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22/07/2020 | FRANCE | N°19MA02297

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 22 juillet 2020, 19MA02297


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire de prélèvements sociaux à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1602316 du 25 mars 2019, le tribunal administratif de Toulon a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 18 169 euros et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la Cour :
>Par une requête sommaire et des mémoires, enregistrés les 17 mai 2019, 1er juillet 2019 et 20 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire de prélèvements sociaux à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1602316 du 25 mars 2019, le tribunal administratif de Toulon a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 18 169 euros et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et des mémoires, enregistrés les 17 mai 2019, 1er juillet 2019 et 20 mars 2020, M. et Mme A..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 mars 2019 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition en litige et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- leur requête est recevable ;

- la proposition de rectification du 10 août 2015 n'est pas motivée dès lors qu'elle fait référence à une proposition de rectification du 5 août 2015 adressée à la société Crazy Fashions qui a été ultérieurement annulée et remplacée par deux autres propositions de rectification ;

- l'administration n'a pas respecté le principe d'impartialité ;

- en application de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, ils doivent être déchargés de la totalité des impositions en litige ;

- M. A..., qui n'exerçait pas seul la maîtrise administrative, financière et commerciale de la société Crazy Fashions ne peut être considéré comme le maître de l'affaire et comme le bénéficiaire des sommes en litige ;

- la reconstitution du chiffre d'affaires de la société Crazy Fashions, fondée sur un coefficient de marge de 1,30, est erronée ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas fondées.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 8 novembre 2019 et le 17 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête, non motivée dans le délai d'appel, est irrecevable ;

- les requérants contestent pour la première fois en appel le bien-fondé des pénalités pour manquement délibéré ;

- les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la société Crazy Fashions, qui exerce une activité de vente à distance de prêt-à-porter et dont M. A... est le dirigeant, l'administration a assujetti M. et Mme A... à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2014. Ils relèvent appel du jugement du tribunal administratif de Toulon du 25 mars 2019 qui a rejeté le surplus de leur demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de prélèvements sociaux qui a été mise à leur charge au titre de l'année 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments présentés au soutien des moyens, n'a omis de répondre à aucun des moyens soulevés par les requérants. En particulier, les premiers juges, qui ont exposé les raisons pour lesquelles M. A... avait la qualité de maître de l'affaire au point 9, ont suffisamment motivé leur jugement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, le moyen tiré du défaut de motivation de la proposition de rectification du 10 août 2015 adressée aux requérants doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 du jugement attaqué.

4. En deuxième lieu, la circonstance que le vérificateur qui a établi le rehaussement en litige a procédé à la vérification de comptabilité de la société Crazy Fashions ne suffit pas, à elle seule, à établir qu'il a méconnu le principe d'impartialité qui s'impose aux agents de l'administration fiscale, alors que les requérants n'invoquent aucun conflit d'intérêt avec le vérificateur et n'allèguent pas l'existence d'une animosité ou d'un parti pris de ce dernier à leur encontre.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales : " La juridiction saisie peut, lorsqu'une erreur non substantielle a été commise dans la procédure d'imposition, prononcer, sur ce seul motif, la décharge des majorations et amendes, à l'exclusion des droits dus en principal et des intérêts de retard. / Elle prononce la décharge de l'ensemble lorsque l'erreur a eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ou lorsqu'elle est de celles pour lesquelles la nullité est expressément prévue par la loi ou par les engagements internationaux conclus par la France ".

6. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 et 4 que la procédure mise en oeuvre à l'encontre de M. et Mme A... n'est entachée d'aucune irrégularité. Par suite, les requérants ne sauraient demander l'application des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ". Aux termes de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ". Le contribuable qui, disposant seul des pouvoirs les plus étendus au sein de la société, est en mesure d'user sans contrôle de ses biens comme de biens qui lui sont propres, doit être regardé comme le seul maître de l'affaire. Il est en conséquence présumé avoir appréhendé les distributions effectuées par la société qu'il contrôle.

8. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (...) ". M. et Mme A... se sont abstenus de répondre dans le délai de trente jours à la proposition de rectification du 10 août 2015 qui leur a régulièrement été notifiée le 13 août 2015. Par suite, il leur appartient de démontrer le caractère exagéré des impositions.

9. En premier lieu, l'administration fiscale, à défaut de présentation de tarifs vérifiables pratiqués par la société Crazy Fashions, de justifications des soldes importantes qui auraient été pratiquées et de justificatifs des ventes, a procédé à une reconstitution du chiffre d'affaires à partir de prospectus émis par la société et révélant ses pratiques commerciales et tarifaires. Le prix de vente des produits, considérés par la société comme les plus significatifs, a été rapproché des achats hors taxes effectués au cours de la période du 16 octobre 2013 au 30 septembre 2014. L'administration a également tenu compte des deux périodes de soldes annuelles, étalées sur trois mois de l'année, ainsi que de " soldes complémentaires " et des ventes " flash " indiquées par M. A.... Le coefficient de marge hors taxe pratiqué par la société a été arrêté à 1,30. Ce taux de marge, fondé principalement sur les données propres de la société Crazy Fashions, apparaît déterminé de façon suffisamment fiable au vu des éléments dont disposait l'administration. En se bornant à faire valoir que le taux de marge hors taxe réellement pratiqué doit être évalué à 1,20, M. et Mme A... ne remettent pas en cause l'évaluation des résultats de la société Crazy Fashions. Dans ces conditions, ils ne peuvent être regardés comme établissant que le montant des revenus distribués en litige aurait été exagéré par le service.

10. En second lieu, M. A... a été regardé comme ayant appréhendé les distributions correspondant aux rehaussements des bénéfices de la société Crazy Fashions au cours de l'exercice clos en 2014. Il résulte de l'instruction que M. A... est le dirigeant et l'associé unique de la société Crazy Fashions, dont il détient 100 % du capital. Il dispose seul de la signature du compte bancaire professionnel ouvert par la société auprès de la Lyonnaise de banque et il n'existe pas de procuration au profit d'un tiers. M. A... doit être considéré comme ayant eu seul la maîtrise de l'affaire au cours de l'année 2014 et par voie de conséquence, il doit être présumé avoir appréhendé les distributions de bénéfices en provenance de la société Crazy Fashions. M. A... ne renverse pas cette présomption en se bornant à soutenir que l'administration n'a pas mis en évidence son enrichissement personnel et qu'il n'assure pas la gestion quotidienne de la société.

En ce qui concerne les pénalités :

11. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

12. En relevant que M. A..., en tant que dirigeant de la société Crazy Fashions, ne pouvait ignorer l'existence de recettes qui n'avaient pas été déclarées par cette société sur l'ensemble de la période vérifiée et pour des montants importants, alors que l'intéressé, en tant que maître de l'affaire, doit être regardé comme ayant appréhendé les revenus réputés distribués par cette société, faute de démonstration contraire, l'administration établit l'intention délibérée des requérants d'éluder l'impôt. Par suite, l'administration établit le bien-fondé de l'application de la majoration pour manquement délibéré prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté le surplus de leur demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. et Mme A... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 15 juillet 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- Mme D..., premier conseiller,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 juillet 2020.

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N° 19MA02297

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02297
Date de la décision : 22/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : SELARL MAILLET-DOSSETTO

Origine de la décision
Date de l'import : 11/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-22;19ma02297 ?
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