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02/08/2007 | FRANCE | N°06NC00456

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 02 août 2007, 06NC00456


Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2006, présentée pour la SARL HOLDING DU GROS MOULIN, dont le siège social est 2, chemin du Gros Moulin à Le Magny (88240), par Me Rémy, avocat ; la SARL HOLDING DU GROS MOULIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401024 du 30 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition litigieuse ;

Elle soutient :

-

que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- qu'elle a seulement procédé à la répa...

Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2006, présentée pour la SARL HOLDING DU GROS MOULIN, dont le siège social est 2, chemin du Gros Moulin à Le Magny (88240), par Me Rémy, avocat ; la SARL HOLDING DU GROS MOULIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401024 du 30 décembre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 1999 ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition litigieuse ;

Elle soutient :

- que le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- qu'elle a seulement procédé à la réparation et à la remise en état de la toiture, du matériel et des divers biens endommagés suite au sinistre survenu le 2 juin 1999, sans effectuer aucune construction nouvelle ou agrandissement ;

- que les travaux considérés n'ont ni augmenté la capacité de production ou la valeur de l'usine électrique, ni prolongé sa durée d'utilisation, et constituent ainsi des charges déductibles des bénéfices industriels et commerciaux ;

- que l'administration n'a pas apporté la preuve que des travaux de construction avaient été réalisés ;

- que la notification de redressement est insuffisamment motivée ;

- qu'elle est fondée à se prévaloir de la documentation administrative de base - Série 4 FE Division C ;

- que tant la jurisprudence que la doctrine s'accordent pour admettre la déduction immédiate des frais de remplacement des matériels et mobiliers loués qui incombent au locataire en vertu des stipulations du contrat de location ;

- que les impositions mises à sa charge vont entraîner la faillite de la société et la cessation d'activité de la centrale électrique qu'elle exploite ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens énoncés par la requérante ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 22 avril 2007, présenté pour la SARL HOLDING DU GROS MOULIN, qui conclut aux mêmes fins que sa requête et, à titre subsidiaire, à ce que l'indemnité d'assurance qu'elle a perçue en 1999 bénéficie du régime d'étalement d'imposition à compter de l'année 2000, et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient en outre qu'elle est fondée à faire valoir les dispositions de l'article 39 quaterdecies I ter du code général des impôts relatives à l'étalement des indemnités perçues consécutivement à un sinistre par incendie ; qu'il y a lieu de retenir la qualification de plus-value concernant l'indemnité d'assurance et de la faire bénéficier du régime d'étalement sur plusieurs exercices ; qu'elle peut également se prévaloir à cet égard de la position adoptée par l'administration concernant le caractère d'immobilisation des travaux réalisés en 1999 ; que les dépenses réalisées devraient ainsi être considérées comme un supplément d'immobilisation ;

Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré le 12 juin 2007, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense et soutient en outre que le nouveau moyen exprimé en réplique est infondé ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 18 juin 2007, présenté pour la SARL HOLDING DU GROS MOULIN ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2007 :

- le rapport de M. Vincent, président ;

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la SARL HOLDING DU GROS MOULIN exploite en location-gérance une usine de production d'énergie électrique ; que, consécutivement à un incendie survenu le 2 juin 1999, ladite société a perçu une indemnité forfaitaire transactionnelle de 145 340 euros et effectué les travaux de remise en état en accord avec la société bailleresse ; que, pour la détermination de ses résultats imposables au titre de l'année 1999, la SARL HOLDING DU GROS MOULIN a, d'une part, déclaré en recettes le montant de ladite indemnité, d'autre part, porté en charges déductibles le montant des travaux réalisés ; que ladite société relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur les société auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1999 à raison de la remise en cause par l'administration des déductions ainsi pratiquées et conclut à titre subsidiaire, dans le dernier état de ses écritures, à ce que l'indemnité d'assurance précitée bénéficie du régime d'étalement d'imposition à compter de l'année 2000 ;

Sur les conclusions principales :

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement attaqué, après avoir énoncé les dispositions applicables du code général des impôts et précisé la nature des travaux effectués par la société requérante, a estimé qu'eu égard notamment à leur importance et à leur coût, ceux-ci avaient eu pour effet de prolonger la durée probable d'utilisation des éléments d'actif concernés et d'en accroître la valeur et ne pouvaient ainsi être regardés comme de simples travaux d'entretien ou de réparation constitutifs de charges déductibles ; qu'ainsi le moyen tiré de l'insuffisance de motivation dudit jugement en tant qu'il ne se serait pas prononcé sur la nature juridique des travaux litigieux doit être écarté ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la notification en date du 15 juillet 2002 comporte un énoncé suffisant des motifs de droit et de fait fondant les redressements litigieux ; que la circonstance que, selon la société requérante, l'administration n'aurait pas apporté la preuve du bien-fondé de son affirmation en vertu de laquelle les dépenses engagées ne seraient pas déductibles en tant que les travaux correspondants aboutiraient en fait à la reconstruction de l'usine de production est en tout état de cause sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation de ladite notification ;

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : «2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apports et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances de tiers, les amortissements et les provisions justifiés» ; qu'aux termes de l'article 39 dudit code : «1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment : 1° les frais généraux de toute nature… 2° les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation…» ; que, pour l'application de ces dispositions, seuls peuvent être compris dans les frais généraux et constituer des charges d'un exercice déterminé les travaux de réparation et d'entretien qui concourent à maintenir en état d'usage ou de fonctionnement les différents éléments de l'actif immobilisé de l'entreprise ; qu'en revanche ne peuvent être déduites du bénéfice imputable et peuvent seulement donner lieu à amortissement les dépenses qui entraînent normalement une augmentation de la valeur pour laquelle un élément immobilisé figure au bilan de l'entreprise ou qui ont pour effet de prolonger de manière notable la durée probable d'utilisation d'un élément de cette nature ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 39 D du même code : «L'amortissement des constructions et aménagements édifiés sur le sol d'autrui doit être réparti sur la durée normale d'utilisation de chaque élément…» ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que si une entreprise locataire est en droit de faire figurer dans ses charges d'exploitation immédiatement déductibles les frais d'entretien et de réparation qui lui incombent, cette entreprise est en revanche tenue de porter à l'actif de ses bilans les dépenses de la nature de celles évoquées ci-dessus qu'elle effectue sur le sol d'autrui alors même que ses droits sur ces constructions et aménagements ne sont pas ceux d'un propriétaire ;

Considérant que, consécutivement à l'incendie survenu le 2 juin 1999 et ayant gravement endommagé l'usine de production d'électricité qu'elle exploitait et dont elle était locataire, la SARL HOLDING DU GROS MOULIN a fait procéder, pour un montant total de 867 211,39 F (132 214,67 euros), à des travaux comportant notamment la remise en état de la toiture, totalement détruite, la réfection de l'ensemble de l'installation électrique, la fourniture, la pose et le raccordement de deux groupes hydrauliques et le remplacement de deux génératrices, avec l'ensemble des cheminements et câbles nécessaires à leur installation ; qu'eu égard à leur importante et à leur coût, comparé au prix de revient initial des immobilisations inscrites à l'actif de la société bailleresse, s'élevant à 16 556 euros, ces travaux ont eu pour effet d'accroître la valeur des éléments corporels de l'actif immobilisé ; qu'il s'ensuit, sans qu'y fasse obstacle les circonstances qu'ils répondraient à une obligation du preneur en vertu du contrat de bail et n'auraient pas conduit à accroître la capacité de production de l'usine, que lesdits travaux ne peuvent être regardés comme ayant le caractère de simples travaux d'entretien et de réparation et que les dépenses correspondantes ne peuvent donner lieu qu'à amortissement ;

S'agissant de l'invocation du bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

Considérant que si la société requérante entend à nouveau se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions de la doctrine administrative de base référencée sous le n° 4C-222, point 7, en date du 3 octobre 1997, il ne résulte toutefois pas de l'instruction que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL HOLDING DU GROS MOULIN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions subsidiaires :

Considérant que la SARL HOLDING DU GROS MOULIN sollicite à titre subsidiaire le bénéfice des dispositions de l'article 39 quaterdecies I ter du code général des impôts, en vertu desquelles la plus-value nette à court terme afférente à des biens amortissables réalisée à la suite de la perception d'une indemnité d'assurances d'immeubles figurant à l'actif peut être repartie, par fractions égales, sur plusieurs exercices à compter de celui suivant la réalisation de la plus-value ; qu'à supposer même que la société requérante soit recevable à présenter de telles conclusions, celles-ci ne peuvent en tout état de cause qu'être rejetées, dès lors que les biens sinistrés figuraient à l'actif de la société bailleresse et non à l'actif de ses propres bilans ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SARL HOLDING DU GROS MOULIN au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL HOLDING DU GROS MOULIN est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL HOLDING DU GROS MOULIN et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 06NC00456


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00456
Date de la décision : 02/08/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : BERTAUD CALLET FILLON ; BERTAUD CALLET FILLON ; BERTAUD CALLET FILLON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-08-02;06nc00456 ?
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