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21/12/2017 | FRANCE | N°12MA02540

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 21 décembre 2017, 12MA02540


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA SM Entreprise a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier Francis Vals à lui verser la somme de 1 439 117,19 euros toutes taxes comprises, majorée des intérêts moratoires au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête, en règlement du marché de construction du nouvel hôpital de Port-la-Nouvelle.

Par un jugement n° 1005788 du 27 avril 2012, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le centre hospitalier Francis Vals à verser la

somme de 30 439,92 euros hors taxes à la SA SM Entreprise, majorée des intérêts a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA SM Entreprise a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner le centre hospitalier Francis Vals à lui verser la somme de 1 439 117,19 euros toutes taxes comprises, majorée des intérêts moratoires au taux légal à compter de l'enregistrement de sa requête, en règlement du marché de construction du nouvel hôpital de Port-la-Nouvelle.

Par un jugement n° 1005788 du 27 avril 2012, le tribunal administratif de Montpellier a condamné le centre hospitalier Francis Vals à verser la somme de 30 439,92 euros hors taxes à la SA SM Entreprise, majorée des intérêts au taux légal à compter 28 décembre 2010 et de la capitalisation de ces intérêts.

Par une requête et un mémoire enregistrés le 25 juin 2012 et le 22 septembre 2014, la SA SM Entreprise, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1005788 du 27 avril 2012 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Francis Vals à lui régler les surcoûts résultant des travaux qu'elle a dû réaliser pour répondre aux normes parasismiques ;

2°) de condamner le centre hospitalier Francis Vals à lui verser les sommes de 822 830,65 euros hors taxes et 45 183,81 euros hors taxes, assorties des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de sa demande, avec capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre une somme de 4 800 euros à la charge du centre hospitalier Francis Vals au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de condamner in solidum les sociétés Guervilly, Puig Pujol et Bâti Structure Ouest à lui verser les sommes de 822 830,65 euros hors taxe et 45 183,81 euros hors taxe et de mettre à leur charge la somme de 4 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les règles parasismiques sont applicables que le bâtiment soit en classe C ou D et la conception du bâtiment ne respectait pas ces règles ;

- le respect des règles PS 92 de l'annexe 2 était une obligation contractuelle, le bureau de contrôle ayant cité ces règles comme référentiel technique ;

- les plans du dossier de consultation des entreprises et de l'avant-projet ont été établis en méconnaissance de la réglementation sismique ;

- cette anomalie n'était pas détectable avant l'établissement des plans d'exécution ;

- les travaux supplémentaires étaient nécessaires à la viabilité de l'ouvrage et juridiquement obligatoires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2013, les sociétés Guervilly, Puig Pujol Architecture et Bâti Structure Ouest, représentées par Me A..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société SM Entreprise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- la SA SM Entreprise ne justifie pas du caractère indispensable des travaux qu'elle a réalisés de sa propre initiative sans ordre de service ;

- la maîtrise d'oeuvre ne devait que le visa des plans et n'était pas tenue de réaliser de plan de ferraillage ni de calcul de quantité, lesquels incombent à l'entreprise dans l'élaboration des plans d'exécution ;

- aucune erreur de conception ne peut leur être reprochée, les plans du dossier de consultation des entreprises étant conformes à la réglementation sismique ;

- compte tenu de l'activité de l'établissement hospitalier, le bâtiment était classé dans la catégorie C situé dans une zone Ia ;

- le classement du bâtiment dans la catégorie D relève d'une erreur commise par le bureau d'études techniques de l'entreprise ;

- les sommes réclamées à ce titre ne sauraient en tout état de cause excéder le montant de 257 946 euros, l'entreprise ayant procédé, pour le reste à des variantes du dossier de consultation des entreprises pour en simplifier la mise en oeuvre et en alléger le coût ;

- l'entreprise n'ayant pas procédé à la vérification préalable des lieux, elle a commis une faute qui est la seule cause de son préjudice ;

- la réception des travaux et la levée des réserves le 9 décembre 2008 ont mis un terme à la responsabilité contractuelle de la maîtrise d'oeuvre envers le maître de l'ouvrage.

Par lettre du 13 juin 2014, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, de la période à laquelle il est envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et indiquant la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2014, le centre hospitalier Francis Vals, représenté Me F..., conclut par la voie de l'appel incident :

1°) à titre principal de rejeter la requête ;

2°) à titre subsidiaire au rejet des demandes de la société SM Entreprise ;

3°) à la condamnation solidaire des sociétés Puig Pujol Architecture, Guervilly et Bâti Structure Ouest à lui rembourser les sommes réclamées par la SA SM Entreprise au titre du surcoût résultant de la prise en charge de la norme sismique ;

4°) à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SA SM Entreprise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la demande de la société SM Entreprise est irrecevable ;

- en vertu de l'arrêté du 29 mai 1997, seuls relèvent de la classe D les établissements de santé dispensant des soins de courte durée ou concernant des affections graves pendant leur phase aiguë en médecine, chirurgie et obstétrique, ce qui n'est pas le cas de l'établissement ;

- dans l'hypothèse où le classement du centre hospitalier en classe D serait fondé, il est fondé à appeler en garantie le groupement de maîtrise d'oeuvre, responsable de l'erreur de classement du bâtiment.

Par un arrêt avant dire droit n° 12MA02540 du 16 février 2015, la Cour a ordonné une expertise afin de déterminer, en premier lieu, si le respect du référentiel technique " règles PS 92 " imposait, pour la réalisation du centre hospitalier Francis Vals, situé en zone Ia et classé dans la classe C au regard de la réglementation applicable en matière de protection parasismique, des travaux non prévus dans les plans du dossier de consultation des entreprises et nécessitant la réalisation de plans d'exécution spécifiques, en deuxième lieu, si les travaux réalisés par la société SM Entreprise étaient indispensables à la prise en compte des normes parasismiques et en troisième lieu, dans l'affirmative, de chiffrer la part de ces travaux indispensables, tous droits, moyens et conclusions des parties à l'instance sur lesquels il n'a pas été statué par cet arrêt ayant été réservés jusqu'en fin d'instance.

L'expert a rendu son rapport le 23 janvier 2017. Ce rapport d'expertise a été communiqué aux parties, qui ont été invitées à produire leurs observations, le 16 mars 2017.

Par des mémoires, enregistrés le 20 mars 2017 et le 23 novembre 2017, le centre hospitalier Francis Vals conclut aux mêmes fins que dans ses précédentes écritures par les mêmes moyens.

Il soutient en outre que :

- l'intervention d'un décompte général et définitif ne fait pas obstacle à ce que la responsabilité du maître d'oeuvre soit engagée ;

- le maître d'oeuvre n'a pas attiré son attention sur le surcoût qu'impliquaient les travaux supplémentaires et l'a privé de la possibilité de choisir un projet alternatif moins onéreux.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2017, la société SOGEA, venant aux droits de la SA SM Entreprise conclut aux mêmes fins que dans ses précédentes écritures par les mêmes moyens. Elle demande en outre à la Cour de condamner l'établissement à lui verser la somme représentative de l'actualisation du prix des travaux supplémentaires conformément aux stipulations du marché, de majorer la condamnation à prononcer des intérêts moratoires au taux d'intérêt contractuel et porte sa demande sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à 15 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2017, les sociétés Guervilly, Puig Pujol Architecture et Bâti Structure Ouest, représentées par Me A..., concluent au rejet de la requête et des conclusions reconventionnelles de l'établissement et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société SM Entreprise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'ouvrage ayant été reçu, le maître de l'ouvrage ne peut mettre en cause leur responsabilité contractuelle ;

- l'intervention du décompte général et définitif du marché de maîtrise d'oeuvre fait également obstacle à la mise en cause de leur responsabilité contractuelle ;

- le maître de l'ouvrage aurait en tout état de cause dû prendre en charge les dépenses d'investissement découlant du classement de l'établissement en catégorie C.

Par une ordonnance du 25 octobre 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 novembre 2017.

Par une ordonnance du 17 novembre 2017, la clôture de l'instruction a été rouverte.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur ;

- les conclusions de M. B... Thiele, rapporteur public ;

- et les observations de Me E... pour la SA SM Entreprise et de Me F... pour le centre hospitalier Francis Vals.

Une note en délibéré présentée par le centre hospitalier Francis Vals a été enregistrée le 14 décembre 2017.

1. Considérant que dans le cadre de la construction de son nouvel hôpital, le centre hospitalier Francis Vals, situé à Port-la-Nouvelle, a conclu le 21 avril 2006 avec la société SM Entreprise un marché à prix global et forfaitaire portant sur les fondations et le gros oeuvre, la maîtrise d'oeuvre étant confiée au groupement solidaire constitué entre les sociétés Guervilly, Puig Pujol et Bâti Structure Ouest ; que la réception des travaux a été notifiée le 4 août 2008, les réserves étant levées le 9 décembre suivant ; que lors de la notification du décompte général, la société SM Entreprise a demandé la prise en compte de surcoûts liés aux travaux réalisés pour assurer la protection parasismique du bâtiment et à la prolongation du chantier rendue nécessaire par ces travaux, de la moins-value tenant à la non-exécution de travaux de construction d'édicules en béton en toiture, du surcoût généré par la mise en oeuvre tardive du service de gardiennage allégé et de la clause de révision de prix prévue à l'article 3.4.2. du cahier des clauses administratives particulières ; que, par jugement du 27 avril 2012, le tribunal administratif de Montpellier a fait partiellement droit à la demande de la société SM Entreprise en condamnant le centre hospitalier Francis Vals à lui verser la somme de 30 439,92 euros hors taxe ; que la société SM Entreprise relève appel de ce jugement, en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier Francis Vals à l'indemniser du surcoût généré par les travaux de protection parasismique et par l'allongement de la durée du chantier ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :

2. Considérant que si le centre hospitalier Francis Vals invoque à nouveau la tardiveté de la demande de la SA SM Entreprise, cette fin de non-recevoir a été écartée par l'arrêt avant-dire droit du 16 février 2015 ; qu'il n'y a dès lors pas lieu de statuer à nouveau sur son bien-fondé ;

3. Considérant que le caractère global et forfaitaire du prix du marché ne fait pas obstacle à l'indemnisation de travaux supplémentaires réalisés sans ordre de service du maître d'ouvrage, mais indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art, quel qu'en soit le montant ; que l'entrepreneur est en droit d'obtenir le règlement de tels travaux sur la base des prix prévus au marché ;

Sur les travaux supplémentaires de gros-oeuvre :

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport initial dressé le 7 décembre 2005 par le contrôleur technique désigné par le maître de l'ouvrage, que le bâtiment à édifier était soumis aux règles de protection parasismique dites " PS 92 ", qui s'imposaient ainsi tant au maître de l'ouvrage qu'aux constructeurs ; qu'il résulte également de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par la Cour, que l'application de cette réglementation impliquait des études et des travaux consistant notamment à modifier la structure du bâtiment n° 2, qui souffrait d'une insuffisance de contreventements, et à augmenter la résistance de la majorité des éléments de fondation de l'ouvrage, ce qui se traduisait également par l'augmentation du nombre de murs-voile au rez-de-chaussée ; qu'à supposer même que ces travaux procèdent en partie de variantes proposées par l'entreprise dans son offre, il résulte de ce qui vient d'être dit que ces travaux étaient indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; qu'il résulte également de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que les plans des documents de consultation ne mettaient pas l'entreprise à même de connaître l'importance des études et travaux à réaliser à ce titre ; que, par suite, dès lors que ces éléments de fait, corroborés par l'instruction, ne sont sérieusement contestés par aucune des parties, la SA SM entreprise, qui n'a commis aucune faute ou négligence en remettant son offre sans prendre en compte le coût de ces prestations, est fondée à demander la rémunération de ces travaux, alors même qu'ils ont été réalisés sans ordre de service, la circonstance que l'entreprise était chargée d'établir les plans d'exécution des ouvrages étant sans incidence sur ce point dès lors qu'elle ne pouvait prendre en compte ces données lors de l'élaboration de son offre ;

5. Considérant que l'expert estime le coût des travaux supplémentaires de consolidation réalisés par la SA SM Entreprise à 431 976,76 euros hors taxes ; qu'il y a lieu de retenir cette évaluation, qui n'est pas sérieusement contestée par les parties ; que la SA SM Entreprise est par suite fondée à demander la condamnation du centre hospitalier Francis Vals à lui verser cette somme ;

Sur les prestations supplémentaires de gardiennage et dépenses de communes de chantier :

6. Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 15.3 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché en cause : " Si l'augmentation de la masse des travaux est supérieure à l'augmentation limite définie à l'alinéa suivant, l'entrepreneur a droit à être indemnisé en fin de compte du préjudice qu'il a éventuellement subi du fait de cette augmentation au-delà de l'augmentation limite. / L'augmentation limite est fixée : / Pour un marché à prix forfaitaires, au vingtième de la masse initiale (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par un ordre de service du 24 janvier 2008 confirmé par une mise en demeure du 27 février 2008, le maître d'oeuvre a enjoint à la SA SM entreprise de maintenir l'intégralité des installations de chantier à sa charge et le gardiennage jusqu'à l'achèvement de l'ouvrage ; qu'il est constant que la prolongation du délai d'exécution du marché n'était pas la conséquence d'une faute de l'entreprise ; que celle-ci est par suite fondée à demander le paiement de ces prestations supplémentaires, auquel ne font pas échec les stipulations de l'article 15.3 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché, qui ne régissent que l'indemnisation des préjudices découlant de l'augmentation de la masse des travaux et non le paiement de leur prix ; qu'il n'est pas contesté que la société requérante a exposé à ce titre des dépenses à hauteur de 45 183,81 euros hors taxes ; que la SA SM entreprise est dès lors fondée à demander la condamnation de l'établissement à lui verser cette somme ;

Sur la révision des prix :

8. Considérant qu'en vertu des stipulations de l'article 3.4.2 du cahier des clauses administratives particulières : " les prix sont révisables / le coefficient de révision Cn (...) est donné par la formule : / Cn = 0,15 + 0,85 (In/I0-5) dans laquelle In et IO sont les valeurs prises par l'index de référence du lot concerné respectivement au mois n d'exécution des travaux et au mois zéro déduction faite d'une neutralisation de 5 mois correspondant à la période de validité des offres (M0-5 mois). / (...) Les index retenus (...) sont les suivants : (...) Lot n° 03 : (...) BT 06 " ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'expert a évalué le coût des travaux supplémentaires indispensables réalisés par l'entreprise en se fondant sur les prix en vigueur au mois de février 2006 ; qu'il résulte également de l'instruction que la société a effectué l'essentiel de ces travaux au cours du second semestre de l'année 2007 et les a achevés en novembre 2007 ; qu'il s'ensuit que leur prix aurait dû faire l'objet d'une révision s'ils avaient été réglés au moment de leur réalisation ; qu'il en résulte que la SA SM entreprise est fondée à demander un complément d'indemnité réparant le préjudice qui résulte du fait que l'indemnisation ci-dessus allouée au point 5 ne tient pas compte de cette révision ; que la valeur de l'indice BT 06 ayant évolué de 654,6 à 714 entre le mois de septembre 2005 et le mois de novembre 2007, dates qui auraient été prises en compte pour la révision des prix en vertu des stipulations précitées, l'indemnité à allouer à la société à ce titre doit être fixée à 33 305,41 euros hors taxes ;

10. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que la SA SM entreprise est également fondée, pour les mêmes motifs, à demander une indemnité réparant l'absence de révision du prix des prestations supplémentaires de logistique et de gardiennage du chantier qu'elle a réalisés sur ordre de service du maître de l'ouvrage ; que l'indice BT 06 s'établissant à 654,6 en septembre 2005 et à 758,7 au mois de juillet 2008, date de fin du chantier, l'indemnité à allouer à la société à ce titre doit être fixée à 6 108,85 euros hors taxes ;

Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :

11. Considérant qu'aux termes de l'article 98 du code des marchés publics, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle les intérêts ont commencé à courir : " Le délai global de paiement d'un marché public ne peut excéder 45 jours. Toutefois, pour les établissements publics de santé et les établissements du service de santé des armées, cette limite est de 50 jours. / Le dépassement du délai de paiement ouvre de plein droit et sans autre formalité, pour le titulaire du marché ou le sous-traitant, le bénéfice d'intérêts moratoires, à compter du jour suivant l'expiration du délai. (...) " ; qu'en vertu de l'article 1er du décret du 21 février 2002 susvisé, pris pour l'application de ces dispositions : " I. - Le point de départ du délai global de paiement prévu aux articles 54 et 55 de la loi du 15 mai 2001 susvisée et à l'article 96 du code des marchés publics est la date de réception de la demande de paiement par les services de la personne publique contractante ou, si le marché le prévoit, par le maître d'oeuvre ou tout autre prestataire habilité à cet effet. Le marché indique les conditions administratives et techniques auxquelles sont subordonnés les mandatements et le paiement. / Toutefois : / - le point de départ du délai global de paiement est la date d'exécution des prestations lorsqu'elle est postérieure à la date de réception de la demande de paiement ; / - pour les marchés de travaux, le point de départ du délai global de paiement du solde est la date d'acceptation du décompte général et définitif (...)" ; qu'aux termes de l'article 5 du même texte : " I. - Le défaut de paiement dans les délais prévus par le décret du 7 mars 2001 susvisé fait courir de plein droit, et sans autre formalité, des intérêts moratoires au bénéfice du titulaire ou du sous-traitant payé directement. / Les intérêts moratoires courent à partir du jour suivant l'expiration du délai global jusqu'à la date de mise en paiement du principal incluse. / II. - Le taux des intérêts moratoires est référencé dans le marché. Ce taux est celui de l'intérêt légal en vigueur à la date à laquelle les intérêts moratoires ont commencé à courir, augmenté de deux points. (...) / V. - En cas de désaccord sur le montant d'un acompte ou du solde, l'ordonnancement ou le mandatement est effectué sur la base provisoire des sommes admises par la personne publique contractante. Lorsque les sommes ainsi payées sont inférieures à celles qui sont finalement dues au titulaire, celui-ci a droit à des intérêts moratoires calculés sur la différence " ;

12. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA SM Entreprise a signé le décompte général du marché avec réserves le 9 janvier 2009 ; qu'elle est par suite en droit d'obtenir les intérêts moratoires au taux d'intérêt légal majoré de deux points sur les sommes qu'elle demande à compter du 1er mars 2009, date à laquelle expirait le délai global de paiement de 50 jours imparti à l'établissement ;

13. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article 1154 du code civil dans sa rédaction en vigueur à la date d'introduction du litige devant le tribunal, la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année ; qu'en ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 28 décembre 2010 ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande à compter de cette date, à laquelle était due une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA SM Entreprise est fondée à demander la condamnation du centre hospitalier Francis Vals à lui verser la somme de 465 282,17 euros hors taxes, soit 558 338,60 euros toutes taxes comprises, majorée des intérêts moratoires contractuels et de leur capitalisation ; que le jugement du tribunal administratif du 27 avril 2012 doit être réformé dans cette mesure ;

Sur l'appel en garantie du centre hospitalier Francis Vals :

15. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article R. 613-4 du code de justice administrative : " Le président de la formation de jugement peut rouvrir l'instruction par une décision qui n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours. Cette décision est notifiée dans les mêmes formes que l'ordonnance de clôture. / La réouverture de l'instruction peut également résulter d'un jugement ou d'une mesure d'investigation ordonnant un supplément d'instruction. (...) " ;

16. Considérant qu'en l'état de l'instruction, résultant de la production de la note en délibéré enregistrée au greffe le 14 décembre 2017, la Cour n'étant pas suffisamment éclairée par le débat contradictoire des parties en ce qui concerne les conséquences des fautes imputées au groupement de maîtrise d'oeuvre par le maître de l'ouvrage et le lien de causalité entre ces fautes et le préjudice subi par l'établissement, il y a lieu d'ordonner, avant de statuer sur cet appel en garantie, un supplément d'instruction aux fins, pour l'établissement, de produire les délibérations du conseil d'administration relatives à la définition et à l'arrêt des modalités du programme de construction, les résultats des études d'esquisse et d'avant-projet réalisés par le maître d'oeuvre, ainsi que toute correspondance ou autre document utile relatifs à la détermination de l'emplacement, de la configuration et du mode constructif de l'ouvrage ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la SA SM Entreprise, qui n'a pas la qualité de partie perdante ou tenue aux dépens dans la présente instance, au titre des frais exposés par le centre hospitalier Francis Vals et les sociétés Guervilly, Puig Pujol et Bati Structure ouest et non compris dans les dépens ;

18. Considérant qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier Francis Vals le versement à la SA SM Entreprise d'une somme de 2 000 euros en application de ces mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La condamnation prononcée à l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Montpellier est portée à la somme de 558 338,60 euros toutes taxes comprises. Cette somme portera intérêts au taux contractuel à compter du 1er mars 2009. Les intérêts échus le 28 décembre 2010 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : Le centre hospitalier Francis Vals versera à la société SM Entreprise la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier Francis Vals et les sociétés Guervilly, Puig Pujol Architecture et Bâti Structure Ouest à l'encontre de la SA SM Entreprise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Il est ordonné un supplément d'instruction aux fins pour le centre hospitalier Francis Vals, de produire les délibérations du conseil d'administration relatives à la définition et à l'arrêt des modalités du programme de construction, les résultats des études d'esquisse et d'avant-projet réalisés par le maître d'oeuvre, ainsi que toute correspondance ou autre document utile relatifs à la détermination de l'emplacement, de la configuration et du mode constructif de l'ouvrage.

Article 5 : Le résultat du supplément d'instruction ordonné à l'article 4 ci-dessus devra parvenir au greffe de la Cour dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 6 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SM Entreprise, au centre hospitalier Francis Vals, à la SARL Guervilly, à la SARL Puig Pujol Architecture et à la SARL Bati structure Ouest.

Délibéré après l'audience du 11 décembre 2017, où siégeaient :

- Mme Isabelle Carthé Mazères, président,

- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur,

- M. C... Grimaud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 décembre 2017.

11

N° 12MA02540


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA02540
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-02-01 MARCHÉS ET CONTRATS ADMINISTRATIFS. EXÉCUTION FINANCIÈRE DU CONTRAT. RÉMUNÉRATION DU CO-CONTRACTANT. INDEMNITÉS. TRAVAUX SUPPLÉMENTAIRES. - TRAVAUX SUPPLÉMENTAIRES INDISPENSABLES À L'EXÉCUTION DE L'OUVRAGE SUIVANT LES RÈGLES DE L'ART - CONDITIONS D'INDEMNISATION - RÈGLEMENT SUR LA BASE DES PRIX DU MARCHÉ.

39-05-01-02-01 Les travaux supplémentaires effectués par une entreprise titulaire d'un marché de travaux publics conclu à prix global et forfaitaire qui se seraient révélés indispensables à l'exécution de l'ouvrage suivant les règles de l'art sont réglés, en principe, sur la base des prix du marché.,,,Il en va de même des travaux réalisés sur ordre de service régulièrement établi.,,[RJ1].


Références :

[RJ1]

CE, 8 juin 1973, Sr Chirinian et Sr Rey, n° 84751, p. 1033 ;

CE, 3 octobre 1979, société Entrasudo, n° 8585, T. p. 797, ,,Comp., pour les travaux simplement utiles : CE, 19 mars 1982, Cojonde, n° 18362, p. 671.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: Mme Florence HERY
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : MBA et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-12-21;12ma02540 ?
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