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11/07/2019 | FRANCE | N°18MA01739

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 18MA01739


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E..., M. C...E...et M. D...E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme de 261 046 euros à verser à M. A...E...et la somme de 10 000 euros chacun à verser à MM. C...et D...E...en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'aggravation de l'état de santé de M. A...E...en raison de sa contamination par le virus

de l'hépatite C.

La caisse primaire centrale d'assurance maladie (CPCAM) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...E..., M. C...E...et M. D...E...ont demandé au tribunal administratif de Marseille de mettre à la charge de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) la somme de 261 046 euros à verser à M. A...E...et la somme de 10 000 euros chacun à verser à MM. C...et D...E...en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait de l'aggravation de l'état de santé de M. A...E...en raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C.

La caisse primaire centrale d'assurance maladie (CPCAM) des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal de mettre à la charge solidaire de l'Etablissement français de sang (EFS) et de l'ONIAM les sommes de 474 405 euros au titre des débours et de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un jugement n° 1600835 du 19 février 2018, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, rejeté la demande de M. E...et autres et, d'autre part, condamné l'EFS à verser à la CPCAM des Bouches-du-Rhône une somme de 269 359,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 mars 2016 et une rente annuelle d'un montant de 7 823,45 euros ainsi que la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et la somme de 4 918,98 euros au titre des frais et honoraires des expertises.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 avril 2018, l'EFS, représenté par la SELARL Campocasso et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 février 2018 en tant qu'il le condamne à indemniser la CPCAM des Bouches-du-Rhône et aux dépens ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. E...et autres et par la CPCAM des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la partie perdante les dépens.

Il soutient que :

- le rejet pour tardiveté de la demande des consorts E...présentée devant le tribunal a pour effet de priver la CPCAM des Bouches-du-Rhône de tout recours subrogatoire dans les droits des victimes ;

- la caisse ne dispose pas d'un droit propre ;

- les dépens doivent être mis à la charge de l'ONIAM qui s'est substitué à l'EFS à compter du 1er juin 2010 dans les contentieux en cours résultant d'une contamination par transfusions sanguines par le virus de l'hépatite C ;

- à défaut, les dépens sont prescrits du fait de la tardiveté de la demande des consorts E...présentée devant le tribunal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2018, l'ONIAM, représenté par la SELARL Birot, Ravaut et Associés, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la CPCAM des Bouches-du-Rhône subrogée dans les droits de la victime ne peut avoir plus de droits qu'elle ;

- le recours du tiers payeur ne peut pas être dirigé à son encontre en application de l'article 72 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;

- le contentieux ayant été initié postérieurement au 1er juin 2010, il intervient au titre de la solidarité nationale et non en tant qu'organisme substitué à l'EFS ;

- il déclare s'en remettre à la sagesse de la cour en ce qui concerne les frais d'expertise.

Par un mémoire en intervention, enregistré le 7 décembre 2018, la compagnie d'assurances Axa France Iard, représentée par la SELARL Abeille et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 février 2018 en tant qu'il condamne l'EFS à verser à la CPCAM des Bouches-du-Rhône une somme de 269 359,72 euros et une rente annuelle d'un montant de 7 823,45 euros et à payer une somme de 4 918,98 euros au titre des dépens.

2°) de rejeter les demandes présentées par M. E...et autres et par la CPCAM des Bouches-du-Rhône devant le tribunal administratif de Marseille ;

3°) de mettre à la charge de la partie perdante les dépens.

Elle soutient que :

- la caisse ne dispose pas d'un droit propre pour obtenir le remboursement des prestations versées à la victime dans les droits de laquelle elle est subrogée ;

- la forclusion de l'action de la victime a pour conséquence l'irrecevabilité de l'action de la caisse ;

- la caisse ne peut agir contre l'EFS ni contre son assureur ;

- l'ONIAM étant substitué à l'EFS pour indemniser les victimes dans les contentieux initiés après le 1er juin 2010, il appartient à l'EFS de prendre en charge les dépens.

La requête a été communiquée à MM.A..., C...et D...E...et à la CPCAM des Bouches-du-Rhône qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant l'EFS, et de Me F...substituant la Selarl Abeille, représentant la compagnie d'assurances Axa France Iard.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...E...et ses deux fils ont demandé au tribunal administratif de Marseille de mettre à la charge de l'ONIAM, substitué à l'EFS, conformément à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, l'indemnisation des préjudices subis du fait de l'aggravation de l'état de santé de M. A...E...en raison de sa contamination par le virus de l'hépatite C. La CPCAM des Bouches-du-Rhône a demandé au tribunal de mettre à la charge solidaire de l'EFS et de l'ONIAM les sommes de 474 405 euros au titre des débours et de 1 047 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion. L'EFS relève appel du jugement du 19 février 2018 en tant que le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser à la caisse la somme de 269 359,72 euros et une rente annuelle d'un montant de 7 823,45 euros ainsi que la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et la somme de 4 918,98 euros au titre des dépens. La compagnie d'assurances Axa France Iard, assureur de l'EFS, intervient à l'instance d'appel. L'ONIAM conclut au rejet de la requête.

Sur la recevabilité de l'intervention de la compagnie d'assurances Axa France Iard :

2. La compagnie d'assurances Axa France Iard a intérêt à l'admission de la requête. Par suite, son intervention est recevable.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. L'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ouvre aux caisses de sécurité sociale la possibilité de poursuivre le remboursement, par le responsable d'un dommage corporel, des dépenses qu'elles ont exposées en faveur de la victime, indépendamment de l'exercice par celle-ci ou par ses ayants droit d'un recours indemnitaire au titre des préjudices qui sont demeurés à sa charge.

4. Bien que cette disposition qualifie de subrogatoires les recours dont disposent les caisses de sécurité sociale contre les tiers, la circonstance que la victime n'a pas, dans le délai du recours contentieux, contesté la décision par laquelle la collectivité publique à laquelle le dommage est imputé a rejeté sa demande indemnitaire n'a pas pour effet de rendre irrecevables les conclusions des caisses tendant au remboursement par cette collectivité des dépenses qu'elles ont engagées à la suite de l'accident.

5. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. E...et autres au motif de sa tardiveté et a condamné l'EFS à rembourser à la CPCAM des Bouches-du-Rhône une somme au titre des dépenses qu'elle a exposées. Toutefois, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la recevabilité des conclusions présentées par l'assuré est sans incidence sur le sort de l'action exercée par la caisse. Il suit de là que l'EFS n'est pas fondé à demander le rejet des conclusions présentées par la CPCAM des Bouches-du-Rhône du fait de la tardiveté de la demande des consorts E...présentée devant le tribunal. Par ailleurs, le montant auquel l'EFS a été condamné n'est pas discuté en appel.

6. Aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent (...) les frais d'expertise, d'enquête et de toute autre mesure d'instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l'Etat. Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. (...) ".

7. L'EFS reste en appel la partie perdante. L'irrecevabilité de la demande de première instance de M. E...et autres et la substitution de l'ONIAM à l'EFS en application de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique ne constituent pas des circonstances particulières justifiant que les dépens soient mis à la charge d'une autre partie. Il suit de là qu'il y a lieu de laisser les frais et honoraires des expertises liquidés et taxés à la somme de 4 918,98 euros par les ordonnances du 14 octobre 2010 et du 6 juillet 2017 du président du tribunal administratif de Marseille, ainsi que l'a fait ce tribunal, à la charge de l'EFS.

8. Il résulte de tout ce qui précède que l'EFS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à payer à la CPCAM des Bouches-du-Rhône une somme de 269 359,72 euros et une rente annuelle d'un montant de 7 823,45 euros ainsi que la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : L'intervention de la compagnie d'assurances Axa France Iard est admise.

Article 2 : La requête de l'EFS est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'Etablissement français du sang, à M. A...E..., à M. C...E..., à M. D...E..., à l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône et à la compagnie d'assurances Axa France Iard.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2019 où siégeaient :

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère ;

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

La rapporteure,

signé

A. BOURJADE-MASCARENHAS

La présidente,

signé

K. JORDA-LECROQ

La greffière,

signé

C. MONTENERO

La République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

5

N° 18MA01739


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01739
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-05-01 Responsabilité de la puissance publique. Recours ouverts aux débiteurs de l'indemnité, aux assureurs de la victime et aux caisses de sécurité sociale. Action en garantie.


Composition du Tribunal
Président : Mme JORDA-LECROQ
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : DONSIMONI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-11;18ma01739 ?
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