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30/03/2010 | FRANCE | N°08MA00268

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 30 mars 2010, 08MA00268


Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2008, présentée pour Mme Sandrine A, demeurant ... par le cabinet Coudray, avocats à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0403723 du 22 novembre 2007 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 2 000 euros l'indemnité due en réparation de ses préjudices moraux et des troubles dans les conditions d'existence, a estimé que le préjudice matériel devant être réparé était celui né pour une période limitée à un an (du 1er décembre 2003 au 1er décemb

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Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2008, présentée pour Mme Sandrine A, demeurant ... par le cabinet Coudray, avocats à la Cour ; Mme A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0403723 du 22 novembre 2007 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 2 000 euros l'indemnité due en réparation de ses préjudices moraux et des troubles dans les conditions d'existence, a estimé que le préjudice matériel devant être réparé était celui né pour une période limitée à un an (du 1er décembre 2003 au 1er décembre 2004) et en tant qu'il n'a pas statué sur sa demande tendant à ce que sa carrière soit reconstituée et à ce que les sommes devant lui être versées soient assorties des intérêts ;

2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à procéder à la reconstitution de sa carrière pour la période allant du 1er décembre 2003 jusqu'à la date de sa réintégration effective sur un emploi à temps plein ;

3°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à lui verser une indemnité en réparation de son préjudice matériel équivalente à la différence entre la rémunération qu'elle aurait perçue si elle avait été à temps plein pour la période allant du 1er décembre 2003 jusqu'à la date de sa réintégration effective sur un emploi à temps plein, sauf à déduire les rémunérations effectivement perçues par elle pendant la même période ;

4°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ;

5°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à lui verser les intérêts sur les sommes précitées, calculées au taux légal à compter du 19 mai 2004, date d'enregistrement de la requête introductive d'instance, jusqu'au 20 mai 2005 et à chacune des dates anniversaires postérieures ;

6°) de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à lui verser la somme de 2 152,80 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2010 :

- le rapport de M. Fédou, rapporteur,

- et les conclusions de M. Brossier, rapporteur public ;

Considérant que Mme A interjette appel du jugement en date du 22 novembre 2007 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a limité à la somme de 2 000 euros l'indemnité due en réparation de ses préjudices moraux et des troubles dans les conditions d'existence, a estimé que le préjudice matériel devant être réparé était celui né pour une période limitée à un an (du 1er décembre 2003 au 1er décembre 2004) et en tant qu'il n'a pas statué sur sa demande tendant à ce que sa carrière soit reconstituée et à ce que les sommes devant lui être versées soient assorties des intérêts ; que, par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris demande la réformation du même jugement en ce qu'il a fait droit aux conclusions de Mme A tendant à la réparation de ses préjudices matériel et moral ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris :

Considérant, d'une part, que si la victime d'un dommage n'est pas recevable à saisir directement le juge de conclusions tendant à la réparation de chefs de préjudices dont elle n'a pas fait état dans sa demande indemnitaire préalable, il est constant que sa réclamation en date du 27 janvier 2004 mentionne expressément que la mesure attaquée qui la place en situation de travail à temps partiel à 70% lui porte préjudice tant financièrement que moralement et qu'elle se réserve d'éventuelles actions ultérieures (...) pour préjudice moral ; qu'ainsi, le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris n'est pas fondé à soutenir que les conclusions de Mme A tendant à la réparation de son préjudice moral auraient dû être déclarées irrecevables par les premiers juges, faute de liaison du contentieux sur une telle demande ;

Considérant, d'autre part, que la demande de Mme A tendant à la réparation de son préjudice matériel pour une période allant du 1er décembre 2003 jusqu'à la date de sa réintégration effective sur un emploi à temps plein ne constitue qu'un développement et un complément de sa demande initiale, limitée à la période allant du 1er décembre 2003 à la date de sa réclamation préalable du 27 janvier 2004 ; que le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris n'est dès lors pas davantage fondé à soutenir qu'une telle demande serait irrecevable faute de liaison du contentieux ;

Sur les demandes de réformation du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et qu'il n'est au demeurant pas contesté, que la situation de travail à temps partiel de Mme A a perduré au-delà de la date du 1er décembre 2004 ; que, par suite, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont limité à la période du 1er décembre 2003 au 1er décembre 2004 celle au titre de laquelle devait être déterminé le montant de sa réparation au titre du préjudice matériel subi ; que le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris ne peut utilement soutenir à ce sujet que l'emploi correspondant avait été supprimé et qu'en absence de service fait, Mme A n'aurait pas droit à une indemnité ; qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir, en l'absence de toute sanction disciplinaire, que l'attitude fautive de Mme A dans son comportement professionnel aurait été à l'origine de la limitation de la durée de son service et l'exonèrerait ainsi de sa responsabilité ; qu'il y a lieu en conséquence de faire droit sur ce point aux conclusions de Mme A en la renvoyant devant le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris pour procéder à la liquidation de sa créance résultant de son préjudice matériel ainsi qu'à la reconstitution de sa carrière pour la période allant du 1er décembre 2003 au 17 janvier 2008, date de sa réintégration effective sur un emploi à temps complet et de réformer, dans cette mesure, le jugement du tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que la situation illégale imposée à Mme A par l'exercice d'une activité à temps partiel alors qu'elle avait droit à un exercice à temps complet s'est prolongée au-delà de la date du 1er décembre 2004 retenue à tort par les premiers juges ; qu'il sera fait dès lors une juste appréciation du préjudice moral subi par Mme A, résultant des troubles dans ses conditions d'existence, en portant la somme due à ce titre de 2 000 euros à 4 000 euros ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, de réformer le jugement du tribunal administratif de Marseille ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu de rejeter par voie de conséquence l'ensemble des conclusions incidentes présentées par le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris tendant à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a fait droit à la demande d'indemnisation de la requérante au titre de ses préjudices matériel et moral ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

Considérant que Mme A a droit aux intérêts de la créance sus évoquée résultant de son préjudice matériel et de la somme de 4 000 euros en réparation de son préjudice moral à compter du 19 mai 2004, date de l'enregistrement de sa requête introductive de première instance ; qu'elle a demandé la capitalisation des intérêts à compter du 20 mai 2005 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ; que le surplus de ses conclusions tendant à l'application d'intérêts au taux majoré pour la part de la condamnation prononcée par le tribunal administratif doit, à l'inverse, être écarté ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme A, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamnée à payer au centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant d'autre part qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris à verser à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions précitées ;

DECIDE :

Article 1er : Mme A est renvoyée devant le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris pour qu'il soit procédé à la reconstitution de sa carrière et à la liquidation de sa créance résultant de son préjudice matériel pour la période allant du 1er décembre 2003 au 17 janvier 2008, date de sa réintégration effective sur un emploi à temps complet.

Article 2 : La créance évoquée à l'article 1er du présent arrêt sera assortie des intérêts légaux à compter du 19 mai 2004. Les intérêts échus à la date du 20 mai 2005 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire

eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La somme que le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris a été condamné à verser à Mme A en réparation de son préjudice moral est portée de 2 000 (deux mille) euros à 4 000 (quatre mille) euros, assortie des intérêts légaux à compter du 19 mai 2004. Les intérêts échus à la date du 20 mai 2005 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille en date du 22 novembre 2007 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er à 3 du présent arrêt.

Article 5 : Le centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris versera à Mme A une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 7 : Les conclusions incidentes du centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris et ses conclusions tendant à la condamnation de Mme A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sandrine A, au centre hospitalier intercommunal de Cavaillon-Lauris et au ministre de la santé et des sports.

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N° 08MA002682


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA00268
Date de la décision : 30/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Guy FEDOU
Rapporteur public ?: M. BROSSIER
Avocat(s) : CABINET OLIVIER COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-03-30;08ma00268 ?
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