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11/04/2017 | FRANCE | N°15MA00703

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 11 avril 2017, 15MA00703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 9 octobre 2012 par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours administratif préalable présenté le 16 mars 2012 devant la commission des recours des militaires à l'encontre de la décision du 23 janvier 2012 portant régularisation d'un trop-perçu de rémunération d'un montant de 30 545,34 euros.

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Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 9 octobre 2012 par laquelle le ministre de la défense a rejeté son recours administratif préalable présenté le 16 mars 2012 devant la commission des recours des militaires à l'encontre de la décision du 23 janvier 2012 portant régularisation d'un trop-perçu de rémunération d'un montant de 30 545,34 euros.

Par un jugement n° 1203304 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 février 2015 et le 5 août 2016, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 18 décembre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du ministre de la défense du 9 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens de l'instance.

Il soutient que :

- la décision du 9 octobre 2012 a été prise en méconnaissance de l'article R. 4125-8 du code de la défense ;

- il bénéficie, sur le fondement de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, d'une ICM au taux de base à compter du 1er novembre 2000 ;

- l'administration doit tenir compte, pour établir le montant de la créance, de l'ICM au taux non logé (TNL) dont il devait bénéficier du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 ;

- le montant réclamé au titre du " Compl Forf CM TNL " est supérieur au montant qu'il a effectivement perçu ;

- les créances de l'Etat concernant les paiements indus versés au cours de la période du 1er novembre 2000 au 23 janvier 2007 étaient prescrites à la date du 23 janvier 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2015, le ministre de la défense conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable ;

- à titre subsidiaire, aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, modifiée notamment par la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 ;

- la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile ;

- le code civil ;

- le code de la défense ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Massé-Degois,

- et les conclusions de M. Roux, rapporteur public.

1. Considérant que M. C..., adjudant de l'armée de terre, relève appel du jugement du 18 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 octobre 2012 du ministre de la défense rejetant son recours administratif préalable présenté le 16 mars 2012 devant la commission des recours des militaires à l'encontre la décision du 23 janvier 2012 lui prescrivant de reverser un trop-perçu de rémunération d'un montant de 30 545,34 euros au titre de la période du 1er novembre 2000 au 30 mai 2011 ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête par le ministre de la défense :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ;

3. Considérant que la requête d'appel de M. C... contient l'exposé des conclusions soumises au juge, assorties de l'exposé de faits et moyens, conformément à l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir opposée en défense doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision attaquée :

En ce qui concerne la régularité de la procédure :

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense : " I.-Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 4125-8 du même code : " La procédure d'instruction des recours est écrite. La commission ne peut statuer qu'après que l'intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les observations du service gestionnaire dont relève M. C... et présentées à la commission des recours des militaires le 23 juillet 2012 à la suite du recours introduit par celui-ci le 16 mars précédent, ont été transmises à l'intéressé par une lettre datée du 25 juillet 2012 ; que cette lettre, adressée au domicile de M. C...par courrier simple, lui demandait de faire connaître ses observations " dans un délai de 10 jours à compter de la présente lettre " ; que M. C... admet avoir pris connaissance de ce courrier le 17 août 2012 à son retour de permission annuelle au Portugal ; que M. C..., qui a d'ailleurs présenté des observations le 10 octobre 2012, ne soutient pas, et il ne résulte au demeurant pas de l'instruction, qu'il aurait été empêché d'adresser ses observations dans le délai de 10 jours à compter du 17 août 2012 ni qu'il se serait trouvé dans l'impossibilité de les présenter avant le 9 octobre 2012, date à laquelle la commission des recours des militaires auprès du ministre de la défense s'est prononcée et le ministre de la défense a pris sa décision de rejet au vu de l'avis émis par cette commission ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure suivie devant la commission des recours des militaires ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

En ce qui concerne la prescription :

6. Considérant que la prescription quinquennale, applicable aux faits en litige, prévue à l'article 2224 du code civil est de même durée que celle qui figurait à l'article 2277 du même code dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la loi susvisée du 17 juin 2008 qui était applicable aux actions en répétition de l'indu exercées par l'Etat à l'encontre des agents publics à raison de rémunérations indûment versées ; que le point de départ de la prescription prévue à l'article 2277 du code civil, dans sa rédaction applicable aux rémunérations versées avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 et aux actions en restitution de rémunérations versées par une personne publique à un agent public, est la date à laquelle la créance devient exigible ; que, sauf disposition législative contraire, en cas de fraude ayant pour effet de maintenir la personne publique ou l'agent public titulaire d'un droit à paiement ou à restitution dans l'ignorance de celui-ci et de le priver de la possibilité de l'exercer, le délai de prescription ne commence à courir qu'à compter de la date à laquelle l'ignorance de ce droit a cessé ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C... a perçu des éléments de rémunération au titre de la situation familiale déclarée à l'administration selon laquelle il vivait en concubinage avec une enfant à charge née en 1997 ; que, par un courrier du 25 mai 2011 émanant de son ex-concubine, l'administration a été informée de ce que le juge aux affaires familiales près le tribunal de grande instance de Carpentras, par une ordonnance du 22 novembre 2000, avait fixé la résidence habituelle de la fille du requérant au domicile de sa mère en confiant à celle-ci l'autorité parentale ; que M. C... ne conteste pas que les attestations établies par la caisse d'allocations familiales ont confirmé que la mère de sa fille avait perçu les allocations familiales la concernant depuis le 1er janvier 2000 ni que les services fiscaux ont confirmé qu'il ne justifiait d'aucun droit au titre de la loi fiscale à déclarer un enfant à charge ainsi qu'il l'a fait ; que, dès lors, M. C..., en s'abstenant d'informer le service gestionnaire de la modification de sa situation familiale pendant plus de dix ans alors qu'il continuait de percevoir des suppléments de rémunération au titre de charges de famille, a maintenu, par ses déclarations erronées, la personne publique dans l'ignorance de l'indu ; que cette ignorance de la créance de l'administration militaire n'a cessé que le 31 mai 2011, à réception des éléments transmis par l'ex-concubine de M. C... ; qu'ainsi, le 23 janvier 2012, date à laquelle le centre territorial d'administration et de comptabilité de l'armée a réclamé à M. C... un trop-perçu de rémunération de 30 545,34 euros, la créance en litige n'était pas prescrite ;

En ce qui concerne le montant de la créance :

8. Considérant que la décision contestée du 9 octobre 2012 précise que M. C... a notamment bénéficié d'un trop versé d'indemnités pour charges militaires au taux particulier n° 1 du 1er novembre 2000 au 31 mai 2011, d'un trop versé d'indemnités pour charges militaires au taux non logé (ICM TNL) du 1er novembre 2000 au 7 juin 2005 et du 12 juin 2008 au 30 mai 2009 et d'un trop versé de complément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires et de supplément forfaitaire de l'indemnité pour charges militaires ;

9. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des bulletins de salaires versés à l'instance que M. C... a perçu les sommes de 3 949,50 euros et de 3 981,25 euros respectivement en août et novembre 2010 au titre des complément et supplément forfaitaire des charges militaires au taux " non logé " représentant un montant total de 7 930,75 euros ; que, par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la somme de 7 807,56 euros qui lui a été demandée de restituer au titre des complément et supplément forfaitaires des charges militaires au taux " non logé " versés au cours de l'année 2010 est supérieure à celle qui lui a été versée ;

10. Considérant, en second lieu, d'une part, que M. C... justifie par les pièces versées devant la Cour, tels un contrat de location en date du 29 août 2008, un état des lieux de sortie en date du 2 novembre 2010, les avis de taxe d'habitation des années 2009 et 2010 et les bulletins de salaires des mois de janvier à décembre 2010, avoir occupé un logement en ville du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 et avoir perçu l'indemnité pour charges militaires au taux " non logé " au cours de cette même période ; que l'appelant soutient qu'une somme de 2 187,37 euros devrait être déduite du montant de 30 545,34 euros mis à sa charge au titre de la répétition de l'indu en faisant valoir qu'il était éligible du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 à l'indemnité pour charges militaires au taux " non logé " ; que ni l'état de régularisation versé aux débats, ni les explications du ministre de la défense ne permettent à la Cour de s'assurer que l'administration a tenu compte, pour déterminer le montant du trop perçu à réclamer à M. C..., de sa situation de militaire " non logé " au cours de cette période du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 ; que, par suite, il y a lieu, avant dire-droit, d'inviter le ministre de la défense à produire à la juridiction, dans un délai de trois semaines à compter de la notification du présent arrêt, un tableau détaillé comparatif de nature à justifier que les services comptables du ministère ont pris en compte, pour établir l'état de régularisation, de la situation de " militaire non logé " de M. C... au titre de la période du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 ; qu'il y a lieu, dans ces circonstances, de réserver l'appréciation de la Cour sur ce point en l'attente des éléments du ministre de la défense jusqu'en fin d'instance ;

11. Considérant, d'autre part, que M. C... soutient que l'administration ne peut lui demander de restituer l'intégralité du montant de l'indemnité pour charges militaires (ICM) dès lors qu'il bénéficie, sur le fondement de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959, d'une ICM au taux de base à compter du 1er novembre 2000 ; que ni l'état de régularisation versé aux débats, ni les explications du ministre de la défense ne permettent à la Cour de s'assurer que l'administration a substitué, pour établir l'état de régularisation, une ICM au taux de base à l'ICM au taux particulier irrégulièrement perçue par l'appelant ; que, par suite, il y a lieu, avant dire-droit, de procéder à un supplément d'instruction et d'inviter le ministre de la défense à produire, dans un délai de trois semaines à compter de la date de la notification du présent arrêt, un tableau détaillé comparatif de nature à justifier que les services comptables du ministère ont procédé au remplacement du taux particulier par le taux de base à compter du 1er novembre 2000 ; qu'il y a lieu, dans ces circonstances, de réserver l'appréciation de la Cour sur ce point en l'attente des éléments du ministre de la défense jusqu'en fin d'instance ;

D É C I D E :

Article 1er : Avant de statuer sur les conclusions de M. C... à fin d'annulation de la décision du 9 octobre 2012 en tant qu'elle fixe les sommes à restituer au titre de l'indemnité pour charges militaires, il est procédé à un supplément d'instruction à fin de production par le ministre de la défense, dans un délai de trois semaines à compter de la date de notification du présent arrêt, de deux tableaux détaillés comparatifs justifiant, d'une part, de la prise en compte de la situation de " militaire non logé " de M. C... au titre de la période du 1er septembre 2008 au 1er novembre 2010 et, d'autre part, du remplacement du taux particulier par le taux de base au titre de la période du 1er novembre 2000 au 30 mai 2011.

Article 2 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de la défense.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2017, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- M. Portail, président-assesseur,

- Mme Massé-Degois, première conseillère.

Lu en audience publique, le 11 avril 2017.

2

N° 15MA00703


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA00703
Date de la décision : 11/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques.

Comptabilité publique et budget - Dettes des collectivités publiques - Prescription quadriennale - Régime de la loi du 31 décembre 1968 - Point de départ du délai.

Procédure - Instruction - Moyens d'investigation.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Christine MASSE-DEGOIS
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : DE PALMA

Origine de la décision
Date de l'import : 25/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-04-11;15ma00703 ?
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