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27/06/2017 | FRANCE | N°15MA03994

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 27 juin 2017, 15MA03994


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1302217 du 30 juillet 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée par télécopie le 25 septembre 2015 et régularisée par cour

rier le 30 septembre suivant, Mme E..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E...a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1302217 du 30 juillet 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée par télécopie le 25 septembre 2015 et régularisée par courrier le 30 septembre suivant, Mme E..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 30 juillet 2015 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et des pénalités contestées ;

3°) de prononcer le sursis de paiement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une erreur de motivation ;

- la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité en l'absence d'envoi de l'avis de vérification prévu à l'article L. 47 du livre des procédures fiscales et de la remise de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;

- la réponse aux observations du contribuable en date du 3 août 2011 est insuffisamment motivée ;

- le courrier de notification de l'avis d'imposition n'est pas signé et ne contient le nom d'aucun fonctionnaire en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- l'administration n'établit pas que la vente par la SARL Sun du terrain qu'elle a acquis le 8 octobre 2009 serait constitutive d'un acte anormal de gestion ni qu'elle avait conscience d'accepter une libéralité ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boyer,

- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.

1. Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont la SARL Sun a fait l'objet en matière d'impôt sur les sociétés, au titre de la période du 1er juillet 2007 au 31 décembre 2009, l'administration a estimé que cette société avait commis un acte anormal de gestion en cédant, le 8 octobre 2009, un terrain à bâtir à un prix minoré à son gérant et associé, M. C... B..., et à Mme E... ; qu'elle a regardé cette minoration de prix comme constitutive d'un avantage occulte au sens des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts ; que l'administration a assujetti Mme E..., sur le fondement de ces dispositions et selon la procédure de rectification contradictoire, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2009, assorties de la majoration de 40 % pour manquement délibéré et des intérêts de retard ; que Mme E... relève appel du jugement du 30 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions supplémentaires ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'en faisant valoir que les premiers juges auraient motivé leur jugement de manière erronée, Mme E... ne conteste pas utilement la régularité du jugement querellé ; que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de se prononcer sur chacun des arguments articulés devant eux, ont suffisamment répondu, au point 9 du jugement, au moyen soulevé par Mme E..., tiré de ce que l'administration s'est fondée sur des termes de comparaison non pertinents pour déterminer la valeur vénale du terrain en litige ; qu'ainsi, ils n'ont en tout état de cause pas entaché la décision qu'ils ont rendue d'une insuffisance de motivation sur ce point ;

Sur la procédure d'imposition :

3. Considérant, d'une part, qu'eu égard au principe d'indépendance des procédures, Mme E... ne peut utilement invoquer les irrégularités qui auraient pu entacher la procédure de vérification de comptabilité de la société Sun pour contester les impositions auxquelles elle a personnellement été assujettie en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, à raison des conséquences des rectifications notifiées à cette société ; qu'ainsi, alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que les impositions litigieuses seraient fondées sur d'autres éléments que ceux recueillis par l'administration fiscale lors de la vérification de la comptabilité de la société Sun, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que la procédure serait irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales prévoyant l'envoi d'un avis de vérification et la remise de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ;

4. Considérant que Mme E... reprend le moyen soutenu en première instance, tiré de ce que la réponse que l'administration a faite à ses observations par un courrier en date du 3 août 2011 serait insuffisamment motivée, sans apporter d'élément nouveau au soutien de ce moyen, qu'il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Nice ;

5. Considérant que, s'agissant d'impôts directs recouvrés par voie de rôle, les modalités d'envoi de l'avis d'imposition au contribuable sont sans incidence sur la régularité de la procédure de rectification ; que, dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité de la notification des avis d'imposition à Mme E... ne saurait être accueilli ;

Sur le bien-fondé des impositions :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... c. Les rémunérations et avantages occultes... " ;

7. Considérant qu'en cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts ; que la preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsque est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le cocontractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession ; que dans le cas où le vendeur et l'acquéreur sont liés par une relation d'intérêts, l'intention d'octroyer et de recevoir une libéralité est présumée ;

8. Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que le bien immobilier cédé le 14 décembre 2009 au prix de 80 000 euros par la SARL Sun à M. C... B...et Mme E..., est constitué d'un terrain à bâtir situé à Aspremont (Alpes-Maritimes), d'une superficie de 1 372 m² permettant la construction d'une villa de 210 m² de surface hors oeuvre nette ; que se fondant sur ce que cinq biens similaires, situés dans la même zone géographique, jouissant de la même exposition et de superficie comparable, avaient été vendus entre janvier 2007 et juillet 2008 au prix moyen de 183 euros au m², l'administration a estimé que le bien cédé, à la valeur au m² de 59 euros, avait été vendu à un prix sous-évalué par rapport à celui du marché ; qu'après avis de la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaires, la valeur du bien dont il s'agit a été ramenée par le service à 192 080 euros, soit 140 euros au m², compte tenu des travaux à réaliser ; que l'administration a regardé la différence entre ce dernier montant et le prix de cession, soit 112 080 euros, comme l'effet d'une libéralité, procédant d'un acte anormal de gestion ; qu'elle a en conséquence réintégré dans les revenus de M. B... et dans ceux de Mme E..., soumis à une imposition distincte, une somme de 56 040 euros au titre de l'année 2009, imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'en se bornant en appel à faire valoir que la méthode de comparaison utilisée par l'administration reposerait sur des affirmations indémontrables en l'absence de production des éléments hypothécaires ou notariés sur lesquels ont été fondées les rectifications en litige, Mme E... ne conteste pas valablement les éléments de comparaison retenus par le service dès lors que les références de publication des actes de vente correspondant à ces éléments ont été mentionnées dans la proposition de rectification du 16 mai 2011 et que le ministre fait valoir, sans être contredit sur ce point, que depuis août 2013 les usagers ont accès à la base de données des ventes immobilières en France, que l'administration fiscale utilise pour établir la valeur vénale d'un bien immobilier ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que l'écart entre la valeur vénale réelle du bien immobilier en cause et le prix de cession, soit 112 080 euros selon l'évaluation non sérieusement remise en cause par les requérants, est significatif ;

9. Considérant, d'autre part, que Mme E... fait valoir que la vente de ce terrain à prix minoré présentait un intérêt pour la Sarl Sun dans la mesure où les difficultés financières dues à la crise immobilière la contraignaient à liquider son stock immobilier ; que, toutefois, le ministre observe sans être contredit que le prix de cession est inférieur au prix de revient du terrain, soit 87 518 euros, alors que selon l'Observatoire Immobilier de la Côte d'Azur les transactions immobilières ont globalement augmenté de 20 % entre le troisième trimestre 2008 et le troisième trimestre 2009 dans les Alpes-Maritimes ; qu'en outre l'administration relève que M. B... et Mme E..., qui avaient déposé dès 2007 une demande de permis de construire sur le terrain en cause et avaient obtenu le 13 mars 2008 l'autorisation ainsi sollicitée, avaient manifesté leur intention d'acquérir ce terrain deux ans avant que n'intervienne la cession en litige, qui ne peut dès lors être regardée comme justifiée par des raisons économiques impérieuses ; que l'administration démontre ainsi que la vente du terrain pour un prix sensiblement inférieur au prix du marché n'a pas été consentie dans l'intérêt de la SARL Sun, mais présentait le caractère d'une libéralité ; que cette société, qui a effectué la vente en cause en qualité de marchand de biens, ne pouvait ignorer l'état du marché ; que Mme E..., qui a réalisé une opération immobilière conjointement avec M. C... B..., gérant et associé de la SARL Sun, et qui était la compagne de ce dernier selon les dires non contestés du ministre, ne pouvait davantage ignorer que la vente effectuée à son profit était consentie à un prix inférieur à celui du marché ; que, par suite, l'administration a pu à bon droit retenir en l'espèce l'intention, pour la SARL Sun, d'octroyer, et, pour l'appelante de recevoir, la libéralité dont il s'agit ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2009, ainsi que des pénalités correspondantes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et en tout état de cause ses conclusions tendant au prononcé du sursis de paiement des impositions en litige ne peuvent être accueillies ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2017, où siégeaient :

- M. Cherrier, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2017.

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N° 15MA03994

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03994
Date de la décision : 27/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. CHERRIER
Rapporteur ?: Mme Catherine BOYER
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : MONTAGARD et ASSOCIES AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-06-27;15ma03994 ?
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