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18/12/2003 | FRANCE | N°98NC01107

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 18 décembre 2003, 98NC01107


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 26 mai 1998 sous le n° 98NC01107, ainsi que les mémoires complémentaires enregistrés les 26 avril et 22 novembre 1999, et le 3 mars 2000, présentés pour la société anonyme SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN, dont le siège social est sis ... par Me X..., Avocat ;

La société demande à la Cour :

1' - de réformer le jugement n° 93-2815 du 21 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg ne lui a accordé la restitution des droits de taxes sur la valeur ajoutée qu'au titre de la période du 1er janvier au

20 février 1993 ;

2' - de prononcer la restitution demandée au titre des périod...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 26 mai 1998 sous le n° 98NC01107, ainsi que les mémoires complémentaires enregistrés les 26 avril et 22 novembre 1999, et le 3 mars 2000, présentés pour la société anonyme SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN, dont le siège social est sis ... par Me X..., Avocat ;

La société demande à la Cour :

1' - de réformer le jugement n° 93-2815 du 21 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg ne lui a accordé la restitution des droits de taxes sur la valeur ajoutée qu'au titre de la période du 1er janvier au 20 février 1993 ;

2' - de prononcer la restitution demandée au titre des périodes du 1er novembre au 31 décembre 1992 et du 21 février au 31 mars 1993, pour un montant total de 309 184,03 F ;

Code : C+

Classement CNIJ : 19-06-02-01-01

3° de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la requête est recevable ;

- au titre de la période du 1er janvier au 20 février 1993, c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté, en statuant uniquement sur le principe, la demande de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 96 256 F ;

- au titre de la période du 21 février au 31 mars 1993, la taxe récupérable comprenait la taxe déductible au cours des périodes antérieures, y compris celles qui a couru du 1er novembre au 31 décembre 1992 ;

- au titre de cette dernière période, comme pour la période postérieure au 21 février 1993, elle entre dans le champ d'application de l'article 256 du Code Général des Impôts, et bénéficie de la déduction de taxes à laquelle les entreprises effectuant des livraisons en suspension de taxes sur la valeur ajoutée, dès lors que l'article 277 du même code ne pouvait s'appliquer ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 25 novembre 1998 présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, ainsi que les mémoires complémentaires enregistrés les 1er octobre 1999 et 21 janvier 2000 ; il conclut au rejet de la requête en faisant valoir :

- que la requête est irrecevable ;

- que les moyens relatifs aux articles 256 et 271 du Code Général des Impôts sont inopérants ;

- que les autres moyens ne sont pas fondés ;

II/ Vu le recours enregistré au greffe de la Cour le 19 août 1998 sous le n° 98NC01816, ainsi que le mémoire complémentaire enregistré le 14 avril 1999, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

1'- de réformer le jugement susvisé par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a accordé à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des opérations que la société a réalisées au cours de la période du 1er janvier au 20 février 1993 ;

2'- de remettre les droits de taxes sur la valeur ajoutée à la charge de la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN ;

3°- de surseoir à l'exécution du jugement attaqué ;

Le ministre soutient que :

- en l'absence de détermination des bases de la réduction de taxes sur la valeur ajoutée prononcée, le jugement est irrégulier ;

- la décision du conseil des communautés du 15 février 1993 ayant pour objectif de proroger l'application du régime dérogatoire dont la France bénéficiait jusqu'au 31 décembre 1992, ce régime devait s'appliquer entre le 1er janvier et le 20 février 1993 ;

4° subsidiairement, d'ordonner, le cas échéant après supplément d'instruction contradictoire, la compensation entre la restitution de taxes sur la valeur ajoutée demandée par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN pour un montant de 155 000 F, et les insuffisances de taxation résultant d'une part, de l'absence de taxation des opérations réalisées sur des métaux non ferreux par la société au cours de la période du 1er janvier au 20 février 1993 et, d'autre part, de la régularisation prévue par les dispositions de l'article 210 de l'annexe II au Code Général des Impôts ;

Le ministre soutient que :

- le régime suspensif des droits de TVA ne pouvant s'appliquer au titre de la période litigieuse, l'article 277 du Code Général des Impôts se trouvant, en l'absence d'effet rétroactif de la décision du 15 février 1993, contraire aux dispositions de l'article dix de la sixième directive, les opérations qu'elle a réalisées devraient atténuer, voir compenser entièrement le remboursement de crédit de taxe sollicité par la société ;

- la déduction de taxes dont la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN a bénéficié au titre de la période comprise entre le 21 février et le 31 mars 1993 doit être remise en cause dès lors que la société était de plein droit exonéré de la taxe sur la valeur ajoutée pour ses opérations effectuées entre le 15 février et le 31 décembre 1993 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 4 novembre 1998, présenté pour la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN ; elle conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 20 000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, en faisant valoir que :

- le recours présenté par le ministre est tardif ;

- les moyens ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, adoptée en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu la dix-huitième directive 89/465/CEE adoptée par le conseil des communautés européennes le 18 juillet 1989 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2003 :

- le rapport de M. RIQUIN, Président,

- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la requête susvisée présentée par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN et le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, sont dirigés contre le jugement en date du 21 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a statué sur les demandes formulées par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN et tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre des périodes comprises entre le 1er novembre 1992 et le 31 mars 1993 ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant qu'en vertu du 1 de l'article 27 de la sixième directive 77/388/CEE du 17 mai 1977, adoptée en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires, le Conseil des communautés européennes, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser tout Etat membre à introduire des mesures particulières dérogatoires à ladite directive, afin de simplifier la perception de la taxe ou d'éviter certaines fraudes ou évasions fiscales ;

Considérant que la dix-huitième directive adoptée par le conseil des communautés européennes le 18 juillet 1989, a abrogé, à partir du 1er janvier 1990, la dérogation transitoire aux dispositions de l'article 2 de la sixième directive susvisée qui permettait à la France, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 27 de la sixième directive, d'exonérer de la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de déchets neufs d'industrie et de récupération ; que, toutefois par une décision du 21 décembre 1989 du Conseil des communautés européennes, cette dérogation a été prorogée jusqu'au 31 décembre 1992 ; que, par une nouvelle décision prise le 15 février 1993 par le conseil des communautés européennes, publiée au journal officiel des communautés européennes le 20 février suivant, la France a été de nouveau autorisée jusqu'au 31 décembre 1996, à exonérer de la TVA les livraisons effectuées, d'une part, par les entreprises dont le montant annuel du chiffre d'affaires est inférieur à 500 000 F et, d'autre part, par les entreprises qui ne possèdent pas d'installation permanente ou qui, disposant d'une installation permanente, ont réalisé au cours de l'année précédente un chiffre d'affaires sur ces produits inférieur à 6 000 000 F, sauf si elle sont autorisées à soumettre ces opérations à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur la requête présentée par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN :

Considérant que la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN demande la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée, d'une part, au titre de la période du 1er novembre 1992, date du début de son activité de négoce de déchets neufs d'industrie et de récupération , au 31 décembre 1992 et, d'autre part, au titre de la période du 21 février au 31 mars 1993 ; que si la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN invoque les dispositions des articles 256 et 271 du Code Général des Impôts, elle n'établit toutefois pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en se fondant sur les dispositions des articles 260 E et 261 du code général des impôts ;

Sur le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE :

Sur la recevabilité du recours :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 200-18 du livre des procédures fiscales : A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts... qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le jugement attaqué a été notifié au directeur des services fiscaux du département du Haut-Rhin le 22 avril 1998 ; que, par suite, en l'absence de signification faite au ministre, le recours formé par ce dernier, qui a été enregistré au greffe de la Cour le 19 août 1998, soit moins de quatre mois après la notification au directeur des services fiscaux, est recevable ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN, et tirée de la tardiveté du recours présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, doit être écartée ;

Au fond :

Considérant en premier lieu qu'il résulte des motifs de la décision susvisée prise le 21 décembre 1989 par le Conseil des communautés européennes, que la commission devait présenter, avant le 1er janvier 1993, un rapport au Conseil sur l'application de l'autorisation dérogatoire accordée à la France, accompagné le cas échéant d'une proposition de décision prorogeant ladite autorisation ; que le Conseil devait statuer avant cette date sur la prorogation de l'autorisation ;

Considérant en second lieu qu'il résulte des motifs de la décision susvisée prise le 15 février 1993 par le Conseil des Communautés européennes que le rapport prévu par la décision susvisée concluait à l'utilité et l'efficacité du régime dérogatoire d'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée dont la France a bénéficié en 1991 et en 1992, dans le secteur de la récupération, particulièrement vulnérable à la fraude ;

Considérant en troisième lieu que les Etats membres ont été informés le 20 novembre 1992 de la demande introduite par le gouvernement français ; que les contribuables français ont été informés de la probable prorogation du régime dérogatoire dès la publication le 5 janvier 1993 de la loi n° 92-1476 du 31 décembre 1992, qui a anticipé la décision susanalysée prise le 15 février 1993 par le Conseil des Communautés européennes ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'autorisation donnée par la décision du 15 février 1993, qui est justifiée par l'intérêt général et qui n'a pas pu porter atteinte aux principe de confiance légitime, doit être clairement regardée comme ayant eu un effet rétroactif à compter du 1er janvier 1993 ; qu'il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur l'absence d'effet rétroactif de ladite décision pour accorder à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre de la période du 1er janvier au 21 février 1993 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner la demande, présentée à titre subsidiaire en première instance par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN, tendant à la saisine de la Cour de justice des Communautés européennes pour statuer sur quatre questions préjudicielles relatives à l'effet rétroactif de la décision susvisée du 15 février 1993 ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susvisées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui tout précède en premier lieu que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête présentée par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN, celle-ci n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg n'a que partiellement fait droit à sa demande ; en second lieu que, sans qu'il soit besoin de statuer sur le moyen présenté à la fois par la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN et le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, tiré de ce que les premiers juges se sont abstenus de déterminer les bases à partir desquelles la restitution de taxe sur la valeur ajoutée accordée à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN devait être calculée, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a accordé à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a acquittée au titre de la période du 1er janvier au 20 février 1993 ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n°est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

ARTICLE 1er : les articles 1er et 2 du jugement prononcé par le Tribunal administratif de Strasbourg le 21 avril 1998 sont annulés.

ARTICLE 2 : La taxe sur la valeur ajoutée dont la restitution a été accordée à la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN par le Tribunal administratif de Strasbourg au titre de la période du 1er janvier au 20 février 1993, est remise à la charge de la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN.

ARTICLE 3 : Le jugement susvisé est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

ARTICLE 4 : La requête n° 98NC01107 de la SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN est rejetée.

ARTICLE 5 : Le présent arrêt sera notifié à SOCIÉTÉ MÉTALLURGIQUE DU RHIN et au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE.

6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98NC01107
Date de la décision : 18/12/2003
Sens de l'arrêt : Maintien de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. RIQUIN
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : BALMITGERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2003-12-18;98nc01107 ?
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