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08/12/2015 | FRANCE | N°13MA04828

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre-formation à 3, 08 décembre 2015, 13MA04828


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...et ses enfants, A...etC..., ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'imposition à laquelle ils ont été assujettis au titre d'une plus-value immobilière réalisée en 2006, à hauteur de la somme de 236 776,53 euros.

Par un jugement n° 1100779 du 25 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2013, Mme D...B...et ses enfants A...etC..., rep

résentés par la SELARL Saint Marcoux, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...B...et ses enfants, A...etC..., ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de l'imposition à laquelle ils ont été assujettis au titre d'une plus-value immobilière réalisée en 2006, à hauteur de la somme de 236 776,53 euros.

Par un jugement n° 1100779 du 25 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 décembre 2013, Mme D...B...et ses enfants A...etC..., représentés par la SELARL Saint Marcoux, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 25 octobre 2013 ;

2°) d'annuler la décision du directeur des services fiscaux en date du 7 février 2011 rejetant leur réclamation préalable formée en 2010 ;

3°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée, à hauteur de la somme de 236 776, 53 euros.

Ils soutiennent que :

- leur requête est recevable dès lors que la décision de rejet de la réclamation préalable leur est commune ;

- à la suite de la vente d'un bien immobilier situé avenue du Roi Albert à Cannes, ils ont été soumis aux dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts ;

- étant résidents fiscaux américains, ils auraient dû bénéficier de la convention franco-américaine, et par là même, bénéficier des dispositions de l'article 150 U-II 2° du code général des impôts ; s'agissant de la première vente d'un bien situé en France et du fait de leur résidence fiscale en France de 1981 à 1983, l'article 150 U-II 2° du code général des impôts les exonère de la plus-value contestée ;

- dans le calcul de la plus-value immobilière ne figure pas le prix d'achat.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 avril 2014, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que :

- la requête est irrecevable s'agissant de Mme D...B...dès lors que celle-ci n'a pas présenté de réclamation préalable relative à la plus-value contestée ; la requête est en outre irrecevable en ce qu'elle a été présentée collectivement par Mme D... B..., qui n'a pas été imposée, et par MM. A...et C...B...qui ont été imposés d'une manière distincte ;

- aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la convention fiscale franco-américaine du 31 août 1994 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant que Mme D...B...et ses fils MM. A...et C...B..., ressortissants américains non résidents fiscaux en France, qui possédaient un bien immobilier à Cannes, n'ont déclaré qu'en 2008 la plus-value immobilière résultant de la vente de ce bien aux enchères publiques en 2006 ; que, d'une part, Mme B...n'étant pas imposable n'a pas été soumise au prélèvement de 33,33 % prévu par l'article 244 bis A du code général des impôts ; que, d'autre part, MM. A...et C...B...ont payé le montant de l'impôt correspondant à la plus-value réalisée, assorti de pénalités de retard, sur la base de leurs déclarations ; qu'ils ont vainement présenté une réclamation auprès de l'administration, tendant à que les sommes payées en 2008 soient restituées en raison du droit à exonération prévu par les dispositions de l'article 150 U-II 2° du code général des impôts dont ils se prévalaient ; que Mme D... B..., M. A... B...et M. C...B...relèvent appel du jugement en date du 25 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'imposition à laquelle ils ont été assujettis au titre de la plus-value immobilière réalisée en 2006, à hauteur d'une somme globale de 236 776,53 euros ;

Sur la recevabilité de la requête :

En ce qui concerne MmeB... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial (...) de l'administration des impôts... " ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de la lettre en date du 9 octobre 2009 adressée à l'administration par l'avocat de MmeB..., que cette dernière n'a pas effectué de déclaration de plus-value dès lors qu'elle n'était pas imposable à ce titre ; qu'une action contentieuse ne peut être exercée que par le redevable de l'impôt ; que, par suite, Mme B...ne justifie d'aucun intérêt lui donnant qualité pour demander devant le juge de l'impôt la décharge d'une imposition dont elle n'a pas eu à s'acquitter ; que, dans ces conditions, ainsi que le fait valoir le ministre, la présente requête est irrecevable en tant qu'elle est formée par Mme B...;

En ce qui concerne M. A...B...et M. C...B...:

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 197-1 du livre des procédures fiscales : " Les réclamations doivent être individuelles. Toutefois, peuvent formuler une réclamation collective : a) Les contribuables imposés collectivement... " ; qu'une réclamation collective est recevable dès lors que les contribuables ont été imposés collectivement ou, lorsqu'il s'agit d'un même impôt, que l'affaire ne comporte pas de conditions d'examen distinctes en ce qui concerne chacun des requérants ;

4. Considérant que MM. A...et C...B...ont adressé au service une première réclamation préalable collective en date du 11 septembre 2009 rejetée par deux décisions en date du 21 octobre 2009, puis une seconde réclamation préalable collective en date du 22 décembre 2010 rejetée le 7 février 2011, par lesquelles ils demandaient la restitution de l'imposition dont ils avaient, chacun, fait l'objet à raison de la plus-value réalisée lors de la vente de leur bien aux enchères publiques ; qu'il résulte de l'instruction que les réclamations soumises au service n'impliquaient pas de conditions d'examen distinctes en ce qui concerne les frèresB... ; qu'en tout état de cause, il n'est pas allégué que l'administration aurait invité les intéressés à régulariser leurs réclamations ; que, par suite, celles-ci étaient recevables, avec cette conséquence que le ministre n'est pas fondé à soutenir que la présente requête serait irrecevable en tant qu'elle a été introduite par MM. A...et C...B...;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes :

5. Considérant que les décisions par lesquelles l'administration statue sur les réclamations d'un contribuable qui entend contester la créance du Trésor, en ce qui concerne les impositions auxquelles il a été assujetti, ne constituent pas des actes détachables de la procédure d'imposition ; qu'elles ne peuvent, en conséquence, être déférées à la juridiction administrative par la voie du recours pour excès de pouvoir et ne peuvent faire l'objet d'un recours contentieux que dans le cadre de la procédure prévue aux articles L. 199 et suivants du livre des procédures fiscales ; que, par suite, les conclusions de MM. B...tendant à l'annulation de la décision du 7 février 2011 par laquelle le directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes a statué sur leur réclamation préalable du 22 décembre 2010 sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 244 bis A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. 1. Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B (...) sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles (...) / 2. 1° Lorsque le prélèvement est dû par des contribuables assujettis à l'impôt sur le revenu, les plus-values sont déterminées selon les modalités définies : / a. Au I et aux 2° à 6° du II de l'article 150 U, aux II et III de l'article 150 UB et aux articles 150 V à 150 VE (...) " ; qu'aux termes de l'article 150 U du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - (...) les plus-values réalisées par les personnes physiques (...) lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) / II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : (...) / 2° Qui constituent l'habitation en France des personnes physiques, non résidentes en France, (...) à la double condition que le cédant ait été fiscalement domicilié en Francede manière continue pendant au moins deux ans à un moment quelconque antérieurement à la cession et qu'il ait la libre disposition du bien au moins depuis le 1er janvier de l'année précédant celle de cette cession. (...) " ; que par ailleurs aux termes de l'article 4 B du même code : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : / a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques (...) " ;

En ce qui concerne l'assujettissement au prélèvement de l'article 244 bis A du code général des impôts :

Au regard de la loi interne :

7. Considérant que le bien immobilier appartenant à la famille B...a été vendu le 30 novembre 2006 lors d'une vente aux enchères publiques pour un montant de 860 000 euros ; qu'il résulte de l'instruction que MM. A...et C...B..., ressortissants américains, étaient fiscalement domiciliés aux Etats-Unis au moment de la cession de ce bien ; que par suite, les requérants entraient, ce qu'ils ne contestent d'ailleurs pas, dans les prévisions des dispositions de l'article 244 bis A précité du code général des impôts relatif au prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles ;

Au regard de la convention franco-américaine du 31 août 1994 :

8. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 13 de la convention franco-américaine du 31 août 1994 : " 1. Les gains provenant de l'aliénation de biens immobiliers situés dans un Etat contractant sont imposables dans cet Etat. (...) " ; que la France est donc en droit, en vertu de ces stipulations, d'imposer les plus-values immobilières résultant de la cession de biens se situant sur son territoire ; qu'il s'ensuit que l'article 24 de la même convention fixant les dispositions en vue d'éviter la double imposition entre les deux Etats contractants ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce ;

9. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 25 de cette même convention : " 1. Les personnes physiques qui sont des nationaux d'un Etat contractant et des résidents de l'autre Etat contractant ne sont soumises dans cet autre Etat à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celles auxquelles sont ou pourront être assujetties les personnes physiques qui sont des nationaux et des résidents de cet autre Etat, et qui se trouvent dans la même situation. (...) " ; qu'il résulte de ces stipulations que la clause de non-discrimination qu'elles instaurent ne s'applique qu'aux personnes physiques, nationaux d'un Etat contractant et résidents de l'autre Etat contractant ; que tel n'est pas le cas des requérants, ceux-ci étant nationaux des Etats-Unis d'Amérique et n'étant pas résidents en France ;

En ce qui concerne le droit à exonération :

10. Considérant que MM. A...et C...B...ont été imposés d'après leurs déclarations ; que, par suite, en application des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, il leur incombe d'apporter la preuve qu'ils remplissaient les conditions pour bénéficier de l'exonération de plus-value immobilière dont ils se prévalent ;

11. Considérant que si les requérants soutiennent qu'ils relevaient du droit à exonération prévu par les dispositions précitées de l'article 150 U du code général des impôts, ils se bornent à produire, s'agissant de la mère des requérants, une carte de séjour temporaire valable du 23 décembre 1980 au 21 juin 1983 et un permis de conduire délivré le 5 juillet 1982, s'agissant de M. C...B..., un diplôme délivré en France le 25 juin 1982, un permis de conduire délivré le 26 août 1981 et une carte d'étudiant non datée, tandis que pour sa part M. A... B...ne fournit aucune preuve concernant sa domiciliation en France durant les mêmes années ; que les documents susmentionnés, eu égard notamment à leur caractère épars, sont insuffisants pour établir que la famille B...aurait eu, au sens des dispositions précitées de l'article 4 B précité du code général des impôts, son domicile fiscal en France de manière continue pendant deux années consécutives à un moment quelconque antérieurement à la cession du bien en litige ; que, par suite, et alors, au surplus que les requérants n'ont produit aucun élément venant démontrer qu'ils auraient eu la libre disposition du bien en cause au moins depuis le 1er janvier 2005, MM. C...et A...B...ne peuvent se prévaloir du droit à exonération qu'ils revendiquent ; que dans ces conditions c'est à bon droit que le service a rejeté leur réclamation tendant à ce que leur soient appliquées les dispositions de l'article 150 U du code général des impôts ;

En ce qui concerne le montant de la plus-value soumise au prélèvement de l'article 244 bis A du code général des impôts :

12. Considérant qu'aux termes de l'article 150 VB du code général des impôts : " Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il a été stipulé dans l'acte. (...) En cas d'acquisition à titre gratuit, le prix d'acquisition s'entend de la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation à titre gratuit. II. - Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : 1° De toutes les charges et indemnités mentionnées au deuxième alinéa du I de l'article 683 ; 2° Des frais afférents à l'acquisition à titre gratuit définis par décret... " ;

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le bien en cause n'a pas été acquis par les frères B...à titre onéreux mais par succession le 2 octobre 2002 ; qu'à ce titre, ils ont d'ailleurs déclaré un prix de cession affecté d'un coefficient d'abattement de 30%, en application des dispositions combinées des articles 150 VB précité et 777 du code général des impôts ; que les requérants ne produisent aucun élément qui justifierait, au sens de l'article 150 VB, une quelconque diminution de la plus-value brute réalisée ; que, par suite, c'est à juste titre que l'administration a maintenu entre les mains des requérants les droits acquittés au titre de l'imposition sur la plus-value prévue par les dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. A...etC... B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande tendant à la restitution du prélèvement prévu à l'article 244 bis A du code général des impôts, d'un montant en droits de 98 986,77 euros pour chacun d'entre eux, assorti de pénalités de retard à hauteur de 38 803 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse aux requérants la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D...B..., M. A...B...et M. C...B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., à M. A...B..., à M. C... B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- M. Martin, président assesseur,

- Mme Chenal-Peter, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 décembre 2015.

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N° 13MA04828 5

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre-formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA04828
Date de la décision : 08/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values immobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: M. Laurent MARTIN
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : SELARL SAINT MARCOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-08;13ma04828 ?
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