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11/04/2019 | FRANCE | N°17MA02567

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 11 avril 2019, 17MA02567


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2011.

En application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a soumis d'office au tribunal administratif de Nîmes la réclamation de M. B...tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations suppl

mentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 200...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvement sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2011.

En application de l'article R. 199-1 du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale a soumis d'office au tribunal administratif de Nîmes la réclamation de M. B...tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2011.

Par un jugement n° 1501514, 1503145 du 21 avril 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté les demandes de M.B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 juin et 15 décembre 2017, M.B..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 avril 2017 du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) de prononcer la décharge demandée.

Il soutient que :

- les sommes encaissées par la société Cibel et facturées par la société Autarkeia ne constituent pas des recettes de la société Cibel, mais des sommes encaissées pour le compte d'autrui, d'où leur comptabilisation au crédit du compte 467 " Autarkeia débiteur et créditeur divers ", des clients de la société Autarkeia, pour diverses raisons notamment commerciales, ayant réglé des factures de cette société en adressant des chèques libellés à l'ordre de Cibel ; ces sommes encaissées par la société Cibel correspondent précisément aux factures émises par la société Autarkeia, ont été déclarées comme chiffre d'affaires par cette dernière et ont permis de diminuer la créance détenue par la société Cibel sur la société Autarkeia ; ces sommes ne constituent donc pas un revenu distribué ;

- la somme de 60 000 euros créditée au compte courant de M. B...dans la société Cibel ne constitue pas un revenu distribué mais provient d'un compte de M. B...dans la société Provenc'Eau ;

- les sommes créditées sur ce compte courant et provenant de chèques émis par M. C... B... ne constituent pas un revenu distribué, mais correspondent au remboursement, par ce dernier, de prêts consentis par son père, qui ne nécessitent pas de contrat écrit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- les décisions du Conseil constitutionnel n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 et n° 2017 643/650 QPC du 7 juillet 2017 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Paix, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Mosser, présidente de la 3ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon,

- et les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue de vérification de comptabilité de la société Cibel, dont M. B...était associé et gérant, l'administration fiscale lui a notifié un rehaussement de ses bases d'imposition à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales au titre des années 2009 et 2011 à raison de recettes non comptabilisées par la société et d'apports en compte courant d'associé non justifiés, considérés comme des revenus distribués. M. B...relève appel du jugement du 21 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a refusé de prononcer la décharge des compléments d'imposition auxquels il a ainsi été assujetti.

Sur l'étendue du litige :

2. Par décision du 9 novembre 2017, postérieure à l'introduction de la requête, l'administration fiscale, tirant les conséquences des décisions du Conseil constitutionnel n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 et n° 2017-643/650 QPC du 7 juillet 2017, a prononcé un dégrèvement de 8 338 euros (1 815 euros au titre de 2009 et 6 523 euros au titre de 2011) des contributions sociales réclamées à M. B...au titre des années en litige. Dans ces conditions, la demande de décharge présentée par M. B...est, dans cette mesure, devenue sans objet. Il n'y a, dès lors, pas lieu pour la Cour d'y statuer.

Sur le bien-fondé des impositions restant en litige :

En ce qui concerne les recettes non comptabilisées dans un compte de produits par la société Cibel :

3. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ; / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'en cas de refus des rehaussements par le contribuable qu'elle entend imposer comme bénéficiaire des sommes regardées comme distribuées, il incombe à l'administration d'apporter la preuve tant de l'existence et du montant des distributions et que de leur appréhension par le contribuable. Elle est toutefois dispensée de démontrer que ce dernier a effectivement disposé des sommes distribuées, lorsqu'il est établi qu'il est le seul maître de l'affaire.

4. En l'espèce, il résulte de l'instruction, et notamment des mentions non contestées de la proposition de rectification du 21 décembre 2012, que M. B...et son épouse sont les associés de la société Cibel et que M.B..., qui en était le gérant, en assume seul la gestion et détient la signature sur les comptes bancaires de l'entreprise. Dans ces conditions, il doit être regardé comme le seul maître de l'affaire.

5. Dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société Cibel, l'administration fiscale a constaté que celle-ci avait encaissé des sommes comptabilisées au compte de tiers n° 467 intitulé " Autarkeia débiteurs et créditeurs divers ", pour un montant total de 113 736, 05 euros, qu'elle a regardées comme des recettes de la société Cibel non comptabilisées comme telles. M. B...fait valoir que ces sommes constituent des encaissements pour le compte d'un tiers, la société Autarkeia, à laquelle la société Cibel a cédé, en septembre 2010, son fichier clients, et dont certaines prestations, pour des raisons commerciales tenant au changement de prestataire intervenu au cours des phases successives d'installation de pompes à chaleur, ont été réglées par les clients au moyen de chèques émis à l'ordre de la société Cibel, qui était la précédente intervenante. Certaines des pièces produites par M.B..., notamment les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre de la période de septembre 2010 à juin 2011, les relevés bancaires de la société Autarkeia pour la même période et les tableaux de recoupements établis par ses soins ne permettent pas de démontrer que le différentiel entre le chiffre d'affaires déclaré par cette société au titre de la TVA et les encaissements réalisés sur son compte bancaire proviendrait des sommes encaissées par la société Cibel. En revanche, pour certains des crédits en litige, M. B...produit la facture correspondante émise par Autarkeia et l'extrait du journal des ventes issu de la comptabilité de cette société faisant apparaître le montant comptabilisé au compte 467 de la société Cibel, éléments qui permettent de corroborer l'explication selon laquelle la société Cibel aurait encaissé les sommes détaillées ci-après pour le compte de la société Autarkeia :

DateIntituléMontant08/11/2010rem ch palova fact2 566,715/11/2010ch delerba facture50019/11/2010rem ch autarkeia5 07130/11/2010pour autarkeia 065 348,3430/11/2010ch pantano clients8 44230/11/2010facture coltat auta2 674,1602/12/2010pestre facture par5 31007/12/2010pellegrini fact aut6 431,1731/12/2010rvir fraissinet fact9 421,0224/01/2011ch staiano a autark5 236,409/02/2011ch brugel pour cpte5 70015/02/2011bouchet pour autar2 016,3417/02/2011pellegrini facture p5 146,2821/02/2011ch delerba facture1 270,4365 133,84

Pour le surplus, les pièces produites ne permettent pas de justifier de la nature des crédits en cause, les factures et les sommes comptabilisées chez Cibel et Autarkeia ne présentant pas des montants identiques. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant seulement que la somme de 48 602,21 euros (113 736,05 euros - 65 133,84 euros) constitue des recettes non comptabilisées par la société Cibel, et donc un revenu distribué entre les mains de M.B..., maître de l'affaire. L'intéressé est ainsi seulement fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration l'a imposé sur la somme de 65 133,84 euros au titre de l'année 2011.

En ce qui concerne les sommes créditées sur le compte courant d'associé de M. B... :

6. Il résulte des dispositions précitées du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts que les sommes inscrites au crédit de comptes courants d'associés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus distribués, imposables, par suite, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers au titre de l'année de leur inscription.

7. Il résulte de l'instruction que l'administration a considéré comme non justifiées les sommes créditées sur le compte courant d'associé de M. B...dans la comptabilité de la société Cibel. S'agissant de la somme de 60 000 euros créditée le 13 février 2010, le requérant soutient qu'elle provient d'un transfert des sommes inscrites à son compte courant dans la société Provenc'Eau, devenue Autarkeia. Toutefois, l'extrait du grand livre général de cette société, édité le 29 septembre 2011, et couvrant la période du 1er janvier 2010 au 31 mars 2011, ne permet pas d'établir que M. B...disposait d'un compte ouvert à son nom dans cette société, dès lors qu'il fait seulement apparaître un compte n° 467350 ouvert au nom de la société Cibel, sur lequel ont été comptabilisées des remises de chèque en provenance de M. B...pour un montant total de 85 000 euros en juin et juillet 2010. La circonstance que M. B...ait effectué des apports sur le compte de la société Cibel dans les écritures de la société Autarkeia ne permet nullement d'établir que la somme en litige, créditée sur son compte courant d'associé dans la société Cibel, résulterait du remboursement d'une partie de ces apports. S'agissant de la somme de 25 613,54 euros, créditée en trois fois les 27 janvier, 11 février et 12 mars 2009, les pièces produites par M.B..., à savoir les fiches de trésorerie de la société Kazak faisant apparaitre les recettes encaissées par cette société en janvier et février 2009 et les ordres de virement au profit de la société Cibel, ne démontrent ni l'existence d'une dette de la société Kazak envers la société Cibel, ni ne permettent d'expliquer pourquoi les sommes versées à la société Cibel ont été créditées sur son compte courant d'associé. S'agissant des chèques émis par M. C...B..., fils du requérant, les relevés bancaires produits, s'ils permettent d'établir que M. B...à émis, au profit de son fils, des chèques pour un montant de 30 000 euros en juillet 2005 et de 46 000 euros en février 2010, ne suffisent pas, à eux seuls, à démontrer que ces sommes constituaient des prêts remboursables. De plus, les montants prétendument prêtés et ceux crédités ne sont pas les mêmes et aucune explication n'est apportée sur les raisons pour lesquelles ce remboursement aurait transité par la comptabilité de la société Cibel. Dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a imposé entre ses mains les sommes créditées sur son compte courant d'associé dans la société Cibel dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à demander décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011 correspondant à la réduction de ses bases imposables de 65 133,84 euros ci-dessus prononcée. Pour le surplus, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande en décharge.

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B...à concurrence de la somme de 8 338 euros en matière de contributions sociales (1 815 euros au titre de l'année 2009 et 6 523 euros au titre de l'année 2011).

Article 2 : La base d'imposition de M. B...d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2011 est réduite de la somme de 65 133,84 euros.

Article 3 : M. B...est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes, en conséquence de la réduction en base prononcée à l'article 2.

Article 4 : Le jugement n° 1501514, 1503145 du tribunal administratif de Nîmes du 21 avril 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2019, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Haïli, premier conseiller,

- Mme Courbon, premier conseiller.

Lu en audience publique le 11 avril 2019.

6

N° 17MA02567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02567
Date de la décision : 11/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : CABINET PLMC PUJOL LAFONT MARTY CASES PUGLIESE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-04-11;17ma02567 ?
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