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16/06/2005 | FRANCE | N°01NC00149

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 16 juin 2005, 01NC00149


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 février 2001, complétée par le mémoire enregistré le 2 mai 2002, présentée pour ELECTRICITE DE FRANCE (EDF) par la SCP Babeau, Verry, Linval, avocats ;

ELECTRICITE DE FRANCE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement no 94-1496 en date du 14 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a limité la condamnation de la société OGCATP à un montant de 9 969,50 frs, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 1996 ;

2°) de condamner la société OGCATP

à lui verser une somme de 6 079,36 euros (39 878,02 frs), assortie des intérêts au taux lé...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 13 février 2001, complétée par le mémoire enregistré le 2 mai 2002, présentée pour ELECTRICITE DE FRANCE (EDF) par la SCP Babeau, Verry, Linval, avocats ;

ELECTRICITE DE FRANCE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement no 94-1496 en date du 14 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a limité la condamnation de la société OGCATP à un montant de 9 969,50 frs, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 1996 ;

2°) de condamner la société OGCATP à lui verser une somme de 6 079,36 euros (39 878,02 frs), assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 octobre 1996 ;

3°) de condamner la société OGCATP à lui verser une somme de 164,76 euros (1 080,73 frs) en remboursement des frais du constat d'huissier, ainsi qu'une somme de 1 525 euros au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

ELECTRICITE DE FRANCE soutient que :

- la société OGCATP est intervenue sur le site le 8 août 1994 alors même qu'elle savait qu'EDF n'était pas intervenue et qu'il était visible que les câbles n'étaient pas protégés ;

- le dossier ne fait apparaître aucune faute d'EDF ;

- le marché faisait obligation à son titulaire de réaliser un piquetage contradictoire des ouvrages souterrains et de prévenir le concessionnaire dix jours au moins avant le début des travaux, ce qui n'a pas été le cas ;

- compte tenu des travaux en cours, il était impératif de faire constater par huissier les dégâts avant que la chaussée ne fut rebouchée dans le souci de préserver ses droits ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires, enregistrés les 26 décembre 2001 et 3 janvier 2003, présentés pour la société OGCATP par la SCP Comolet-Mandin et associés, avocats ; la société OGCATP conclut à titre principal, au rejet de la requête d'EDF et, subsidiairement, au maintien du jugement, à la condamnation de l'Etat à relever et à la garantir de toute nouvelle condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre et à la condamnation d'EDF à lui verser une somme de 10 000 frs au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

La société OGCATP soutient que :

- le régime de responsabilité appliquée à un participant au travail public est un régime de faute ;

- si un câble a été endommagé, la faute en incombe exclusivement à l'exploitant dont l'attention avait été attirée à plusieurs reprises sur la nécessité de protéger les réseaux, ce qu'il n'a pas fait ;

- le constat d'huissier du 8 août 1994 relatif aux operculaires de béton est sans incidence sur l'appréciation des données du litige ;

- c'est à tort que le tribunal a considéré que la faute d'EDF n'était pas pleinement exonératoire de la responsabilité de l'entreprise ;

- le maître d'oeuvre a commis une faute en ne procédant pas aux vérifications nécessaires et en n'interdisant pas l'intervention, ce qui justifie de faire droit à l'appel en garantie formé à son encontre, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal ;

- en tout état de cause, le quantum de la réparation n'a pas à tenir compte des frais exposés pour le constat d'huissier ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 Pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mai 2005 :

- le rapport de Mme Monchambert, président,

- les observations de Me X... pour la SCP Babeau, Verry, Linval, avocat d'ELECTRICITE DE FRANCE et de Me Y... pour la SCP Comolet, Mandin et associés, avocat de la société OGCATP,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'EDF a sollicité du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la condamnation de la société OGCATP à lui rembourser, au titre des frais irrépétibles, les frais de constat d'huissier qu'elle a été amenée à exposer pour les besoins du débat contentieux ; que si les premiers juges ont répondu à ce moyen, ils ont en revanche omis de statuer sur ce point dans le dispositif du jugement ; qu'il suit de là que le jugement du 14 décembre 2000 susvisé est entaché d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif ; qu'ainsi, ce jugement doit être annulé en tant qu'il n'a pas statué sur la demande de remboursement des frais de constat d'huissier ;

Considérant que l'affaire est en l'état ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer sur les conclusions de la demande de première instance relatives au remboursement des frais de constat d'huissier, ainsi qu'en vertu de l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions ;

Sur la responsabilité :

Considérant que les dommages résultant de l'exécution d'un travail public ne peuvent engager, à l'égard des personnes qui y participent ou de leur ayant cause, la responsabilité du maître de l'ouvrage ou de l'entrepreneur que s'il est établi que ces dommages sont imputables à la faute de ces derniers ;

Considérant que dans le cadre de travaux effectués en vue de la reprise d'étanchéité et de ragréage des ponts Brusley et Saint-Quentin à Troyes, la société OGCATP, titulaire du marché, a effectué le 8 août 1994 des travaux de coupe à la disqueuse sur un câble basse tension préalablement mis hors tension par EDF ; qu'au cours de cette opération, la disqueuse s'est bloquée et a été projetée sur un câble haute tension situé à proximité qui était resté sous tension, provoquant un éclair et une violente déflagration ainsi que son sectionnement ; qu'EDF, qui avait été, à l'initiative de la direction départementale de l'équipement de l'Aube, associée depuis le mois de juillet aux réunions de chantiers à raison de l'incidence des travaux sur les réseaux électriques doit être regardée comme ayant la qualité de participant aux travaux ; qu'il lui appartient donc d'établir que les dommages dont elle recherche la réparation sont imputables à la faute commise par la société OGCATP ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que lors de la réunion de chantier du 3 août 1994, il a été demandé à EDF d'identifier d'urgence ses réseaux, d'ôter les câbles inutiles et de réaliser les protections nécessaires sur les autres câbles, de façon à permettre la poursuite du chantier par la société OGCATP ; qu'il résulte d'un constat d'huissier établi le jour même de l'accident que lors de leur intervention, les ouvriers de la société OGCATP ont eux-mêmes retiré l'operculaire de béton de protection des câbles sous tension et ont poursuivi leur intervention, alors même qu'il était patent qu'EDF n'avait pas achevé la mise hors tension des câbles présents dans la zone ; que cette faute engage la responsabilité de la société OGCATP qui se borne à évoquer, sans l'établir, l'existence d'une communication téléphonique en date du 5 août 1994 avec le maître d'oeuvre, l'assurant de la mise en état du chantier par EDF ; que, toutefois, la responsabilité de la société OGCATP est atténuée par la faute d'EDF qui ne conteste pas qu'alors que les travaux de protection lui avaient été demandés en urgence lors de la réunion de chantier à laquelle elle a participé le 3 août 1994, ceux-ci n'avaient pas été intégralement réalisés le 8 août 1994, jour de l'accident, et n'allègue pas avoir eu de désaccord sur la mission confiée ; qu'il sera fait une juste appréciation des fautes respectivement commises par EDF et par la société en mettant à la charge de la société OGCATP les trois quarts des conséquences dommageables de l'incident ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'EDF est fondée à solliciter la réformation du jugement attaqué dans cette mesure et à demander que la condamnation prononcée à l'encontre de la société OGCATP soit portée à un montant de 4 559,50 euros (29 908,50 frs), ladite somme étant assortie des intérêts à compter du 31 octobre 1996, date d'enregistrement de sa demande devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Sur l'appel en garantie :

Considérant que la responsabilité du maître d'oeuvre ne peut être engagée envers l'entrepreneur qu'en raison d'une faute caractérisée et d'une gravité suffisante commise par le maître d'oeuvre dans la mission d'étude et de direction des travaux qui lui a été confiée par le maître d'ouvrage ; qu'il n'est pas établi que la direction départementale de l'équipement ait commis une faute de cette nature ; que, dès lors, la société OGCATP n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à ce que l'Etat la garantisse de la condamnation prononcée à son encontre ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la société OGCATP, partie perdante en appel, puisse se voir allouer les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de la condamner à verser à EDF une somme de 1 164,76 euros sur ce fondement, compte-tenu des frais de constat d'huissier ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 14 décembre 2000 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la demande de remboursement des frais de constat d'huissier.

Article 2 : La société OGCATP est condamnée à verser à ELECTRICITE DE FRANCE une somme de quatre mille cinq cent cinquante euros cinquante centimes (4 550,50 €), soit 29 908,50 frs, ladite somme étant assortie des intérêts au taux égal à compter du 31 octobre 1996.

Article 3 : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 14 décembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La société OGCATP versera à ELECTRICITE DE FRANCE une somme de mille cent soixante-quatre euros soixante-seize centimes (1 164,76 €) au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête d'ELECTRICITE DE FRANCE et l'appel incident de la société OGCATP sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à ELECTRICITE DE FRANCE, à la société OGCATP et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

2

N° 01NC00149


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC00149
Date de la décision : 16/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: Mme Sabine MONCHAMBERT
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : BABEAU-VERRY-LINVAL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-06-16;01nc00149 ?
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