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04/07/2019 | FRANCE | N°18MA02402

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2019, 18MA02402


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... et Mme E...D...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Aubagne et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) à verser la somme de 82 171,46 euros à M. D...et celle de 5 000 euros à Mme D... en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis suite à une infection nosocomiale. La caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a en outre demandé la condamnation du centre hospitalier d'Aubagne à lui verser la somme

de 23 818,14 euros au titre des prestations versées à la victime.

Par un j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... et Mme E...D...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner le centre hospitalier d'Aubagne et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) à verser la somme de 82 171,46 euros à M. D...et celle de 5 000 euros à Mme D... en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis suite à une infection nosocomiale. La caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône a en outre demandé la condamnation du centre hospitalier d'Aubagne à lui verser la somme de 23 818,14 euros au titre des prestations versées à la victime.

Par un jugement n° 1600121 du 26 mars 2018, le tribunal administratif de Marseille a condamné le centre hospitalier d'Aubagne et la SHAM à verser la somme de 40 800 euros à M. D... et celle de 2 000 euros à MmeD..., et le centre hospitalier seul à verser la somme de 23 818,14 euros à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 25 mai 2018, M. et MmeD..., représentés par Me F..., demandent à la cour :

1°) de réformer le jugement du 26 mars 2018 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il a limité aux sommes de 40 800 et 2 000 euros les indemnités versées à leur profit ;

2°) de porter ces indemnités aux sommes de 82 171,46 et 5 000 euros ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Aubagne et de la SHAM la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que leurs préjudices doivent être mieux indemnisés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 janvier 2019, le centre hospitalier d'Aubagne et la SHAM, représentés par MeC..., concluent au rejet de la requête.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par M. et Mme D...ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M. Merenne,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de MeF..., représentant M. et MmeD..., et de Me B..., représentant le centre hospitalier d'Aubagne et la Société hospitalière d'assurances mutuelles.

Considérant ce qui suit :

1. M.D..., né en 1945, souffrait des deux hanches depuis 1998 et présentait une coxarthrose bilatérale. Il a été opéré de la hanche droite au cours de l'année 2000. Il a ensuite été hospitalisé au centre hospitalier d'Aubagne le 15 septembre 2002 pour la pose d'une prothèse de hanche gauche, puis le 7 avril 2003 pour un changement d'appareil prothétique. Un épisode infectieux est survenu au décours de cette intervention et a nécessité de nombreux soins. La date de consolidation de l'état de santé de la victime a été fixée au 31 décembre 2011.

2. Par le jugement attaqué du 26 mars 2018, le tribunal administratif de Marseille a retenu que la responsabilité sans faute du centre hospitalier d'Aubagne était engagée sur le fondement du deuxième alinéa du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique du fait d'une infection nosocomiale et a condamné le centre hospitalier et son assureur à verser la somme de 40 800 euros à M. D... et celle de 2 000 euros à Mme D...en réparation des préjudices subis. M. et Mme D... contestent en appel l'évaluation des préjudices effectuée par le tribunal administratif.

3. Le tribunal administratif a indemnisé le déficit fonctionnel permanent à hauteur de 11 000 euros et le préjudice d'accompagnement de Mme D...à hauteur de 2 000 euros par des motifs appropriés, figurant aux points 11 et 13 du jugement attaqué, qu'il y a lieu d'adopter en appel en l'absence d'éléments nouveaux par rapport à l'argumentation développée en première instance.

4. L'expert désigné par la cour a retenu, pour la période comprise entre le 16 juin 2003 et le 31 décembre 2011, un déficit fonctionnel temporaire total pour une durée totale de 66 jours et un déficit fonctionnel temporaire partiel de 50 % pour une durée de 551 jours, de 30 % pour une durée de 2 314 jours, et de 25 % pour une durée de 62 jours. Il y a lieu de porter la somme de 14 000 euros accordée par le tribunal administratif à 17 000 euros.

5. Le tribunal administratif a également fait une évaluation insuffisante des préjudices en indemnisant les souffrances endurées par M.D..., évaluées à 5 sur une échelle de 1 à 7 en raison des douleurs prolongées au genou et à la hanche, et le préjudice esthétique permanent, évalué à 2 sur une échelle de 1 à 7, à hauteur respectivement des sommes de 13 500 et 1 800 euros, qu'il convient de porter à 16 000 et 2 000 euros.

6. Le préjudice d'agrément est un préjudice permanent résultant de l'impossibilité de poursuivre certaines activités spécifiques sportives et de loisirs après la consolidation du dommage. Si M. D...a pratiqué le handball à haut niveau jusqu'aux années 1980 il a ensuite été entraîneur. Il ressort des commentaires portés en marge des justificatifs fournis qu'après avoir été licencié pour la dernière fois de la Fédération française de handball en 1998/1999, il a interrompu les activités en lien avec ce sport en raison de ses problèmes de hanche. L'expert nommé par le juge des référés du tribunal administratif retient également que l'interruption de ces activités sportives est en lien avec la pathologie initiale. L'impossibilité de pratiquer les activités liées au handball n'est donc pas imputable à l'infection nosocomiale. Par ailleurs, les difficultés susceptibles d'être éprouvées dans ses interactions avec ses petits-enfants ne constituent pas la privation d'une activité spécifique de loisirs, mais une gêne dans la vie courante. Par suite, en accordant la somme de 500 euros en réparation de ces difficultés au titre du préjudice d'agrément, après avoir accordé une indemnité en réparation des déficits fonctionnels temporaire et permanent, le tribunal administratif a à tort indemnisé deux fois le même préjudice. En revanche, M. D...justifie de la pratique antérieure d'activités physiques régulières en dehors du handball, telles que le tir à l'arc et le vélo, en lien avec sa condition sportive. Il y a lieu d'indemniser le préjudice d'agrément qui en résulte à hauteur de 2 000 euros.

7. Il résulte de l'instruction que les dépenses de santé exposées par M. D...ont soit été prises en charge à 100 % par la sécurité sociale, soit ne sont pas en lien direct et certain avec l'infection nosocomiale contractée au sein du centre hospitalier. Cependant, M. D...justifie par des pièces nouvelles produites en appel exposer, pour l'achat de semelles orthopédiques destinées à compenser la différence de mensuration entre ses membres inférieurs, un surcoût après prise en charge à 100 % par la sécurité sociale, qu'il évalue à la somme non contestée de 69 euros par an. Ce préjudice doit en conséquence être indemnisé à hauteur de 483 euros pour les années 2012 à 2019, et capitalisé pour l'avenir, compte tenu de l'âge de M. D...à la date du présent arrêt, à la somme de 740 euros.

8. M. D...demande en appel l'indemnisation de frais de déplacement correspondant à vingt-quatre allers-retours entre son domicile, à Bollène et Marseille. Il ressort des justificatifs fournis que seule une partie de ces trajets est directement imputable à l'infection nosocomiale. Il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice, incluant les dépenses de péage et d'essence, en retenant la somme forfaitaire de 500 euros.

9. Enfin, si M. D...demande l'indemnisation de fournitures et de frais postaux qu'il indique avoir exposés pour les besoins du litige, ces dépenses correspondent à des frais non compris dans les dépens qui ont été couverts par la somme forfaitaire accordée par le tribunal administratif au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

10. Il résulte de ce qui précède que seul M. D...est fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille lui a alloué la somme de 40 800 euros, qu'il convient de porter à 49 723 euros.

11. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge solidaire du centre hospitalier d'Aubagne et de la SHAM le versement de la somme de 2 000 euros à M. D...au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a exposés.

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 40 800 euros que le centre hospitalier d'Aubagne et la SHAM ont été condamnés à verser à M. D...par l'article 1er du jugement du 26 mars 2018 est portée à 49 723 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier d'Aubagne et la SHAM verseront solidairement à M. D...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme D...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D..., à Mme E...D..., à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, au centre hospitalier d'Aubagne et à la Société hospitalière d'assurances mutuelles.

Copie en sera adressée pour information à l'expert judiciaire.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2019, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 4 juillet 2019.

2

N° 18MA02402


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02402
Date de la décision : 04/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-03 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Sylvain MERENNE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : CABINET BOUSQUET - SOULAS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-04;18ma02402 ?
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