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01/06/2010 | FRANCE | N°08MA02219

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 01 juin 2010, 08MA02219


Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2008, présentée pour M. Jean-Baptiste A, demeurant ... par Me Vaissière, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0603274 du 28 février 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 3 000 euros la condamnation de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne en réparation de son préjudice pour licenciement abusif ;

2°) de condamner in solidum l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnel

le agricole de Carcassonne et le centre de formation des apprentis agricoles...

Vu la requête, enregistrée le 25 avril 2008, présentée pour M. Jean-Baptiste A, demeurant ... par Me Vaissière, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0603274 du 28 février 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 3 000 euros la condamnation de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne en réparation de son préjudice pour licenciement abusif ;

2°) de condamner in solidum l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne et le centre de formation des apprentis agricoles de l'Aude à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation de son préjudice, outre la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions ;

Vu l'arrêté du vice-président du Conseil d'État, en date du 27 janvier 2009, fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 2010 :

- le rapport de M. Fédou, rapporteur,

- et les conclusions de M. Brossier, rapporteur public ;

Considérant que M. A interjette appel du jugement en date du 28 février 2008 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a limité à la somme de 3 000 euros la condamnation de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne en réparation de son préjudice pour licenciement abusif ; qu'il demande la condamnation solidaire de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne et du centre de formation des apprentis agricoles de l'Aude à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation de son préjudice, outre la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur la recevabilité :

Considérant, d'une part, que la circonstance qu'en application des dispositions de l'article R. 811-10 du code de justice administrative, le ministre intéressé soit seul habilité à présenter devant la cour administrative d'appel les mémoires et observations produits au nom de l'État n'a pas pour effet de rendre irrecevables les conclusions indemnitaires formées par M. A contre l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne ; que la fin de non recevoir opposée par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche contre lesdites conclusions doit dès lors être écartée ;

Considérant, d'autre part, que le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche est en revanche fondé à soutenir que les conclusions indemnitaires présentées contre le centre de formation des apprentis agricoles de l'Aude, lequel ne dispose pas de l'autonomie administrative et financière, sont irrecevables ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant que le moyen retenu en première instance par les premiers juges,

tiré de ce que le non renouvellement du contrat de M. A devait être regardé

comme entaché d'une illégalité fautive engageant la responsabilité de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne dès lors que les motifs avancés de la réorganisation du service et des difficultés financières de l'établissement n'étaient pas établis, n'est pas utilement contesté en défense par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et notamment

pas des pièces produites par les parties devant les premiers juges, que M. A ait exprimé le souhait de mettre fin à son activité au sein de l'établissement dans lequel il travaillait depuis novembre 1997, mais simplement qu'il ait discuté avec son employeur,

lors d'entretiens tenus les 29 août et 6 septembre 2005, d'une possible rupture à l'amiable de son contrat à la suite de l'annonce par ce dernier que ledit contrat ne serait pas renouvelé ; que M. A a ensuite, par deux lettres du 9 septembre et du 23 septembre 2005 puis dans le cadre du débat contentieux, formellement nié avoir exprimé le souhait de mettre un terme de sa propre initiative à son activité ; qu'ainsi, le motif opposé par l'administration doit être regardé comme manquant en fait ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, retenu la responsabilité pour faute de l'administration à la suite de la rupture illégale du contrat à durée déterminée de M. A ;

Considérant que M. A critique le jugement attaqué en ce qu'il a limité à la somme de 3 000 euros la réparation de son préjudice ; qu'il fait valoir à ce sujet qu'il a subi, à la suite de l'annonce de la rupture de son contrat de travail, un syndrome anxio-dépressif du 6 septembre au 20 octobre 2005, qu'il a perdu une chance sérieuse d'obtenir un contrat à durée indéterminée, n'a pas retrouvé d'emploi et touche une allocation de solidarité spécifique très inférieure au salaire qu'il touchait au sein de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne, enfin qu'il a été placé dans uns situation de grande précarité qui l'a contraint à vendre son appartement à Carcassonne ;

Considérant d'une part que, dans les circonstances particulières de l'espèce, et notamment des conditions dans lesquelles est intervenue la rupture du contrat de travail de M. A, en lien direct avec le syndrome anxio-dépressif qu'il a subi, de la période de chômage de trois ans qu'a connue le requérant et de l'obligation consécutive de vendre son appartement, M. A est fondé à soutenir que son préjudice moral a été insuffisamment évalué par les premiers juges ; qu'il y a lieu de porter le montant de la réparation de ce préjudice à la somme de 6 000 euros ;

Considérant, d'autre part, que si le requérant fait valoir qu'il a perdu une chance sérieuse d'obtenir un contrat à durée indéterminée, il est constant qu'il ne peut se prévaloir à cet égard ni des dispositions de l'article 12 de la loi du 26 juillet 2005 susvisée, qui excluent de son champ d'application les contrats conclus pour la mise en oeuvre d'un programme de formation, d'insertion, de reconversion professionnelle ou de formation professionnelle d'apprentissage ni de celles de l'article 13 de la même loi, dès lors que la condition posée au II, 1° de cet article ( être âgé d'au moins cinquante ans ) n'était remplie par M. A ni au 1er juin 2004 ni au terme de son contrat, le 17 novembre 2005 ; qu'il est en revanche fondé à solliciter la réparation de son préjudice financier pour la période du 18 novembre 2005 au 18 novembre 2008, dans la mesure où il aurait dû bénéficier d'un nouveau contrat à durée déterminée dans la période précitée ;

Considérant que M. A invoque à l'appui de cette prétention la différence entre l'aide au retour à l'emploi et l'allocation de solidarité spécifique qu'il a perçus et le salaire qu'il touchait auparavant de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne ; qu'il résulte des pièces versées à l'instance par le requérant qu'il a touché en septembre 2005 un revenu net de 1 570 euros et qu'il aurait dès lors dû percevoir sur la période en cause de trente-six mois 57 500 euros environ ; que s'il ne démontre pas avoir été en situation de chômage de novembre 2005 à janvier 2006, il a perçu de février 2006 à octobre 2007 une aide au retour à l'emploi de 1 050 euros mensuels en moyenne puis de novembre 2007 à avril 2008 une allocation de solidarité spécifique de 440 euros mensuels en moyenne, soit environ 24 500 euros ; qu'il en résulte que la perte financière subie par M. A, correspondant à la différence entre le salaire qu'il percevait de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne et les aides reçues, doit être évaluée à la somme de 33 000 euros ;

Considérant qu'il y a lieu en conséquence de réformer le jugement du tribunal administratif de Montpellier en ce qu'il a limité à la somme de 3 000 euros la condamnation de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne en réparation du préjudice pour licenciement abusif subi par M. A, de condamner l'établissement public précité à lui verser la somme totale de 39 000 euros et de rejeter le surplus des conclusions indemnitaires de M. A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne à verser à M. A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions précitées ;

DECIDE :

Article 1er : L'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne est condamné à verser à M. A la somme de

39 000 (trente neuf mille) euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 28 février 2008 est réformé en ce qu'il a limité la condamnation de l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne à la somme de 3 000 euros.

Article 3 : L'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne versera à M. A une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Baptiste A, à l'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole de Carcassonne, au centre de formation des apprentis agricoles de l'Aude et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.

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N° 08MA022192


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA02219
Date de la décision : 01/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Guy FEDOU
Rapporteur public ?: M. BROSSIER
Avocat(s) : VAISSIÈRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2010-06-01;08ma02219 ?
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