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20/09/2022 | FRANCE | N°21MA01632

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 20 septembre 2022, 21MA01632


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Châteaurenard à lui verser la somme de 32 500 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estimait avoir subis du fait, d'une part, de l'arrêté du 13 juin 2013 par lequel le maire de la commune avait retiré son autorisation de stationnement n° 3 pour l'exploitation de sa profession de chauffeur de taxi sur le territoire communal, et d'autre part, l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le maire avait réd

uit de trois à deux le nombre de stationnements de taxis sur la commune.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la commune de Châteaurenard à lui verser la somme de 32 500 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estimait avoir subis du fait, d'une part, de l'arrêté du 13 juin 2013 par lequel le maire de la commune avait retiré son autorisation de stationnement n° 3 pour l'exploitation de sa profession de chauffeur de taxi sur le territoire communal, et d'autre part, l'arrêté du 14 juin 2013 par lequel le maire avait réduit de trois à deux le nombre de stationnements de taxis sur la commune.

Par un jugement n° 1903263 du 1er mars 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 avril 2021 et le 23 février 2022, M. C..., représenté par Me Trèves, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er mars 2021 ;

2°) de condamner la commune de Châteaurenard à lui verser les sommes de 27 200 euros et de 5 000 euros en réparation, respectivement, du préjudice financier et du préjudice moral et pour résistance abusive, qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité des arrêtés du maire de la commune des 13 et 14 juin 2013 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Châteaurenard la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande n'est pas tardive, la commune ne livrant les motifs de son arrêté de retrait qu'à l'occasion du procès ;

- le retrait de l'arrêté municipal du 14 juin 2013, et le non-lieu à statuer prononcés par le tribunal sur le recours contre cet arrêté ne font pas obstacle, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, à ce qu'il réclame l'indemnisation des préjudices causés par l'illégalité de cet arrêté ;

- la commune ne peut pas se prévaloir d'autres motifs pour justifier sa décision de retrait, dont l'annulation contentieuse est définitive, de tels motifs n'étant pas fondés ;

- il justifie d'une perte de chance sérieuse de conclure un contrat de location-gérance, dont l'illicéité n'est pas démontrée, et partant, d'une perte de revenus locatifs, alors qu'une autre personne atteste de son intérêt pour son autorisation de stationnement et de sa renonciation en raison du différend avec la commune ;

- son préjudice financier doit tenir compte du chiffre d'affaires et non simplement des bénéfices et pas davantage des risques d'exploitation, les redevances étant dues en vertu du contrat de location-gérance en toute circonstance.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2022, la commune de Châteaurenard, représentée par Me Xoual, conclut à titre principal, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas déclaré irrecevable la demande de M. C..., subsidiairement, au rejet de la requête, très subsidiairement, à ce que les prétentions indemnitaires du requérant soient réduites à de plus justes proportions, et, en tout état de cause, à ce que soit mise à la charge de l'appelant la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- c'est à tort que le tribunal n'a pas rejeté la demande indemnitaire comme irrecevable, dans la mesure où la demande préalable du 5 février 2019 présente un caractère purement confirmatif de celle présentée le 17 mai 2017 et implicitement rejetée ;

- ayant été retiré dès le 8 août 2013, l'arrêté du 14 juin 2013 n'a pu causer au requérant aucun préjudice ;

- les autres moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 2 juin 2022, à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 ;

- le décret n° 95-935 du 17 août 1995 ;

- le code des transports ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me Molland, substituant Me Xoual, représentant la commune de Châteaurenard.

Des pièces présentées pour M. C... ont été enregistrées le 9 septembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., titulaire depuis le 10 juillet 1997 de l'autorisation de stationnement n° 3 pour exercer sur la commune de Châteaurenard sa profession de chauffeur de taxi, a vu cette autorisation retirée par un arrêté du maire de la commune en date du 13 août 2013. Par un arrêté du 14 juin 2013, le maire a également réduit le nombre d'autorisations de stationnement de taxis, de trois à deux. Par jugement du 2 décembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a annulé pour erreur de droit l'arrêté municipal du 13 juin 2013 et prononcé le non-lieu à statuer sur les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2013, au motif de son retrait définitif le 8 août 2013. Par un jugement du 1er mars 2021, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Châteaurenard à lui verser la somme de 32 500 euros en réparation des préjudices financier et moral qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de ces deux arrêtés.

Sur la recevabilité de la demande :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. ". L'article L. 112-3 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Toute demande adressée à l'administration fait l'objet d'un accusé de réception ". En vertu de l'article R. 112-5 du même code, l'accusé de réception prévu à l'article L. 112-3 indique si la demande est susceptible de donner lieu à une décision implicite de rejet ou à une décision implicite d'acceptation et, dans le premier cas, mentionne les délais et les voies de recours à l'encontre de la décision. Enfin, aux termes de l'article L. 112-6 de ce code : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation. Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite ".

3. Il résulte de l'instruction que, par lettre du 17 juin 2017, reçue le 19 juin, M. C... a demandé au maire de la commune de Châteaurenard le versement d'une somme de 32 500 euros, en réparation des préjudices financier et moral, causés selon lui par l'illégalité des arrêtés des 13 et 14 juin 2013. Il est constant que cette demande, qui n'a donné lieu à aucune décision expresse, n'a fait l'objet d'aucun accusé de réception, mentionnant les voies et délais de recours. Si, par une nouvelle demande formée le 5 février 2019, M. C... a invoqué les mêmes fautes et les mêmes préjudices que dans sa demande du 17 juin 2017, pour réclamer à la commune la même indemnité, et si, par conséquent, la décision tacite rejetant sa seconde demande n'a fait que confirmer le précédent refus né le 19 août 2017, ce dernier ne présentait pas un caractère définitif. Il suit de là que, contrairement à ce que soutient la commune, le recours présenté par M. C... au tribunal administratif de Marseille le 11 avril 2019, dirigé contre la décision tacite de rejet de sa demande du 5 février 2019, laquelle n'a donné lieu ni à la notification d'une décision expresse de rejet, ni à la délivrance d'un accusé de réception avec mention des voies et délais de recours, et présenté dans le délai de deux mois, était recevable.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le cadre juridique applicable :

4. L'illégalité d'une décision administrative constitue une faute de nature à engager la responsabilité de son auteur, pour autant qu'elle ait été à l'origine d'un préjudice direct et certain. Ainsi, l'erreur de droit entachant la décision qui pour retirer une autorisation de stationnement, se fonde sur le non-respect par son titulaire de la réglementation applicable aux taxis, et s'analyse comme une simple mesure de police, n'est de nature à engager la responsabilité de la commune territorialement compétente que s'il résulte de l'instruction que, compte tenu de la gravité de ces manquements à la réglementation, le maire aurait pris la même mesure de retrait s'il n'avait pas commis l'erreur de droit censurée par le juge.

5. En outre, l'autorité absolue de chose jugée attachée à la décision juridictionnelle qui a annulé une décision administrative pour erreur de droit, ne fait pas obstacle à ce que le requérant qui recherche la réparation des conséquences dommageables de cette mesure invoque à cet effet d'autres illégalités que celle ainsi censurée.

En ce qui concerne l'illégalité fautive de l'arrêté du 14 juin 2013 :

6. D'une part, la circonstance que l'arrêté du 14 juin 2013, par lequel le maire de la commune de Châteaurenard a réduit le nombre d'autorisations de stationnement de taxis sur le territoire communal, de trois à deux, a été retiré par un arrêté du 8 août 2013, devenu définitif, n'interdit pas à M. C... de se prévaloir des illégalités entachant ce premier arrêté pour obtenir l'indemnisation des préjudices qui y seraient liés. A cet égard, demeure sans incidence sur les droits à indemnité de l'intéressé, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le fait que, par l'effet du retrait du 8 août 2013, ses conclusions devant le tribunal tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 juin 2013 ont perdu leur objet.

7. Mais d'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que, entre la notification au requérant le 18 juin 2013 de l'arrêté du 14 juin, et sa prise de connaissance de l'arrêté du 8 août 2013 en prononçant le retrait, au plus tard à l'issue de l'instance de référé-suspension, le 14 août 2013, le chauffeur de taxi avec lequel il affirme avoir eu le projet de conclure un contrat de location-gérance portant, notamment, sur l'exploitation de l'autorisation de stationnement n° 3, aurait eu connaissance de l'arrêté du 14 juin 2013 et décidé en conséquence de ne pas donner suite à ce projet de contrat. M. C... n'est ainsi pas fondé à se prévaloir de l'illégalité de cet arrêté, dont il ne précise d'ailleurs pas les causes, pour réclamer l'indemnisation du préjudice financier lié à la perte de redevances mensuelles prévues à ce projet de convention. En outre, compte tenu de sa nature et de son objet, l'arrêté du 14 juin 2013 n'a pu être de nature à causer à M. C... un quelconque préjudice moral.

En ce qui concerne l'illégalité fautive de l'arrêté du 13 juin 2013 :

8. L'illégalité qui affecte l'arrêté du 13 juin 2013, qui tient à l'erreur de droit commise par le maire en se fondant sur le motif tiré de ce que M. C... n'avait pas justifié, chaque début d'année civile, d'une demande de renouvellement de son autorisation de stationnement n° 3, et qui a justifié l'annulation définitive de cet arrêté par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 2 décembre 2015, est constitutive d'une faute de nature à engager à son égard la responsabilité de la commune.

9. Premièrement, ainsi qu'il a été dit au point 5, M. C... est recevable, malgré l'autorité absolue de chose jugée attachée au dispositif du jugement d'annulation du 2 décembre 2015 et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire, à invoquer des illégalités externes qui affecteraient l'arrêté du 13 juin 2013, constitutif selon lui d'une sanction. Cependant, il ne résulte pas de l'instruction que de telles irrégularités, à les supposer établies, seraient de nature à lui procurer une meilleure indemnisation que celle susceptible de lui être accordée en réparation de l'illégalité interne de cet arrêté.

10. Deuxièmement, pour prétendre que, malgré cette erreur de droit, le maire aurait pu légalement retirer l'autorisation de stationnement de M. C..., la commune affirme, sur le fondement des dispositions de l'article L. 3421-1 du code des transports, que celui-ci s'est rendu coupable de violation grave et répétée de la réglementation applicable et qu'il n'exploitait pas de manière effective et continue cette autorisation de stationnement.

11. S'agissant, d'une part, de la prétendue violation grave et répétée de la réglementation applicable, la commune se prévaut de l'attestation du chef de la police municipale, établie le 31 juillet 2013, et relatant deux entretiens avec M. C..., les 16 février et 1er juin 2011 au cours desquels il lui aurait été fait part de manquements aux obligations de présenter en mairie en début de chaque année les pièces afférentes à la circulation du véhicule utilisé dans le cadre de l'autorisation de stationnement (contrôle technique du véhicule, carte grise du véhicule, permis de conduire en cours de validité, attestation d'assurance professionnelle, déclaration de revenus indiquant un suivi de l'exercice de la profession), de n'utiliser que le véhicule déclaré pour l'exercice de la profession de taxi en vertu de l'autorisation de stationnement, de respecter le tarif affiché sur l'appareil taximétrique et de fournir une attestation de suivi d'une formation continue obligatoire. Mais il résulte de cette même attestation, ainsi que du courrier en réponse de M. C... du 18 juillet 2011, reçu le 19 juillet, que ce dernier a justifié non seulement d'une attestation de suivi de formation continue du 30 juin au 1er juillet 2011, mais encore des autres documents exigés. Si cette attestation indique en outre que pour les années 2012 et 2013, les mêmes documents ont été demandés à M. C..., en vain, les lettres produites en ce sens par la commune, des 21 février 2012 et 12 février et 8 mars 2013 se bornent à lui demander de communiquer les justificatifs de demandes de renouvellement de son autorisation de stationnement. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que pour les années 2011 à 2013, M. C... aurait commis une violation grave et répétée de la réglementation applicable aux chauffeurs de taxi, de nature à justifier légalement le retrait de son autorisation prononcé par l'arrêté du 13 juin 2013.

12. D'autre part, s'il est constant que M. C... est titulaire de plusieurs autorisations de stationnement sur les communes voisines de Châteaurenard, cette seule circonstance ne peut suffire à démontrer l'absence d'exploitation effective et continue de son autorisation de stationnement n° 3 au sens de l'article L. 3421-1 du code des transports, sur une période au demeurant non précisée par la commune, dès lors que, ainsi que l'admettait, à la date des faits litigieux, l'article 10 du décret du 17 août 1995 portant application de la loi n° 95-66 du 20 janvier 1995 relative à l'accès à l'activité de conducteur et à la profession d'exploitant de taxi, le titulaire de l'autorisation de stationnement peut en assurer l'exploitation personnellement, avec le concours d'un salarié ou en consentant la location de son véhicule à un conducteur de taxi, et que M. C... affirme sans être contredit que plusieurs de ses autorisations ont donné lieu à des contrats de location-gérance. Alors qu'en vertu de l'article 11 du même décret, alors en vigueur, la preuve de l'exploitation effective et continue est rapportée par la copie des déclarations de revenus et des avis d'imposition pour la période concernée, et par celle de la carte professionnelle utilisée par l'exploitant pendant la période d'exploitation ou tout document justificatif démontrant une exploitation par un salarié ou un locataire, il ne résulte d'aucune des correspondances adressées par la commune à M. C... que, pour les années 2012 et 2013, de telles pièces lui auraient été demandées, sans succès. Par suite, la commune n'est pas non plus fondée à soutenir que, malgré l'erreur de droit entachant son arrêté du 13 juin 2013, elle aurait retiré l'autorisation de stationnement n° 3 de M. C... au motif de l'inexploitation effective et continue de celle-ci, ni donc que sa responsabilité ne saurait être engagée à l'égard de M. C... du fait de l'illégalité de cet arrêté.

En ce qui concerne les préjudices indemnisables :

13. En premier lieu, M. C... fait valoir que, du fait de l'arrêté du 13 juin 2013 retirant illégalement son autorisation de stationnement, il n'a pu conclure le contrat de location-gérance avec le conducteur de taxi à qui il avait par ailleurs promis le transfert de son autorisation et que, en conséquence, il a été privé de la redevance de 800 euros mensuels devant être stipulée à son bénéfice par le locataire-gérant. Si, pour étayer ses allégations, M. C... se borne à produire, comme en première instance, un contrat de location-gérance et une promesse de transfert, ni datés ni signés, sans les accompagner d'une attestation du conducteur de taxi appelé à les conclure avec lui, il affirme également, sans être contredit, que c'est parce qu'il a soumis ce projet de contrat de location-gérance au visa de la commune, que celle-ci a pris l'arrêté de retrait du 13 juin 2013. En outre, il résulte de l'instruction qu'un contrat de location-gérance a été finalement conclu le 2 avril 2016, soit après l'acquisition par le jugement du 2 décembre 2015 de son caractère définitif, alors que le projet de contrat stipulait pour date de prise d'effet le 1er juin 2013 au bénéfice de la même personne que le bénéficiaire de la promesse de transfert, qui fixait quant à elle pour date limite d'obtention du prêt bancaire le 31 décembre 2013. L'ensemble de ces circonstances permettent de considérer comme suffisamment réels et sérieux, à la date du retrait illégal, non seulement le projet de contrat de location-gérance, mais encore la perte d'une chance de percevoir, sur le fondement de ce contrat, une somme mensuelle de 800 euros correspondant à la redevance alors stipulée.

14. En deuxième lieu, à les supposer avérées, les irrégularités qui affecteraient le projet de contrat de location-gérance à la conclusion duquel le retrait fautif a fait échec, demeurent par elles-mêmes sans incidence sur la privation des droits contractuels ainsi causée par cette illégalité fautive. Contrairement à ce qu'affirme la commune, les dispositions de l'article 10 du décret du 17 août 1995 qui prévoyaient, à la date des faits en cause, que, " après en avoir fait la déclaration à l'autorité compétente, il (le titulaire de l'autorisation de stationnement) peut également assurer cette exploitation en consentant la location du taxi à un conducteur de taxi " et que " l'autorité compétente pour délivrer les autorisations de stationnement peut, dans l'intérêt de la sécurité et de la commodité de la circulation sur les voies publiques, subordonner la délivrance d'une autorisation sollicitée en vue de l'exploitation d'un taxi par location à la présentation par le demandeur d'un contrat de louage conforme à un contrat-cadre approuvé par elle (...) ", n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre au maire, qui n'était pas saisi d'une première demande d'autorisation de stationnement mais seulement d'une déclaration de location-gérance, de s'opposer à cette déclaration au motif d'irrégularités l'affectant.

15. En troisième lieu, compte tenu à la fois des stipulations du projet de contrat de location-gérance relatives à sa durée, égale à une année et renouvelable tacitement, qui ne permettent donc de considérer comme suffisamment certain le préjudice invoqué que pour une durée d'un an, et de la circonstance qu'à compter de la lecture du jugement du 2 décembre 2015 rétablissant l'autorisation de stationnement n° 3 dans l'ordonnancement juridique, il était loisible à M. C... d'exploiter son autorisation, il sera fait une juste indemnisation de la perte de chance qu'il a subie de percevoir une redevance mensuelle de 800 euros, en lui allouant à ce titre la somme de 9 600 euros.

16. Enfin, en se bornant à affirmer que la commune a fait preuve d'une résistance abusive, M. C... ne justifie pas d'un préjudice moral qui lui aurait été causé par l'illégalité fautive de l'arrêté du 13 juin 2013.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est fondé à demander la condamnation de la commune de Châteaurenard à lui verser la somme de 9 600 euros en réparation de son préjudice financier, et à obtenir l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il a de contraire à cette condamnation.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à la charge de M. C..., qui n'est pas la partie perdante dans cette instance, au titre des frais exposés par la commune de Châteaurenard et non compris dans les dépens. Les conclusions présentées en ce sens par la commune doivent donc être rejetées. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, et en application de ces dispositions, il y a lieu de mettre à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. C... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La commune de Châteaurenard est condamnée à verser à M. C... la somme de 9 600 euros en réparation de son préjudice financier.

Article 2 : Le jugement n° 1903263 du tribunal administratif de Marseille du 1er mars 2021 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article précédent.

Article 3 : La commune de Châteaurenard versera à M. C... la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C..., et les conclusions présentées par la commune de Châteaurenard au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et à la commune de Châteaurenard.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 septembre 2022.

N° 21MA016322


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA01632
Date de la décision : 20/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-04-02 Responsabilité de la puissance publique. - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. - Responsabilité et illégalité. - Illégalité n'engageant pas la responsabilité de la puissance publique.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : TREVES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-09-20;21ma01632 ?
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