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20/10/2023 | FRANCE | N°22MA01064

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 20 octobre 2023, 22MA01064


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n° 1906239, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision du 26 août 2019 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis l'a informée de la suppression de son poste et de son affectation sur le poste de " responsable de gestion - coordinatrice de justice - référente secteur Antibes-Vallauris ", confirmée par la décision du 18 novembre 2019 rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, de condamner la communauté d'agg

lomération Sophia-Antipolis à lui payer la somme de 50 000 euros au titre d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n° 1906239, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Nice, d'une part, d'annuler la décision du 26 août 2019 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis l'a informée de la suppression de son poste et de son affectation sur le poste de " responsable de gestion - coordinatrice de justice - référente secteur Antibes-Vallauris ", confirmée par la décision du 18 novembre 2019 rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, de condamner la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis à lui payer la somme de 50 000 euros au titre des préjudices subis, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2019, date de la réclamation indemnitaire et de la capitalisation des intérêts.

Sous le n° 1906240, elle a demandé à ce même tribunal d'annuler la décision du 30 octobre 2019 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis a refusé de renouveler son contrat à durée déterminée.

Par un jugement n° 1906239 et 1906240 du 26 janvier 2022, le tribunal administratif de Nice a, après avoir joint les deux requêtes, rejeté les demandes de Mme A....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 avril et 6 septembre 2022, Mme A..., représentée par Me Persico, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 janvier 2022 ;

2°) d'annuler la décision du 26 août 2019 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis a supprimé son poste, confirmée par la décision du 18 novembre 2019 rejetant son recours gracieux ;

3°) d'annuler la décision du 30 octobre 2019 par laquelle le président de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis a refusé de renouveler son contrat à durée déterminée ;

4°) de condamner la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis à lui payer la somme de 50 000 euros au titre des préjudices subis, assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2019, date de la réclamation indemnitaire et de la capitalisation des intérêts ;

5°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la recevabilité de sa requête d'appel :

- elle n'est pas tardive ;

- elle comporte des critiques du jugement attaqué ;

En ce qui concerne les décisions du 26 août 2019 et du 30 octobre 2019 :

- le comité technique paritaire n'a pas été valablement saisi au regard des dispositions de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- en méconnaissance des dispositions de l'article 39-4 du décret n° 88-145 du 15 février 1988, la réorganisation des antennes de justice n'est pas fondée ;

- la suppression de son poste méconnaît les articles 7 et 8 de la convention relative au fonctionnement des antennes de justice ;

- les décisions contestées doivent être regardées comme revêtant le caractère de sanctions déguisées ;

En ce qui concerne les préjudices subis :

- du fait des deux décisions contestées, elle a subi des pertes de salaires pour un montant de 18 642,36 euros, un préjudice moral lui ouvrant droit au versement de la somme de 25 000 euros et des troubles dans ses conditions d'existence lui ouvrant droit au versement de celle de 6 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2022, la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis, représentée par la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et Associés agissant par Me Constans, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante de la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de Mme A... est tardive et ne comporte aucune critique du jugement attaqué ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mahmouti,

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,

- et les observations de Me Constans, représentant la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été recrutée par la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis en qualité de " responsable d'unité " au sein de la Direction de la cohésion sociale de la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis (CASA) - Antennes de justice, par un contrat à durée déterminée à compter du 1er février 2017. Le 22 janvier 2019, ce contrat a été renouvelé pour une durée d'un an. Par une délibération du 1er avril 2019, après avoir recueilli l'avis du comité technique le même jour, le conseil communautaire de la CASA a procédé à une réorganisation de ses services et décidé, dans ce cadre, de supprimer le poste de responsable d'unité au sein de l'antenne de justice de Vallauris au profit d'un poste de responsable de gestion - coordinateur de justice - référent secteur Antibes-Vallauris. Par un courrier du 17 juillet 2019, le président de la CASA a proposé à Mme A... un avenant à son contrat de travail, accompagné d'une nouvelle fiche de poste, et l'a informée qu'elle disposait d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître son acceptation. Par courrier en date du 26 août 2019, confirmé par un courrier du 1er septembre 2019, Mme A... a refusé de signer cet avenant. Par courrier du 26 août 2019, le président de la CASA l'a informée de la réorganisation du service et de la suppression de son poste de responsable d'unité et l'a affectée sur le poste de responsable de gestion - coordinatrice de justice - référente secteur Antibes-Vallauris à compter du 2 septembre 2019. Par un courrier du 21 octobre 2019, Mme A... a formé un recours gracieux à l'encontre de la décision du 26 août 2019 et a adressé à la CASA une demande préalable indemnitaire. Ces demandes ont été explicitement rejetées par une décision du 18 novembre 2019. Par un courrier du 30 octobre 2019, Mme A... a été informée que son contrat ne serait pas renouvelé à compter du 31 janvier 2020. La requérante relève appel du jugement du 26 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 août 2019, confirmée par la décision du 18 novembre 2019 rejetant son recours gracieux, et de celle du 30 octobre 2019 ainsi que de ses conclusions indemnitaires.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la décision du 26 août 2019 :

2. En premier lieu, Mme A... doit être regardée comme excipant de l'illégalité, par voie d'exception, de la délibération du 1er avril 2019 en tant que celle-ci supprime le poste de responsable d'unité au sein de l'antenne de justice de Vallauris au profit d'un poste de responsable de gestion - coordinateur de justice - référent secteur Antibes-Vallauris.

3. Aux termes de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 : " (...) Un emploi ne peut être supprimé qu'après avis du comité technique sur la base d'un rapport présenté par la collectivité territoriale ou l'établissement public. (...) ". Il ressort des débats retranscrits dans le procès-verbal de réunion du comité technique du 1er avril 2019 que les membres du comité ont été consultés, dans le cadre de la nouvelle organisation des antennes de justice de la CASA, sur la " transformation " à " effectif constant " de deux postes de responsables d'unité au profit de deux postes de responsables de gestion - coordinateurs de justice - référents secteur. Il s'ensuit que l'avis émis par ce comité portait sans aucune ambiguïté sur la suppression desdits postes et la création corolaire de deux nouveaux emplois sans augmentation des effectifs. Par suite, et comme l'a jugé à bon droit le tribunal, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la délibération contestée aurait été adoptée à la suite d'une procédure irrégulière.

4. Aux termes de l'article 39-4 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors applicable : " En cas de transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent contractuel sur un emploi permanent conformément à l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, l'autorité peut proposer la modification d'un élément substantiel du contrat de travail tel que notamment la quotité de temps de travail de l'agent, ou un changement de son lieu de travail. Elle peut proposer dans les mêmes conditions une modification des fonctions de l'agent, sous réserve que celle-ci soit compatible avec la qualification professionnelle de l'agent. Lorsqu'une telle modification est envisagée, la proposition est adressée à l'agent par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. / Cette lettre informe l'agent qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître, le cas échéant, son acceptation et l'informe des conséquences de son silence. / A défaut de réponse dans le délai d'un mois, l'agent est réputé avoir refusé la modification proposée. ". Il ressort des pièces du dossier qu'en supprimant l'emploi de responsable d'unité au sein de l'antenne de justice de Vallauris et en le remplaçant par un emploi de responsable de gestion - coordinateur de justice/référent secteur Antibes-Vallauris, la CASA a souhaité " recentrer sur l'antenne de justice d'Antibes les moyens dédiés à la réception du public et maintenir un accueil plus ciblé à Vallauris et Valbonne ", traduisant de la sorte le diagnostic posé par le comité de pilotage des Antennes de Justice fin 2017 qui a conclu à la " nécessité de repenser le projet de service des antennes de justice afin de répondre au mieux aux attentes actuelles du public ". Ce projet de réorganisation a été exposé le 5 février 2019 lors d'une réunion de tous les services et agents concernés, parmi lesquels figurait la requérante, et il a recueilli l'avis favorable unanime du comité technique paritaire émis le 1er avril suivant. Ainsi et à supposer que la requérante puisse utilement invoquer les dispositions précitées à l'appui de son moyen, il ne ressort pas des pièces du dossier que, en procédant à la suppression du poste occupé par Mme A..., le conseil communautaire de la CASA ait entaché sa délibération d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Par ailleurs et contrairement à ce que soutient la requérante, la délibération contestée comporte la mention des buts poursuivis par la réorganisation des antennes de justice, la circonstance que les courriers qui lui ont été adressés ne feraient pas mention des justifications relatives à l'intérêt du service, à la transformation du besoin ou de l'emploi, qui au demeurant manque en fait, est sans influence à cet égard.

6. Enfin, la requérante invoque les stipulations de l'article 7, portant sur les " missions du personnel permanent des antennes de justice " et de l'article 8 prévoyant " l'organisation et le fonctionnement des antennes ", de la " convention relative au fonctionnement des antennes de justice d'Antibes-Juan-Les-Pins, de Valbonne Sophia-Antipolis-Biot et de Golf-Juan ", signée en aout 2011 par le préfet des Alpes-Maritimes, le président du tribunal de grande instance de Grasse, le procureur de la république près le tribunal de grande instance de Grasse, le président de la communauté d'agglomération de Sophia-Antipolis, le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Grasse, la directrice territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse, la directrice départementale du service pénitentiaire d'insertion et de probation et le président du conseil départemental d'accès au droit des Alpes-Maritimes, renouvelée le 26 septembre 2016 pour une durée de cinq ans. Toutefois, à supposer même que ces clauses ont pour objet l'organisation et le fonctionnement d'un service public, et revêtent, dès lors, un caractère réglementaire, la délibération contestée revêt elle aussi un tel caractère. Par suite, si Mme A... soutient que cette délibération est contraire aux articles 7 et 8 de la convention précitée, un tel moyen, fondé sur la violation d'un texte de même valeur juridique que la délibération contestée, est, en tout état de cause, inopérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir, par la voie de l'exception, que la délibération du 1er avril 2019 serait illégale.

8. En second lieu, l'existence d'une mesure disciplinaire déguisée se caractérise à la fois par l'intention de sanctionner un agent et par la dégradation objective de sa situation professionnelle en conséquence de cette mesure.

9. Si Mme A... soutient de nouveau en appel que les décisions contestées doivent être regardées comme revêtant le caractère de sanctions déguisées, il y a toutefois lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs suffisamment précis et circonstanciés retenus par les premiers juges aux points 12 à 16 du jugement attaqué, la requérante ne produisant en appel aucun élément nouveau ou déterminant distinct de ceux soumis à leur appréciation selon laquelle, en l'espèce, aucune intention de la sanctionner n'est avérée. De même, si la requérante réitère en appel ses allégations selon lesquelles les agissements de la CASA postérieurs aux décisions en litige procéderaient de la volonté de lui nuire, celles-ci, inopérantes, doivent être écartées par adoption des motifs retenus par le tribunal aux points 17 à 19 du jugement attaqué.

S'agissant de la décision du 30 octobre 2019 :

10. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté par la requérante, que la décision prise par la CASA de ne pas renouveler le contrat de Mme A... est motivée par le refus de cette dernière de signer l'avenant qui lui a été proposé pour exercer des fonctions de " responsable de gestion - coordinatrice de justice - référente secteur Antibes-Vallauris ".

11. En outre, à supposer qu'elle puisse invoquer, par la voie de l'exception, l'illégalité de la délibération du 1er avril 2019 à l'appui de son moyen dirigé contre la décision du 30 octobre 2019, cette délibération ne procède pas d'un vice de procédure ou d'une volonté déguisée de sanctionner Mme A..., comme il l'a été dit aux points précédents.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme A... doivent être rejetées.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires :

13. Il résulte de ce qui précède que la requérante ne démontre pas que les décisions du 26 août 2019 et du 30 octobre 2019 seraient entachées d'illégalité. Par conséquent, elle n'est pas fondée à soutenir que la CASA aurait, en les édictant, commis des fautes de nature à engager sa responsabilité et, par suite, ses conclusions indemnitaires doivent être rejetées.

14. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis, qui n'est pas la partie perdante, verse à Mme A... une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la requérante la somme de 2 000 euros à verser à cet établissement public sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Mme A... versera à la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la communauté d'agglomération Sophia-Antipolis.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2023 où siégeaient :

- Mme Fedi, présidente de chambre,

- Mme Rigaud, présidente-assesseure,

- M. Mahmouti, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2023.

2

N° 22MA01064


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01064
Date de la décision : 20/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: M. Jérôme MAHMOUTI
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : SCP VINSONNEAU-PALIES NOY GAUER et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2023-10-20;22ma01064 ?
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