date de la décision : 04/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. DARRIEUTORT
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : THIERY-SECCHI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2008-12-04;06ma01382 ?
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