(Première Chambre)
VU la requête enregistrée le 10 mai 1994 au greffe de la Cour, présentée pour Mme Chantal X..., demeurant ... (Marne) ;
Mme X... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 9133-92555 du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 1er mars 1994, en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que la Commune de Mardeuil soit condamnée à lui verser la somme de 42 177,60F représentant le montant de l'indemnité représentative de logement afférente à la période du 1er janvier 1985 au 30 décembre 1988 ;
2°/ de condamner la Commune de Mardeuil à lui verser ladite somme, augmentée des intérêts de droit à compter du 8 août 1990 et de la capitalisation des intérêts ;
VU le jugement attaqué ;
VU le mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 1994, présenté au nom de la Commune de Mardeuil représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par une délibération du conseil municipal en date du 24 juin 1994 ; le maire conclut au rejet de la requête ;
VU le mémoire en réplique, enregistré le 28 septembre 1984, présentée pour Mme Chantal X... ; Mme X... conclut aux mêmes fins que la requête ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU les lois des 30 octobre 1886 et 19 juillet 1889 ;
VU le décret n° 83-367 du 2 mai 1983 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 1995 :
- le rapport de M. STAMM, Conseiller,
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement ;
Sur le droit à l'indemnité de Mme X... :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de la loi du 30 octobre 1886, de la loi du 19 juillet 1889 et du décret du 2 mai 1983 que les communes sont tenues de mettre un logement convenable à la disposition des instituteurs qui en font la demande ou à défaut, de leur verser une indemnité représentative ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par délibération du 20 septembre 1983, le conseil municipal de Mardeuil a décidé d'accorder à Mme X..., institutrice nouvellement nommée dans la commune, le bénéfice de l'indemnité représentative de logement ; que toutefois, il a été mis fin au versement de cette indemnité à compter du 1er janvier 1985 ;
Considérant que, si la commune soutient que le versement de cette indemnité méconnaissait les dispositions législatives et réglementaires précitées et qu'il pouvait y être mis fin, il est constant que Mme X... avait présenté une demande d'indemnité lors de son affectation dans la commune ; qu'il n'est pas établi que l'intéressée avait alors manifesté clairement son intention de limiter sa demande à l'indemnité de logement et de refuser le logement que la commune pourrait lui proposer ; qu'ainsi la demande d'indemnité présentée valait demande de logement ; qu'il résulte de l'instruction que les logements qui auraient pu, alors, être proposés à Mme X..., étaient occupés ; que c'est donc à bon droit que la Commune de Mardeuil a servi à Mme X... une indemnité représentative de logement à compter du 1er septembre 1983 ; qu'elle n'était pas en revanche fondée à cesser de lui verser cette indemnité du 1er janvier 1985 au 30 novembre 1988 ; que Mme X... est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la condamnation de la Commune de Mardeuil à lui verser une indemnité représentative de logement du 1er janvier 1985 au 30 novembre 1988 ;
Sur la prescription :
Considérant que le maire, ou l'adjoint qu'il délègue à cet effet, a seul qualité pour opposer la prescription quadriennale au nom de la commune ; qu'ainsi, la prescription invoquée par la Commune de Mardeuil dans le mémoire susvisé qui ne porte que la signature de son avocat, n'est pas régulièrement opposée à Mme X... ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme X... a droit aux intérêts au taux légal à compter du 9 août 1990, date de réception, par la Commune de Mardeuil, de sa demande de versement de la somme due au titre de l'indemnité ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée le 10 mai 1994 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Article 1 : La Commune de Mardeuil est condamnée à verser à Mme Chantal X... l'indemnité représentative de logement du 1er janvier 1985 au 30 novembre 1988.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-sur-Marne en date du 1er mars 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La somme correspondant au montant de l'indemnité due sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 9 août 1990. Les intérêts échus le 10 mai 1994 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X..., à la Commune de Mardeuil et au Ministre de l'Intérieur.