La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2011 | FRANCE | N°08MA03229

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 15 février 2011, 08MA03229


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2008 sur télécopie confirmée le 11 suivant, présentée par Me Véronique Lesne-Bernat, avocat, pour M. Pierre A, élisant domicile ... ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606290 rendu le 23 avril 2008 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 39 987,34 euros en réparation des préjudices subis du fait d'une infection nosocomiale prétendument contractée à l'hôpital Salvator ;

2°) d

e condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille au versement d'une somme d...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2008 sur télécopie confirmée le 11 suivant, présentée par Me Véronique Lesne-Bernat, avocat, pour M. Pierre A, élisant domicile ... ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606290 rendu le 23 avril 2008 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille à lui verser la somme de 39 987,34 euros en réparation des préjudices subis du fait d'une infection nosocomiale prétendument contractée à l'hôpital Salvator ;

2°) de condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille au versement d'une somme de 35 551,66 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis du fait de l'infection nosocomiale sus-évoquée, assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 juin 2006 ;

3°) de déclarer la décision à intervenir opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Var ;

4°) de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Vu l'arrêté du 10 novembre 2010 relatif au montant de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 relatif au rapporteur public des juridictions administratives et au déroulement de l'audience devant ces juridictions, et notamment son article 2 ;

Vu l'arrêté du 27 janvier 2009 pris par le Vice-Président du Conseil d'Etat autorisant la cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2010 :

- le rapport de Mme Busidan, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Fedi, rapporteur public ;

Considérant que M. Pierre A interjette appel du jugement rendu le 23 avril 2008 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à être indemnisé des préjudices subis du fait d'une infection nosocomiale prétendument contractée à l'hôpital Salvator, dépendant de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Var demande également la réformation de ce jugement ;

Sur la responsabilité de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille :

Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, (...)tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.// Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise rédigé le 5 juillet 2005, que l'opération de l'adénome de la prostate, pour laquelle M. A était entré à l'hôpital Salvator le 30 mars 2003 et qui a été effectuée le 31 mars 2003, avait été précédée le 22 mars 2003 d'un examen cytobactériologique des urines mettant en évidence des cultures stériles ; que l'hospitalisation s'est poursuivie avec les soins apportés de manière classique en pareil cas (irrigation continue par cathéter sus-pubien et sonde trans-urétrale, assortie de lavages vésicaux répétés) ; que, cependant, comme M. A se trouvait par ailleurs sous un traitement rendu nécessaire par une prothèse valvulaire cardiaque placée en février 2001, une endoscopie intra-urétrale a dû être effectuée le 10 avril 2003 pour évacuer les caillots et compléter l'hémostase ; que, durant cette intervention, M. A a fait un collapsus avec choc septique par septicémie à Escherichia Coli, qui a conduit l'intéressé en réanimation jusqu'au 29 avril 2003, où il a subi plusieurs autres complications liées à la réanimation (pneumopathie avec colonisation pulmonaire à staphylocoque, trachéotomie le 15 avril avec arrêt de la ventilation le 22 avril et insuffisance rénale nécessitant plusieurs dialyses) ; que, transféré en service cardiologique à compter du 29 avril, où il a fait des épisodes de bradycardie et de tachycardie, il est revenu à partir du 6 mai 2003 en service urologique, avant d'être conduit le 26 mai au centre de rééducation fonctionnelle Léon Béraud d'où il est sorti un mois plus tard, le 27 juin 2003 ;

Considérant qu'il résulte de la chronologie des faits sus-rappelée que l'infection subie par M. A a été contractée dans l'établissement de santé, dès lors que les examens urinaires de l'appelant étaient stériles avant l'adénomectomie prostatique et que l'infection s'est déclenchée à l'hôpital dans les suites de l'opération, et de manière virulente à l'occasion de la manoeuvre endoscopique ; que, par suite, l'infection doit être regardée comme nosocomiale ; qu'à supposer que M. A ait été porteur du germe responsable de l'infection - ce qu'au demeurant l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille n'établit pas -, le caractère endogène du germe ne peut constituer une des causes étrangères visées par les dispositions précitées, susceptible d'exonérer l'établissement de sa responsabilité, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que ledit germe aurait constitué un foyer infectieux pré-existant aux actes effectués par l'hôpital ; que, par suite, l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille est responsable des conséquences dommageables de l'infection nosocomiale que M. A a contractée à l'hôpital Salvator ;

Sur l'évaluation du préjudice subi par M. A :

En ce qui concerne le préjudice patrimonial :

S'agissant des dépenses de santé exposées par la caisse primaire d'assurance maladie

du Var :

Considérant que si la caisse primaire d'assurance maladie du Var produit une liste des débours exposés pour son assuré pour un montant global de 54 494,20 euros, seules les dépenses exposées à hauteur de 33 977 euros, correspondant à la période d'hospitalisation de M. A en service de réanimation du 10 au 29 avril 2003, peuvent être regardées, une fois rapprochées des éléments figurant dans l'expertise sus-évoquée, comme présentant un lien direct et certain avec les complications dues à l'infection nosocomiale dont le patient a été victime ; qu'il y a lieu d'allouer cette somme à la caisse primaire d'assurance maladie ;

S'agissant des dépenses exposées par M. A :

Considérant M. A demande que lui soient remboursés 2 000 euros de frais exposés pour l'assistance d'un médecin-conseil lors de l'expertise dont il a fait l'objet, 182,90 euros de frais de déplacement, ainsi que 118,76 euros de frais de reproduction et d'envoi de son dossier médical ; que s'agissant des premiers, il n'établit pas être la personne qui a réglé la note d'honoraires de ce praticien ; que s'agissant des deuxièmes, il ne démontre pas avoir habité Valence aux dates concernées, alors qu'il indique que les billets SNCF dont il réclame le remboursement étaient établis au départ de cette ville et que la carte d'identité de son épouse mentionne un domicile à Toulon depuis 2000 ; qu'enfin s'agissant des troisièmes, il justifie par les pièces produites d'un montant de frais s'élevant seulement à la somme de 92,06 euros ;

En ce qui concerne les préjudices personnels :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise précité, que le déficit fonctionnel temporaire subi par M. A a duré de manière certaine jusqu'à sa sortie du centre de rééducation ; qu'il en sera fait une juste appréciation par l'attribution d'une somme de 1 000 euros ; que l'expert ayant évalué à 4 sur 7 les souffrances endurées par l'appelant, et à 14 % le déficit fonctionnel permanent, la réparation de ces préjudices s'opèrera par le versement de sommes respectivement fixées à 6 000 euros et 14 000 euros ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice esthétique subi, évalué à 1 sur 7 en accordant à l'intéressé une indemnité de 300 euros ; que, cependant en l'absence au dossier d'élément précis de nature à établir que M. A s'adonnait à une activité d'agrément caractérisée, il n'est pas fondé à obtenir la réparation du préjudice d'agrément qu'il allègue ;

Sur l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie du Var a droit à l'indemnité forfaitaire prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dont le montant revalorisé par l'arrêté du 10 novembre 2010 susvisé, s'élève à 980 euros à la date de la présente décision ; qu'il y a lieu de mettre cette somme à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A et la caisse primaire d'assurance maladie du Var sont respectivement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté l'ensemble de leurs conclusions indemnitaires ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il a lieu de mettre à la charge de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille la somme totale de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement rendu par le tribunal administratif de Marseille le 23 avril 2008 est annulé.

Article 2 : L'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille est condamnée à verser, d'une part à M. Pierre A la somme de 21 392,06 euros (vingt et un mille trois cent quatre vingt-douze euros six centimes), d'autre part à la caisse primaire d'assurance maladie du Var la somme de

34 957 euros ( trente-quatre mille neuf cent cinquante-sept euros).

Article 3 : L'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille versera à M. A la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. A et par la caisse primaire d'assurance maladie du Var sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pierre A, à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille, à la caisse primaire d'assurance maladie du Var et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

''

''

''

''

N° 08MA032292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA03229
Date de la décision : 15/02/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Hélène BUSIDAN
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : LESNE-BERNAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-02-15;08ma03229 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award