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20/12/2018 | FRANCE | N°17MA03151

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17MA03151


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de leur accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1502963 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a accordé à M. et Mme B...la décharge de la majoration pour manquement délibéré qui leur a été appliquée et rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 juillet 2017, et le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de leur accorder la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1502963 du 1er juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a accordé à M. et Mme B...la décharge de la majoration pour manquement délibéré qui leur a été appliquée et rejeté le surplus de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 20 juillet 2017, et le 21 février 2018, Mme C...B..., représentée par la société d'avocats PLMC, demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 1er juin 2017 en ce qu'il ne leur a pas donné satisfaction ;

2°) de prononcer la décharge demandée.

Elle soutient que :

- la taxation de la somme de 189 999 euros sur le fondement de l'article 111 c du code général des impôts est infondée ;

- la créance détenue sur l'EURL Société Nouvelle à l'Ancienne, par l'EURL A... Investissements dirigée par son frère et que celui-ci lui a cédée pour un euro symbolique n'avait aucune valeur, car l'EURL Société Nouvelle à l'Ancienne était en cessation de paiement ;

- elle n'a jamais eu l'intention d'obtenir un avantage occulte puisqu'elle a cédé cette créance quelques mois plus tard à son frère.

Par un mémoire, enregistré le 23 janvier 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour de rejeter la requête de MmeB....

Il soutient que les moyens invoqués par Mme B...ne sont pas fondés.

Par lettre du 30 novembre 2018, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de relever d'office le moyen de l'inconstitutionnalité de la majoration prévue par l'article 158-7-2 du code général des impôts en application de la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-610 du 10 février 2017.

Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2018, parvenu après clôture d'instruction, le ministre de l'action et des comptes publics a prononcé un dégrèvement d'une somme globale de 6 771 euros des redressements réclamés à M. et Mme B...au titre des prélèvements sociaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Paix,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B...interjette appel du jugement du 1er juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a partiellement rejeté sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été, avec son époux, assujettie au titre de l'année 2011.

2. Aux termes de l'article 111 c du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ". En cas d'acquisition par une société à un prix que les parties ont délibérément majoré par rapport à la valeur vénale de l'objet de la transaction, ou, s'il s'agit d'une vente, délibérément minoré, sans que cet écart de prix comporte de contrepartie, l'avantage ainsi octroyé doit être requalifié comme une libéralité représentant un avantage occulte constitutif d'une distribution de bénéfices au sens de ces dispositions, alors même que l'opération est portée en comptabilité et y est assortie de toutes les justifications concernant son objet et l'identité du co-contractant, dès lors que cette comptabilisation ne révèle pas, par elle-même, la libéralité en cause. La preuve d'une telle distribution occulte doit être regardée comme apportée par l'administration lorsqu'est établie l'existence, d'une part, d'un écart significatif entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé, d'autre part, d'une intention, pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession.

3. Par acte du 21 novembre 2011, l'EURL A...Investissements, détenue par M. A..., frère de la contribuable a cédé pour 1 euro symbolique à Mme B..., une créance de 190 000 euros qu'elle détenait sur sa filiale, l'EURL Société Nouvelle à l'Ancienne détenue par M. A.... Pour estimer que Mme B... avait bénéficié, de la part de l'EURL A... Investissements, d'un avantage occulte constitutif d'une distribution de revenus à hauteur de 189 999 euros, l'administration fiscale a relevé d'une part l'existence d'un écart significatif entre le prix de vente convenu et la valeur vénale du bien cédé, et d'autre part que l'élément intentionnel tiré de la volonté des parties était constitué.

4. S'agissant de la valeur vénale de la créance cédée, l'administration fiscale s'est fondée sur le rapport d'expertise des actifs détenus par la société cédante, ordonné le 28 juin 2012, par le juge commissaire à la procédure de sauvegarde. Il en résulte qu'à la date du 30 juin 2011, dernier bilan avant la cession litigieuse, l'actif net de la société s'établissait à 505 613 euros. Dans ces conditions, il n'est nullement établi que la société ne pouvait pas acquitter, au moins partiellement, sa dette, la circonstance qu'elle ait par la suite été placée en situation de cessation de paiement étant sans incidence sur la valeur vénale à la date de la cession. Si Mme B...produit un rapport d'expertise établi par un expert immobilier le 10 juin 2013, celui-ci est postérieur de dix-huit mois à la date de la cession litigieuse. Il en est de même du bilan clos le 31 mai 2012.

5. S'agissant de l'intention pour la société, d'octroyer, et, pour le co-contractant, de recevoir, une libéralité du fait des conditions de la cession, il résulte de l'instruction que les liens familiaux unissant M. A...et MmeB..., ainsi que l'importance de la minoration, constituent des indices de ce que l'opération constituait une libéralité au profit de MmeB.... De plus à la même date, Mme B...a acquis l'ensemble des parts sociales de l'EURL Société Nouvelle à l'Ancienne, ce qu'elle n'a pu faire sans avoir une connaissance comptable et financière de la situation de cette société. La circonstance que Mme B...ait, par la suite, revendu cette créance à son frère est à cet égard sans incidence. Dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant l'élément intentionnel nécessaire à l'application de l'article 111 c du code général des impôts.

Sur les rappels de contributions sociales :

6. Aux termes du 7 de l'article 158 du code général des impôts : " Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : / (...) 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice (...) ". Aux termes du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale relatif à la contribution sociale sur les revenus du patrimoine : " Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France (...) sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu (...) :/ (...) c) Des revenus de capitaux mobiliers (...) ".

7. Pour l'application et l'interprétation d'une disposition législative, aussi bien les autorités administratives que le juge sont liés par les réserves d'interprétation dont une décision du Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, assortit la déclaration de conformité à la Constitution de cette disposition.

8. Dans sa décision n° 2016-610 QPC du 10 février 2017, le Conseil constitutionnel a jugé les dispositions précitées du code de la sécurité sociale conformes à la Constitution, sous réserve qu'elles ne puissent être interprétées comme permettant l'application du coefficient multiplicateur de 1,25 prévu par les dispositions précitées du 7 de l'article 158 du code général des impôts pour l'établissement des contributions sociales assises sur les rémunérations et avantages occultes.

9. M. et Mme B...ont été imposés au titre des de l'année 2011 aux contributions sociales à raison des sommes perçues de l'EURL A...Investissements, sur le fondement de l'article 111 du code général des impôts. Pour déterminer le montant de ces impositions, l'administration a appliqué a tort le coefficient de 1,25 prévu par les dispositions du 7 de l'article 158 du code général des impôts à la base imposable aux contributions sociales. Il y a lieu, par suite, de prononcer la décharge des impositions ayant résulté de la majoration de 25 % de la base imposable aux contributions sociales au titre de l'année 2011.

10. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme B...est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille lui a refusé la réduction des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie avec son époux au titre de l'année 2011, correspondant à l'application à la base de ces impositions de la majoration de 1,25 prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts.

11. L'Etat n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par Mme B...tendant aux frais d'instance seront, par voie de conséquence, rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La base d'imposition de Mme B...aux contributions sociales au titre de l'année 2011 est réduite du montant correspondant à la majoration de 25 % prévue au 7 de l'article 158 du code général des impôts.

Article 2 : Mme B...est déchargée des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes, en conséquence de la réduction prononcée à l'article précédent.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, où siégeaient :

- Mme Mosser, présidente,

- Mme Paix, présidente assesseure,

- M. Haïli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

N°17MA03151 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03151
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : Mme MOSSER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CABINET PLMC PUJOL LAFONT MARTY CASES PUGLIESE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-20;17ma03151 ?
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