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09/11/2015 | FRANCE | N°14MA01950

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2015, 14MA01950


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cabrol construction métallique a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Gruissan à lui payer la somme de 123 389,21 euros hors taxes, correspondant aux sommes qui lui seraient dues au titre des travaux réalisés dans le cadre de la construction d'un centre aqualudique. A défaut, elle demandait qu'une mesure d'expertise soit ordonnée.

Par un jugement n° 1201591 du 11 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 avril 2014 et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cabrol construction métallique a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Gruissan à lui payer la somme de 123 389,21 euros hors taxes, correspondant aux sommes qui lui seraient dues au titre des travaux réalisés dans le cadre de la construction d'un centre aqualudique. A défaut, elle demandait qu'une mesure d'expertise soit ordonnée.

Par un jugement n° 1201591 du 11 mars 2014, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 avril 2014 et le 21 novembre 2014, la société Cabrol construction métallique, représentée par Me B...D..., mandataire judiciaire, par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 11 mars 2014 ;

2°) à titre principal, de condamner la commune de Gruissan à lui payer la somme de 178 673,85 euros TTC, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2011, ainsi que de leur capitalisation ou, à titre subsidiaire, d'ordonner une mesure d'expertise ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Gruissan une somme de 4 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est suffisamment motivée ;

- le courrier de la commune de Gruissan du 21 juillet 2011 n'était pas la réponse définitive à la réclamation qu'elle avait présenté mais constituait une étape de la discussion dans le cadre du règlement de leur différend ;

- elle a droit à l'indemnisation des conséquences du retard dans l'exécution du marché imputable à la remise tardive des côtes de châssis pour la pose du bardage, à l'insuffisance d'informations sur les interventions d'autres sociétés, à l'accès difficile du chantier pour les nacelles, au retard dans la réalisation des travaux des sociétés Labastere et Progisol, à la dégradation de ses travaux par une autre société et enfin au déplacement du ponton ;

- elle a droit à l'indemnisation des travaux supplémentaires qui lui ont été demandés par le maitre d'oeuvre tenant à la perforation de tôle de bardage, à la reprise des lames brise-soleil et à la fourniture de bardage bois afin d'habiller le portail ;

- elle a droit à l'indemnisation de son préjudice lié au retard dans la levée des réserves dans le cadre de la réception de l'ouvrage ;

- la commune ne peut lui appliquer des pénalités de retard dès lors que le retard ne lui est pas imputable et n'a pas été constaté dans les formes prévues par le CCAP ;

- elle est fondée à demander à être indemnisée de son préjudice d'industrie ;

- le solde du marché doit être fixé à 178 673,85 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2014, la commune de Gruissan, représentée par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Cabrol construction métallique, en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête d'appel est insuffisamment motivée et par suite irrecevable ;

- la demande tendant au règlement du solde du marché à hauteur de 32 977,57 euros TTC est tardive et par suite irrecevable ;

- les autres moyens présentés par la société Cabrol construction métallique ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées le 16 décembre 2014, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la date ou de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et précisant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.

La clôture de l'instruction a été prononcée, avec effet immédiat, par ordonnance du 3 février 2015.

La réouverture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du 27 février 2015.

La clôture de l'instruction a été prononcée, avec effet immédiat, par ordonnance du 25 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Ouillon,

- les conclusions de M. Thiele, rapporteur public.

1. Considérant que la société Cabrol construction métallique, anciennement dénommée Etablissements Cabrol Frères, a été titulaire du lot n° 5 " vêture, bardage, bungalows extérieurs " du marché de travaux passé par la commune de Gruissan pour la réalisation d'un centre aquatique ; qu'à la suite d'un différend avec la personne publique sur le montant du décompte général du marché, la société Cabrol construction métallique a saisi le tribunal administratif de Montpellier d'une demande tendant au paiement de divers travaux réalisés au-delà du forfait contractuel, à l'indemnisation des préjudices subis du fait de retards de chantier qui ne lui étaient pas imputables et à la non application des pénalités de retard ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la société Cabrol construction métallique comme tardive puisque présentée plus de six mois après la notification de la décision prise par le maitre d'ouvrage, prévu par l'article 50.32 du cahier des clauses administratives générales ;

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. "

3. Considérant que contrairement à ce que soutient la commune de Gruissan, la requête, qui contient une critique du jugement de première instance, est suffisamment motivée au regard des exigences prévues par l'article précité ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Gruissan doit être écartée ;

Sur l'indemnisation des conséquences du retard dans l'exécution du marché :

4. Considérant que les difficultés rencontrées dans l'exécution d'un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnité au profit de l'entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que ces difficultés ont eu pour effet de bouleverser l'économie du contrat soit qu'elles sont imputables à une faute de la personne publique ;

5. Considérant que la société requérante demande l'indemnisation des dépenses supplémentaires occasionnées par la prolongation de la durée des travaux au-delà de la période contractuelle et qui serait imputable au retard de la société Labastere à lui communiquer des côtes de châssis et dans la réalisation des travaux dont cette dernière avait la charge, à la transmission tardive par les sociétés Cegelec Sud Ouest et Courcières des informations sur les réservations liées aux grilles extérieures, aux dégradations par la société DLM des travaux qu'elle avait réalisés et aux prestations demandées par le maître d'oeuvre tenant au déplacement d'un ponton et à la dépose de la sous-face du débord de couverture à fin de permettre à d'autres entreprises de réaliser leurs prestations ; que ce faisant, elle n'établit pas que les agissements en cause, qui auraient été à l'origine d'un décalage de la fin de chantier, résulteraient d'une faute de la commune de Gruissan ni qu'ils auraient eu pour conséquence de bouleverser l'économie du marché ;

6. Considérant que si la société Cabrol construction métallique fait valoir également que le retard pris par le chantier serait imputable à la commune de Gruissan qui n'aurait réalisé que tardivement les remblaiements et les préparations des abords du chantier, ce qui l'aurait notamment conduite à utiliser des nacelles à bras articulé, elle n'établit pas la réalité de ses allégations ni ne démontre que cette circonstance l'aurait retardée dans la réalisation des prestations dont elle avait contractuellement la charge et, par suite, que ces circonstances auraient occasionné pour elle des dépenses supplémentaires ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Cabrol construction métallique n'est pas fondée à demander l'indemnisation des dépenses supplémentaires occasionnées par la prolongation de la durée des travaux au-delà de la période contractuelle ni de la perte d'industrie qui en aurait résulté pour elle ;

Sur l'indemnisation des travaux supplémentaires :

8. Considérant que dans le cadre d'un marché à prix global et forfaitaire, l'entreprise titulaire dudit marché n'est fondée à réclamer un supplément de prix au maître d'ouvrage que pour autant qu'elle justifie qu'elle a effectué des travaux non prévus au marché, sur ordre de service, ou que ces travaux présentent un caractère indispensable à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art et ce quel qu'en soit le montant ; que le caractère forfaitaire du marché en litige ne fait pas obstacle à ce que l'entreprise sollicite une indemnisation au titre de travaux supplémentaires effectués, même sans ordre de service, dès lors que ces travaux étaient indispensables à la destination conforme de l'ouvrage, et alors même que ces travaux supplémentaires n'auraient pas bouleversé l'économie du contrat et n'auraient pas été imprévisibles ;

9. Considérant que la société Cabrol construction métallique demande à être indemnisée à raison de travaux supplémentaires de perforations de tôle de bardage, pour un montant de 19 282 euros hors taxes ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que l'article 5.7.4 du cahier des clauses techniques particulières du marché, intitulé " complément pour façon de perforation dans vêture en cassette isolante en tôle place d'acier laqué pour ventilation ", prévoyait que la façon de perforer, le dimensionnement et le taux de perforation seraient réalisés suivants les demandes du BET fluides ; que, comme il ressort du compte rendu de la réunion de chantier du 2 juillet 2009, la demande du BET Fluide, qui a été relayée auprès de la société requérante par le maître d'oeuvre, prévoyait que les perforations des cassettes métalliques seront au moins de 60 % de la surface en conservant un cadre non perforé en périphérie ; que, par suite, les travaux de perforation en cause effectués par la société requérante étaient ceux prévus au marché ; qu'elle n'est donc pas fondée à réclamer à ce titre un supplément de prix au maître d'ouvrage ;

10. Considérant que la société requérante demande le paiement d'une somme de 4 118 euros correspond au montant des travaux tendant à la mise en place de fixations complémentaires sur les lames brise-soleil ; que, toutefois, cette somme correspond non à des travaux supplémentaires qui auraient été exigés par le maître d'ouvrage, mais à de simples travaux de reprise destinés à assurer la conformité de ces lames brise-soleil aux stipulations du contrat ;

11. Considérant que la société Cabrol construction métallique demande le remboursement de travaux de remplacement de clins de bardage qui auraient été cassés à la suite d'une mauvaise manipulation de l'exploitant du site ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que la société requérante aurait reçu une instruction formelle du maître d'oeuvre de réaliser cette prestation non prévue ou que celle-ci aurait été rendue nécessaire pour rendre l'ouvrage conforme à sa destination ; que, par ailleurs, la commune de Gruissan conteste l'existence d'une mauvaise manipulation qui aurait endommagé les clins de bardage ;

12. Considérant, enfin, que si la société Cabrol construction métallique demande à être indemnisée à raison de travaux tenant à la fourniture d'un bardage en bois à l'entreprise en charge du lot " serrurerie " afin d'habiller un portail, la commune de Gruissan soutient, sans être utilement contredite, que ces travaux ont été réglés à la société requérante par l'entreprise en charge de ce lot " serrurerie " ; que, par suite, la société Cabrol construction métallique n'est pas fondée à en demander le règlement au maître de l'ouvrage ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Cabrol construction métallique n'est pas fondée à demander au maître d'ouvrage un supplément de prix au titre de travaux supplémentaires ;

Sur les coûts imputables aux réserves formulés dans le cadre des opérations préalable à la réception des travaux :

14. Considérant que la société Cabrol construction métallique demande à être indemnisée des dépenses occasionnées par les réserves formulées dans le cadre des opérations préalables à la réception des travaux qui ont eu lieu de juillet à septembre 2011 ; que, toutefois, la société requérante n'établit pas que le maître de l'ouvrage aurait commis des fautes dans le cadre des opérations préalables à la réception ; qu'elle ne démontre pas, non plus, avoir subi un préjudice du fait du délai écoulé entre la date de levée des réserves sur les travaux qu'elle a réalisés et la date de réception de l'ouvrage ;

Sur les pénalités de retard :

15. Considérant que les travaux confiés à la société Cabrol construction métallique devaient être initialement achevés le 15 mars 2010 ; qu'il résulte de l'instruction que ce délai contractuel de fin des travaux a été reporté de 29 jours, la réception de l'ouvrage étant prévue alors pour le 16 juillet 2010 ; qu'il résulte également de l'instruction que les travaux réalisés par la société Cabrol construction métallique ont été achevés en fait le 14 octobre 2010 et que la réception de l'ouvrage est intervenue le 4 novembre 2010 ; qu'en application des stipulations de l'article 6.4.1 du cahier des clauses administratives particulières, la commune de Gruissan lui a infligé des pénalités de retard d'un montant de 39 000 euros, qui n'ont été calculées que sur une période du 29 mai au 14 octobre 2010 soit 133 jours, afin de tenir compte de la défaillance de son sous-traitant ; qu'en réponse à la réclamation de la société Cabrol construction métallique présentée le 24 mai 2011, la commune a proposé de ramener le montant de ces pénalités à 20 000 euros ; que la seule circonstance que la société requérante ne se serait pas vu signifier en cours de chantier le décompte des pénalités n'est pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de l'application de ces pénalités du fait du retard dans l'exécution des travaux qui lui étaient confiés ; qu'au demeurant, la commune soutient qu'au cours de plusieurs réunions de chantier le maître d'oeuvre a informé la société requérante que du fait de ce retard, elle pourrait se voir appliquer des pénalités ; que, par suite, la société Cabrol construction métallique n'est pas fondée à contester le bien-fondé des pénalités de retard, dont le montant n'est pas excessif, qui lui ont été infligées ;

Sur le solde du marché :

16. Considérant que compte tenu notamment du montant initial du marché et des pénalités de retard, le décompte final a été arrêté par la commune de Gruissan à la somme négative de 52 163,36 euros ; que la société Cabrol construction métallique, qui n'établit pas, comme il a été dit, avoir supporté des dépenses supplémentaires du fait de l'exécution de ce marché, n'en conteste pas utilement le solde ; que, par suite sa demande de versement d'une somme de 31 100,36 euros toutes taxes comprises au titre du solde du marché doit être rejetée ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Cabrol construction métallique n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Gruissan, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Cabrol construction métallique demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Cabrol construction métallique la somme que la commune de Gruissan réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Cabrol construction métallique est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Gruissan sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me B...D...en qualité de mandataire judiciaire de la société Cabrol construction métallique et à la commune de Gruissan.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2015, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- M. Ouillon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2015.

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N° 14MA01950


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA01950
Date de la décision : 09/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-02 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Règlement des marchés.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Sylvain OUILLON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : SCPI BUGIS BALLIN RENIER ALRAN PERES

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-11-09;14ma01950 ?
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