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27/10/2015 | FRANCE | N°14NC02260

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 27 octobre 2015, 14NC02260


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Espace Architecture a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 22 octobre 2013 portant résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre conclu avec la communauté de communes du district urbain de Faulquemont, et, d'autre part, de condamner la communauté de communes du district urbain de Faulquemont à lui verser la somme de 177 823,75 euros.

Par un jugement n° 1305810 du 15 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.<

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Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Espace Architecture a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 22 octobre 2013 portant résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre conclu avec la communauté de communes du district urbain de Faulquemont, et, d'autre part, de condamner la communauté de communes du district urbain de Faulquemont à lui verser la somme de 177 823,75 euros.

Par un jugement n° 1305810 du 15 octobre 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 décembre 2014, 22 juin 2015 et 14 septembre 2015, la société Espace Architecture, représentée par Me C...de la SELARL Le Discorde-C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 octobre 2014 ;

2°) d'annuler la décision du 22 octobre 2013 portant résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre conclu avec la communauté de communes du district urbain de Faulquemont ;

3°) de condamner la communauté de communes du district urbain de Faulquemont à lui verser la somme de 177 823,75 euros, avec intérêt au taux légal à compter de la date d'enregistrement de sa demande de première instance et capitalisation des intérêts ;

4°) de condamner la communauté de communes du district urbain de Faulquemont aux dépens, dont la somme de 35 euros au titre de la contribution pour l'aide juridique ;

5°) de mettre à la charge de la communauté de communes du district urbain de Faulquemont la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de résiliation du 22 octobre 2013 a méconnu les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ;

- cette décision a été prise par une autorité incompétente ;

- cette décision a méconnu les stipulations de l'article 12.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché ;

- cette décision est injustifiée et repose sur des faits matériellement inexacts ;

- compte tenu de l'irrégularité de la décision de résiliation, elle est bien fondée à solliciter directement devant le juge le paiement des sommes qui lui sont dues au titre du marché, pour 27 823,75 euros ;

- elle est également fondée à demander la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices, moral et matériel, du fait de la résiliation irrégulière du marché ainsi que de l'allongement de la durée du chantier, imputable au maître de l'ouvrage ; la cour pourra ordonner une expertise pour déterminer le montant du préjudice.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 12 mai 2015 et 28 juillet 2015, la communauté de communes du district urbain de Faulquemont, représentée par Me D...de la SELARL D...et De Zolt, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la société Espace Architecture sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande au titre du solde du marché est irrecevable en l'absence de mémoire en réclamation de la société mettant en demeure le maître de l'ouvrage d'établir un décompte général ;

- la société ne justifie pas du montant des préjudices invoqués et ne détaille pas l'étendue du préjudice matériel ;

- le moyen tiré de ce que la décision de résiliation méconnaît les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 est inopérant et, en tout de cause, non fondé ;

- les autres moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- l'arrêté du 16 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Michel, premier conseiller,

- les conclusions de M. Laubriat, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Espace Architecture, ainsi que celles de Me B...pour la communauté de commune du district urbain de Faulquemont.

1. Considérant que la communauté de communes du district urbain de Faulquemont a conclu un contrat de maîtrise d'oeuvre le 3 juin 2010, avec le groupement constitué des sociétés Espace Architecture, Génie Tec France et Sogecli, dans le cadre de la construction d'un bâtiment relais de 3000 m² dit bâtiment " BRAFER " ; que le 22 octobre 2013, la communauté de communes du district urbain de Faulquemont a résilié ce marché en tant qu'il concernait les prestations attribuées à la société Espace Architecture ; que la société Espace Architecture relève appel du jugement du 15 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 22 octobre 2013 portant résiliation du marché de maîtrise d'oeuvre et à la condamnation de la communauté de communes du district urbain de Faulquemont à lui verser la somme de 177 823,75 euros ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant, en premier lieu, que les parties à un contrat administratif ne peuvent pas demander au juge l'annulation d'une mesure d'exécution de ce contrat ; que, dès lors, les conclusions de la société Espace Architecture tendant à l'annulation de la mesure de résiliation du marché public de maîtrise d'oeuvre conclu avec la communauté de communes du district urbain de Faulquemont sont irrecevables ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de prestations intellectuelles : " Tout différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur doit faire l'objet, de la part du titulaire, d'une lettre de réclamation exposant les motifs de son désaccord et indiquant, le cas échéant, le montant des sommes réclamées. Cette lettre doit être communiquée au pouvoir adjudicateur dans le délai de deux mois, courant à compter du jour où le différend est apparu, sous peine de forclusion. Le pouvoir adjudicateur dispose d'un délai de deux mois, courant à compter de la réception de la lettre de réclamation, pour notifier sa décision. L'absence de décision dans ce délai vaut rejet de la réclamation " ; qu'en l'absence de décompte général, il résulte des dispositions précitées que le différend entre le titulaire et le pouvoir adjudicateur du marché doit faire l'objet, préalablement à toute instance contentieuse, d'un mémoire en réclamation de la part du titulaire du marché ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Espace Architecture a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant au règlement du solde du marché pour la somme de 27 823,75 euros sans avoir préalablement adressé à la communauté de communes du district urbain de Faulquemont un mémoire en réclamation en application des dispositions précitées de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de prestations intellectuelles ; que, par suite, la fin de non recevoir opposée par la communauté de communes du district urbain de Faulquemont à la demande susmentionnée de règlement du solde du marché doit être accueillie ;

Sur la responsabilité :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 5211-2 du code général des collectivités territoriales : " A l'exception de celles des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 2122-4, les dispositions du chapitre II du titre II du livre Ier de la deuxième partie relatives au maire et aux adjoints sont applicables au président et aux membres du bureau des établissements publics de coopération intercommunale, en tant qu'elles ne sont pas contraires aux dispositions du présent titre " ; qu'aux termes du 4° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, applicable aux établissements publics de coopération intercommunale : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : / 4° De prendre toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés et des accords-cadres ainsi que toute décision concernant leurs avenants, lorsque les crédits sont inscrits au budget " ; qu'il résulte de l'instruction que la mesure de résiliation a été signée par M. François Lavergne, président de la communauté de communes du district urbain de Faulquemont, qui bénéficiait par délibération n° 11 du conseil communautaire du 27 mars 2013 d'une délégation pour " prendre toute décision concernant (...) l'exécution et le règlement des marchés " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la mesure de résiliation, acte d'exécution du contrat, manque en fait et doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Sont considérés comme autorités administratives au sens de la présente loi les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif " ; qu'aux termes de l'article 4 de la même loi : " Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " ; qu'il résulte de l'instruction que la lettre d'accompagnement du formulaire EXE 15 portant décision de résiliation comporte les mentions exigées par les dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions manque en fait et doit être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, que l'article 12.1 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché stipule que : " le présent marché pourra être résilié : (...) h) si l'une des parties refuse d'exécuter les obligations auxquelles elle a souscrit sans être en mesure de justifier ce refus par des motifs valables (...) la résiliation ne pourra être prononcée qu'après mise

en demeure adressée à la partie défaillante d'avoir à exécuter les obligations découlant du marché. Cette mise en demeure devra fixer un délai qui, sauf justification, ne sera pas inférieur à trois semaines " ;

8. Considérant que, contrairement à ce que soutient la communauté de communes du district urbain de Faulquemont, ces stipulations étaient bien applicables, l'abandon de chantier constituant une inexécution de ses obligations contractuelles par le cocontractant ; qu'il résulte de l'instruction que par lettre du 17 septembre 2013 la communauté de communes du district urbain de Faulquemont a mis en demeure la société Espace Architecture de reprendre l'exécution de ses prestations dans un délai d'une semaine et non de trois semaines prévu par les stipulations précitées ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que la société Espace Architecture a pu présenter ses observations par lettre du 27 septembre 2013, ainsi que l'y avait invitée la communauté de communes du district urbain de Faulquemont et que ces observations ont été prises en compte ainsi qu'en atteste la lettre d'accompagnement de la décision de résiliation du 22 octobre 2013 ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que la mesure de résiliation a été prise le 22 octobre 2013, soit dans un délai de plus d'un mois après la mise en demeure précitée, et sans que la société ait repris l'exécution de ses obligations contractuelles ; qu'il s'ensuit que, dans les circonstances de l'espèce, la société Espace Architecture n'a été privée d'aucune garantie ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées l'article 12.1 du cahier des clauses administratives particulières du marché ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite du refus de la communauté de communes du district urbain de Faulquemont de régler la facture du 28 juin 2013 présentée par la société Espace Architecture pour la somme de 18 092,49 euros au titre des prestations d'assistance aux opérations de réception, la société Espace architecture a informé la communauté de communes du district urbain de Faulquemont par courriel du 22 août 2013 qu'elle n'interviendrait plus sur le site tant qu'elle n'aurait pas eu l'assurance écrite que cette facture serait réglée et qu'en l'absence de réponse positive elle ne serait pas présente à la commission de sécurité de ce jour ; que, par décision du 22 octobre 2013, la communauté de communes du district urbain de Faulquemont a résilié le marché pour faute au motif de l'abandon du chantier par la société Espace Architecture en relevant plus particulièrement à son encontre qu'aucune réunion de chantier et aucun suivi n'avaient été assurés sur place depuis le mois d'août 2013 ; que la société Espace Architecture, qui a explicitement fait état de son intention de ne plus intervenir sur le site par le courriel précité du 22 août 2013, et a d'ailleurs " mis en demeure " par lettre du 12 septembre 2013 la communauté de communes du district urbain de Faulquemont de régler la facture du 28 juin 2013 à peine de résiliation du marché, ne produit aucun élément de nature à remettre en cause la réalité de son absence sur le chantier ; qu'en n'assurant aucun suivi sur place et aucune réunion de chantier à compter du 22 août 2013 en inexécution de ses obligations contractuelles, la société Espace Architecture a commis une faute de nature à justifier la résiliation du marché à ses torts exclusifs ; que, dès lors, il y a lieu de rejeter sa demande d'indemnisation ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, que la société Espace Architecture n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Espace Architecture le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la communauté de communes du district urbain de Faulquemont et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Espace Architecture est rejetée.

Article 2 : La société Espace Architecture versera à la communauté de communes du district urbain de Faulquemont une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Espace Architecture et à la communauté de communes du district urbain de Faulquemont.

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N° 14NC02260


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC02260
Date de la décision : 27/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : SELARL LE DISCORDE-DELEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-10-27;14nc02260 ?
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