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28/02/2023 | FRANCE | N°22MA01582

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 28 février 2023, 22MA01582


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Simiane-Collongue sur sa demande du 26 septembre 2019 tendant à requalifier ses contrats conclus depuis le

1er septembre 2017 en contrats à durée déterminée, d'enjoindre à la commune de Simiane-Collongue de procéder à la requalification de ses contrats de vacataire en contrats à durée déterminée, de condamner la commune lui verser la somme de 2 389,25 e

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de Simiane-Collongue sur sa demande du 26 septembre 2019 tendant à requalifier ses contrats conclus depuis le

1er septembre 2017 en contrats à durée déterminée, d'enjoindre à la commune de Simiane-Collongue de procéder à la requalification de ses contrats de vacataire en contrats à durée déterminée, de condamner la commune lui verser la somme de 2 389,25 euros en réparation des préjudices subis du fait de son statut de vacataire, et de mettre à la charge de cette commune la somme de 2 000 euros au titre des frais du litige.

Par un jugement n° 2000560 du 4 avril 2022, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision implicite du maire de Simiane-Collongue rejetant la demande de requalification des contrats de Mme B..., a enjoint à la commune de Simiane-Collongue de requalifier les décisions d'engagement de l'intéressée en contrats à durée déterminée et de régulariser en conséquence sa situation administrative, selon les modalités définies au point 5 du jugement, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, a condamné la commune à verser à Mme B... une somme de 600 euros au titre du préjudice moral, a mis à la charge de la commune une somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2022, la commune de Simiane-Collongue, représentée par la SCP Lesage Berguet Gouard-Robert, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 avril 2022 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de rejeter la demande de Mme B... ;

3°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 1 600 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a prononcé la requalification des contrats de vacataire signés avec Mme B... sans procéder à l'examen particulier de la situation de celle-ci ; elle a été recrutée pour des durées mensuelles très variables en fonction du nombre d'élèves inscrits, ce qui démontre l'irrégularité de ses horaires et donc qu'il ne s'agissait pas d'un besoin permanent de la collectivité puisque subordonné à la présence d'inscription d'enfants ;

- l'indemnisation susceptible de lui être allouée ne peut être calculée que sur la base du traitement net et non sur la base du traitement brut alloué à l'agent ; conformément au jugement attaqué, l'indemnisation susceptible d'être allouée à Mme B... ne peut être calculée que sur la base de l'indice de rémunération correspondant au premier échelon de la grille indiciaire des assistants territoriaux d'enseignement artistique de première classe ; il conviendra également de tenir compte des congés payés à hauteur de 10 % du traitement ;

- la requérante ne saurait se prévaloir d'un quelconque préjudice moral du fait d'une précarité dès lors que le statut d'agent contractuel lié par un contrat à durée déterminée ne confère aucun droit à renouvellement.

La requête a été communiquée à Mme B..., qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par ordonnance du 28 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 12 janvier 2013 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 18 août 2015, Mme B... a été recrutée par la commune de

Simiane-Collongue du 1er septembre au 30 septembre 2015 pour exercer les fonctions de professeur de musique au sein de l'école municipale en qualité de vacataire. Elle a ensuite été employée par cette collectivité pour exercer les mêmes fonctions, en qualité d'agent contractuelle, par trois contrats pour la période allant du 1er octobre 2015 au 30 juin 2016, puis pour le mois de septembre 2016, et la période allant du 1er octobre 2016 au 31 août 2017. Enfin, au titre des années scolaires 2017-2018 et 2018-2019, l'intéressée a de nouveau été recrutée en qualité de vacataire, par contrat en ce qui concerne la première de ces deux périodes, et par arrêté du 18 août 2018 en ce qui concerne la seconde. Par courrier du 26 septembre 2019, Mme B... a saisi la commune de Simiane-Collongue d'une demande tendant à la requalification des contrats conclus depuis le 1er septembre 2017 en contrats à durée déterminée ainsi qu'à l'indemnisation des préjudices subis. En l'absence de réponse de la commune, l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Marseille d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite rejetant sa demande et à la condamnation de la commune à l'indemniser de ses préjudices. Par un jugement du 4 avril 2022, dont la commune de Simiane-Collongue relève appel, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision implicite rejetant les demandes de Mme B... du 22 novembre 2018, lui a enjoint de requalifier les décisions d'engagement de Mme B... en contrats à durée déterminée et de régulariser en conséquence sa situation administrative, l'a condamnée à verser à Mme B... une somme de 600 euros au titre du préjudice moral, a mis à sa charge une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

2. En premier lieu, la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction issue de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique, fixe aux articles 3-1 à 3-3 les cas dans lesquels les emplois permanents des collectivités territoriales peuvent par exception être pourvus par des agents non titulaires. L'article 136 de cette loi fixe les règles d'emploi de ces agents et précise qu'un décret en Conseil d'Etat déterminera les conditions d'application de cet article. Aux termes de l'article 1er du décret du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction en vigueur jusqu'au 1er janvier 2015 : " Les dispositions du présent décret s'appliquent aux agents non titulaires de droit public des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 (...). Les dispositions du présent décret ne sont toutefois pas applicables aux agents engagés pour un acte déterminé ". Ces mêmes dispositions réglementaires, dans leur rédaction issue du décret du 29 décembre 2015, précisent que ces règles d'emploi ne sont pas applicables " aux agents engagés pour une tâche précise, ponctuelle et limitée à l'exécution d'actes déterminés ".

3. Un agent de droit public employé par une collectivité ou un établissement mentionné au premier alinéa de l'article 2 de la loi du 26 janvier 1984 doit être regardé comme ayant été engagé pour exécuter un acte déterminé lorsqu'il a été recruté pour répondre ponctuellement à un besoin de l'administration. La circonstance que cet agent a été recruté plusieurs fois pour exécuter des actes déterminés n'a pas pour effet, à elle seule, de lui conférer la qualité d'agent contractuel. En revanche, lorsque l'exécution d'actes déterminés multiples répond à un besoin permanent de l'administration, l'agent doit être regardé comme ayant la qualité d'agent non titulaire de l'administration.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a assuré, à compter du mois de septembre 2015, des cours de musique au sein de l'école municipale de Simiane-Collongue, selon un volume horaire variable chaque année, d'abord en qualité de vacataire jusqu'au 30 septembre 2015, puis en qualité d'agent contractuel sur la base de contrats à durée déterminée couvrant l'année scolaire 2015-2016 du 1er octobre au 2015 au 30 juin 2016, et l'année scolaire 2016-2017, puis à nouveau en qualité de vacataire à compter de la rentrée scolaire de

septembre 2017. Il est par ailleurs constant qu'elle a effectué en moyenne entre 13 heures et

17 heures mensuelles depuis son recrutement, que ses engagements ont été systématiquement renouvelés et que ses missions n'ont pas varié. Dans ces conditions qui ne sont pas contestées par l'appelante, laquelle se borne à soutenir que le recrutement de Mme B... en qualité de vacataire était justifié par la seule circonstance que les modalités d'emploi étaient fonction du nombre annuel d'élèves bénéficiant de l'enseignement musical dispensé par cet agent, celle-ci ne peut être regardée comme ayant été recrutée, sur la période en cause, pour répondre ponctuellement à un besoin de la commune, mais doit être considérée comme ayant occupé un emploi répondant à un besoin permanent, en dépit de la circonstance qu'elle était rémunérée sur la base d'un nombre de vacations multiplié par un taux horaire. Par suite, la commune de Simiane-Collongue n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision implicite par laquelle son maire a refusé de faire droit à la demande de Mme B... de requalification de ses contrats depuis le 1er septembre 2017 en contrats à durée déterminée.

5. En second lieu, Mme B... a droit à réparation des préjudices directement liés à l'illégalité commise par la commune de Simiane-Collongue.

6. D'une part, il résulte clairement des motifs du jugement attaqué que la demande de Mme B... tendant à l'indemnisation de son préjudice financier a été rejetée par les premiers juges au motif de l'absence, selon eux, de préjudice distinct des conséquences pécuniaires ayant résulté du maintien de l'intéressée dans le statut de vacataire sur la période du

1er septembre 2017 au 30 juin 2019. Dans ces conditions, l'appelante ne peut utilement soutenir, pour demander l'annulation de ce jugement, que l'indemnisation susceptible d'être allouée à Mme B... doit être calculée sur la base du traitement net et non du traitement brut et qu'il conviendra de tenir compte des congés payés. A supposer que, par cette argumentation, la commune ait entendu contester le jugement en tant qu'il lui a enjoint de régulariser la situation administrative de Mme B..., elle ne critique pas de la sorte utilement, ni le principe de cette injonction, ni les modalités fixées par les premiers juges pour son exécution, au point 5 de leur décision.

7. D'autre part, la seule circonstance, invoquée par l'appelante, que le statut d'agent contractuel lié par un contrat à durée déterminée ne lui confère aucun droit au renouvellement de son contrat ne peut suffire à remettre en cause l'existence d'un préjudice moral ayant résulté en l'espèce pour Mme B... de l'illégalité fautive commise par la commune en la maintenant dans une situation irrégulière. La commune n'est donc pas fondée à soutenir que c'est de façon erronée que les premiers juges ont alloué à l'intéressée une somme de 600 euros en réparation de son préjudice moral.

8. Il résulte de ce tout qui précède que la requête d'appel de la commune de

Simiane-Collongue doit être rejetée, y compris ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Simiane-Collongue est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Simiane-Collongue et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 10 février 2023, où siégeaient :

- M. Revert, président,

- M. Martin, premier conseiller,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 28 février 2023.

N° 22MA015822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01582
Date de la décision : 28/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. - Contentieux de la fonction publique. - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SCP LESAGE - BERGUET - GOUARD-ROBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-02-28;22ma01582 ?
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