La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/03/2023 | FRANCE | N°21MA02020

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre, 30 mars 2023, 21MA02020


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ly Co a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, des pénalités correspondantes et de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du

code général des impôts.

Par un jugement n° 1802315 du 30 mars 2021, le tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Ly Co a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, des pénalités correspondantes et de l'amende qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts.

Par un jugement n° 1802315 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 mai 2021 et le 13 janvier 2023, la SARL Ly Co, représentée par Me Mundet, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 30 mars 2021 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités demeurant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les opérations de vérification de comptabilité se sont déroulées au sein du cabinet de l'expert-comptable, sans demande de sa part ;

- l'administration a ainsi méconnu la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20 n° 90, selon laquelle le contribuable doit demander expressément au vérificateur que les documents soient examinés chez son conseil ;

- l'expert-comptable ne disposait d'aucun mandat pour la représenter au cours du contrôle ;

- par conséquent elle n'a pu bénéficier d'un débat oral et contradictoire ;

- le vérificateur a irrégulièrement emporté des documents comptables ;

- la méthode de reconstitution de ses recettes est inadaptée et radicalement viciée ;

- le chiffre d'affaires reconstitué n'est pas réaliste ;

- l'administration ne pouvait faire application de la majoration pour manquement délibéré.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la SARL Ly Co ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Ury, rapporteur public,

- et les observations de Me Mundet, représentant la SARL Ly Co.

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'une vérification de comptabilité de la SARL Ly Co, qui exploite un restaurant à Nice, l'administration fiscale, après avoir écarté la comptabilité de la société et procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires, l'a assujettie à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, et lui a infligé l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts. La remise des intérêts de retard et de l'amende a été prononcée par l'administration, sur le fondement du I de l'article 1756 du code général des impôts, en raison du placement de la société en redressement judiciaire par un jugement du 11 février 2016. La SARL Ly Co relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a ainsi été assujettie, et des pénalités demeurant en litige.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. En premier lieu, si, en application de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, toute vérification de comptabilité doit en principe se dérouler dans les locaux de l'entreprise vérifiée, la vérification n'est toutefois pas nécessairement entachée d'irrégularité du seul fait qu'elle ne s'est pas déroulée dans ces locaux. Il en va ainsi lorsque, notamment, la comptabilité ne se trouve pas dans l'entreprise et que, d'un commun accord entre le vérificateur et les représentants de l'entreprise, les opérations de vérification se déroulent au lieu où se trouve la comptabilité, dès lors que cette circonstance ne fait, par elle-même, pas obstacle à ce que la possibilité d'engager avec le vérificateur un débat oral et contradictoire demeure offerte aux représentants de l'entreprise vérifiée.

3. Il résulte de l'instruction et il n'est pas contesté que la vérification de comptabilité de la SARL Ly Co a débuté le 17 juin 2014 et que deux interventions se sont déroulées sur place les 17 et 20 juin 2014. Le contrôle s'est poursuivi dans les locaux de l'expert-comptable, conformément à la demande expressément formulée par la gérante de la société par une lettre datée du 6 juin 2014. En outre et en tout état de cause, la société requérante n'établit pas que sa gérante, avec laquelle le vérificateur s'est entretenu au moins à deux reprises au cabinet de l'expert-comptable, et qui a elle-même fourni, le 23 juillet 2014, des éléments chiffrés relatifs à la ventilation des ventes entre le taux réduit et le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée, se serait opposée à la poursuite du contrôle dans ce cabinet. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les opérations de vérification de comptabilité se seraient irrégulièrement déroulées au sein du cabinet de l'expert-comptable doit être écarté. La requérante n'est pas davantage fondée à ce titre à se prévaloir des énonciations de la doctrine administrative référencée BOI-CF-PGR-20-20 n° 90 dès lors que, relative à la procédure d'imposition, elle n'entre pas dans le champ d'application de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.

4. En deuxième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la gérante de la SARL Ly Co, qui était présente lors des interventions du vérificateur, les 23 et 31 juillet 2014, ainsi qu'il vient d'être dit, et lui a elle-même fourni la copie de la carte des prix ainsi que des éléments chiffrés relatifs à la ventilation des ventes entre le taux réduit et le taux normal de taxe sur la valeur ajoutée, aurait été représentée par l'expert-comptable. Par conséquent, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'expert-comptable ne disposait d'aucun mandat pour la représenter au cours du contrôle.

5. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux deux points précédents que la SARL Ly Co n'apporte pas la preuve qui lui incombe qu'elle aurait été privée de la garantie s'attachant à l'existence d'un débat oral et contradictoire.

6. En quatrième lieu, l'utilisation pour les besoins d'une vérification de comptabilité de tirages sur support papier d'originaux comptables conservés sous forme de fichiers informatiques et dont le contribuable garde la disposition ne saurait être regardé comme l'emport de documents comptables originaux. En l'espèce, le vérificateur a demandé, le 23 juillet 2014, l'édition sur support papier, à partir des données de la caisse enregistreuse, des journaux des ventes, des statistiques globales, des règlements, des offerts, des ventes " retour ", du journal taxe sur la valeur ajoutée et du chiffre d'affaires par familles. Il ne résulte pas de l'instruction que la SARL Ly Co n'aurait pas conservé la disposition des données dont sont issues ces journaux et cette répartition du chiffre d'affaires. La société requérante ne peut utilement se prévaloir ni de la circonstance que sa comptabilité n'était pas tenue au moyen d'un système informatisé, ni de celle que le 17 novembre 2014, l'administration a communiqué à sa gérante, à sa demande, une copie de ces documents. Par conséquent, la SARL Ly Co n'est pas fondée à soutenir que le vérificateur aurait irrégulièrement emporté des documents comptables.

Sur le bien-fondé des impositions :

7. La méthode retenue pour reconstituer les recettes de l'entreprise a consisté à déterminer, dans un premier temps, le chiffre d'affaires des ventes de boissons alcoolisées à partir des achats revendus, dont le montant a été établi grâce au dépouillement des factures, et corrigé des variations de stocks, en excluant les boissons utilisées en cuisine ainsi que celles destinées à la consommation personnelle et en appliquant un abattement de 10 % pour tenir compte des offerts, des pertes et de la consommation du personnel, et, dans un second temps, le coefficient correspondant à la proportion du chiffre d'affaires des boissons alcoolisées dans le chiffre d'affaires total, à partir des déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, puis à appliquer ce rapport au chiffre d'affaire reconstitué des boissons alcoolisées.

8. En premier lieu, il est constant que l'établissement proposait de nombreux plats, qui, composés d'ingrédients divers, étaient susceptibles d'être vendus à la carte ou dans un menu. Ainsi, la méthode de reconstitution retenue par l'administration, fondée sur les boissons alcoolisées, dont les ventes pouvaient être déterminées de façon précise, et qui, contrairement à ce qui est soutenu, étaient suffisamment représentatives de l'activité, apparaît pertinente, alors qu'une méthode fondée sur le riz n'apparaîtrait pas plus précise, eu égard à la difficulté de détermination des quantités utilisées dans chaque plat, et alors que la SARL Ly Co n'a pas été en mesure de justifier du détail de ses recettes. Par suite, la SARL Ly Co n'est pas fondée à soutenir que la méthode de reconstitution de son chiffre d'affaires serait radicalement viciée.

9. En deuxième lieu, alors qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la méthode de reconstitution retenue est fondée sur les données propres de l'entreprise, il n'apparaît pas que les chiffres d'affaires reconstitués seraient irréalistes.

Sur les pénalités :

10. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

1. La SARL Ly Co, qui ne conteste pas que sa comptabilité était entachée de d'insuffisances graves, a, de façon répétée, fortement minoré le chiffre d'affaires déclaré. L'ensemble de ces constatations traduit une volonté délibérée d'éluder l'impôt. Dès lors, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve d'un manquement délibéré de la société requérante, laquelle ne peut utilement se prévaloir à cet égard des pratiques du cabinet d'expertise comptable, dont elle n'aurait pas eu connaissance. Cette dernière n'est ainsi pas fondée à demander la décharge des majorations mises à sa charge.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Ly Co n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Ly Co est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée Ly Co et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 16 mars 2023, où siégeaient :

- Mme Paix, présidente,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2023.

2

N° 21MA02020


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award