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22/01/2019 | FRANCE | N°18MA02191

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 22 janvier 2019, 18MA02191


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement no 1700803 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2018, M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à

la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 mars 2018 ; ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement no 1700803 du 5 mars 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2018, M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 5 mars 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- c'est à tort que le service a rejeté la comptabilité de l'entreprise, dès lors que les recettes enregistrées globalement en fin de journée étaient assorties de fiches de caisse détaillées par familles de produits, que les inventaires étaient précisément et régulièrement établis, et qu'ils justifient des mouvements enregistrés sur le compte de l'exploitant ;

- ils sont fondés à se prévaloir des doctrines fiscales référencées 4 G-3341 n° 9 et n° 10 et 4 G-3334 n° 6 publiées le 25 juin 1998 et de l'instruction 4 A-10-85 du 10 septembre 1985 ;

- la réglementation comptable autorise la récapitulation des opérations journalières sur une pièce justificative unique et leur enregistrement global ;

- la reconstitution des recettes de glaces en boules, glaces italiennes, granités, boissons, bonbons, crêpes et gaufres prend insuffisamment en compte les pourcentages pour invendus, pertes et offerts, et conduit à des résultats excessifs qui ne correspondent pas à la réalité de l'exploitation ;

- le service n'était pas fondé à remettre en cause l'inscription au passif des sommes portées au crédit du compte de l'exploitant, dès lors que celles-ci, qui correspondent à des dépenses de l'entreprise payées sur leurs deniers personnels, sont justifiées ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées.

Par un mémoire en défense, en date du 24 septembre 2018, enregistré le 24 et le 25 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Barthez, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antonetti, président de la 4ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carotenuto,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., qui exploitait à La Grande Motte un fonds de commerce à caractère saisonnier de vente à emporter de glaces, crêpes, churros, boissons et de jeux électriques a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2008 et 2009. A l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a écarté la comptabilité et procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de l'entreprise. M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 5 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2008 et 2009, ainsi que des pénalités correspondantes.

I. Régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par M. et Mme A... à l'appui de leurs moyens, ont suffisamment répondu au point 3 du jugement attaqué au moyen tiré du caractère régulier et probant de la comptabilité. Ainsi le jugement attaqué est suffisamment motivé.

II. Bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de la charge de la preuve :

3. Aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. / Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité présente de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge (...) ".

4. En l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, la charge de la preuve des graves irrégularités invoquées dans la comptabilité de l'entreprise de M. A... et du bien-fondé des rectifications notifiées selon la procédure contradictoire, et contestées par les requérants, incombe à l'administration fiscale en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales.

S'agissant du rejet de la comptabilité :

5. Pour écarter la comptabilité relative à l'activité de M. A... comme non probante, le vérificateur a relevé que ce dernier n'était pas en mesure de présenter des pièces justificatives du détail de ses recettes, telles que bandes de caisse enregistreuse, fiches ou brouillards de caisse. Il enregistrait globalement ses recettes en fin de journée et les ventilait par familles de produits qui globalisaient, notamment, d'une part, les ventes de glaces, crêpes churros et gaufres, et d'autre part, les boissons en canettes et granités. Aucun justificatif n'a été établi pour les recettes de jeux électriques. Les stocks arrêtés à la clôture de l'exercice étaient dépourvus de cohérence au regard du cycle de l'activité ainsi que des achats et consommations dont ils auraient dû procéder. Ainsi, au regard de l'ensemble de ces éléments, l'administration fiscale apporte la preuve du caractère irrégulier et non probant de la comptabilité tenue par M. A.... Si les dispositions de l'article 3 du décret du 29 novembre 1983 relatif aux obligations comptables des commerçants, reprises à l'article R. 123-174 du code de commerce, autorisent la récapitulation des opérations de même nature, réalisées en un même lieu et au cours d'une même journée, sur une pièce justificative unique, c'est à la condition que le commerçant puisse produire, à l'appui des livres, un relevé détaillé ou des pièces permettant de justifier la consistance exacte du chiffre des recettes. Or, M. A... n'a pas été en mesure de justifier les discordances relevées par le vérificateur.

6. Compte tenu des graves irrégularités entachant la comptabilité de l'entreprise, M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir des termes de la documentation administrative de base référencée 4 G-3341 qui confirment que la valeur probante de la comptabilité ne peut être remise en cause qu'au vu d'irrégularités graves. En outre, M. A... n'a pas présenté l'ensemble des données de caisse justifiant du détail de ses recettes quotidiennes. Ni la documentation administrative 4 G-3334 du 25 juin 1998 qui autorise leur comptabilisation globale en fin de journée ni l'instruction administrative référencée 4 A-10-85 du 10 septembre 1985, qui autorise les enregistrements globaux des recettes journalières inférieures au seuil de 76 euros ne dispensent les entreprises de produire à l'appui de leur comptabilité les documents justificatifs de leurs recettes. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, une doctrine dans les prévisions de laquelle ils n'entrent pas.

7. Il résulte de ce qui précède que l'administration a pu à bon droit écarter la comptabilité de l'établissement de M. A... et procéder à la reconstitution de son chiffre d'affaires.

S'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires :

8. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de l'entreprise à partir des factures d'achat de produits et matières premières et les prix de vente que le contribuable a fournis, déduction faite des pertes et offerts, auxquels ont été appliqués les procédés de fabrication propres aux glaces en boules, glaces à l'italienne, crêpes et churros constatés dans l'entreprise. Une telle méthode, qui tient compte des conditions d'exploitation de l'entreprise, ne saurait être regardée comme viciée dans son principe. Les requérants, qui ne proposent pas de méthode plus pertinente, contestent certains éléments du calcul du vérificateur.

9. D'une part, le service a retenu au titre des pertes et offerts des pourcentages de 2 % pour les glaces en boules et glaces italiennes, 1 % pour les bonbons, 3 % pour les granités, 20 % pour les gaufres, 3 % pour les churros, et 1 à 5 % pour les boissons selon les différentes catégories détaillées dans la proposition de rectification. Les pertes et offerts sur les crêpes ont été pris en compte en ramenant à trente le nombre d'unités pouvant être produites par kilogramme de farine. M. et Mme A... se limitent à soutenir que, dans le cadre d'un contrôle antérieur, l'administration avait parfois retenu des pourcentages supérieurs. Par suite, celle-ci doit être regardée comme établissant que ces pourcentages de pertes et offerts, différenciés selon les produits, ont été déterminés en tenant compte des conditions réelles d'exploitation.

10. D'autre part, M. et Mme A..., en se bornant à demander la prise en compte d'une dose de 42 grammes de levure par kilogramme de farine, ne remettent pas en cause la réalité du chiffre d'affaires des gaufres évalué sur le fondement d'une consommation de levure de 21 grammes par kilogramme de farine, correspondant à celle que M. A... avait indiquée au vérificateur.

11. Il résulte de ce qui précède que l'administration fiscale apporte la preuve qui lui incombe que la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires utilisée n'était ni excessivement sommaire, ni radicalement viciée, et démontre, par voie de conséquence, le bien-fondé des rectifications en découlant.

S'agissant des écritures sur le compte de l'exploitant :

12. M. et Mme A... contestent la réintégration du passif injustifié dans les résultats des exercices clos en 2008 et 2009 à hauteur de 23 897,09 euros et 71 004,47 euros. A l'appui de leur requête d'appel, ils font valoir des moyens déjà présentés en première instance qui, en l'absence de tout élément nouveau de droit ou de fait, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 9 du jugement attaqué.

En ce qui concerne les pénalités :

13. M. et Mme A... reprennent en appel, sans y apporter d'élément nouveau, le moyen tiré de ce que les pénalités pour manquement délibéré dont les rehaussements mis à leur charge ont été assortis en application des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts ne sont pas fondées. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif au point 13 du jugement attaqué.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

III. Frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit à verser à M. et Mme A... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, où siégeaient :

- M. Barthez, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Maury, premier conseiller,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.

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N° 18MA02191

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02191
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : CABINET PLMC PUJOL LAFONT MARTY CASES PUGLIESE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-01-22;18ma02191 ?
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