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25/11/2014 | FRANCE | N°11MA01857

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 25 novembre 2014, 11MA01857


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 mai 2011 et régularisée par courrier le 12 mai suivant, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me B...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800547 en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur notifié le 14 septembre 2007 à la Caisse de Règlement Pécuniaire des Avocats (CARPA) de Nice, en sa qualité de séquestre du prix d'adjudication d'un immeuble ayan

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Vu la requête, enregistrée par télécopie le 11 mai 2011 et régularisée par courrier le 12 mai suivant, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me B...;

M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800547 en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur notifié le 14 septembre 2007 à la Caisse de Règlement Pécuniaire des Avocats (CARPA) de Nice, en sa qualité de séquestre du prix d'adjudication d'un immeuble ayant fait l'objet d'une saisie-vente immobilière, pour avoir paiement, dans la limite des sommes détenues, de la somme de 112 472,06 euros correspondant aux intérêts moratoires dont il restait redevable envers l'Etat ;

2°) de prononcer la décharge de l'obligation de payer en cause et d'ordonner la restitution des sommes appréhendées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le premier protocole additionnel à cette convention ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 2014,

- le rapport de M. Emmanuelli, rapporteur ;

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public ;

1. Considérant que M. C...relève appel du jugement en date du 24 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer résultant de l'avis à tiers détenteur notifié le 14 septembre 2007 à la Caisse de Règlement Pécuniaire des Avocats de Nice, en sa qualité de séquestre du prix d'adjudication d'un immeuble ayant fait l'objet d'une saisie-vente immobilière, pour avoir paiement, dans la limite des sommes détenues, de la somme de 112 472,06 euros correspondant aux intérêts moratoires dont il restait redevable envers l'Etat ; que ces intérêts moratoires ont été calculés sur la base d'impositions non acquittées par M. C...au titre des années 1992 et 1993, la demande de décharge de ces impositions ayant été rejetée par jugement du tribunal administratif de Nice en date du 26 décembre 2002 ;

Sur les moyens relevant de la compétence du juge judiciaire :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 199 et L. 281 du livre des procédures fiscales, les contestations relatives au recouvrement des impôts directs sont portées devant le juge de l'exécution, lorsqu'elles ont trait à la régularité en la forme de l'acte de poursuite, et devant la juridiction administrative lorsqu'elles sont relatives à l'existence de l'obligation de payer, au montant de la dette compte tenu des paiements effectués ou à l'exigibilité de la somme réclamée, ou lorsqu'elles sont fondées sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt ;

3. Considérant, en premier lieu, que la circonstance que le trésorier-payeur général des Alpes-Maritimes ait indiqué à M.C..., par courrier en date du 23 octobre 2007, qu'il pouvait, en cas de rejet de sa réclamation préalable, " former éventuellement un recours devant la juridiction administrative ", n'est pas de nature à permettre au contribuable de soulever utilement devant le juge de l'impôt des moyens ayant trait à la régularité en la forme de l'acte de poursuite qui, en application des dispositions de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, relèvent de la compétence du juge judiciaire ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'appartient qu'au juge de l'exécution d'apprécier les conditions dans lesquelles a été notifié l'acte de poursuite qui a provoqué la contestation du contribuable, lorsque l'irrégularité de cette notification est invoquée par celui-ci à l'appui de sa contestation ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que l'avis à tiers détenteur du 14 septembre 2007 aurait été notifié à M. C...à une adresse qui n'est pas la sienne est inopérant et doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, que si M. C...se prévaut d'une contradiction dans la rédaction de l'avis à tiers détenteur litigieux entre les mentions pré-imprimées et les indications afférentes à la nature de la créance telles qu'elles ont été portées dans la case réservée à cet effet, ce grief ne se rattache à aucune contestation dont il appartient au juge administratif de connaître ; qu'il est, dès lors, inopérant ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la contestation par le contribuable du bien-fondé de l'application de la procédure d'avis à tiers détenteur aux intérêts moratoires, lesquels sont assortis du privilège du Trésor comme l'impôt qui leur sert de base, ne met en cause ni l'existence, ni la quotité, ni l'exigibilité de la dette fiscale et relève dès lors de la compétence du juge judiciaire ; qu'elle est donc inopérante dans le cadre du présent litige ;

Sur le moyen tiré de l'existence d'une demande de sursis de paiement :

7. Considérant que M. C...soutient que l'avis à tiers détenteur en litige, en date du 14 septembre 2007, ne pouvait être valablement notifié et emporter effet attributif immédiat des sommes consignées à la Caisse de Règlement Pécuniaire des Avocats de Nice, en ce que l'opposition à poursuites formée le 17 octobre 2007 auprès du trésorier-payeur général visait expressément la réclamation préalable formée le 26 mars 1999, afférente aux impositions supplémentaires mises à sa charge au titre des années 1992 et 1993, qui était assortie du sursis légal de paiement ; que, toutefois, si une demande régulière de sursis de paiement suspend, dès sa présentation, l'exigibilité de l'impôt, cet effet suspensif demeure jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation contentieuse soit par l'administration, soit par le tribunal administratif ; qu'en l'espèce, le tribunal administratif de Nice a rejeté le 26 décembre 2002 la demande de décharge des impositions mises à la charge de M. C...au titre des années 1992 et 1993, ce qui a rendu à nouveau exigibles les impositions dont il s'agit ; que le requérant n'est, dès lors, nullement fondé à soutenir que l'avis à tiers détenteur en date du 14 septembre 2007 émis pour avoir paiement des intérêts moratoires calculés sur la base des impositions non acquittées des années 1992 et 1993, redevenues exigibles à la date de la notification du jugement du tribunal administratif du 26 décembre 2002, ne pouvait entraîner effet attributif des sommes détenues par la Caisse de Règlement Pécuniaire des Avocats de Nice à la suite de la saisie-vente d'un bien immobilier dont il était propriétaire ;

Sur le moyen tiré de la prescription :

8. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables du Trésor qui n'ont fait aucune poursuite contre un contribuable retardataire pendant quatre années consécutives, à partir du jour de la mise en recouvrement du rôle, perdent leur recours et sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. Le délai de quatre ans mentionné au premier alinéa, par lequel se prescrit l'action en vue du recouvrement, est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des contribuables et par tous autres actes interruptifs de la prescription " ;

9. Considérant que les intérêts moratoires mentionnés à l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, qui ont pour objet de réparer le préjudice subi par l'administration du fait du retard avec lequel le contribuable s'est acquitté des impositions pour lesquelles il a bénéficié d'un sursis de paiement, ne sont que l'accessoire des impositions auxquelles ils se rattachent et constituent, par suite, des créances de nature fiscale ; qu'ainsi, les dispositions précitées de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles l'action en recouvrement des créances fiscales se prescrit au bout de quatre ans, sont applicables aux poursuites contre les débiteurs des intérêts moratoires mentionnés à l'article L. 209 du livre des procédures fiscales ; que ce délai commence à courir à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif rejetant les prétentions du contribuable a été notifié aux parties ;

10. Considérant que le délai de prescription a commencé à courir, en l'espèce, à compter de la notification du jugement du 26 décembre 2002 ; qu'il n'était pas expiré lorsqu'un commandement aux fins de saisie immobilière a été notifié le 1er septembre 2005, à la requête du trésorier de Menton ; que le commandement, qui concernait les cotisations d'impôt sur le revenu des années 1992, 1993, 1999 et 2000, la taxe foncière de l'année 2004 et divers frais afférents aux années 1998, 2003 et 2004, le tout pour une somme totale de 398 718,95 euros, mentionnait également pour mémoire les intérêts moratoires ; qu'il a ainsi interrompu la prescription pour les impositions qu'il visait et les intérêts moratoires qui constituaient l'accessoire de celles-ci ; qu'il a, en conséquence, fait courir un nouveau délai de quatre ans, lequel n'était pas expiré quand le trésorier de Menton a établi l'avis à tiers détenteur contesté ; que M. C...n'est dès lors pas fondé à soutenir, au soutien de sa demande de décharge de l'obligation de payer la somme de 112 472,06 euros, que cette dernière serait atteinte par la prescription ;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel :

11. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Lorsqu'une juridiction rejette totalement ou partiellement la demande d'un contribuable tendant à obtenir l'annulation ou la réduction d'une imposition établie en matière d'impôts directs à la suite d'un redressement ou d'une taxation d'office, les cotisations ou fractions de cotisations maintenues à la charge du contribuable et pour lesquelles celui-ci avait présenté une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires au taux de l'intérêt légal (...). Les intérêts courent du premier jour du treizième mois suivant celui de la date limite de paiement jusqu'au jour du paiement effectif des cotisations. Ils sont recouvrés dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que les impositions auxquelles ils s'appliquent " ;

12. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation " ; qu'en vertu des stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes " ;

13. Considérant que M. C...fait valoir que l'article L. 209 du livre des procédures fiscales opère une distinction injustifiée entre les personnes ayant constitué des garanties en vue de l'obtention du sursis de paiement et celles ayant obtenu le bénéfice du sursis sans avoir constitué de garanties ; qu'il se réfère, toutefois, à une rédaction de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales qui est antérieure à l'entrée en vigueur de la loi de finances rectificative n° 94-1163 du 29 décembre 1994 et qui n'était plus applicable à la date à laquelle le requérant a déposé sa réclamation ; que les dispositions de cet article L. 209, dans leur version applicable à l'espèce, ne font plus aucune distinction entre les contribuables qui ont déposé une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement ; qu'elles ne méconnaissent donc pas les stipulations combinées précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

14. Considérant, par ailleurs, que les stipulations combinées des articles précités de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de son premier protocole additionnel sont sans portée dans les rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l'occasion de l'établissement et du recouvrement de l'impôt ou de ses accessoires ; que le requérant ne peut donc, en tout état de cause, utilement se prévaloir de la modification du taux des intérêts moratoires issue de l'article 29 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 pour invoquer l'existence, sur la période antérieure à celle-ci, d'une discrimination ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; qu'il ne peut ainsi prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre des finances et des comptes publics.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01857
Date de la décision : 25/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement.

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement - Prescription.

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement - Actes de recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: M. Olivier EMMANUELLI
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : FORCIOLI-CONTI - VALLI - PINELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-11-25;11ma01857 ?
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