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06/02/2024 | FRANCE | N°23MA00441

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 06 février 2024, 23MA00441


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 octobre 2020 par laquelle la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon a refusé de modifier la fiche d'exposition à l'amiante qu'elle lui a communiquée.



Par un jugement n° 2009135 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B....



Procédure devant la Cour :



Par u

ne requête et des mémoires, enregistrés les 23 février, 28 février et 11 mai 2023, M. B..., représenté par Me de Permentie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 octobre 2020 par laquelle la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon a refusé de modifier la fiche d'exposition à l'amiante qu'elle lui a communiquée.

Par un jugement n° 2009135 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. B....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 23 février, 28 février et 11 mai 2023, M. B..., représenté par Me de Permentier, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 2009135 du 30 décembre 2022 du tribunal administratif de Marseille et, en tant que de besoin, d'enjoindre à la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon de verser aux débats les justificatifs de la date de création du lieu de stockage et les justificatifs de remises des équipements personnels ;

2°) d'annuler la décision du 10 octobre 2020 par laquelle la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon a refusé de modifier la fiche d'exposition à l'amiante ;

3°) d'enjoindre à la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon de signer la fiche qu'il lui a transmise les 13 février et 18 septembre 2020, sous astreinte de

1 000 euros par mois de retard ;

4°) de mettre à la charge de la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye

Serre-Ponçon la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête est recevable dès lors que l'effet décisoire de la fiche d'exposition à l'amiante est suffisant et que cette fiche est créatrice de droits ;

- chaque employeur public est tenu à une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des agents publics placés sous son autorité, et dans le cas spécifique de l'amiante, l'employeur doit assurer la traçabilité de l'exposition des agents en une fiche individuelle d'exposition à l'amiante ;

- il est constant qu'à compter du 1er janvier 2002 et jusqu'au 31 décembre 2011, il a été exposé à l'amiante ; en sus de cette exposition à l'amiante, il a également été exposé de 2001 à 2009 aux risques liés à l'équarrissage, de 2001 à 2010, aux risques liés à l'incinération de tout bois, et de 2001 à 2016 aux risques liés à la réception de produits chimiques A... ;

- la version de la fiche d'exposition qui lui a été remise est erronée en ce qui concerne la nature du travail réalisé, les procédés de travail utilisés, le taux d'empoussièrement estimé, sur les risques ou nuisance d'origine chimique, physique ou biologique autres que l'amiante, sur les moyens de protection individuelle utilisés, et sur la durée moyenne de l'intervention.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 avril 2023, la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon, représentée par Me Rey de la Selarl Itinéraires Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de M. B... est irrecevable dès lors que la décision attaquée ne lui fait pas grief ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Un courrier du 31 août 2023 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 25 septembre 2023, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Martin,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations Me Tabarly, substituant Me Rey, représentant la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., agent de la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye

Serre-Ponçon (CCVUSP) du 1er janvier 1994 au 1er novembre 2019, a exercé des fonctions de chauffeur de bennes à ordures ménagères et de ripeur puis, affecté à la déchetterie intercommunale à compter du mois d'octobre 2001, des fonctions d'agent d'accueil, de gestionnaire des bennes et des déchets ainsi que d'entretien de ladite déchetterie. Par lettre remise le 2 août 2018, il a sollicité de son employeur la délivrance d'un certificat d'exposition à l'amiante pour la période de 2002 à 2011. Dès le 8 août suivant, la présidente de la CCVUSP a transmis à l'intéressé une fiche d'exposition à l'amiante comportant des informations en partie contestées par M. B.... A la suite de plusieurs échanges, il a sollicité, par courrier du 18 septembre 2020, l'élaboration d'une nouvelle fiche d'exposition en prenant en compte les observations qu'il a formulées. Par courrier du 10 octobre 2020, la présidente de la CCVUSP lui a transmis une version finale de cette fiche, rejetant cette ultime demande de modification. Dans la présente instance, M. B... relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article R. 4412-120 du code du travail, rendu applicable à la fonction publique territoriale par les dispositions de l'article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique alors elles-mêmes applicables :

" L'employeur établit, pour chaque travailleur exposé, une fiche d'exposition à l'amiante indiquant : / 1° La nature du travail réalisé, les caractéristiques des matériaux et appareils en cause, les périodes de travail au cours desquelles il a été exposé et les autres risques ou nuisances d'origine chimique, physique ou biologique du poste de travail ; / 2° Les dates et les résultats des contrôles de l'exposition au poste de travail ainsi que la durée et l'importance des expositions accidentelles ; / 3° Les procédés de travail utilisés ; / 4° Les moyens de protection collective et les équipements de protection individuelle utilisés ".

3. En premier lieu, M. B... ne peut utilement soutenir que le jugement contesté est entaché d'une dénaturation des faits, s'agissant d'un moyen de cassation et non d'appel quand il vise une décision juridictionnelle.

4. En deuxième lieu, pour contester les mentions portées par la CCVUSP sur la fiche d'exposition à l'amiante qui lui a été remise, M. B... soutient que la description de la nature du travail réalisé ne correspond pas à la réalité, dès lors que les déchets étaient exposés en vrac sans être correctement conditionnés, et qu'aucun enfouissement mécanique n'a pu être réalisé avant 2004, date de réalisation d'un site d'enfouissement, circonstance de nature à majorer l'exposition à l'amiante dont il a été l'objet. Toutefois, ces allégations ne sont pas établies par les pièces qu'il produit, et notamment pas par le courrier du 10 juin 2011 du département prévention de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, adressé au président de la CCVUSP à la suite d'une visite de prévention effectuée le 24 mai 2011, lequel fait certes apparaitre que certains déchets amiantés ne sont pas correctement emballés, mais qui en tire pour seule conséquence une exposition possible aux fibres d'amiantes pour les agents de la déchetterie, sans autre forme de précision. Au demeurant, cette exposition est admise par la communauté de communes, qui l'a qualifiée de " très faible " dans la fiche d'exposition, sans qu'aucune des pièces du dossier ne permettent de contredire une telle appréciation. De même, si, parmi les bordereaux de suivi des déchets contenant de l'amiante versés au dossier, pour la plupart établis antérieurement à la visite des agents de l'assurance maladie, certains ne mentionnent pas les modalités de conditionnement retenues, une telle circonstance ne suffit pas à établir que l'exposition de M. B... aux poussières d'amiante aurait dû être qualifiée d'importante. Si l'intéressé soutient, ensuite, que la fiche qu'il conteste est erronée en ce qui concerne les procédés de travail utilisés, il n'établit pas plus en cause d'appel qu'en première instance avoir manipulé des charges supérieures à cinq kilogrammes, et ce d'autant plus qu'il reconnait lui-même, dans ses écritures, avoir utilisé un chargeur pour les grandes quantités, ainsi que cela est d'ailleurs mentionné dans la fiche d'exposition aux risques dont il conteste le contenu.

5. En troisième lieu, et d'une part, en se bornant à renvoyer à l'article X du règlement intérieur de la déchetterie, selon lequel le dépôt de cadavres d'animaux ne pourra se faire dans les bacs qu'après autorisation du gardien, M. B... n'établit pas que les mentions portées sur la fiche définitive établie par la CCVUSP, évoquant une mission de nettoyage du container à équarrissage une fois par mois de 2001 à 2009, seraient erronées. Il n'établit pas davantage qu'il aurait été amené, du fait de ses fonctions de gardien, à porter les cadavres d'animaux à leur arrivée sur le site. D'autre part, les photographies produites, ainsi que le tableau relatif à l'évolution des tonnages de bois collecté entre 2008 et 2013, ne permettent pas de corroborer l'affirmation de l'appelant selon laquelle, entre 2001 et 2009, il aurait procédé à l'incinération d'environ 1 700 tonnes de bois. Enfin, outre que M. B... n'apporte aucun élément permettant d'apprécier avec précision la nature des déchets admis au sein de la déchetterie entrant dans la catégorie des déchets diffus spécifiques dits " A... ", la circonstance que la fiche définitive établie par son employeur ne précise pas qu'il s'agit de déchets chimiques est sans incidence sur la légalité de la décision refusant de la modifier dès lors que, selon les propres affirmations de l'appelant, non contredites sur ce point, la définition proposée par l'administration des A... implique, par elle-même, qu'il s'agit de déchets issus de produits chimiques pouvant présenter un risque significatif pour la santé et l'environnement.

6. En quatrième lieu, en ce qui concerne les équipements de protection mis à disposition des agents de la déchetterie, il ne ressort pas des propositions de modification formulées par

M. B... des différences notables sur la nature de ces équipements avec les mentions portées sur la fiche définitive adoptée par son employeur. S'il est certes exact que cette fiche ne mentionne pas les quantités remises, l'appelant ne peut utilement faire valoir, au soutien d'une demande d'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision portant rejet d'une demande de modification de la fiche précitée, que les moyens de protection qui lui ont été alloués étaient insuffisants voire inexistants. En tout état de cause, il ressort de la proposition qu'il a lui-même formulée que la CCVUSP lui a alloué, notamment, une paire de lunettes par an, des masques à poussière, des gants, et deux combinaisons par an.

7. En cinquième lieu, en se bornant à produire les bordereaux de suivi des déchets précédemment cités, M. B... n'établit pas que l'administration aurait sous-évalué la durée moyenne d'exposition aux risques, qu'elle a fixée à une heure, ni que cette durée devait être fixée entre une et deux heures.

8. En sixième et dernier lieu, M. B... ne peut utilement soutenir, à l'appui d'un recours tendant à l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision portant rejet d'une demande de modification de la fiche d'exposition aux risques établie en application de l'article

R. 4412-120 du code du travail, que la CCVUSP aurait commis des fautes dans le suivi des agents, dans la mise en œuvre de son obligation de sécurité, ainsi que dans le mesurage du taux d'empoussièrement prévu par les articles R. 4412-100 à R. 4412-105 du code du travail, et ce d'autant plus que certains d'entre eux, dont l'article R. 4412-100, qui fixe la concentration moyenne en fibres d'amiante sur huit heures de travail à ne pas dépasser, sont entrés en vigueur postérieurement à la période d'activité en litige, qui a pris fin le 31 décembre 2011.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par la CCVUSP, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 10 octobre 2020. Par suite, ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la CCVUSP sur le fondement de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la CCVUSP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et à la communauté de communes de la vallée de l'Ubaye Serre-Ponçon.

Délibéré après l'audience du 23 janvier 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 février 2024.

2

No 23MA00441


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA00441
Date de la décision : 06/02/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-07-10 Fonctionnaires et agents publics. - Statuts, droits, obligations et garanties. - Garanties et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Stéphen MARTIN
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : SELARL ITINERAIRES AVOCATS CADOZ - LACROIX - REY - VERNE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-02-06;23ma00441 ?
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