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21/02/2022 | FRANCE | N°19MA03709

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 21 février 2022, 19MA03709


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Arcadi Pla a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le département du Gard a prononcé la résiliation à ses frais et risques du lot n° 1 bis " gros œuvre " du marché de construction du collège de Bellegarde, dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1700810 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2019 et q

uatre mémoires complémentaires enregistrés le 22 mars 2021, le 16 avril 2021, le 21 mai 2021 et le 24...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Arcadi Pla a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le département du Gard a prononcé la résiliation à ses frais et risques du lot n° 1 bis " gros œuvre " du marché de construction du collège de Bellegarde, dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1700810 du 6 juin 2019, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 août 2019 et quatre mémoires complémentaires enregistrés le 22 mars 2021, le 16 avril 2021, le 21 mai 2021 et le 24 juin 2021, la société Arcadi Pla, représentée par Me Bonnet, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures:

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes ;

2°) d'annuler la décision du 18 janvier 2017 par laquelle le département du Gard a prononcé la résiliation à ses frais et risques du lot n° 1 bis " Gros œuvre " du marché de construction du collège de Bellegarde, dont elle était titulaire ;

3°) de condamner le département du Gard à lui verser la somme de 4 615,29 euros hors taxes en réparation des préjudices résultant de l'irrégularité de la résiliation du marché ;

4°) de mettre à la charge de la SAS Samop et du département du Gard la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- l'auteur de la décision de résiliation était incompétent pour prendre une telle mesure ;

- la décision de résiliation est irrégulière et infondée ;

- la décision en cause n'est justifiée par aucun motif grave ;

- à titre subsidiaire, la résiliation doit être prononcée aux torts partagés ; le maître de l'ouvrage a eu un comportement fautif ;

- la défectuosité des bétons ne lui est pas imputable ; la sécurité de l'ouvrage n'était pas en cause ;

- le maître de l'ouvrage a tardé à se prononcer sur la présentation du sous-traitant ; ce sous-traitant présentait toutes les garanties requises ;

- elle est en droit d'obtenir réparation de ses préjudices à raison de la résiliation fautive, et au titre des prestations restant dues ;

- sa requête est recevable ; le marché de substitution et le marché public dans sa globalité ont été entièrement exécutés ; les conclusions tendant à obtenir la reprise des relations contractuelles sont sans objet ; les conclusions aux fins d'annulation demeurent recevables ; il existe un contentieux pendant devant le tribunal administratif de Nîmes concernant le décompte de liquidation ; l'exception de non-lieu à statuer soulevée en défense devra être écartée ;

- les écritures en défense du département du Gard sont irrecevables dès lors qu'aux termes de l'article 18 de la convention de mandat liant la SAS Samop au département du Gard, seul le maître de l'ouvrage délégué pouvait présenter ses observations en défense ;

- ses conclusions indemnitaires sont recevables ; elles ne sont pas nouvelles en cause d'appel ; le contentieux était lié et elle a formulé une demande dans le cadre du litige lié au décompte général ;

- ses prétentions indemnitaires, initialement fixées à la somme de 451 888,93 euros toutes taxes comprises, doivent être ramenées à la somme de 4 615,29 euros hors taxes.

Par un mémoire, enregistré le 9 février 2021, et deux mémoires du 21 mai 2021 et du 28 juin 2021, la SAS Samop, représentée par Eleom avocats, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la société Arcadi Pla la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du tribunal administratif de Nîmes est régulier ;

- la décision de résiliation a été prise par la personne compétente ; la décision n'avait pas à être contresignée par le conseil départemental ;

- la décision de résiliation était régulière et fondée ; les manquements de la société Arcadi Pla sont établis ;

- le maître de l'ouvrage n'a pas eu un comportement fautif ;

- les prétentions indemnitaires de la société Arcadi Pla sont irrecevables ; elles sont nouvelles en cause d'appel ;

- les conclusions présentées en défense par le département du Gard sont recevables.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 février 2021, et deux mémoires complémentaires enregistrés le 30 avril 2021 et le 25 juin 2021, le département du Gard, représenté par Me Brault, conclut au rejet de la requête et demande à ce que la société Arcadi Pla soit condamnée à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions aux fins d'annulation de la mesure de résiliation, qui ne sont assorties d'aucune conclusion aux fins de reprise des relations contractuelles, sont irrecevables ;

- à supposer que les conclusions présentées par la société requérante puissent être regardées comme des conclusions visant à la reprise des relations contractuelles, de telles conclusions sont devenues sans objet ;

- à titre subsidiaire, la demande est infondée ; la SAS Samop était compétente pour signer et notifier la décision de résiliation ; la décision de résiliation était justifiée ; le maître de l'ouvrage n'a commis aucune faute ; la société Arcadi Pla était responsable de la qualité des bétons fournis par ses sous-traitants ;

- le décompte de liquidation du marché fait l'objet d'un litige spécifique et pendant ;

- les conclusions contestant la décision de résiliation du contrat ne sont recevables qu'en tant qu'elles tendent à la reprise des relations contractuelles ; il appartient au juge administratif de requalifier les conclusions aux fins d'annulation de la mesure de résiliation en recours de plein contentieux contestant la validité de la mesure et tendant à la reprise des relations contractuelles ;

- les conclusions indemnitaires sont nouvelles en cause d'appel et par suite irrecevables ;

- le mandat confié à la SAS Samop n'a pas pour effet de dessaisir le département de son droit à agir en justice.

- la SAS Samop pouvait présenter des observations en défense en son nom propre.

Par ordonnance en date du 28 juin 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B... Point, rapporteur,

- les conclusions de M. A... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me Bonnet pour la société Arcadi Pla.

1. Par acte d'engagement du 24 juillet 2013, le département du Gard a confié à la SAS Samop une mission de mandat de maîtrise d'ouvrage pour l'opération de construction d'un collège et d'une halle de sport à Bellegarde (Gard). Par un acte d'engagement du 3 novembre 2014, la réalisation des travaux du lot n° 1 bis - gros oeuvre - de cette opération de construction a été confiée à la société Arcadi Pla. Après plusieurs mises en demeure de réaliser les travaux, le département du Gard, par une décision du 18 janvier 2017, a prononcé la résiliation du marché de la société Arcadi Pla à ses frais et risques, au motif tiré de ce que cette dernière n'avait pas remédié aux carences et défaillances identifiées dans la mise en demeure du 17 novembre 2016 et n'aurait notamment pas poursuivi les travaux de la halle de sport, ni mis en état les installations du chantier et réalisé un certain nombre de prestations comprenant l'achèvement de la pose du bandeau préfabriqué indispensable à la pose complète de la charpente métallique et l'achèvement des voiles béton du plateau sportif. La société Arcadi Pla fait appel du jugement en date du 6 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la contestation de la validité de cette mesure de résiliation.

Sur le cadre du litige :

2. Il résulte de l'instruction que la société Arcadi Pla a saisi les premiers juges de conclusions tendant à l'annulation de la décision de résiliation du marché en litige. Saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution du contrat, le juge administratif peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Ainsi, les conclusions présentées par la société Arcadi Pla demandant l'annulation de la décision de résiliation du marché en litige doivent être regardées comme un recours de plein contentieux tendant à la contestation de la validité de la mesure de résiliation du contrat et, par suite, à la reprise des relations contractuelles.

3. Il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité. Dans l'hypothèse où il fait droit à la demande de reprise des relations contractuelles, il peut décider, si des conclusions sont formulées en ce sens, que le requérant a droit à l'indemnisation du préjudice que lui a, le cas échéant, causé la résiliation, notamment du fait de la non-exécution du contrat entre la date de sa résiliation et la date fixée pour la reprise des relations contractuelles.

4. Lorsqu'un tribunal administratif a rejeté une demande tendant à la reprise des relations contractuelles et que, postérieurement à son jugement, le terme du contrat est atteint avant la saisine du juge d'appel ou pendant l'instance d'appel, la cour saisie doit constater que le contrat n'est plus susceptible d'être exécuté et que le litige n'a pas ou n'a plus d'objet.

Sur la recevabilité des écritures en défense du département du Gard :

5. Aux termes de l'article 5 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 : " Les rapports entre le maître de l'ouvrage et le mandataire sont définis par un contrat écrit qui prévoit, à peine de nullité : (...) e) Les conditions dans lesquelles le mandataire peut agir en justice pour le compte du maître de l'ouvrage. ".

6. La société Arcadi Pla ne peut utilement se prévaloir de la convention de mandat liant le maître de l'ouvrage au maître de l'ouvrage délégué pour soutenir que les écritures en défense du département du Gard, qui est partie à l'instance, seraient irrecevables. Au demeurant, les stipulations de l'article 18 de la convention de mandat invoquées par la société n'ont pas pour effet de substituer le mandataire à son mandant dans toutes les actions en justice, le dernier alinéa de cet article prévoyant expressément que le mandant conserve le droit d'agir lui-même en justice, tant en demande qu'en défense. Le moyen tendant à ce que les écritures en défense du département du Gard soient déclarées irrecevables doit par suite être écarté.

Sur l'exception de non-lieu à statuer sur la reprise des relations contractuelles :

7. Il résulte de l'instruction, ainsi que le fait valoir le département du Gard dans ses écritures en défense, que le marché de substitution du marché en litige, confié à la société Demathieu Bard, a été entièrement exécuté. Les travaux du marché de substitution ont été réceptionnés et le collège a été ouvert au public. La société Arcadi Pla admet au demeurant dans ses écritures que le marché public, dans sa globalité, était totalement achevé à la date d'introduction de sa requête d'appel, et que les conclusions tendant à obtenir la reprise des relations contractuelles sont devenues sans objet. Dans ces conditions, les conclusions de la société Arcadi Pla dirigées contre la mesure de résiliation du contrat, en tant qu'elles tendent à la reprise des relations contractuelles, n'ont plus d'objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.

Sur les conclusions indemnitaires :

8. Il résulte de l'instruction que dans ses écritures de première instance présentées devant le tribunal administratif de Nîmes, la société Arcadi Pla s'est bornée à demander l'annulation de la décision de résiliation et n'a formulé aucune demande indemnitaire. Par suite, ainsi que le fait valoir le département du Gard dans ses écritures en défense, les conclusions indemnitaires présentées par la société Arcadi Pla sont nouvelles en cause d'appel et par suite irrecevables.

9. Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par la société Arcadi PLA doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge du département du Gard et de la SAS Samop, qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, les sommes réclamées par la société Arcadi Pla sur le fondement de ces dispositions.

11. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société Arcadi Pla le versement au département du Gard et à la SAS Samop de la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la société Arcadi Pla tendant à la reprise des relations contractuelles.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Il est mis à la charge de la société Arcadi Pla le versement au département du Gard et à la SAS Samop de la somme de 2 000 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Arcadi Pla, au département du Gard et à la SAS Samop.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- M. Gilles Taormina, président assesseur,

- M. B... Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2022.

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N° 19MA03709

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA03709
Date de la décision : 21/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 Marchés et contrats administratifs. - Fin des contrats. - Résiliation.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. François POINT
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : PALMIER et ASSOCIÉS CPA CABINETS D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-02-21;19ma03709 ?
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