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30/01/2014 | FRANCE | N°13NC00009

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2014, 13NC00009


Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. C...F..., demeurant..., par Me D...;

M. F...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002554 du 6 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2009 par laquelle le président du conseil général du Bas-Rhin l'a suspendu de ses fonctions, de l'arrêté du 24 mars 2010 lui infligeant la sanction du blâme et ses conclusions tendant à la condamnation du département du Bas-Rhin à lui verser la somme de 10

000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence ;

2°) d'a...

Vu la requête, enregistrée le 4 janvier 2013, présentée pour M. C...F..., demeurant..., par Me D...;

M. F...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002554 du 6 novembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 décembre 2009 par laquelle le président du conseil général du Bas-Rhin l'a suspendu de ses fonctions, de l'arrêté du 24 mars 2010 lui infligeant la sanction du blâme et ses conclusions tendant à la condamnation du département du Bas-Rhin à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d'existence ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) de condamner le département du Bas-Rhin au paiement d'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans les conditions d'existence ;

4°) de mettre à la charge du département du Bas-Rhin une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. F...soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de ce que la procédure interne en matière de harcèlement moral, laquelle prévoit qu'une enquête doit être diligentée vers le présumé harceleur, n'a pas été respectée ;

- l'enquête menée par le conseil général a été diligentée à son insu ;

- l'exactitude matérielle des faits n'a pas été vérifiée ;

- l'arrêté de suspension du 29 décembre 2009 est signé par une autorité incompétente, M.H..., directeur des ressources humaines adjoint, ne justifiant pas d'une délégation de signature ;

- MmeE..., directrice des ressources humaines, ne justifie pas d'une délégation de signature ;

- contrairement à ce que soutient le département l'arrêté n'a pas été signé par M. A..., directeur général des services ;

- l'ampliation diffère de la version originale de l'arrêté ;

- des motifs absents de l'arrêté de suspensions de fonctions ont été cependant invoqués devant le conseil de discipline ;

- la mesure de suspension n'est pas justifiée au regard de la chronologie des faits ;

- il n'a commis aucune faute grave ;

- la suspension prononcée à son encontre n'est pas fondée sur l'intérêt du service dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis et que la suspension intervient tardivement ;

- le blâme, sanction du premier groupe, est incompatible avec la mesure d'exclusion temporaire et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté du 24 mars 2010 lui infligeant la sanction du blâme n'est pas motivée par des faits précis et datés ;

- le principe du contradictoire n'a pas été respecté par le conseil de discipline dès lors qu'il n'a pas eu accès à l'intégralité de son dossier, notamment aux documents dont l'administration a fait état devant le conseil de discipline ;

- il n'avait pas été informé que des témoins seraient cités par le département ;

- la connaissance par un des conseillers composant le conseil de discipline des personnes le mettant en cause met en doute son impartialité ;

- le conseil de discipline n'a pas tenu compte des témoignages qu'il a produits ;

- la procédure interne en matière de harcèlement n'a pas été suivie ;

- les décisions attaquées lui font subir un préjudice financier et moral ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2013, présenté pour le département du Bas-Rhin par MeB..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. F...la somme de 3.000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le département fait valoir que :

- l'arrêté en cause n'a pas été signé par M.H..., lequel n'a signé que l'ampliation, mais par M.A..., directeur général des services, qui disposait d'une délégation de signature pour ce faire ;

- la suspension de M. F...était justifiée au regard des faits qui l'ont précédée ;

- la circonstance que M. F...ait, au terme de la procédure, fait l'objet d'un simple blâme est sans incidence ;

- le requérant n'est pas fondé à demander à être indemnisé du fait de sa suspension ;

- la procédure devant le conseil de discipline était parfaitement régulière, et en particulier la citation de témoins ;

- l'absence de communication d'un rapport au requérant est sans incidence dès lors que le conseil ne s'est pas fondé sur ce rapport pour rendre son avis ;

- le conseil de discipline a pris en compte les témoignages en faveur de M.F... et n'a fait preuve d'aucune partialité ;

- la décision de sanction est suffisamment motivée ;

- le moyen relatif à l'absence de mise en oeuvre de la procédure interne et celui relatif à l'enquête réalisée par le conseil général sont sans incidence ;

- les faits sont établis et justifient la sanction ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 août 2013, présenté par M.F... ;

Vu la note en délibéré, produite pour le département du Bas- Rhin, par MeB..., enregistré le 11 septembre 2013 ; le département soutient que la décision attaquée est suffisamment motivée dès lors qu'elle a été notifiée avec le procès verbal du conseil de discipline ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2013, présenté pour M.F... tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les pièces dont il résulte que, par application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré du non lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 janvier 2014, présenté pour M.F... ;

Vu le mémoire enregistré le 6 janvier 2014, présenté par M.F... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi du 26 janvier 1984 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2014 :

- le rapport de M. Nizet, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

- et les observations de Me G...pour le département du Bas-Rhin ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

1. Considérant qu'il ressort de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges ont expressément répondu au moyen tiré de ce que l'enquête menée par le conseil général aurait été diligentée à l'insu du requérant, ainsi qu'à celui tiré de l'inexactitude matérielle des faits en précisant que les faits reprochés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité ; que, par ailleurs, le moyen tiré de ce que la procédure interne en matière de harcèlement moral n'aurait pas été respectée étant inopérant, les premiers juges n'étaient pas tenus d'y répondre expressément ; que, par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation manquent en fait ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté du 29 décembre 2009 portant suspension de M.F... :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 14 avril 2009, régulièrement publié au bulletin départemental d'information, M.A..., directeur général des services, a reçu délégation de signature du président du conseil général, à l'exception de la signature des rapports au conseil général et à la commission permanente, des délibérations du conseil général et de la commission permanente et des ordres de réquisition du comptable ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette délégation n'est pas restreinte au cas où le président du conseil général serait absent ; que, dès lors, M. A... était compétent pour signer la présente décision ; qu'à supposer, comme le soutient M.F..., que M.H..., directeur adjoint des ressources humaines, aurait été incompétent pour signer la décision en cause, cette circonstance est sans incidence dès lors qu'il n'en est pas l'auteur et qu'il n'en a signé qu'une ampliation ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, que si, comme le relève M.F..., le motif retenu par le président du conseil général, dans la décision du 29 décembre 2009, n'est pas exactement reproduit dans l'ampliation qui lui a été notifiée, cette erreur purement matérielle ne crée aucune ambiguïté en l'espèce quant à la teneur de la motivation et est dès lors sans influence sur la légalité de cette décision ;

4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 30 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai le conseil de discipline. Le fonctionnaire suspendu conserve son traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement et les prestations familiales obligatoires. Sa situation doit être définitivement réglée dans le délai de quatre mois... " ;

5. Considérant que la mesure provisoire de suspension prévue par ces dispositions législatives, qui est uniquement destinée à écarter temporairement un agent du service, en attendant qu'il soit statué disciplinairement ou pénalement sur sa situation, ne présente pas par elle-même un caractère disciplinaire ; qu'elle peut être légalement prise dès lors que l'administration est en mesure d'articuler à l'encontre de l'intéressé des griefs qui ont un caractère de vraisemblance suffisant et qui permettent de présumer que celui-ci a commis une faute grave ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que le département du Bas-Rhin a reproché à M. F...d'avoir manqué à ses obligations professionnelles en raison notamment d'actes répétés d'agression physique et verbale à l'encontre de certaines de ses collègues ; qu'à la date à laquelle est intervenue la suspension contestée, ces faits présentaient un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité pour justifier une suspension de fonction ; que M. F...ne saurait soutenir que le temps écoulé depuis ces faits empêcherait que la décision de suspension attaquée soit regardée comme ayant été prise dans l'intérêt du service, d'autant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose qu'une telle décision prise sur le fondement de l'article 30 précité de la loi du 13 juillet 1983 soit décidée dans un délai déterminé à compter de la date des faits sur lesquels elle repose ou de celle à laquelle l'employeur en a eu connaissance ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. F...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 décembre 2009 ;

En ce qui concerne l'arrêté du 24 mars 2010 infligeant la sanction du blâme de M. F... :

8. Considérant qu'aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " (...) Parmi les sanctions du premier groupe, seuls le blâme et l'exclusion temporaire de fonctions sont inscrits au dossier du fonctionnaire. Ils sont effacés automatiquement au bout de trois ans si aucune sanction n'est intervenue pendant cette période. " ; qu'en application de ces dispositions, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. F...aurait fait l'objet d'une nouvelle sanction disciplinaire, le blâme du 24 mars 2010, a été automatiquement et rétroactivement effacé du dossier administratif de l'intéressé le 24 mars 2013 ; qu'il n'est pas établi que tous les effets de cette sanction n'auraient pas entièrement disparu ; que, par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la sanction en cause était fondée sur des agressions verbales et physiques commises par l'intéressé à l'encontre de certaines de ses collègues, matériellement établies et qui constituent un manquement à ses obligations professionnelles de nature à la justifier légalement ; que, par suite, il ne peut obtenir réparation du préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence qu'il invoque ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. F...doivent dès lors être rejetées ; qu'il n' y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. F...la somme que demande le département du Bas-Rhin au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 mars 2010.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...F...et au département du Bas-Rhin.

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N° 13NC00009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00009
Date de la décision : 30/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier NIZET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : CABINET DEBRE ET WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-01-30;13nc00009 ?
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