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17/11/2011 | FRANCE | N°08MA01554

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 17 novembre 2011, 08MA01554


Vu le recours du MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré le 20 mars 2008 au greffe de la Cour administrative de Marseille, sous le n°08MA01554 ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement n°0620549 du Tribunal administratif de Nîmes en date du 8 janvier 2008 annulant l'arrêté du 9 décembre 2005 du préfet de Vaucluse refusant à M. A l'autorisation d'exploiter une superficie de vingt-sept hectares et dix-huit centiares de terres ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu l'article 1er de ...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ALIMENTATION, DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE, enregistré le 20 mars 2008 au greffe de la Cour administrative de Marseille, sous le n°08MA01554 ;

Le ministre demande à la Cour d'annuler le jugement n°0620549 du Tribunal administratif de Nîmes en date du 8 janvier 2008 annulant l'arrêté du 9 décembre 2005 du préfet de Vaucluse refusant à M. A l'autorisation d'exploiter une superficie de vingt-sept hectares et dix-huit centiares de terres ;

............................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu l'article 1er de l'arrêté du 27 janvier 2009 qui autorise la Cour administrative d'appel de Marseille à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l'article 2 du décret du 7 janvier 2009, situant l'intervention du rapporteur public avant les observations des parties ou de leurs mandataires ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2011 :

- le rapport de M. Salvage, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Chenal-Peter, rapporteur public ;

Considérant que M. A a demandé au préfet de Vaucluse l'autorisation d'exploiter, en conséquence d'une reprise partielle, un terrain précédemment donné à bail à M. B ; que le 8 février 2002 le préfet a refusé cette autorisation ; que par un jugement du 18 octobre 2005, le Tribunal administratif de Nîmes a annulé cette décision pour insuffisance de motivation et a enjoint au préfet de prendre une nouvelle décision dans un délai de deux mois ; que le 9 décembre 2005, le préfet a, de nouveau, refusé l'autorisation sollicitée ; que par jugement du 8 janvier 2008, le Tribunal administratif a annulé cette décision. ; que le ministre de l'agriculture et de la pêche interjette appel de ce jugement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L.331-2 du code rural, dans sa version applicable en l'espèce : Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : (...) 2° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles ayant pour conséquence : a) De supprimer une exploitation agricole dont la superficie excède un seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures et compris entre le tiers et une fois l'unité de référence définie à l'article L.312-5, ou de ramener la superficie d'une exploitation en deçà de ce seuil. (...) ; que selon les dispositions de l'article L.312-5 du même code : L'unité de référence est la surface qui permet d'assurer la viabilité de l'exploitation compte tenu de la nature des cultures et des ateliers de production hors sol ainsi que des autres activités agricoles. Elle est fixée par l'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, pour chaque région naturelle du département par référence à la moyenne des installations encouragées au titre de l'article L.330-1 au cours des cinq dernières années. Elle est révisée dans les mêmes conditions. ; que l'article 4 de l'arrêté du 9 septembre 2004 du préfet de Vaucluse portant révision du schéma directeur des structures pour le département de Vaucluse fixe le seuil mentionné à l'article L.331-2 du code rural sus rappelé à 40 % de l'unité de référence ; que l'article 3 du même texte fixe une unité de référence par nature de culture ;

Considérant que, pour déterminer, en application du a) du 2° de l'article L.331-2, les conséquences de l'agrandissement ou de la réunion d'exploitations agricoles et, par suite, la nécessité d'une autorisation préalable, il convient de prendre en compte la totalité de la superficie de l'exploitation qui se trouverait supprimée ou réduite par l'effet de l'opération, quelles que soient les cultures pratiquées et en y intégrant, le cas échéant, les ateliers de production hors sol après application du coefficient d'équivalence fixé par arrêté ministériel ; que si le préfet fixe une unité de référence spécifique, exprimée en superficie, pour chaque nature de culture, il convient de calculer, pour chaque culture pratiquée sur l'exploitation, la proportion de l'unité de référence correspondante, la somme des résultats obtenus représentant, en proportion de l'unité de référence, la superficie de l'exploitation pondérée en fonction de la nature des cultures ;

Considérant, en l'espèce, qu'avant la reprise projetée, M. B bénéficiait, or landes, d'une surface de 14,72 hectares en polyculture, représentant 0,24 unité de référence applicable à cette nature de culture ; de 8,56 hectares de vignes côte du Lubéron , soit 0,33 unité de référence, et de 6,86 hectares de vignes raisins de table représentant 0,28 unité référence, représentant au total 0,87 unité de référence, chiffre supérieur au seuil sus mentionné de 40 % ; qu'après la reprise projetée, M. B ne disposerait plus que de 3,37 hectares, en polyculture, soit 0,05 unité de référence et 3,93 hectares, de vignes, soit 0,17 unité de référence, soit au total 0,22 unité de référence ; que, par suite, la reprise envisagée par M. A était bien soumise à une autorisation d'exploiter en application des dispositions du a) de l'article L.331-2 du code rural ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif s'est fondé sur le motif que l'opération n'était pas soumise à autorisation pour annuler la décision contestée du préfet de Vaucluse ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Nîmes ;

Considérant, en premier lieu, que si dans son jugement du 18 novembre 2005, le Tribunal administratif de Marseille a enjoint au préfet des Bouches du Rhône, et non au préfet de Vaucluse, de prendre une nouvelle décision, il ne ressort pas de la lecture de ce jugement qu'il ait souhaité déroger aux règles de compétences définies notamment à l'article R.331-4 du code rural ; que l'injonction en cause doit ainsi être regardée comme entachée d'erreur matérielle ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué ne peut dès lors qu'être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que contrairement à ce que soutient M. A l'avis de la commission départementale d'orientation agricole, qui est suffisamment motivée, est visé par la décision contestée ;

Considérant, en troisième lieu, que la décision du préfet qui mentionne que M. B correspond au premier rang de priorité (évincé) et M. A au second (installation jeune agriculteur) et que la situation familiale de M. B est prioritaire par rapport à celle de M. A permet au demandeur de l'autorisation de vérifier que, le cas échéant, l'ordre des priorités lui a été opposé à bon droit au regard de la règlementation applicable ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.331-3 du code rural : L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : /1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; (...) /4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...) ;

Considérant que la décision attaquée du préfet de Vaucluse a rejeté la demande d'autorisation formulée par M. A au motif que, au regard de l'ordre des priorités applicable au département, ce dernier, jeune agriculteur souhaitant s'installer, relevait du second rang, alors que l'exploitant en place, évincé, relevait du premier rang ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B ait présenté une candidature concurrente à celle de M. A ou ait contesté la reprise envisagée ; que le préfet ne pouvait dès lors pas, sans commettre une erreur de droit, rejeter la demande de ce dernier au motif que M. B était prioritaire ;

Considérant, toutefois, que pour établir que la décision attaquée était légale, le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE invoque dans sa requête introductive d'appel un autre motif tiré de ce que le refus pouvait être opposé à M. A pour éviter le démembrement d'une exploitation viable, qui est l'une des orientations définie par le schéma directeur des structures agricoles du département de Vaucluse ; qu'il résulte de ce qui a été précédemment dit que le projet de reprise de M. A aurait pour effet de faire chuter la superficie exploitée par M. B à un seuil inférieur au plancher fixé par le schéma directeur et donc à rendre, a priori, non viable sa propre exploitation ; que ce motif pouvait dès lors fonder légalement la décision querellée ; qu'il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé initialement sur ce motif ; que la commission départementale d'orientation agricole saisie pour avis s'est prononcée sur l'ensemble de la situation de l'intéressé en disposant de tous les éléments de faits relatifs à la situation des protagonistes ; que M. A ne peut ainsi prétendre que, à défaut de saisir à nouveau de son cas cette commission, il serait privé d'une garantie procédurale ; qu'il y a dès lors lieu de procéder à la substitution de motif demandée ; qu'au regard de ce qui a été précédemment dit, ladite décision n'est pas entachée d'erreur d'appréciation en retenant ce nouveau motif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nîmes a annulé l'arrêté du 9 décembre 2005 du préfet de Vaucluse refusant à M. A l'autorisation d'exploiter une superficie de vingt-sept hectares et dix-huit centiares de terres ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative: Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. A quelque somme que ce soit au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nîmes en date du 8 janvier 2008 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. A devant le Tribunal administratif de Nîmes et devant la Cour de céans sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE, DE LA RURALITE ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et à M. Ralph A.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08MA01554
Date de la décision : 17/11/2011
Type d'affaire : Administrative

Analyses

03-03-03-01 Agriculture, chasse et pêche. Exploitations agricoles. Cumuls. Cumuls d'exploitations.


Composition du Tribunal
Président : M. FERULLA
Rapporteur ?: M. Frédéric SALVAGE
Rapporteur public ?: Mme CHENAL-PETER
Avocat(s) : DEBEAURAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2011-11-17;08ma01554 ?
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