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02/04/2015 | FRANCE | N°13MA00901

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 02 avril 2015, 13MA00901


Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par la SCP Gerbaud B...Charmasson Cotte Moineau Rouanet, agissant par Me B...; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007991 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la c

harge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L....

Vu la requête, enregistrée le 4 mars 2013, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par la SCP Gerbaud B...Charmasson Cotte Moineau Rouanet, agissant par Me B...; M. C...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1007991 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007, ainsi que des pénalités correspondantes ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.......................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mars 2015 :

- le rapport de Mme Markarian, premier conseiller,

- les conclusions de M. Maury, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour M.C... ;

1. Considérant que le commerce de vente et de location de matériel de sport que M. C... exploitait à Vars a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a remis en cause sa comptabilité et a procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires ; que cette vérification a donné lieu à des rectifications en matière d'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux sur les années 2005 à 2007 ; que compte tenu de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui a proposé de réduire les taux de marge retenus par le service afin de tenir compte de la concurrence, l'administration a revu les bases d'imposition qu'elle avait initialement retenues dans les deux propositions de rectification des 15 décembre 2008 et 17 juin 2009 ; que, dans la présente instance, M. C...relève appel du jugement n° 1007991 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. C...a été assujetti au titre des années 2005 à 2007 assorties de la pénalité prévue à l'article 1729 du code général des impôts ;

Sur la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la motivation des propositions de rectification :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; que, lorsque l'administration entend fonder au moins en partie un redressement, non sur des pratiques habituelles à la profession ou au secteur d'activité, mais sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises, elle doit, pour assurer le caractère contradictoire de la procédure sans méconnaître le secret professionnel protégé par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, désigner nommément ces entreprises, mais ne fournir au contribuable que des moyennes ne lui permettant pas de connaître, fût-ce indirectement, les données propres à chacune d'elles ; que cette obligation, dont le respect constitue une garantie pour le contribuable, s'impose à l'administration même si ce dernier disposait d'éléments relatifs à sa propre situation pour contester les évaluations du vérificateur et si la recherche par l'administration d'informations relatives à d'autres entreprises était la conséquence du refus du contribuable de communiquer des informations dont il disposait ;

3. Considérant que pour procéder à la reconstitution des recettes du commerce de vente et location de vêtements et de matériels de sports d'hiver que M. C...exploitait à Vars, le vérificateur a repris, à l'appui de sa proposition de rectification du 15 décembre 2008 concernant l'exercice 2005, les coefficients multiplicateurs des prix de vente toutes taxes comprises sur les prix d'achat hors taxes indiqués par le requérant lui-même, soit un taux de 1,75 pour les skis, un taux de 1,90 pour les chaussures et un taux de 2,10 pour les vêtements et articles divers ; qu'à partir de ces taux, il a déterminé un coefficient moyen pondéré de 1,97, qu'il a ramené à 1,67, après application d'un taux de 15 % pour tenir compte des remises commerciales faites aux clients ; que pour les exercices 2006 et 2007, le service a estimé, en utilisant un relevé de prix effectué en janvier 2009 dans la mesure où l'entreprise ne pouvait justifier les prix pratiqués au cours de la période vérifiée, que le rapprochement des prix de vente et des prix d'achat d'un large échantillon d'articles proposés à la vente, qu'il a repris en annexe à la proposition de rectification du 17 juin 2009, aboutissait à des coefficients supérieurs à ceux indiqués pour la période concernée par la proposition de rectification du 15 décembre 2008 ; que le service a relevé que la reconstitution ainsi effectuée correspondait à la réalité des conditions d'exploitation et a pris en compte les observations du requérant en excluant les chaussures Tecnica Selene et les skis Lacroix, ces articles étant peu représentatifs de la gamme des produits proposés à la vente ; que le service a ensuite déterminé, compte tenu des achats comptabilisés, un coefficient de marge pondéré de 2,23 pour l'exercice 2006 et de 2,19 pour l'exercice 2007 puis, comme dans la proposition de rectification précédente, a appliqué un abattement de 15 % pour tenir compte des remises commerciales ; qu'ainsi, et alors même que le service aurait indiqué dans sa proposition de rectification du 17 juin 2009 que les coefficients multiplicateurs qu'il avait arrêtés étaient confortés par les coefficients de marge déclarés par des entreprises situées dans la même zone géographique, l'administration n'a pas fondé ses redressements sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises et n'avait pas, par suite, l'obligation de désigner nommément les entreprises visées, dès lors qu'elle s'est bornée, après avoir reconstitué les recettes de l'entreprise de M. C...à partir des seuls éléments d'information propres à cette entreprise, à indiquer que le taux de marge du requérant était au final conforme aux usages de la profession, ainsi qu'elle avait pu le constater chez d'autres entreprises de la même zone géographique ; qu'ainsi la proposition de rectification satisfait aux exigences de motivation découlant des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne la durée de la vérification sur place :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I.-Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) II.-Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : (...) 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. " ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les opérations de contrôle de l'entreprise de M. C...se sont déroulées du 4 novembre 2008, date de la première visite sur place, jusqu'au 24 avril 2009, date de la réunion de synthèse ; que si la durée de contrôle a dépassé le délai de trois mois prévu au I de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, ce dépassement est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que l'administration a constaté l'existence de graves irrégularités privant la comptabilité de valeur probante et que la durée du contrôle n'a pas dépassé le délai de six mois prévu au II du même article ;

En ce qui concerne le caractère régulier et probant de la comptabilité :

6. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. (...) " ;

7. Considérant que le service, lors de l'examen des bandes de caisses, a relevé qu'elles ne mentionnaient ni la nature précise des articles, ni leur prix unitaire, ni leur nombre et qu'elles portaient seulement la mention de la date de la vente, de la catégorie de l'article, chaussures, skis, vêtement ou divers, sans indication des remises appliquées par le requérant ; que les tickets " Z " reprenaient ainsi les sommes globales encaissées pour chaque catégorie d'articles en distinguant la location de matériel, les ventes de ski, les ventes de chaussures, les ventes de vêtements et une rubrique divers ne permettant ainsi qu'un rapprochement global entre les achats effectués et les ventes réalisées par l'entreprise ; que le requérant n'a pu en outre justifier le montant des remises consenties aux clients qui n'apparaissent pas sur les bandes de caisses ; qu'eu égard à la nature du commerce concerné et des articles vendus, ces lacunes faisaient ainsi obstacle à la vérification de concordance des ventes avec les achats comptabilisés ; que le requérant ne peut dès lors soutenir que sa comptabilité était parfaitement tenue et que la documentation fiscale autorise un enregistrement global des recettes en fin de journée ; que la circonstance que le fonctionnement de la caisse enregistreuse n'aurait pas fait l'objet d'observations de la part de l'administration lors d'un précédent contrôle ne saurait être regardée comme une prise de position formelle de l'administration qui lui serait opposable en application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; qu'ainsi l'administration a pu, à bon droit, tenir la comptabilité de l'entreprise pour non probante en ce qui concerne le montant des recettes et procéder à une reconstitution de ces dernières ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou le redressement est soumis au juge (...) " ; que les impositions en litige ayant été établies conformément à l'avis émis le 16 mars 2010 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, M.C..., dont la comptabilité comporte de graves irrégularités, supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions en litige ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des recettes :

9. Considérant que s'agissant de l'exercice 2005, le service a retenu, ainsi qu'il a été dit précédemment, un coefficient de marge net pondéré de 1,97 avant application d'un abattement de 15 % pour tenir compte des remises consenties aux clients ; que si le requérant soutient que les coefficients de marge ont été établis à partir des prix catalogue et non sur la base des prix d'achats réels dans la mesure où il bénéficie lui-même de remises importantes de la part de ses fournisseurs, il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectification, que ce coefficient a bien été appliqué aux achats revendus comptabilisés ; que s'il ajoute que le taux de remise de 15 % retenu par le service ne tient pas compte des taux de remise et rabais effectifs qu'il pratiquait, à hauteur de 25 à 30 %, il n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que le taux de remise de 15 % serait insuffisant, les attestations établies par le personnel de l'entreprise comme l'existence alléguée d'une concurrence agressive ne pouvant constituer un élément suffisant de preuve ;

10. Considérant que s'agissant des exercices postérieurs, le requérant soutient que les coefficients moyens retenus par le service de 1,96 pour les skis, de 2,11 pour les chaussures, de 2,37 pour les vêtements et de 2,27 pour la rubrique " divers " résultent d'un relevé de prix effectué le 14 janvier 2009, alors que la reconstitution portait sur des exercices clos en 2006 et 2007 et que les pourcentages de remise accordés par ses fournisseurs étaient différents de ceux pratiqués sur les exercices antérieurs du fait de la fermeture du commerce Caretta sports, qui pratiquait des prix très agressifs ; que, toutefois, le service était fondé à procéder à un relevé de prix en 2009 et à utiliser ce relevé dans la mesure où l'entreprise n'a pu justifier ses prix de vente sur la période litigieuse ; qu'en outre, et à supposer même que les relevés effectués par le vérificateur comportent des omissions ou des erreurs, l'administration a suivi l'avis de la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et a ramené les coefficients de marge nette pondéré de 1,90 pour l'exercice 2006 et de 1,86 pour l'exercice clos en 2007 à 1,70 afin précisément de prendre en compte la proximité immédiate d'une entreprise concurrente proposant des prix extrêmement bas et des remises très élevées que le requérant aurait été obligé de suivre ; que par suite la méthode de reconstitution utilisée par l'administration ne saurait être regardée comme ayant conduit à une évaluation excessive des bases d'imposition ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à être déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007 ainsi que des pénalités correspondantes ;

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. C... de la somme que celui-ci demande au titre des frais d'instance exposés et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... et au ministre des finances et des comptes publics.

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N° 13MA00901 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00901
Date de la décision : 02/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02-02-01 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Rectification (ou redressement). Proposition de rectification (ou notification de redressement). Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : SCP GERBAUD - AOUDIANI - CANELLAS - CHARMASSON - COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-04-02;13ma00901 ?
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