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15/06/2012 | FRANCE | N°09MA02990

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 15 juin 2012, 09MA02990


Vu la requête, enregistrée le 3 août 2009, présentée pour M. François A, ..., par la SCP de Angelis-Semidei-Vuilquiez-Habart-Melki-Bardon ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702193 du 25 mai 2007 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1995, 1996 et 1997 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Vu la requête, enregistrée le 3 août 2009, présentée pour M. François A, ..., par la SCP de Angelis-Semidei-Vuilquiez-Habart-Melki-Bardon ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0702193 du 25 mai 2007 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1995, 1996 et 1997 et des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

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Vu le jugement attaqué ;

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Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mai 2012 :

- le rapport de M. Lemaitre, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Dubois, rapporteur public ;

- les observations de Me Guilhem, avocat de M. A ;

Considérant qu'à la suite d'une vérification de sa comptabilité, M. François A, qui exerce la profession de médecin, a fait l'objet, selon la procédure contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, qui ont été assorties des pénalités correspondantes, portant sur ses bénéfices non commerciaux des années 1995, 1996 et 1997 ; qu'il relève appel du jugement du 25 mai 2009 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;

Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, contenir l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge ;

Considérant qu'il ressort du dossier soumis aux premiers juges que M. A a contesté le redressement fiscal qui lui avait été notifié le 21 décembre 1998 à hauteur de 81 693 euros, en soutenant qu'il portait sur des recettes qui n'étaient que des apports effectués à partir de comptes privés pour combler un découvert de trésorerie ; que la demande de l'intéressé renvoyait au mémoire qu'il avait présenté devant la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, et qui était annexé à sa demande, dans lequel il développait son argumentation ; qu'il résulte de ce qui précède que l'administration fiscale n'est pas fondée à soutenir que la demande du requérant était irrecevable au motif qu'elle était dépourvue de moyens et de conclusions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition de l'année 1995 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ... Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée " ;

Considérant que pour estimer que la comptabilité de M. A est dépourvue de caractère probant, l'administration se prévaut du fait que pour chacune des trois années vérifiées, les recettes qu'il a déclarées sont inférieures à celles des relevés du " système national inter-régime " (SNIR) et que les encaissements sur ses comptes financiers professionnels sont supérieurs aux recettes qu'il a déclarées ; que M. A soutient, en ce qui concerne les recettes de l'année 1995, qu'aucun élément contradictoire n'a été fourni dans la réponse faite le 8 avril 1999 aux observations qu'il avait présentées le 18 janvier 1999 ; que dans le cadre de ces dernières, il avait fait valoir qu'il avait déclaré à tort des annulations d'écritures débitées et des mouvements portant sur des opérations à caractère personnel dont il a précisé les dates, la nature et le montant pour les années 1995, 1996 et 1997, contestant ainsi le caractère imposable des crédits bancaires s'y rapportant ; que si dans la réponse qu'elle a faite le 8 avril 1999 aux observations de l'intéressé, l'administration a répondu en reconnaissant avoir pris en compte, à tort, certaines opérations bancaires, elle a toutefois limité l'examen auquel elle s'est livrée, aux seules années 1996 et 1997 pour lesquelles elle a d'ailleurs admis le caractère non imposable des sommes représentant respectivement au total 83 455 francs et 5 207 francs ; qu'elle a néanmoins estimé que " ces constatations " corroboraient les différences constatées entre les relevés SNIR et les recettes déclarées, y compris en ce qui concerne l'année 1995, alors même qu'elle n'avait pas analysé les éléments dont le requérant avait fait part dans ses observations pour cette année ; que par suite, le requérant est fondé à soutenir qu'il n'a pas obtenu sur ce point de la part de l'administration, de réponse à ses observations ; qu'il résulte de ce constat que la procédure d'imposition, en tant qu'elle concerne l'année 1995, est pour ce motif entachée d'un vice de procédure qui doit conduire à prononcer la décharge de l'imposition portant sur cette année ;

Sur le bien-fondé des impositions des années 1996 et 1997 :

En ce qui concerne le rejet de comptabilité et la reconstitution des chiffres d'affaires :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L 59 est saisie d'un litige ou d'une rectification, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. (...) " ;

Considérant que M. A conteste dans le document qu'il a soumis à la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, auquel il se réfère, le rejet de sa comptabilité ; qu'il ressort de la réponse faite le 8 avril 1999 aux observations du contribuable que l'administration s'est prévalue des distorsions qu'elle estime avoir constatées entre les crédits bancaires et les recettes déclarées par l'intéressé, pour en conclure que ces dernières corroboraient les différences constatées entre les relevés SNIR et les recettes déclarées et que l'existence de ces distorsions justifiaient ainsi la prise en compte des recettes ressortant des relevés SNIR ; que si la commission a estimé que la comptabilité de M. Paoli ne revêtait pas un caractère probant, il incombe toutefois à l'administration, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales précitées d'en apporter la preuve ;

Considérant en premier lieu, que pour qualifier de non probante la comptabilité de M. A au titre de l'année 1996, l'administration a pris en compte le montant total des relevés de caisse de sécurité sociale, soit 1 454 394 francs, qu'elle a rapproché de celui des recettes déclarées par M. A, soit 1 407 185 francs, pour constater une insuffisance de déclaration qui atteint 47 209 francs, (1 454 394 francs - 1 407 185 francs), représentant 3, 35% des revenus déclarés ; que dans sa réponse faite aux observations du contribuable le 8 avril 1999, elle a estimé que cette distorsion de 47 209 francs était corroborée par une autre distorsion, s'élevant à 2 288 francs seulement, résultant de la différence entre les crédits bancaires et espèces correspondant, après notamment déduction d'une somme de 83 455 francs, à des revenus imposables d'un montant de 1 409 473 francs, et les recettes déclarées à hauteur de 1 407 185 francs ; qu'il s'avère que la distorsion de 2 288 francs dont se prévaut l'administration, qui est d'un faible montant, est mathématiquement erronée dès lors que, comme le fait valoir le requérant, l'administration a commis à son détriment, une erreur de 3 006 francs dans la totalisation des recettes mensuelles qu'elle a constatées à partir de ses comptes, et dont elle donne le détail dans la réponse qu'elle lui a faite ; qu'après rectification de cette erreur, il ressort des éléments de calcul produits par l'administration elle-même, que M. A aurait en réalité trop déclaré 718 francs (3 006 francs - 2 288 francs) ; que le vérificateur mentionne, il est vrai, le fait qu'il conviendrait de prendre également en compte les menues dépenses de la vie courante et les dépenses d'entretien du véhicule, telles l'essence ou les menues réparations, pour des déplacements d'environ 3 700 kms par mois, qu'il semble considérer comme ayant été payées en espèces à partir des recettes perçues, mais qui n'ont pas été chiffrées ; que toutefois, cette distorsion au regard des crédits bancaires, dont l'administration ne s'est d'ailleurs pas prévalue dans ses écritures en première instance comme en appel, n'est pas de nature, en raison de son chiffrage incertain, à corroborer une insuffisance de recettes de 3, 35 % sur la base des relevés SNIR, qui n'est elle-même pas significative ; que dans ces circonstances, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve du caractère non probant de la comptabilité de M. A pour l'année 1996 ; que par suite le requérant est fondé à demander la décharge de l'imposition qui procède de la reconstitution de son chiffre d'affaires pour cette année ;

Considérant en second lieu, que pour qualifier de non probante la comptabilité de M. A au titre de l'année 1997, l'administration a pris en compte le montant total des relevés de caisse de sécurité sociale, soit 1 476 156 francs, qu'elle a rapproché de celui des recettes déclarées par M. A, soit 1 220 596 francs, pour constater une insuffisance de déclaration qui atteint 255 560 francs (1 476 156 francs - 1 220 596 francs), représentant 20, 93 % des revenus déclarés, en estimant que cette insuffisance de déclaration est corroborée par celle d'un montant de 152 323 francs résultant du rapprochement entre les crédits bancaires et les montants des relevés SNIR ; que pour contester ces écarts significatifs, le requérant soutient que des annulations de débits et des opérations personnelles, qu'il a récapitulées et détaillées par ordre chronologique dans un tableau " annexe 7 ", auraient été à tort retenues en recettes par le vérificateur à hauteur de 211 670, 46 francs ; qu'il produit diverses remises de chèques sur le compte Crédit du Nord au soutien de ces allégations correspondant à la nature des dépenses ainsi qu'aux montants et aux dates dont il se prévaut ; que l'administration n'établit ni même ne soutient qu'elle aurait exclu ces sommes des montants qu'elle a regardés comme constituant des recettes imposables, ni n'expose les motifs pour lesquels elle les auraient maintenus dans les recettes imposables, alors qu'elle a déclaré, dans la réponse faite au contribuable, s'être fondée sur ces encaissements pour corroborer le chiffre d'affaires ressortant des relevés SNIR ; que ni la notification de redressement, ni aucune autre pièce du dossier ne permet de s'en assurer ; que le requérant soutient, sans être contredit, que le vérificateur a uniquement étudié un relevé SNIR annuel, sans solliciter la communication des relevés détaillés auprès de la sécurité sociale et affirme les avoir lui-même demandés sans pouvoir les obtenir ; que l'administration, qui ne répond pas aux moyens du requérant, se borne à présent à lui opposer la seule circonstance que le montant de ses recettes a été déterminé en fonction des relevés SNIR, alors que l'écart entre le chiffre d'affaires déclaré et celui ressortant des relevés SNIR, qui est censé révéler le caractère non probant de la comptabilité de M. A, n'a lui-même de valeur probante que si sa signification a été analysée en rapport avec les circonstances de l'espèce ; que dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du caractère insincère de la comptabilité de M. A pour l'année 1997 ;

Considérant qu'à défaut d'apporter la preuve qui lui incombe du caractère non probant de la comptabilité de M. A, l'administration n'était pas en droit de procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires pour les années 1996 et 1997 ; que par suite, M. A est fondé à demander la décharge des impositions supplémentaires qui procèdent de ces reconstitutions de recettes ;

En ce qui concerne les dépenses :

onsidérant qu'aux termes de l'article 99 du code général des impôts : " Les contribuables soumis au régime de la déclaration contrôlée sont tenus d'avoir un livre-journal suivi au jour le jour et présentant le détail de leurs recettes et de leurs dépenses professionnelles. " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'aucune dépense professionnelle ne peut être calculée par les contribuables concernés de manière forfaitaire ; que, toutefois, dans la documentation administrative de base 5 G 4421 applicable aux impositions en litige, l'administration autorise les médecins conventionnés du secteur I placés sous le régime de la déclaration contrôlée à déduire notamment un abattement forfaitaire de 2 % destiné à prendre en compte les sujétions particulières auxquelles ils sont tenus et une déduction complémentaire de 3 % ; que le bénéfice de ces déductions est subordonné à plusieurs conditions, dont celle de souscrire les déclarations de résultat dans le délai légal ;

Considérant que M. A conteste avoir déposé tardivement sa déclaration de revenus n° 2035 de l'année 1997, à la date du 19 juin 1998, après la réception d'une mise en demeure le 10 juin 1998 ; que s'il affirme avoir accompli ses obligations déclaratives pour avoir remis lui-même sa déclaration le 30 avril 1998 à l'administration fiscale, avant l'expiration le 2 mai 1998 du délai qui lui était imparti, il ne produit aucune preuve de sa réception par l'administration ; que la circonstance que la pénalité de 10 % pour dépôt tardif de sa déclaration ne lui ait pas été infligée n'est pas de nature à constituer cette preuve ; qu'il suit de là que M. A ne saurait revendiquer ni le bénéfice de l'abattement forfaitaire de 2 %, ni celui de la déduction complémentaire de 3 % ;

Considérant en second lieu, que le requérant soutient que l'administration lui aurait à tort refusé la déduction de certaines dépenses qu'il a comptabilisées, en faisant grief à celle-ci de faire état d'un montant forfaitaire et de ne pas le mettre en mesure de les identifier ; qu'il ressort toutefois de la réponse faite par l'administration à ses observations, d'une part, que le requérant n'avait pas produit, lors du contrôle, les pièces justificatives de ses dépenses, à l'exception de celles dont l'administration établit la liste, dans cette réponse, pour chacune des trois années en litige et que d'autre part, il y est précisé que les frais injustifiés portaient sur les dépenses de parking et de péage ; que contrairement à ce qu'il soutient, M. A était en mesure, à partir de ces éléments, d'identifier les dépenses qui n'avaient pas été admises en déduction de son chiffre d'affaires ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant que M. A soutient que le calcul des intérêts de retard qui lui ont été appliqués pour l'année 1997 est erroné dès lors que le point de départ de leur calcul a été fixé à compter du 1er juillet 1998, à une date à laquelle le rôle n'avait pas encore été émis ; que toutefois, en matière d'impôt sur le revenu, à l'exception de l'impôt afférent à certaines plus-values, le point de départ du calcul est fixé au 1er juillet de l'année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est établie, donc indépendamment de la date de mise en recouvrement ; que le moyen tiré d'une erreur de calcul des intérêts de retard doit ainsi être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille, a rejeté sa demande en tant qu'elle conteste le rehaussement du montant de ses recettes professionnelles imposables au titre des années 1995, 1996 et 1997 ;

DECIDE :

Article 1er : M. François A est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1995, 1996 et 1997, en tant qu'elles procèdent de la reconstitution de ses recettes imposables.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. François A est rejeté.

Article 3 : Le jugement n° 0702193 du 23 avril 2009 du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. François A et au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur.

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N°09MA02990


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09MA02990
Date de la décision : 15/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-05-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices non commerciaux. Détermination du bénéfice imposable.


Composition du Tribunal
Président : Mme LASTIER
Rapporteur ?: M. Dominique LEMAITRE
Rapporteur public ?: M. DUBOIS
Avocat(s) : SCP DE ANGELIS -SEMIDEI-VUILLQUEZ - HABART-MELKI - BARDON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2012-06-15;09ma02990 ?
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