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24/03/2023 | FRANCE | N°21MA03992

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 24 mars 2023, 21MA03992


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré devant le tribunal administratif de Marseille comme prévenus d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques M. D... A... et M. F... B..., sur le fondement d'un procès-verbal de contravention de grande voirie du 19 octobre 2017 constatant l'occupation sans droit ni titre du domaine public maritime, au lieu-dit " Anse de Maldormé ", à Marseille, 7ème arrondissement (Bouches

-du-Rhône), par une construction à usage d'habitation avec terrasse, la surface...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré devant le tribunal administratif de Marseille comme prévenus d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques M. D... A... et M. F... B..., sur le fondement d'un procès-verbal de contravention de grande voirie du 19 octobre 2017 constatant l'occupation sans droit ni titre du domaine public maritime, au lieu-dit " Anse de Maldormé ", à Marseille, 7ème arrondissement (Bouches-du-Rhône), par une construction à usage d'habitation avec terrasse, la surface occupée par l'ensemble de cette construction étant d'environ 114 m².

Par un jugement n° 1901677 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Marseille a, d'une part, relaxé MM. A... et B... du versement de l'amende visée à l'article 131-13 du code pénal et, d'autre part, a enjoint à M. C... A..., M. E... A... et M. F... B... de procéder à la démolition des installations et ouvrages mentionnés dans le procès-verbal dans un délai de neuf mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 septembre et 13 octobre 2021, M. C... A... et M. E... A..., représenté par Me Gonand, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 juillet 2021 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de dire qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) subsidiairement, de rejeter les demandes présentées par le préfet des Bouches-du-Rhône en première instance ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est entaché d'une erreur de droit dans la mesure où, en raison du décès du contrevenant, l'action publique était prescrite et il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions du représentant de l'Etat tendant au paiement d'une amende ;

- le tribunal a statué " ultra petita " dans la mesure où les demandes présentées ne visaient que M. F... B... et M. D... A..., décédé, sans que n'apparaisse une demande tendant à la mise en cause de M. C... A... et de M. E... A... ;

- alors qu'il ressort des pièces qu'ils ont produit que le bien en cause n'apparaît pas dans la succession, le tribunal ne pouvait leur appliquer la qualité de copropriétaires ou les considérer comme ayant la garde dudit bien.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par MM. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ciréfice,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Gonand, représentant M. C... A... et M. E... A....

Considérant ce qui suit :

1. Après qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie eut été dressé le 19 octobre 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône a déféré M. D... A... et M. F... B... comme prévenus d'une contravention de grande voirie prévue et réprimée par l'article L. 2132-3 du code général de la propriété des personnes publiques, devant le tribunal administratif de Marseille. Celui-ci, par un jugement du 8 juillet 2021, a, d'une part, relaxé MM. A... et B... du versement de l'amende visée à l'article 131-13 du code pénal et, d'autre part, a enjoint à ces derniers de procéder à la démolition des installations et ouvrages mentionnés dans le procès-verbal dans un délai de neuf mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard. M. C... A... et M. E... A..., héritiers de M. D... A..., décédé le 14 janvier 2019, relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. D... A... est décédé le 14 janvier 2019. En matière de contravention de grande voirie, le décès du contrevenant rend sans objet les conclusions relatives à l'action publique. Dans ces conditions, la demande présentée par le préfet des Bouches-du-Rhône tendant à la condamnation de M. D... A... au versement d'une amende de 1 500 euros au titre de l'action publique était devenue sans objet à la date du jugement. Le jugement du tribunal administratif de Marseille doit, dès lors, être annulé en tant qu'il a relaxé M. D... A... au motif que l'action publique était prescrite. Il y a lieu d'évoquer les conclusions de la demande ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance, de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par M. C... et E... A... devant le tribunal administratif.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. D'une part, aux termes de l'article R. 634-1 du code de justice administrative : " Dans les affaires qui ne sont pas en état d'être jugées, la procédure est suspendue par la notification du décès de l'une des parties (...). Cette suspension dure jusqu'à la mise en demeure pour reprendre l'instance (...) ".

4. D'autre part, en vertu du principe d'imprescriptibilité du domaine public, les termes d'une autorisation d'occupation du domaine public disposant qu'en cas de cessation de l'occupation le permissionnaire devra, s'il en est requis, remettre les lieux en leur état primitif dans le délai qui lui sera imparti par l'administration donnent à l'administration le droit d'exiger du titulaire de l'autorisation ou de ses héritiers, si ces derniers ont accepté la succession, la démolition des installations édifiées sur le domaine public dans un délai raisonnable après l'expiration de l'autorisation. A défaut de disposition contraire expresse insérée dans l'autorisation d'occupation temporaire ultérieurement délivrée au bénéfice d'un successeur, l'administration ne peut qu'exiger du nouvel occupant qu'il restitue, à l'expiration de sa propre permission, la parcelle dans l'état dans lequel elle lui a été remise et non le contraindre à démolir les installations édifiées par ses prédécesseurs.

5. Enfin, si, par un arrêté du 4 avril 2013, le préfet des Bouches-du-Rhône a autorisé M. D... A... à occuper un pavillon à usage d'habitation, situé Anse de Maldormé, cette autorisation prenait fin le 31 décembre 2014. Par ailleurs, l'article 10 de cet arrêté précise " qu'à l'échéance de l'autorisation et sauf demande contraire de l'administration, les ouvrages constructions et installations de caractère immobilier existant sur la dépendance domaniale occupée doivent être démolis. / Dans le cas où le bénéficiaire a été autorisé à occuper des ouvrages déjà réalisés, la démolition s'applique aux constructions existantes précédemment, comme à celles éventuellement édifiées par le bénéficiaire de l'autorisation ".

6. Il ressort des pièces du dossier de première instance qu'à la suite de l'enregistrement du déféré préfectoral par le tribunal administratif de Marseille, cette juridiction a, le 19 mars 2019, communiqué cette requête à M. D... A... puis, le 12 décembre 2019, l'a mis en demeure de produire avant de lui par faire parvenir, le 8 juin 2020, l'avis d'audience fixé au 25 juin 2020. C'est seulement à l'occasion de cette audience que le tribunal administratif de Marseille a été informé du décès de M. D... A... survenu le 14 janvier 2019. L'affaire était donc en état d'être jugée lorsque le tribunal administratif de Marseille a été informé du décès de M. D... A..., père des requérants, lesquels ont, au demeurant, eu connaissance de l'ensemble de la procédure qui s'est poursuivie à leur encontre et à laquelle ils ont pris part en produisant des observations en défense, se comportant de la sorte en héritiers du contrevenant. Dans ces conditions et en raison du principe, rappelé au point 4, d'imprescriptibilité du domaine public maritime, le décès de M. D... A... est resté sans effet sur l'action du préfet des Bouches-du-Rhône tendant à la réparation des atteintes à ce domaine. Dès lors et en vertu de son office en matière de contravention de grande voirie, les premiers juges étaient tenus de statuer sur l'action domaniale initiée par le préfet des Bouches-du-Rhône. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient statué " ultra petita " doit être écarté.

7. En outre, alors que les requérants n'établissent pas, en dépit d'une mesure d'instruction en ce sens, avoir renoncé à la succession de leur père, le préfet des Bouches-du-Rhône était fondé, dans le délai de quatre ans raisonnable dans les circonstances de l'espèce, à demander la condamnation des héritiers de M. A... à la remise en état du domaine public par la démolition des ouvrages en cause, aux motifs exposés au point 4 ci-dessus et par application de l'article 10 de l'arrêté précité du 4 avril 2013. La circonstance selon laquelle les appelants ne sont pas à l'origine de la construction de ces ouvrages, qu'ils n'en ont jamais été propriétaires ni n'en n'auraient jamais eu la garde est sans incidence sur le bien-fondé d'une telle demande.

8. Enfin, le moyen selon lequel " aucune garantie " n'aurait été accordée aux requérants, soulevé dans la requête sommaire mais non repris dans le mémoire ampliatif, n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il ne peut, par suite, qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le surplus des conclusions de la requête de M. C... A... et de M. E... A... doit être rejeté, y compris les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement du 8 juillet 2021 est annulé en tant que le tribunal n'a pas retenu le non-lieu à statuer s'agissant de l'action publique dirigée contre M. D... A....

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions relatives à l'action publique dirigée contre M. D... A....

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à C... A..., à M. E... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2023, où siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Ciréfice, présidente assesseure,

- M. Prieto, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2023.

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N° 21MA03992

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03992
Date de la décision : 24/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Analyses

24-01-03-01 Domaine. - Domaine public. - Protection du domaine. - Contraventions de grande voirie.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-03-24;21ma03992 ?
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