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08/04/2013 | FRANCE | N°10MA00297

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 08 avril 2013, 10MA00297


Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA00297, présentée pour la société Eugelec, représentée par son gérant en exercice, et dont le siège est domaine de Gratianne à Bouc Bel Air (13320), par Me Boumaza ;

La société Eugelec demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803601 du 3 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à ce que soit constatée la suspension de la force exécutoire du titre émis par le trésor public à son encon

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Vu la requête, enregistrée le 25 janvier 2010 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, sous le n° 10MA00297, présentée pour la société Eugelec, représentée par son gérant en exercice, et dont le siège est domaine de Gratianne à Bouc Bel Air (13320), par Me Boumaza ;

La société Eugelec demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0803601 du 3 décembre 2009 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à ce que soit constatée la suspension de la force exécutoire du titre émis par le trésor public à son encontre et de toute la procédure de recouvrement, à l'annulation du titre exécutoire dont procèdent les lettres de rappel des 6 juin 2006 et 20 juin 2006 lui réclamant paiement de la somme de 53 219,38 euros et à mettre à la charge de l'Etat et de l'office public communal d'HLM (OPHLM) Toulon Habitat Méditerranée une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler le titre exécutoire précité et de la décharger du paiement de la somme de 53 219,38 euros ;

3°) de mettre à la charge solidaire de l'Etat et de l'office public communal d'HLM Toulon Habitat Méditerranée une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu la loi n° 85-704 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec le maîtrise d'oeuvre privée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2012 du président de la cour administrative d'appel de Marseille portant désignation, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, de M. Laurent Marcovici, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Guerrive, président de la 6e chambre ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2013 :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Markarian, rapporteur public,

- et les observations de Me Ratouit représentant la société Eugelec ;

1. Considérant que dans le cadre de la réhabilitation du groupe immobilier Missiessy à Toulon, l'office public communal d'HLM Toulon Habitat Méditerranée, a confié à la société Eugelec, par un marché du 29 mars 1999, la réalisation du lot n° 3 " Electricité courants forts -courants faibles - chauffage électrique " ; que l'avenant n° 1 conclu le 30 août 2001 pour tenir compte de travaux supplémentaires, a porté le montant global du marché à 6 211 926,47 francs HT ; que la réception des travaux prononcée le 18 juillet 2002, comportait des réserves devant être levées avant le 30 juillet 2002 ; que, par une mise en demeure adressée le 16 septembre 2002, le maître d'ouvrage a demandé à la société de commencer les travaux faisant l'objet des réserves mentionnées au procès-verbal du 17 juillet 2002, sous peine de résilier à ses frais et risques le marché ; qu'ultérieurement, l'office a avisé la société Eugelec de l'exécution à ses frais et risques des travaux portant sur le remplacement systématique des régulateurs et appareils de gestion électronique de chauffage défectueux de l'ensemble des logements de la résidence, sur le fondement de l'article 41.6 du cahier des clauses administratives générales ; que le 20 novembre 2002, l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée a conclu avec la société Terras, un marché de substitution ; que le 3 décembre 2004, est notifié à la société défaillante, par ordre de service n° 892.1, un décompte général de liquidation faisant apparaître un solde créditeur de 53 219,38 euros TTC en faveur de l'office ; que les 6 juin et 20 juin 2006, le receveur de l'office a adressé à la société des lettres de rappel en vue du paiement de la somme de 53 219,38 euros TTC ; que, par le jugement attaqué du 3 décembre 2009, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de la société Eugelec, tendant à ce que soit constatée la suspension de la force exécutoire du titre émis par le Trésor public à son encontre et de toute la procédure de recouvrement, à l'annulation du titre exécutoire dont procèdent les lettres de rappel des 6 juin 2006 et 20 juin 2006 lui réclamant paiement de la somme de 53 219,38 euros ; que la société Eugelec interjette appel et demande d'annuler le titre exécutoire en cause et de la décharger du paiement de la somme de 53 219,38 euros ;

Sur la recevabilité de l'opposition au titre exécutoire :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite " ; que, d'autre part, aux termes de l'article 50.22 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics : " Si un différend survient directement entre la personne responsable du marché et l'entrepreneur, celui-ci doit adresser un mémoire en réclamation à ladite personne aux fins de transmission au maître de l'ouvrage. " ;

3. Considérant que l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée fait valoir qu'il appartenait à la société Eugelec de respecter les exigences imposées par l'article 50-22 et suivants du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics en contestant le décompte de liquidation par un mémoire de réclamation ; que, toutefois, la contestation contentieuse d'un titre exécutoire en vue du recouvrement d'une créance née de l'exécution d'un marché, dont la recevabilité est régie par les dispositions précitées de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, n'est pas subordonnée au respect de la procédure prévue par l'article 50.22 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du titre exécutoire :

4. Considérant que pour rejeter la demande présentée par la société Eugelec, le tribunal administratif de Toulon a estimé qu'en l'absence de contestation du décompte général de liquidation du marché, notifié à la société le 3 décembre 2004, le décompte était devenu général et définitif ;

5. Considérant, toutefois, qu'aux termes de l'article 41.6 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics, applicable aux marchés publics de travaux : " Lorsque la réception est assortie de réserves, l'entrepreneur doit remédier aux imperfections et malfaçons correspondantes dans le délai fixé par la personne responsable du marché (...) Au cas où ces travaux ne seraient pas faits dans le délai prescrit, la personne responsable du marché peut les faire exécuter aux frais et risques de l'entrepreneur " ; qu'il résulte, en outre, des stipulations des articles 13.31 et 13.32 du même cahier des clauses administratives générales, qu'il appartient à l'entrepreneur après l'achèvement des travaux, de dresser un projet de décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre ; que ce projet doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux, ou encore, en application des stipulations combinées des articles 46.1 et 49.2 du même cahier, de la date d'effet de la résiliation du marché ; que faute pour l'entrepreneur de se conformer à ce délai, et après mise en demeure restée sans effet, le décompte final peut être établi d'office par le maître d'oeuvre ; qu'en application des stipulations de l'article 13.4 du cahier des clauses administratives générales - Travaux publics, il appartient ensuite au maître d'oeuvre d'établir à partir de ce décompte final et des autres documents financiers du marché, un décompte général signé par la personne responsable du marché et de le notifier à l'entrepreneur ; qu'au cas où celui-ci n'a pas renvoyé ce décompte dans les quarante-cinq jours, en exposant le cas échéant les motifs de son refus ou de ses réserves, ce décompte général est réputé accepté par lui et devient le décompte général et définitif du marché ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction, que la société Eugelec n'a pas commencé les travaux faisant l'objet de réserves assortissant le procès-verbal de réception du 17 juillet 2002, avant le délai imparti par la mise en demeure du 16 septembre 2002 ; que l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée a, sur le fondement de l'article 41.6 du cahier des clauses administratives générales, fait exécuter les travaux aux frais et risques de l'entrepreneur en concluant un marché de substitution en vue de l'achèvement des travaux ; que, par un ordre de service, signé par le président du conseil d'administration de l'office, a été notifié, le 3 décembre 2004, à la société Eugelec, le " décompte général de liquidation avec titre exécutoire d'un montant de 53 219,38 euros TTC " auquel étaient annexés trois tableaux, mentionnant le montant du marché en cause, les acomptes réglés et les " réfactions appliquées " ainsi que le coût du marché de substitution relatif au diagnostic des installations de chauffage à accumulation, dépannage et remplacement des pièces d'un montant de 65 355,06 euros TTC ; que, cependant, en l'absence d'établissement par la société Eugelec d'un projet de décompte final, après l'achèvement des travaux, l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée, maître d'ouvrage n'a pas mis en demeure l'entreprise ou le maître d'oeuvre d'établir ce décompte final, comme il lui appartenait de le faire ; que, dès lors, le décompte général ne pouvait être arrêté et n'a pu devenir définitif ;

7. Considérant qu'en l'absence de décompte général régulièrement établi, l'office public d'HLM ne pouvait émettre un titre de perception tendant au recouvrement d'une créance qui n'était pas certaine et exigible ; que, dès lors, le titre exécutoire litigieux ne peut qu'être annulé et la société Eugelec, déchargée de son obligation de payer la somme de 53 219,38 euros TTC ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Eugelec est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Eugelec, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il en est de même des conclusions de la société Eugelec tendant à la condamnation de l'Etat ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de cet office la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Eugelec et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 décembre 2009 est annulé.

Article 2 : Le titre exécutoire émis par Toulon Habitat Méditerranée en vue du recouvrement de la somme de 53 219,38 euros TTC (cinquante-trois mille deux cent dix-neuf euros et trente-huit centimes) est annulé. La société Eugelec est déchargée de l'obligation de payer cette somme.

Article 3 : L'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée versera à la société Eugelec une somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de l'OPHLM Toulon Habitat Méditerranée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Eugelec, à l'office public communal d'HLM Toulon Habitat Méditerranée et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 10MA00297


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA00297
Date de la décision : 08/04/2013
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: Mme MARKARIAN
Avocat(s) : BOUMAZA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-04-08;10ma00297 ?
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