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28/11/2019 | FRANCE | N°18MA01434

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 28 novembre 2019, 18MA01434


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision du 4 avril 2014 par laquelle le maire de la commune de Hyères-les-Palmiers a refusé de lui accorder l'allocation temporaire d'invalidité (ATI) et la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 26 septembre 2014, d'autre part, de condamner solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL), à lui verser l'ATI depuis le 7 février 2010, l

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Toulon, d'une part, d'annuler la décision du 4 avril 2014 par laquelle le maire de la commune de Hyères-les-Palmiers a refusé de lui accorder l'allocation temporaire d'invalidité (ATI) et la décision implicite de rejet de son recours gracieux du 26 septembre 2014, d'autre part, de condamner solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et la société mutuelle d'assurance des collectivités locales (SMACL), à lui verser l'ATI depuis le 7 février 2010, la somme de 3 680,76 euros au titre du rappel de trois mois de salaire à plein traitement du 7 novembre 2009 au 7 février 2010 ainsi que la somme de 67 500 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de son accident de service, et, enfin, d'ordonner une expertise médicale.

Par un jugement n° 1500075 du 12 janvier 2018, le tribunal administratif de Toulon a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions présentées par M. E... tendant au rappel de traitement, a mis hors de cause la caisse primaire d'assurance maladie du Var, a condamné solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et la SMACL à verser à M. E... la somme de 7 500 euros, condamné la SMACL à garantir la commune d'Hyères-les-Palmiers des condamnations prononcées à son encontre et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2018, M. E..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 janvier 2018 ;

2°) d'annuler les décisions du maire de la commune de Hyères-les-Palmiers du 4 avril 2014 et du 26 septembre 2014 ;

3°) de condamner solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et la SMACL à lui verser l'ATI depuis le 7 février 2010, la somme de 3 680,76 euros au titre des rappels de salaires et la somme de 67 500 euros à titre indemnitaire ;

4°) à défaut, d'ordonner une expertise médicale ;

5°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Hyères-les-Palmiers et de la SMACL la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité de la commune du fait des fautes commises dans l'instruction de son dossier d'attribution de l'ATI est de nature à lui ouvrir droit au versement de cette allocation ;

- la responsabilité de la commune est aussi engagée pour l'avoir placé en congé de maladie de longue durée à compter du 7 novembre 2009 alors que la date de consolidation de son état de santé a été fixée au 7 février 2010 ;

- les trois mois de salaire correspondant au manque à gagner pendant la période du 7 novembre 2009 au 7 février 2010 doivent être indemnisés ;

- les souffrances endurées et la gêne dans les actes de la vie courante ont été insuffisamment réparées ;

- l'incidence professionnelle et le préjudice moral doivent être indemnisés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2019, la commune d'Hyères-les-Palmiers, représentée par la SCP Vedesi, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions aux fins d'annulation des décisions des 4 avril 2014 et 26 septembre 2014 sont irrecevables en l'absence de développement de moyens ;

- les conclusions tendant au versement de l'ATI sont irrecevables dès lors qu'elles ne sont pas dirigées contre la Caisse des dépôts et des consignations et en l'absence de contestation des décisions rejetant l'ATI ;

- les conclusions tendant au versement de rappel de salaire sont irrecevables en l'absence de réclamation préalable ;

- les demandes indemnitaires liées à l'accident de service sont irrecevables en l'absence de liaison du contentieux et compte tenu de la majoration des sommes demandés entre le recours préalable et le recours contentieux ;

- l'agent n'a pas subi de perte de salaire ayant été placé en congé de longue durée à plein traitement pendant trois ans à compter du 7 novembre 2009 ;

- il ne remplit pas les conditions d'attribution de l'ATI ;

- elle n'a pas commis de faute dans l'instruction et la gestion de la demande d'ATI ;

- l'incidence professionnelle et la gêne dans les actes de la vie courante ne sont pas établies ;

- les souffrances endurées ont été suffisamment évaluées ;

- la mesure d'expertise ne présente pas d'utilité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 avril 2019, la SNC Sofaxis, venant aux droits de la société Sofcap, représentée par Me C..., conclut, à titre principal, à sa mise hors de cause et, à titre subsidiaire, au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, elle doit être mise hors de cause dès lors qu'elle n'est pas contractuellement liée au requérant ;

- à titre subsidiaire, le contrat d'assurance prend uniquement en charge les indemnités journalières et les frais médicaux ;

- l'agent ne remplit pas les conditions pour bénéficier de l'allocation temporaire d'invalidité ;

- les traitements de la période courant du 7 novembre 2009 au 7 février 2010 ont été versés par la commune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 juin 2019, la SMACL, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. E... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte pas de critique du jugement ;

- la demande d'indemnisation du préjudice moral est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux ;

- la demande d'indemnisation des souffrances endurées, du préjudice professionnel et des troubles dans les conditions d'existence est irrecevable dès lors qu'elle excède la somme sollicitée dans la réclamation préalable ;

- l'indemnisation du préjudice moral est incluse dans celle des souffrances endurées ;

- les souffrances endurées ont été suffisamment indemnisées ;

- la gêne dans les actes de la vie courante et l'incidence professionnelle ne sont pas établies ;

- elle doit être mise hors de cause s'agissant des demandes de versement de l'allocation temporaire d'invalidité et des arriérés de traitement qui sont sans lien avec l'accident de service.

- l'expertise ne présente pas d'utilité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme H...,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de Me G..., représentant M. E..., de Me D..., représentant la commune d'Hyères-les-Palmiers, et de Me B..., représentant la SMACL.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... qui était agent des services techniques de la commune d'Hyères-les-Palmiers, a été placé en congé de maladie ordinaire du 6 avril 2007, date de l'accident de service dont il a été victime, jusqu'au 6 novembre 2009, puis en congé longue durée à plein traitement du 7 novembre 2009 au 6 mai 2013 et enfin à demi-traitement jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité. Il relève appel du jugement du tribunal administratif de Toulon du 12 janvier 2018 prononçant un non-lieu à statuer sur sa demande de rappel de traitement et condamnant solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et son assureur automobile, la SMACL à lui verser la somme de 7 500 euros en sollicitant, en premier lieu, une meilleure indemnisation des préjudices liés à l'accident de service, en deuxième lieu, l'annulation des décisions des 4 avril 2014 et 26 septembre 2014 du maire lui refusant le bénéfice de l'ATI et rejetant son recours gracieux, en troisième lieu, le versement d'une indemnité équivalente à l'ATI et, enfin, la désignation d'un expert. La commune d'Hyères-les-Palmiers et la SMACL concluent au rejet de la requête. La SNC Sofaxis, venant aux droits de la société Sofcap, courtier en assurance, demande sa mise hors de cause.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la SMACL :

2. Aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours ".

3. La requête d'appel de M. E... ne se borne pas à reproduire purement et simplement la demande présentée devant le tribunal administratif mais comporte une critique du jugement de première instance et expose à nouveau de manière précise les conclusions et les moyens présentés à l'appui de sa demande. La fin de non-recevoir opposée par la SMACL, tirée de l'absence de critique du jugement attaqué, doit dès lors être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Contrairement à ce qui est soutenu par M. E..., c'est à bon droit que les premiers juges ont considéré que ses conclusions tendant au rappel de salaires pour la période du 7 novembre 2009 au 7 février 2010 pendant laquelle il était placé en congé de longue durée à plein traitement étaient devenues sans objet dès lors que la commune d'Hyères-les-Palmiers lui a versé la somme qu'il demandait à ce titre au mois de juillet 2015, soit postérieurement à l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif.

5. L'article 1 du décret n° 2005-442 du 2 mai 2005 prévoit qu'une allocation temporaire d'invalidité est accordée aux fonctionnaires relevant de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière affiliés à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales. Aux termes de l'article 2 de ce décret : " L'allocation est attribuée aux fonctionnaires maintenus en activité qui justifient d'une invalidité permanente résultant : / a) Soit d'un accident de service ayant entraîné une incapacité permanente d'un taux au moins égal à 10 % ; (...) ". Aux termes de l'article 7 de ce même décret : " L'entrée en jouissance de l'allocation temporaire d'invalidité est fixée à la date de reprise des fonctions après consolidation ". Il résulte de ces dispositions que le bénéfice de l'ATI est subordonné à la reprise effective de ses fonctions par l'agent.

6. Il est constant que M. E..., après l'accident reconnu imputable au service dont il a été victime le 6 avril 2007, n'a jamais repris ses fonctions au sein des services techniques de la commune d'Hyères-les-Palmiers jusqu'à sa mise à la retraite pour invalidité. Il s'ensuit que le requérant ne remplissant pas l'une des conditions pour pouvoir prétendre à l'ATI n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 4 avril 2014 par laquelle le maire a refusé de lui accorder le bénéfice de cette allocation ni celle de la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé le 26 septembre 2014.

7. Il résulte de ce qui a été indiqué au point précédent qu'en l'absence de reprise de son activité professionnelle, M. E... ne pouvait prétendre à l'allocation de l'ATI. Il s'ensuit que ses conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice subi du fait de l'absence de versement de cette allocation doivent être rejetées.

8. Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, l'allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent ces prestations déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font en revanche pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incombait.

9. Ainsi que cela vient d'être précisé ci-dessus, M. E..., qui n'a pas repris ses fonctions, ne pouvait prétendre au bénéfice de l'ATI ni, par suite, soutenir que le maire de la commune de Hyères-les-Palmiers a commis une faute en lui refusant le bénéfice de cette allocation. Il suit de là que ses conclusions tendant à l'indemnisation de l'incidence professionnelle doivent être rejetées.

10. Les souffrances à la fois physiques et morales endurées par M. E... ont été évaluées à 2,5 sur une échelle de 1 à 7 par l'expert désigné par une ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulon du 30 novembre 2010. Contrairement à ce qui est soutenu par la SMACL, le préjudice moral, qui est inclus dans le pretium doloris, n'avait pas à faire l'objet d'une demande d'indemnisation distincte de celle qui a été formulée dans la réclamation préalable du 21 mai 2014. En l'espèce, les premiers juges en ont fait une évaluation suffisante en allouant à M. E... une somme de 2 500 euros à ce titre.

11. Le tribunal a enfin suffisamment réparé les troubles dans les conditions d'existence du requérant par la somme de 10 000 euros.

12. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise médicale, que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions tendant au rappel de 3 mois de traitement et a condamné solidairement la commune de Hyères-les-Palmiers et la SMACL à lui verser la somme de 7 500 euros, déduction faite de la provision de 2 500 euros qui lui a été accordée par l'ordonnance du juge des référés du tribunal de grande instance de Toulon du 30 novembre 2011 et des sommes déjà versées par la SMACL.

Sur les frais liés au litige :

13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties en litige la charge de ses propres frais de procédure et de rejeter les conclusions qu'elles ont présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Hyères-les-Palmiers, de la SMACL et de la SNC Sofaxis présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à la commune de Hyères-les-Palmiers, à la société mutuelle d'assurance des collectivités locales, à la caisse primaire d'assurance maladie du Var et la SNC Sofaxis.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2019 où siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- Mme F..., présidente-assesseure,

- Mme H..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2019.

2

N° 18MA01434


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA01434
Date de la décision : 28/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04 Responsabilité de la puissance publique. Réparation.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : MARTINS-MESTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-11-28;18ma01434 ?
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