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12/04/2024 | FRANCE | N°23MA02654

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 12 avril 2024, 23MA02654


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... G... C... et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler deux arrêtés du 1er juin 2023 par lesquels le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par deux jugements n° 2305873 et 2305874 du 9 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur dema

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Procédure devant la Cour :



I. Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... G... C... et Mme F... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler deux arrêtés du 1er juin 2023 par lesquels le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par deux jugements n° 2305873 et 2305874 du 9 octobre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2023, sous le n° 23MA02654, M. C..., représenté par Me Bochnakian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2305873 du 9 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er juin 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est contraire aux dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

II. Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2023, sous le n° 23MA02655, Mme D..., représentée par Me Bochnakian, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2305874 du 9 octobre 2023 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er juin 2023 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté méconnait les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est contraire aux dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Aurélia Vincent, présidente assesseure, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Marchessaux,

- et les observations de Me Bochnakian, représentant M. C... et Mme D....

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 23MA02654 et n° 23MA02655, présentées pour M. C... et Mme D... présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

2. M. C..., né le 16 janvier 1956, et Mme D..., née le 1er janvier 1960, de nationalité vietnamienne, déclarent être entrés en France le 13 mai 2016. Ils ont sollicité, le 3 avril 2023, un titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale. Par deux arrêtés du 1er juin 2023, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. C... et Mme D... relèvent appel des jugements du 9 octobre 2023 par lesquels le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés du 1er juin 2023.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. C... et son épouse, Mme D..., sont entrés en France, le 13 mai 2016, sous couvert d'un visa de court séjour pour rejoindre leurs deux filles qui résident sur le territoire national, dont l'une est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2030 et l'autre, de nationalité française, est mère de deux enfants, nés le 15 novembre 2009 et le 12 juillet 2014 laquelle héberge ses parents. Le fils cadet de cette dernière est atteint d'un trouble du spectre autistique et s'est vu reconnaître un taux d'incapacité entre 50 et 79 % ainsi qu'une allocation d'éducation. A ce titre, il ressort d'un certificat médical du 26 septembre 2019 d'un médecin du centre hospitalier Valvert, situé à Marseille, que le jeune B... nécessite des soins pluridisciplinaires depuis l'âge de deux ans et demi, a des difficultés dans la réalisation de certains actes du quotidien et a besoin d'être accompagné par un adulte. Il est scolarisé à temps partiel avec une auxiliaire de vie. Une attestation établie le 17 octobre 2023 par une éducatrice et un certificat médical d'un pédopsychiatre du centre médico-psycho-pédagogique (CMPP), qui suivent l'enfant mentionnent qu'il présente des troubles du sommeil, ainsi que des réactions impulsives et imprévisibles pouvant le mettre en danger. Il a, par ailleurs, été renversé par une voiture en sortant du bus le 24 mai 2022 et nécessite ainsi une attention constante par un adulte. Ils précisent également que l'enfant entretient une relation affective très forte avec ses grands-parents qui l'ont élevé jusqu'à l'âge de 18 mois au E... et que leur présence est idéale à son développement. Selon ces certificats et l'attestation de la directrice de l'école maternelle de l'enfant, ses grands-parents sont très présents et l'accompagnent dans ses soins. Dans ces conditions, la présence de M. C... et de Mme D... étant indispensable en raison de l'état de santé de leur petit-fils et eu égard à la densité et à l'intensité des liens personnels qu'ils ont noués avec ce dernier, les requérants n'ayant pas d'autres enfants au E..., les arrêtés contestés ont porté une atteinte à leur droit au respect de leur vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels ils ont été pris, et ont, par suite, méconnu les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. C... et Mme D... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Marseille a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 1er juin 2023.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. En raison du motif qui la fonde, l'annulation des arrêtés du préfet des Bouches-du-Rhône du 1er juin 2023 implique nécessairement, sous réserve de l'absence de changements de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, que des cartes de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " soient délivrées à M. C... et Mme D.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de leur délivrer ces documents dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C... et Mme D... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Marseille du 9 octobre 2023 et les arrêtés préfectoraux du 1er juin 2023 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à M. C... et à Mme D... dans le délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C... et à Mme D... une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. C... et de Mme D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... G... C..., à Mme F... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal judiciaire de Marseille.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2024, où siégeaient :

- Mme Vincent, présidente assesseure, présidente de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Marchessaux, première conseillère,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 avril 2024.

N° 23MA02654, 23MA02655 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA02654
Date de la décision : 12/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINCENT
Rapporteur ?: Mme Jacqueline MARCHESSAUX
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : BOCHNAKIAN & LARRIEU-SANS;BOCHNAKIAN & LARRIEU-SANS;BOCHNAKIAN & LARRIEU-SANS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-12;23ma02654 ?
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