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24/03/2016 | FRANCE | N°14MA00477

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 24 mars 2016, 14MA00477


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre au titre des années 2007 et 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2007 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201894, 1201897 du 26 novembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2014, et deux mémoires complé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Marseille la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre au titre des années 2007 et 2008 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2007 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1201894, 1201897 du 26 novembre 2013, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 janvier 2014, et deux mémoires complémentaires enregistrés les 10 février et 22 février 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 novembre 2013 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses avec le versement des intérêts de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la reconstitution des bases imposables effectuée par le service comporte des anomalies de nature à remettre en cause le bien-fondé des impositions litigieuses ; la détermination du coefficient de marge brute, à partir d'une simple moyenne, sans autre pondération, et sur un échantillon restreint ne correspond pas à la réalité de l'activité de l'entreprise ;

- il n'a fait preuve d'aucune agressivité envers le service vérificateur ; son attitude passive s'apparente plus à un état dépressif qu'à une quelconque volonté de faire obstacle au contrôle ; le service n'a pas établi la situation d'opposition à contrôle fiscal qui seule permettait d'infliger la pénalité prévue à l'article 1732 du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2014, et un mémoire complémentaire enregistré le 12 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le tribunal ne pouvait statuer, par un seul jugement, sur les litiges qui lui étaient soumis ;

- les impositions en litige ayant été établies suivant la procédure de taxation d'office en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée et la procédure d'évaluation d'office en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux, du fait de l'absence de dépôt des déclarations et de la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve de l'exagération des bases d'imposition incombe au requérant en application des articles L. 193 et R. 193-1 du même livre ;

- s'agissant de l'impôt sur le revenu, et en l'absence de comptabilité, le service a dû exercer son droit de communication auprès des banques et des clients et mettre en oeuvre l'assistance administrative internationale ; la reconstitution a tenu compte d'une corrélation entre les achats venant des fournisseurs et les ventes réalisées à partir de ces achats ; le requérant se borne à viser certaines factures pour relever une disparité du coefficient de marge brute sans proposer une méthode de reconstitution plus précise ; concernant l'année 2008, le relevé de comptabilité produit, établi après le contrôle fiscal, est dénué de valeur probante ;

- s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, l'année 2007 étant seule en litige, la déclaration dont le requérant demande la prise en compte a été établie a posteriori ;

- l'application de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts est exclusive de toute appréciation du comportement du contribuable ; en l'espèce, celui-ci a tout fait pour s'opposer au contrôle sur place ; par suite, le moyen selon lequel M. C... serait resté passif pour des raisons médicales manque en droit et en fait.

Il soutient, en outre, que les intérêts de retard appliqués aux droits de taxe sur la valeur ajoutée ont été intégralement remis ; la décharge des intérêts de retard appliqués aux cotisations d'impôt sur le revenu doit en revanche être prononcée.

Les parties ont été informées le 2 février 2016, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que la Cour est susceptible de prononcer la décharge des intérêts de retard, qui doivent être remis en cas d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire en application du I de l'article 1756 du code général des impôts.

Le ministre des finances et des comptes publics a présenté un nouveau mémoire le 8 mars 2016.

Il conclut au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement de 2 483 euros qu'il prononce et au rejet du surplus des conclusions de la requête de M. C..., par les moyens qu'il a précédemment invoqués.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Markarian,

- et les conclusions de M. Maury, rapporteur public.

1. Considérant que M. C... a fait l'objet, au titre de son activité de commerce de matériel pour personnes handicapées, d'une vérification de comptabilité portant sur la période courant du 1er avril 2007, début de son activité, au 31 décembre 2008 ; qu'en l'absence de réponse de sa part aux avis de vérification qui lui ont été adressés ou de présentation aux rendez-vous qui lui avaient été fixés, un procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal a été dressé à son encontre le 27 avril 2010 ; que l'administration fiscale a établi, au titre des périodes et années vérifiées, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge personnelle de M. C... ainsi que des suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme C..., assortis, dans l'un et l'autre cas, de la majoration de 100 % prévue à l'article 1732 du code général des impôts ; qu'après avoir été saisi de deux demandes contentieuses formées par M. C..., l'une dirigée contre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et l'autre tendant à la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu, le tribunal administratif de Marseille a joint ces demandes et les a rejetées par un jugement en date du 26 novembre 2013 ; que M. C... relève appel de ce jugement ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant, d'une part, que, par décision en date du 28 février 2012, antérieure à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a prononcé le dégrèvement, à concurrence de 1 921 euros, des intérêts de retard appliqués aux droits de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été réclamés à M. C... au titre de la période du 1er avril 2007 au 31 décembre 2008 ; que, dans cette mesure, M C...n'est pas, dans le dernier état de ses conclusions, recevable à demander la décharge de cette imposition ;

3. Considérant, d'autre part, que, par une décision du 26 février 2016, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur a prononcé le dégrèvement, à concurrence de la somme de 2 483 euros, des intérêts de retard appliqués aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. C... a été assujetti au titre des années 2007 et 2008 ; que les conclusions de la requête de M. C... sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Considérant que, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires, y compris lorsqu'elles concernent des contribuables ou des impositions distincts ; que la jonction est, par elle-même, insusceptible d'avoir un effet sur la régularité de la décision rendue et ne peut, par suite, être contestée en tant que telle devant le juge d'appel ;

5. Considérant qu'en se bornant à critiquer la jonction opérée par le tribunal administratif de Marseille, le ministre, qui ne fait état d'aucune irrégularité entachant le jugement attaqué qui aurait résulté de cette jonction, n'est pas fondé à en demander l'annulation ;

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition " ; qu'en l'absence de dépôt de déclaration de résultats et de déclaration récapitulative de taxe sur la valeur ajoutée, le service a fait application, respectivement, des procédures d'évaluation et de taxation d'office prévues par les dispositions de l'article L. 68 et du 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et par le 3° de l'article L. 66 du même livre et compte tenu de l'opposition de M. C... au contrôle fiscal des dispositions de l'article L. 74 du même livre ; que la charge de la preuve du caractère excessif de la reconstitution des bases imposables incombe, par suite, à M. C... ;

En ce qui concerne l'impôt sur le revenu :

7. Considérant que, pour reconstituer les bases d'imposition à l'impôt sur le revenu de M. C... dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, le service vérificateur a, en l'absence de toute comptabilité, exercé son droit de communication auprès des banques et des clients de l'entreprise et mis en oeuvre l'assistance administrative auprès des autorités italiennes ; que, pour l'année 2007, le service a ainsi constaté au vu des éléments remis par le Crédit Mutuel, où M. C... détenait un compte courant pour son activité professionnelle, que les remises de chèques s'élevaient à 47 098,68 euros alors que le montant des acquisitions intracommunautaires enregistré dans la base de données SEIC s'élevait pour le fournisseur italien Vimec SRL à 82 565 euros laissant ainsi supposer que tous les chèques de clients n'avaient pas été déposés sur ce compte courant ; que, de même, l'analyse des factures de ce même fournisseur italien Vimec SRL pour 2008 a permis au service de constater que des achats de matériels avaient été effectués par M. C... pour des clients dont les chèques n'avaient pas été retrouvés sur ce compte courant ; que le service, qui a ainsi mis en évidence que toutes les recettes professionnelles n'avaient pas été déposées sur le compte courant dont M. C... disposait au Crédit Mutuel, a dû, en l'absence de présentation de toute comptabilité, reconstituer les recettes professionnelles des années 2007 et 2008 à partir des achats de matériels effectués auprès des fournisseurs italiens en établissant un coefficient de marge brute déterminé à partir des achats de matériels effectués en 2008 auprès du fournisseur italien Vimec SRL et des factures clients établies en 2008 et obtenues dans le cadre du droit de communication ou ayant fait l'objet de chèques déposés sur le compte courant de M. C... ; que, sur la base de ce coefficient de bénéfice brut moyen de 1,60, le service a ainsi reconstitué les recettes hors taxes pour un montant de 125 217 euros en 2007 et de 229 036 euros en 2008 ;

8. Considérant que le service a pris en compte dix-neuf factures d'achat représentant presque la moitié des factures de la société italienne Vimec SRL de l'année 2008 pour aboutir, en comparant le prix d'achat et le prix de revente des matériels figurant sur ces factures à un coefficient de bénéfice brut moyen de 1,60 ; que la seule affirmation selon laquelle l'échantillon de factures retenues par le service conduit à majorer indûment ce coefficient dans la mesure où la grande majorité des factures émises par l'entreprise en 2008 sont d'un montant inférieur à 10 000 euros ne peut qu'être écartée dès lors qu'il n'est pas démontré que l'échantillon retenu, qui comporte majoritairement des factures inférieures à 10 000 euros, ne serait pas représentatif de l'activité de l'entreprise ; que, si le requérant soutient en outre que cette méthode n'est pas fiable, il ne conteste pas que le vérificateur a été contraint d'y recourir y compris pour l'année 2007 par l'absence de présentation de sa comptabilité et ne propose aucune méthode alternative, les relevés de comptabilité établis par le requérant après le contrôle fiscal étant dépourvus de valeur probante ; qu'en outre, le requérant n'établit pas que le service aurait pris en compte à tort deux crédits qui n'auraient pas été imposables correspondant selon lui à un versement d'un montant de 12 000 euros effectué le 23 mai 2007 à l'occasion de la succession de sa mère et au versement d'un montant de 18 000 euros effectué le 8 octobre 2007 correspondant à un prêt bancaire ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

9. Considérant que le requérant, qui ne conteste en appel que les rappels qui lui ont été réclamés pour la période du 1er avril 2007 au 31 décembre 2007, ne peut se prévaloir utilement d'une déclaration établie après le contrôle fiscal par son expert comptable ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération des bases d'imposition retenues par l'administration fiscale ;

Sur l'application de la pénalité pour opposition à contrôle fiscal :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 1732 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 : " La mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraîne : / a. L'application d'une majoration de 100 % aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l'Etat (...) " ;

12. Considérant que les impositions en litige ont été évaluées selon la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, laquelle s'applique en cas d'opposition à la mise en oeuvre du contrôle fiscal ; que cette procédure doit être regardée comme ayant été mise en oeuvre à bon droit à l'encontre de M. C... dès lors qu'il résulte de l'instruction, et notamment des mentions non sérieusement contestées des propositions de rectification qui lui ont été notifiées le 14 décembre 2010, qu'après avoir adressé le 19 novembre 2009 un premier avis de vérification de comptabilité, revenu avec la mention " non réclamé ", qui prévoyait une intervention le 8 décembre 2009, le requérant a informé le service par courrier recommandé du 2 décembre qu'il ne pourrait être présent ; que le requérant ne s'est pas présenté aux quatre rendez-vous suivants ; que les agissements répétés de M. C... établissent la situation d'opposition à contrôle fiscal ; que l'administration établit, en se prévalant de cette situation, le bien-fondé de la pénalité infligée à M. C... au taux de 100 % sur le montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er avril 2007 au 31 décembre 2008 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titres des années 2007 et 2008 ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande en décharge des impositions et majorations auxquelles il reste assujetti après le dégrèvement prononcé au cours de l'instance d'appel ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui ne peut être regardé, dans la présente instance, comme ayant la qualité de partie perdante, verse à M. C... la somme qu'il réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 2 483 (deux mille quatre cent quatre-vingt-trois) euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. C... relatives aux intérêts de retard appliqués aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre des finances et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré à l'issue de l'audience du 10 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bédier, président de chambre,

- Mme Paix, président assesseur,

- Mme Markarian, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 mars 2016.

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N° 14MA00477 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00477
Date de la décision : 24/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Détermination du revenu imposable.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Ghislaine MARKARIAN
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : MONDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-03-24;14ma00477 ?
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