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08/10/2015 | FRANCE | N°13MA03194

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 08 octobre 2015, 13MA03194


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA EMT Process a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2006 et 2007.

Par un jugement n° 1107689 du 25 juin 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 août 2013, MeA..., en sa qualité de mandataire liquidateur de la SA EMT Process, représenté p

ar MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2013 du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA EMT Process a demandé au tribunal administratif de Marseille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices 2006 et 2007.

Par un jugement n° 1107689 du 25 juin 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 août 2013, MeA..., en sa qualité de mandataire liquidateur de la SA EMT Process, représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2013 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les charges relatives au véhicule mis à la disposition de M. B...sont déductibles en application de l'article 39-1 du code général des impôts ;

- le prix de cession du stock de pièces ne peut être étayé d'éléments supplémentaires à ceux déjà communiqués en raison d'un contexte sensible qui justifie que la déductibilité des charges afférentes à la cession du stock de pièces soit admise ;

- s'agissant de la minoration d'actif net, ses facturations ne représentent pas la rémunération à titre principal d'une activité de location de matériel industriel mais d'essais industriels ; le prix indicatif représente le prix de vente des matériels concernés et non leur prix de revient ; les composants concernés constituent des stocks et non des immobilisations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 février 2014, le ministre de l'économie et des finances a conclu au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la société requérante a commis un acte anormal de gestion en prenant en charge la totalité des frais du véhicule mis à la disposition de M.B..., directeur non salarié de la SA EMT Process, sans procéder à des refacturations aux deux sociétés dans lesquelles M. B... exerçait des fonctions salariées ; la société requérante n'apporte aucun élément de nature à justifier les allégations selon lesquelles la charge totale de la rémunération et des frais de M. B...était répartie sur plusieurs sociétés et l'intérêt que pouvait avoir la SA EMT Process à ne pas refacturer aux deux autres sociétés une quote-part des frais ;

- s'agissant de la cession du stock de pièces détachées, il a été constaté lors du contrôle que la dépréciation forfaitaire appliquée à la valeur de ces matériels n'était pas justifiée et que la vente consentie à prix réduit à la société MPV Systems constituait une libéralité consentie par la requérante à cette société ; en appel, la requérante n'apporte aucun élément de nature à justifier la décote constatée et se borne à faire valoir sa situation difficile et reconnaît ne pas disposer de pièces justificatives.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Markarian,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que la SA EMT Process, placée en liquidation judiciaire le 6 septembre 2012 et qui exerçait une activité de vente de machines et outillages de pulvérisation, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2006 et 2007 et jusqu'au 31 octobre 2008 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale lui a notifié des rectifications en matière d'impôt sur les sociétés et en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; que la SA EMT Process a contesté devant le tribunal administratif de Marseille les seules impositions supplémentaires d'impôt sur les sociétés portant sur la minoration d'actif, sur des frais de véhicule et la cession d'un stock de pièces que l'administration a réintégrés dans les bénéfices imposables ; qu'en application des dispositions de l'article 1756 du code général des impôts, l'administration fiscale a procédé, par décision du 24 septembre 2012, à la remise des intérêts de retard correspondant aux droits en litige ; que Me A..., mandataire liquidateur de la SA EMT Process, relève appel du jugement du 25 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à la charge de cette dernière ;

Sur les frais de véhicule :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net imposable est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1 Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de la vérification de comptabilité de la SA EMT Process, l'administration fiscale a constaté que cette dernière avait pris en charge les frais liés au véhicule acquis par elle le 13 décembre 2005 et mis à la disposition exclusive de M.B..., directeur non salarié de cette société, à hauteur de 11 737 euros en 2006 et 12 981 euros en 2007 ; qu'à l'issue de la vérification, le service a limité la déductibilité de ces frais au tiers de ces dépenses en estimant que ces frais n'avaient pas été refacturés aux sociétés Caprim et MPV Systems, dont M. B...était salarié, et ne pouvaient, par suite, être regardés comme ayant été engagés dans le cadre d'une gestion normale ; que l'administration a estimé, au vu des conventions liant les trois sociétés, que le véhicule était également utilisé dans l'intérêt des sociétés Caprim et MPV Systems ; que la SA EMT Process, qui ne conteste pas cette utilisation pour les besoins de ces deux sociétés, se borne en appel, pour justifier d'une contrepartie à cette prise en charge, à indiquer que celle-ci compensait en fait l'absence de rémunération par ses soins de M. B...sans toutefois produire de contrat ou de quelconque document matérialisant un tel accord qui serait intervenu entre les trois sociétés ; que, dans ces conditions, l'administration rapporte la preuve qui lui incombe que la prise en charge totale du véhicule de M. B...par la société requérante est constitutive d'un acte anormal de gestion, justifiant la réintégration d'une partie des charges exposées dans les résultats des années 2006 et 2007 ;

Sur la provision pour dépréciation de stock :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...). 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt (...) L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient (...) " ; que, par cours du jour à la clôture de l'exercice, au sens des dispositions de l'article 38, il y a lieu d'entendre, s'agissant des marchandises dont une entreprise fait le commerce, le prix auquel, à cette date, cette entreprise peut, dans les conditions de son exploitation à cette même date, normalement escompter vendre les biens qu'elle possède en stock ;

5. Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes les charges, celles-ci comprenant, sous déduction des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que les événements en cours rendent probables à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...). S'agissant des produits en stock à la clôture d'un exercice, les dépenses non engagées à cette date en vue de leur commercialisation ultérieure ne peuvent, à la date de cette clôture être retenues pour l'évaluation de ces produits en application du 3 de l'article 38, ni faire l'objet d'une provision pour perte. " ; que la preuve du bien-fondé de la déduction d'une provision appartient au contribuable quelle que soit la nature de la procédure d'imposition suivie ;

6. Considérant que la SA EMT Process a facturé, le 29 décembre 2006, à la société MPV Systems la cession d'un stock de pièces détachées au prix de 5 138 euros hors taxe et comptabilisé une provision pour dépréciation de ces matériels pour lesquels elle avait constaté une décote ; que compte tenu du coefficient de marge indiqué par l'entreprise, le service a estimé que le coefficient appliqué au cas d'espèce représentait une décote de la valeur de l'ordre de 70 à 80 % du prix d'achat par l'entreprise et que la vente consentie ainsi à la société MPV Systems constituait une libéralité ;

7. Considérant que la SA EMT Process ne justifie ni de la probabilité du risque de vente à un prix inférieur ni du montant de la dépréciation ; qu'il est constant que l'entreprise, en utilisant cette méthode d'évaluation, n'a pris, d'aucune manière, en compte les éléments particuliers résultant des pratiques commerciales de sa propre exploitation et pouvant conférer aux matériels une valeur différente de celle pour laquelle ils étaient comptabilisés et se borne en appel à faire valoir la situation de la société après le départ de l'équipe dirigeante et la survenance d'un cambriolage ; qu'ainsi, cette méthode était insuffisamment précise pour justifier le bien-fondé de cette provision, qui, étant irrégulièrement constituée, n'était pas déductible pour la détermination des résultats imposables de l'entreprise ;

Sur la minoration d'actif :

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de la vérification de la SA EMT Process, qui avait une activité de négoce d'outillage industriel, le service a constaté que la société avait facturé la location ou la mise à disposition de machines qui n'avaient pas fait l'objet d'une inscription ni en stocks ni en immobilisations et a rehaussé son actif net à hauteur de la valeur vénale des matériels, soit 264 960 euros au titre de l'exercice clos pour 2006 ; que si la SA EMT Process soutient qu'il s'agissait en fait, non de location de matériels, mais d'une facturation d'essais industriels, les machines étant ainsi mises à la disposition des clients à titre d'essais, le service n'a pu, en l'absence de production des contrats portés en référence sur les dix-sept factures en cause, s'assurer de l'identité entre les machines louées et celles finalement vendues ; qu'ainsi que l'ont également relevé les premiers juges, si la SA EMT Process soutient que les prototypes prêtés aux clients appartenaient en fait à la société VFS Systems, la production de la copie du stock de cette société au 31 décembre 2008 ne permet pas de l'établir ; qu'au demeurant, le mandataire liquidateur indiquait lui-même dans son courrier du 29 juillet 2009, et sans plus d'éléments, que seules les biturbines TB appartenaient à VFS Systems ; que l'administration soutient, par ailleurs, sans être contredite, que certaines machines ont été louées plusieurs fois ; qu'en outre, s'il est soutenu que la valeur retenue par le service pour évaluer les actifs en litige comporte une marge commerciale de 60 % alors que seul le prix de revient aurait dû être pris en considération, il n'est établi ni que la valeur des machines en cause correspondrait à leur prix de vente ni le montant des marges alléguées ; que la comparaison de la facture de prêt du 17 juillet 2006 adressée à la société Kraftfoods RetD Inc. et la facture de vente du matériel du 31 octobre 2006 adressée à cette même société ne permet pas d'établir ni qu'il s'agit du même matériel ni que la valeur retenue par le service serait erronée ; que, dès lors, l'administration fiscale a pu, à bon droit, estimer que les machines faisant l'objet des factures en cause, et qui étaient sous le contrôle de la SA EMT Process, devaient être regardées comme des éléments durables de l'activité de l'entreprise ayant le caractère d'immobilisations ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " (...) Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. (...). " ; que si ces dispositions instituent une garantie contre les changements de doctrine de l'administration, qui permet aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, qui ajoutent à la loi ou la contredisent, c'est à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations ; que par suite la SA EMT Process ne peut utilement se prévaloir des instructions 4 A-2512 n°15 et 4 B-121 n°15 qui concernent les voitures de démonstration utilisées par un négociant en automobiles ;

10. Considérant que la SA EMT Process ne peut demander en tout état de cause que la minoration d'actif net soit compensée par la diminution corrélative de la valeur des stocks de composants concernés par les rectifications litigieuses dès lors que les actifs repris par l'administration fiscale n'avaient pas été comptabilisés en stocks ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MeA..., mandataire liquidateur de la SA EMT Process, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas la partie perdante en la présente instance verse au requérant la somme qu'il demande sur ce fondement ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Me A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à MeA..., en sa qualité de mandataire de la SA EMT Process et au ministre des finances et des comptes publics

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré à l'issue de l'audience du 17 septembre 2015, où siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président-assesseur,

- Mme Markarian, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.

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N° 13MA03194 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA03194
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net - Acte anormal de gestion.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS LEX PHOCEA

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-08;13ma03194 ?
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