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17/05/2016 | FRANCE | N°16NC00685

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 17 mai 2016, 16NC00685


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne statuant en matière fiscale sur le fondement des articles L. 277 et L. 279 du livre des procédures fiscales de décider que les garanties proposées dans le cadre de la procédure de sursis de paiement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales sont propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor et doivent être acceptées par le comptable et que la décision du comptable du Trésor du 29 févr

ier 2016 portant rejet des garanties offertes est dès lors infondée.

Par une ord...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne statuant en matière fiscale sur le fondement des articles L. 277 et L. 279 du livre des procédures fiscales de décider que les garanties proposées dans le cadre de la procédure de sursis de paiement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales sont propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor et doivent être acceptées par le comptable et que la décision du comptable du Trésor du 29 février 2016 portant rejet des garanties offertes est dès lors infondée.

Par une ordonnance n°1600490 du 8 avril 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 avril 2016 et un mémoire complémentaire enregistré le 6 mai 2016, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) de réformer cette ordonnance en ce qu'elle lui fait grief ;

2°) de juger que les garanties proposées sont propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor, et à cet effet, de diminuer le montant des droits à garantir à concurrence des retenues à la source payées au titre de l'impôt sur le revenu des années 2010 à 2012, d'accepter en tant que garantie le nantissement des parts sociales de la Selarl Manche Médicale, et enfin, le cas échéant, de faire droit à ses propositions tendant à augmenter la garantie offerte de la somme de 9 802 euros versée en consignation pour les besoins de la procédure en référé et à procéder à une augmentation de capital pour incorporer l'ensemble des bénéfices et réserves non distribués ;

4°) de condamner l'État à lui verser la somme de 1 500 euros en titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal fait référence à l'article A. 277-9 du livre des procédures fiscales qui, a priori, n'existe pas, ou, à tout le moins, n'est pas applicable au cas d'espèce ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le requérant n'a pas sollicité un nantissement sur un fonds de commerce mais un nantissement sur des parts sociales ;

- le tribunal n'a pas pris en compte ses propositions émises lors de l'audience publique ;

- le montant des sommes dont le recouvrement doit être garanti doit être réduit d'une somme de 18 127 euros ; il convient en effet de tenir compte, dans le décompte des droits à garantir, du montant total des retenues à la source qui n'a pas été déduit du montant total des rappels de droit ; l'administration fiscale a connaissance de l'ensemble de l'impôt sur le revenu payé initialement ;

- le nantissement des parts sociales de la Selarl Manche Médicale constitue une garantie suffisante et supérieure à l'impôt réclamé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 avril 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête, et à ce que la somme de 9 802 euros versée à titre de consignation soit conservée par le comptable et vienne en diminution du montant des garanties qui reste à constituer.

Il soutient que :

- l'article A. 277-9 du livre des procédures fiscales existe bien et l'ordonnance attaquée ne comporte aucune erreur matérielle ;

- le tribunal prend bien en considération le fait que le requérant propose comme garantie un nantissement des parts sociales de la Selarl Manche Médicale ;

- la discussion sur la prise en compte de retenues à la source pour déterminer les conséquences financières des rehaussements opérés n'entre pas dans le champ de compétence du juge des référés fiscaux de l'article L. 279 du livre des procédures fiscales et le montant à garantir s'élève à 98 024 euros ;

- la valeur des parts sociales de la Selarl Manche Médicale est très relative et la cession de ces parts est aléatoire ; ainsi, la garantie proposée par M. A...ne présente pas les conditions de sécurité et de disponibilité nécessaires.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision en date du 1er septembre 2015 de la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy désignant M. Martinez, président de chambre, comme juge des référés, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l'audience publique du 11 mai 2016 à 15 heures au cours de laquelle a été entendu :

- le rapport de M. Martinez, juge des référés ;

1. Aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases du dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation soit par l'administration, soit par le tribunal compétent. / Lorsque la réclamation mentionnée au premier alinéa porte sur un montant de droits supérieur à celui fixé par décret, le débiteur doit constituer des garanties portant sur le montant des droits contestés. / A défaut de constitution de garanties ou si les garanties offertes sont estimées insuffisantes, le comptable peut prendre des mesures conservatoires pour les impôts contestés (...) " ; aux termes de l'article L. 279 du même livre : " En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque les garanties offertes par le contribuable ont été refusées, celui-ci peut, dans les quinze jours de la réception de la lettre recommandée qui lui a été adressée par le comptable, porter la contestation, par simple demande écrite, devant le juge du référé administratif, qui est un membre du tribunal administratif désigné par le président de ce tribunal. / Cette demande n'est recevable que si le redevable a consigné auprès du comptable, à un compte d'attente, une somme égale au dixième des impôts contestés. Une caution bancaire ou la remise de valeurs mobilières cotées en bourse peut tenir lieu de consignation. / Le juge du référé décide dans le délai d'un mois si les garanties offertes répondent aux conditions prévues à l'article L. 277 et si, de ce fait, elles doivent être ou non acceptées par le comptable. Il peut également, dans le même délai, décider de dispenser le redevable de garanties autres que celles déjà constituées. / Dans les huit jours suivant la décision du juge, le redevable et le comptable peuvent, par simple demande écrite, faire appel devant le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet. Celui-ci, dans le délai d'un mois, décide si les garanties doivent être acceptées comme répondant aux conditions de l'article L. 277(...) Lorsque le juge des référés estime suffisantes les garanties initialement offertes, les sommes consignées sont restituées. Dans le cas contraire, les garanties supplémentaires à présenter sont diminuées à due concurrence " ; aux termes de l'article R. 277-1 du livre des procédures fiscales : " Le comptable compétent invite le contribuable qui a demandé à différer le paiement des impositions à constituer les garanties prévues à l'article L. 277 (...) Ces garanties peuvent être constituées par un versement en espèces qui sera effectué à un compte d'attente au Trésor, par des créances sur le Trésor, par la présentation d'une caution, par des valeurs mobilières, des marchandises déposées dans des magasins agréés par l'État et faisant l'objet d'un warrant endossé à l'ordre du Trésor, par des affectations hypothécaires, par des nantissements de fonds de commerce (...) " ; enfin, aux termes des dispositions de l'article A. 277-9 du même livre : " Les valeurs mobilières qui ne sont pas cotées à une bourse française et les actions de Sicav autres que celles visées par l'article A. 277-8 ne peuvent être admises que si elles sont accompagnées d'une caution bancaire souscrite pour la différence entre le montant de l'évaluation des titres et le montant des impôts contestés " ;

2. Consécutivement à la vérification de comptabilité de la société Selarl Manche Médicale, dont est il est le gérant et unique associé, et de l'examen de sa situation fiscale personnelle, M. B...A..., médecin-anesthésiste, a fait l'objet de rectifications ayant donné lieu à des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu pour les années 2010, 2011 et 2012 et en matière de prélèvements sociaux pour les années 2010 et 2011. Après la mise en recouvrement le 30 juin 2015 de ces impositions supplémentaires. M. A...a formé une réclamation en date du 22 décembre 2015, assortie d'une demande tendant au bénéfice du sursis de paiement. Au soutien de cette demande de sursis, l'intéressé a proposé à titre de garantie le nantissement des parts sociales de la Selarl Manche Médicale. Par une décision du 25 février 2016, le comptable public a refusé la garantie offerte au motif qu'elle était insuffisante pour couvrir le montant des impositions en litige, soit la somme de 98 024 euros. M.A..., qui a, à cet effet, consigné auprès du comptable à un compte d'attente une somme égale au dixième des impositions contestées, a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne statuant en matière fiscale sur le fondement des articles L. 277 et L. 279 du livre des procédures fiscales de décider que les garanties proposées sont propres à assurer le recouvrement de la créance du Trésor et doivent être acceptées par le comptable public. M. A...relève appel de l'ordonnance du 8 avril 2016 par laquelle le président du tribunal administratif statuant en qualité de juge des référés a rejeté sa demande.

3. Les garanties proposées par le contribuable doivent présenter un degré de sécurité et de disponibilité suffisant pour permettre au Trésor public d'exercer ses droits de préférence, de rétention et de suite ; il appartient ainsi au juge du référé fiscal de dire dans quelle mesure la garantie proposée par le contribuable, qui souhaite différer le paiement des impositions qu'il conteste durant l'instruction de sa réclamation et éventuellement jusqu'au jugement, est susceptible d'assurer, dans des conditions de sécurité et de disponibilité satisfaisantes, le recouvrement de l'imposition contestée ; il incombe au contribuable d'apporter les éléments nécessaires à l'appréciation de la valeur des garanties offertes.

4. En l'espèce, le comptable du Trésor a pu à bon droit demander au contribuable la constitution d'une garantie à hauteur du montant des droits contestés dont il est constant qu'il doit être fixé à 98 024 euros. Le requérant fait néanmoins valoir qu'il y a lieu de réduire ce montant en prenant en compte les sommes, d'un montant total de 18 127 euros, correspondant aux retenues à la source opérées, au titre de l'impôt sur le revenu des années 2010 à 2012, sur ses rémunérations en qualité de gérant de la Selarl Manche Médicale et de salarié de l'hôpital de Langres. Pour sa part, l'administration fiscale soutient qu'elle ne saurait prendre en compte ces retenues à la source payées par M. A...qui se présente comme un non résident mais qui est en réalité, selon elle, domicilié.... Contrairement à ce que soutient M.A..., il n'appartient pas au juge du référé fiscal, qui n'est compétent en vertu de l'article L. 279 précité du livre des procédures fiscales que pour statuer sur le litige relatif à la valeur des garanties offertes par le contribuable, de prendre en compte les sommes dont il se prévaut en tant que créances imputables sur les rappels d'impôt, dès lors que lesdites sommes sont contestées dans leur principe et leur montant dans le cadre d'une contestation de l'établissement de l'impôt et font en outre l'objet, au titre de l'année 2009, parallèlement d'un recours devant le juge de l'impôt, concernant précisément la question de la détermination de la domiciliation fiscale du requérant. Dans ses conditions, le moyen susmentionné soulevé par M. A...doit être écarté.

5. En tout état de cause, à supposer même que le requérant puisse se prévaloir de la réduction qu'il sollicite du montant des droits contestés, l'octroi du sursis de paiement est subordonné à la condition que la garantie offerte réponde aux exigences posées par les dispositions de l'article L. 277 précité du livre des procédures fiscales.

6. Or, d'une part, en sa qualité de médecin et par suite membre d'une profession libérale, le requérant, qui est gérant de la Selarl manche Médicale, ne conteste pas qu'il ne peut être considéré comme propriétaire d'un fonds de commerce dont il pourrait proposer le nantissement sur le fondement des dispositions précitées de l'article R. 277-1 du livre des procédures fiscales. D'autre part, le requérant ne conteste pas non plus utilement l'ordonnance attaquée en tant qu'elle précise que les capitaux propres inscrits à l'actif du bilan ne peuvent, en raison de l'indivisibilité du fonds de commerce, faire l'objet d'une estimation séparée et d'une quelconque cession par le Trésor public. Enfin et surtout, si en appel, M. A...argue de ce qu'il entend plus précisément demander le nantissement des parts sociales de la Selarl, il n'est pas davantage contesté que l'activité de la Selarl Manche Médicale, dans laquelle il exerce la profession de médecin anesthésiste et dont il est le seul associé, est étroitement dépendante de la personne du requérant. A supposer même que la patientèle considérée puisse faire l'objet en cas de défaillance du contribuable d'une quelconque cession par le Trésor public, le requérant ne donne aucune indication tangible sur l'éventuelle valorisation de ces parts sociales et se borne à se référer à la valeur des capitaux propres de ladite société d'un montant de 119 760 euros. Ainsi, en raison du caractère aléatoire de la cession et de la valorisation des parts sociales, le nantissement des parts sociales de la Selarl Manche Médicale ne présente pas les conditions de sécurité et de disponibilité requises par l'article L. 277 précité du livre des procédures fiscales pour assurer le recouvrement des rappels de droits en litige. Dès lors, ce motif pouvait à lui seul justifier le refus du comptable d'accepter les garanties proposées par le contribuable.

7. Au surplus, contrairement à ce que soutient le requérant, les dispositions précitées de l'article A. 277-9 du livre des procédures fiscales sont applicables au cas d'espèce dans la mesure où les parts sociales d'une Selarl doivent être regardées comme des valeurs mobilières non cotées à une bourse française au sens et pour l'application dudit article. Or, il résulte des dispositions précitées de l'article A. 277-9 du livre des procédures fiscales que ces parts sociales ne peuvent être admises en garantie qu'accompagnées d'une caution bancaire garantissant le paiement intégral des impôts dus, dans l'hypothèse où, en cas de cession ultérieure des titres à fin de règlement de la dette fiscale, le prix obtenu se révélerait inférieur au montant des impôts garantis. Dès lors que M. A...n'établit pas ni même n'allègue qu'il aurait assorti d'une telle caution les parts sociales apportées en garantie, ce motif de refus, surabondant, invoqué par le service et confirmé par l'ordonnance attaquée, pouvait à juste titre être opposé à la demande de sursis de paiement formée par l'intéressé.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui n'était pas tenu de faire droit aux propositions émises par le requérant au cours de l'audience publique devant le tribunal, a rejeté sa demande de référé présentée sur le fondement de l'article L. 279 du livre des procédures fiscales. Il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions à fin de réformation de ladite ordonnance ainsi que par voie de conséquence ses conclusions accessoires et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Fait à Nancy, le 17 mai 2016.

Le juge des référés,

Signé :

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N°16NC00685


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NC00685
Date de la décision : 17/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-02-01-02-04 Contributions et taxes. Règles de procédure contentieuse spéciales. Questions communes. Pouvoirs du juge fiscal. Référé fiscal.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. José MARTINEZ
Avocat(s) : ROUMAZEILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-05-17;16nc00685 ?
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