La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/04/2021 | FRANCE | N°19MA03671

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 22 avril 2021, 19MA03671


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sam Rénovation a demandé au tribunal administratif de Montpellier, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des cotisations de taxe d'apprentissage auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2015 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.

Par un j

ugement n° 1801657, 1801661 du 17 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sam Rénovation a demandé au tribunal administratif de Montpellier, par deux requêtes distinctes, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des cotisations de taxe d'apprentissage auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 à 2015 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.

Par un jugement n° 1801657, 1801661 du 17 juin 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 août 2019, l'EURL Sam Rénovation, représentée par la Selarl Caliste Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 juin 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- la proposition de rectification qui lui a été adressée le 24 novembre 2016 est insuffisamment motivée, en ce qui concerne les cotisations de taxe d'apprentissage ; elle a été privée, du fait de cette insuffisante motivation, de la possibilité d'engager un débat oral et contradictoire ;

- le service ne pouvait remettre en cause le principe de son assujettissement à l'impôt sur les sociétés dès lors que lors de sa constitution, la société à responsabilité limitée Sam Rénovation avait formulé une option qui, s'attachant à sa personnalité morale, est irrévocable et n'a pu être remise en cause lors de la réunion de l'ensemble des parts sociales entre les mains de l'un des associés ;

- les dispositions du deuxième alinéa de l'article 239 du code général des impôts ne fixant aucun point de départ au délai d'exercice de cette option, elle a pu être exercée avant la réunion de toutes les parts sociales entre les mains de l'un des associés ;

- le service ne pouvait lui faire application du régime d'auto-liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée, régi par les dispositions de l'article 283-2 nonies du code général des impôts, en se bornant à se référer aux factures émises par la société Sofelec ;

- les premiers juges ont inversé la charge de la preuve en considérant qu'elle devait apporter l'ensemble des éléments de preuve ;

- elle est fondée à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-IS-CHAMP-40 n° 135, BOI-TVA-DECLA-10-10-20 n° 533 et 535 et BOI-TVA-CHAMP-50-10 n° 210 et de la réponse ministérielle n° 34342 publiée le 4 mai 2004.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par l'EURL Sam Rénovation ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné, par décision du 19 mars 2021, Mme Mylène Bernabeu, présidente, pour assurer les fonctions de présidente par intérim de la 3ème chambre à compter du 20 mars 2021, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de Mme Courbon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sam Rénovation, qui exerce une activité de travaux maçonnerie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, résultant de la remise en cause par l'administration de l'imputation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi, et des cotisations de taxe d'apprentissage au titre des années 2013 à 2015, ainsi qu'à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015, en ce qu'ils procèdent de la vérification de comptabilité de son activité de travaux de maçonnerie. L'EURL Sam Rénovation relève appel du jugement du 17 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes tendant à la décharge des impositions supplémentaires ainsi mises à sa charge.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. L'EURL Sam Rénovation reprend le moyen soulevé en première instance tiré de ce que la proposition de rectification que le service lui a adressé le 24 novembre 2016 est insuffisamment motivée concernant les cotisations de taxe d'apprentissage auxquelles elle a été assujettie et de ce qu'elle a été privée, de ce fait, de la possibilité d'engager un débat oral et contradictoire, sans apporter d'élément nouveau au soutien de ce moyen. Il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 4 du jugement contesté.

Sur le bien-fondé des impositions :

3. En premier lieu, l'article 8 du code général des impôts prévoit que, à moins d'une option en faveur de l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, est assujetti à l'impôt sur le revenu, pour les bénéfices qu'il en retire, l'associé unique d'une société à responsabilité limitée lorsque cet associé est une personne physique. Aux termes du 3 de l'article 206 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Sont soumis à l'impôt sur les sociétés s'ils optent pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions prévues à l'article 239 : (...) e. Les sociétés à responsabilité limitée dont l'associé unique est une personne physique ; (...) ". Aux termes de l'article 239 du même code, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " 1. Les sociétés et groupements mentionnés au 3 de l'article 206 peuvent opter, dans des conditions qui sont fixées par arrêté ministériel, pour le régime applicable aux sociétés de capitaux. Dans ce cas, l'impôt sur le revenu dû par les associés en nom, commandités, coparticipants, l'associé unique de société à responsabilité limitée et les associés d'exploitations agricoles est établi suivant les règles prévues aux articles 62 et 162. / L'option doit être notifiée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l'impôt sur les sociétés. Toutefois, en cas de transformation d'une société de capitaux en une des formes de société mentionnées au 3 de l'article 206 ou en cas de réunion de toutes les parts d'une société à responsabilité limitée entre les mains d'une personne physique, l'option peut être notifiée avant la fin du troisième mois qui suit cette transformation ou cette réunion pour prendre effet à la même date que celle-ci. Dans tous les cas, l'option exercée est irrévocable. (...) ". Aux termes de l'article 22 de l'annexe IV au code général des impôts, applicable aux années en litige : " La notification de l'option prévue à l'article 239 du code général des impôts est adressée au service des impôts du lieu du principal établissement de la société ou du groupement qui souhaite exercer cette option. / La notification indique la désignation de la société ou du groupement et l'adresse du siège social, les nom, prénoms et adresse de chacun des associés, membres ou participants, ainsi que la répartition du capital social ou des droits entre ces derniers. Elle est signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants. Il en est délivré récépissé (...) ".

4. En application des dispositions citées au point 3, pour exercer valablement leur option pour l'imposition selon le régime propre aux sociétés de capitaux, les sociétés de personnes doivent soit notifier cette option au service des impôts du lieu de leur principal établissement, conformément aux prescriptions de l'article 239 du code général des impôts et de l'article 22 de l'annexe IV à ce code, soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce dont elles dépendent à l'occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambiguïté l'exercice de leur option. Si les dispositions de ces articles n'ont ni pour objet, ni pour effet de dispenser de ces formalités les sociétés ou groupements mentionnés au 3 de l'article 206 du code général des impôts qui opteraient pour leur assujettissement à cet impôt alors qu'ils n'y étaient pas précédemment soumis, il en va autrement dans l'hypothèse où une société à responsabilité limitée décide, au moment de la réunion de toutes ses parts entre les mains d'un associé unique, de demeurer assujettie à l'impôt sur les sociétés. Une telle entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée est réputée avoir régulièrement exercé l'option offerte au 3 de l'article 206 si elle a opté dans ses statuts, dans le délai prévu à la deuxième phrase du deuxième alinéa de l'article 239, pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, et si elle a, au titre du premier exercice clos après la réunion des parts dans une même main, déclaré ses résultats sous le régime de l'impôt sur les sociétés.

5. Par ailleurs, en vertu de l'article 199 ter C du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur et rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 220 C du même code, le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi défini à l'article 244 quater C est imputé sur l'impôt sur les sociétés dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été versées.

6. L'administration, considérant que l'EURL Sam Rénovation ne pouvait être assujettie à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices en litige, a remis en cause l'imputation des crédits d'impôt pour la compétitivité et l'emploi pour un montant total de 8 466 euros. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la réunion entre les mains de M. A... B... de toutes les parts de la société à responsabilité limitée (SARL) Sam Rénovation, celle-ci est devenue, le 7 octobre 2011, l'EURL Sam Rénovation. Si en vertu de l'article 1844-3 du code civil, la transformation régulière d'une société en une société d'une autre forme n'entraîne pas la création d'une personne morale nouvelle, elle a néanmoins impliqué, fiscalement, la cessation d'activité d'une société passible de l'impôt sur les sociétés et la création d'une société de personnes dont les résultats sont entièrement imposables au nom de son unique associé en application des dispositions combinées de l'article 8 du code général des impôts et de l'article 206 du même code. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est pas soutenu, que l'EURL Sam Rénovation aurait opté dans ses statuts pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, dans le délai prévu par l'article 239 du code général des impôts. L'entreprise requérante ne peut utilement se prévaloir de l'irrévocabilité de l'option exercée par la SARL Sam Rénovation lors de sa création, le 12 janvier 2010, dès lors que la SARL était assujettie de plein droit à l'impôt sur les sociétés. Elle n'est pas davantage fondée à se prévaloir d'une option qui aurait été exercée " de manière anticipée " lors de la constitution de la SARL. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que l'EURL Sam Rénovation, en l'absence d'option pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, ne pouvait être assujettie à cet impôt au titre des années en litige et a remis en cause l'imputation des crédits d'impôt pour la compétitivité et l'emploi.

7. En deuxième lieu, aux termes du 2 nonies de l'article 283 du code général des impôts, applicable aux années en litige : " Pour les travaux de construction, y compris ceux de réparation, de nettoyage, d'entretien, de transformation et de démolition effectués en relation avec un bien immobilier par une entreprise sous-traitante, au sens de l'article 1er de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, pour le compte d'un preneur assujetti, la taxe est acquittée par le preneur. ". Selon le I de l'article 242 nonies A de l'annexe II au même code : " Les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures (...) sont les suivantes : (...) 13° Lorsque l'acquéreur ou le preneur est redevable de la taxe, la mention : "Autoliquidation" ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci.

8. Il résulte de l'instruction que le service a rappelé les droits de taxe sur la valeur ajoutée que l'EURL Sam Rénovation n'avait pas acquittés sur des factures payées à la société Sofelec, libellées hors taxe et portant la mention " Autoliquidation de TVA - TVA due par le preneur Sam Rénovation ". Ces factures sont à même de justifier que le preneur, l'EURL Sam Rénovation, est redevable de la taxe sur la valeur ajoutée. L'entreprise requérante se borne à faire valoir, sans apporter aucun élément qu'elle seule est susceptible de détenir, que le service n'établit pas que les prestations correspondaient à des travaux relevant des dispositions précitées, que son lien avec la société Sofelec aurait la nature d'une relation de sous-traitance et que le contrat correspondant avait été signé avant le 1er janvier 2014. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges, qui n'ont pas inversé la charge de la preuve, ont considéré que l'EURL Sam Rénovation n'était pas fondée à contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2015.

9. En dernier lieu, l'EURL Sam Rénovation n'est pas fondée à se prévaloir de la doctrine référencée BOI-IS-CHAMP-40 n°135 et BOI-TVA-DECLA-10-10-20 n° 533 et 535, au demeurant postérieure aux années d'imposition en litige, qui ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il a été fait application. Elle n'est pas davantage fondée à se prévaloir de la réponse ministérielle n° 34342 publiée le 4 mai 2004 qui concerne le régime fiscal d'une EURL, soumise sur option à l'impôt sur les sociétés, qui devient une SARL du fait de la cession de parts, ni de la doctrine référencée BOI-TVA-CHAMP-50-10 n° 210, qui porte exclusivement sur les opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée sur option et qui n'est pas applicable au cas d'espèce.

10. Il résulte de tout ce qui précède que l'EURL Sam Rénovation n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, en tout état de cause, celles relatives aux entiers dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'EURL Sam Rénovation est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Sam Rénovation et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 8 avril 2021, où siégeaient :

- Mme Bernabeu, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 avril 2021.

6

N° 19MA03671

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03671
Date de la décision : 22/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Personnes morales et bénéfices imposables.

Contributions et taxes - Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés - Taxe d'apprentissage.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Questions communes.


Composition du Tribunal
Président : Mme BERNABEU
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme COURBON
Avocat(s) : RIGHI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-04-22;19ma03671 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award