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14/09/2023 | FRANCE | N°23MA01501

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 14 septembre 2023, 23MA01501


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2103610 du 7 mars 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 juin 2023, Mme A..., représentée par Me Bessis-Osty, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicit

e par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2103610 du 7 mars 2023, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 juin 2023, Mme A..., représentée par Me Bessis-Osty, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de quinze jours à compter de cette notification et sous la même astreinte, et de la munir d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision litigieuse méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Mouret a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante ukrainienne née en 1983, est entrée sur le territoire français le 11 novembre 2014, munie d'un visa de long séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Elle s'est ensuite vu délivrer, en sa qualité de conjointe d'un ressortissant français, une carte de séjour temporaire portant la même mention valable jusqu'au 9 novembre 2016 puis une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 9 novembre 2018. L'intéressée, qui indique être séparée de son époux depuis 2019, a sollicité, le 3 août 2020, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Mme A... relève appel du jugement du 7 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite, née du silence gardé par le préfet des Alpes-Maritimes, refusant de lui délivrer un titre de séjour.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée régulièrement en France au cours du mois de novembre 2014 afin d'y rejoindre son époux, de nationalité française. L'intéressée, qui indique avoir divorcé au cours du mois de décembre 2017 et précise que la rupture de la communauté de vie avec son époux est intervenue au cours de l'année 2019, se prévaut de la circonstance qu'elle est hébergée par ses anciens beaux-parents depuis le mois de juin 2020. Si la requérante établit qu'elle résidait en France depuis un peu plus de six ans à la date de la décision litigieuse, dont une grande partie en situation régulière, elle était, à cette date, célibataire et sans charge de famille, sa fille n'étant née à Nice que le 22 avril 2021. Par ailleurs, Mme A... ne justifie pas, en dépit des efforts d'insertion professionnelle dont elle se prévaut, d'une intégration particulière sur le territoire français. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante serait dépourvue d'attaches dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu la majeure partie de sa vie. Enfin, l'évolution de la situation en Ukraine postérieurement à la date de la décision contestée, qui n'est assortie d'aucune mesure d'éloignement, est en tout état de cause sans incidence sur sa légalité. Dans ces conditions, la décision implicite de refus de titre de séjour en litige n'a pas porté au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Il suit de là que le préfet des Alpes-Maritimes n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni, en tout état de cause, les dispositions alors en vigueur du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes raisons, cette autorité n'a pas davantage commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences de cette décision sur la situation de Mme A....

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de la décision implicite en litige : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".

5. Les éléments de la situation de Mme A... mentionnés au point 3 ne sont pas, à eux seuls, de nature à caractériser l'existence, à la date de la décision implicite en litige, de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions alors en vigueur de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En particulier, ainsi qu'il a été dit, la requérante ne peut utilement se prévaloir de l'évolution défavorable de la situation en Ukraine postérieurement à la naissance de la décision contestée. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions en rejetant implicitement la demande d'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressée.

6. En troisième et dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

7. La décision de refus de titre de séjour en litige n'a ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de sa fille née à Nice le 22 avril 2021. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes aurait porté atteinte à l'intérêt supérieur de cette enfant dont la naissance est, au demeurant, postérieure à la décision contestée ainsi qu'il a été dit, alors que les pièces produites tant en première instance qu'en appel par l'intéressée ne permettent pas d'établir l'identité du père de celle-ci. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer ainsi qu'à Me Bessis-Osty.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 31 août 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Portail, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Mouret, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 septembre 2023.

2

N° 23MA01501

nb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23MA01501
Date de la décision : 14/09/2023
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: M. Raphaël MOURET
Rapporteur public ?: M. QUENETTE
Avocat(s) : BESSIS-OSTY

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-09-14;23ma01501 ?
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